3. Les justices militaires anglaise, espagnole et italienne sont plus ou moins intégrées à la justice ordinaire, mais ne fonctionnent pas nécessairement selon les mêmes principes
Dans ces trois pays, il existe une justice militaire , qui est plus ou moins intégrée à la justice ordinaire.
a) Le modèle britannique
Au Royaume-Uni , chacune des trois forces armées applique son propre code militaire. Ainsi, les militaires de l'armée de terre sont soumis au Army Act 1955, ceux de la Royal Air Force au Air Force Act 1955 et ceux de la marine au Naval Discipline Act 1957. Le système de la justice militaire a été réformé le 2 octobre 2000 avec l'entrée en vigueur de l'Armed Forces Discipline Act 2000. Ce texte a pour objet de veiller à ce que la justice militaire respecte les droits de l'homme tels que définis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950.
Chaque arme dispose de ses propres juridictions militaires du premier degré . En revanche, il n'y a qu' une juridiction militaire du second degré.
Les tribunaux militaires ne sont pas des tribunaux permanents . C'est le service de l'administration centrale chargé de l'administration de la justice militaire qui, en cas de besoin, se charge de réunir le tribunal. C'est un service indépendant qui ne dépend ni du parquet ni de la chaîne de commandement. Il est composé uniquement de civils et fait office de greffe.
Les juridictions militaires sont en principe les mêmes en temps de paix et en temps de guerre . Cependant, lorsque l'urgence le commande, un conseil de guerre de campagne peut être convoqué. En effet, les Service Discipline Acts prévoient qu'un officier peut ordonner que l'accusation soit portée devant un tel tribunal, lorsqu'il commande une troupe de l'armée régulière agissant en service actif sur un théâtre d'opérations et qu'il estime que l'accusation ne peut être portée devant les juridictions militaires existant en temps de paix.
Les juridictions du premier degré sont de deux sortes. Leur compétence respective est déterminée par le grade de l'accusé et la gravité de la faute.
Le conseil de guerre régional , composé d'un président, d'au moins deux officiers et d'un magistrat professionnel, est compétent sauf s'il s'agit d'un officier. Il ne peut pas prononcer de peine d'emprisonnement supérieure à deux ans.
Le conseil de guerre général , composé d'un président, d'au moins quatre officiers et d'un magistrat professionnel, juge les infractions qui ont été commises par les militaires les plus gradés. Comme il peut prononcer la peine maximale prévue par la loi militaire, il juge aussi les infractions les plus graves qui ont été commises par les militaires les moins gradés.
Les tribunaux militaires du premier degré sont donc composés de militaires qui doivent remplir certaines conditions d'état de service et de grade, eu égard notamment au grade de l'accusé, ainsi que d'un magistrat professionnel , spécialement désigné pour siéger dans les juridictions militaires par le magistrat responsable du service juridique du ministère de la défense.
Dans les deux cas, le magistrat professionnel est chargé d'éclairer le tribunal sur les points de droit et sur la procédure. Ses instructions ont force obligatoire. Il ne participe pas aux délibérations sur la culpabilité de l'accusé, mais prend part au vote sur la peine capitale.
La juridiction de second degré est le conseil de guerre d'appel , qui présente de très grandes similitudes avec la chambre criminelle de la Cour d'appel et qui n'est composée que de magistrats professionnels très expérimentés. Ils sont en nombre impair et sont au moins trois. C'est le président de la chambre criminelle de la Cour d'appel, en accord avec le ministre de la justice, qui les choisit. Le président de la Cour d'appel peut en faire partie. En principe, cette juridiction siège à Londres, mais le président de la Cour d'appel peut choisir un autre lieu.
La juridiction de cassation , qui est la même que celle pour les juridictions ordinaires, est la chambre des Lords.
La procédure pénale applicable devant les juridictions militaires est différente du droit commun.
L'enquête est menée par le supérieur immédiat de l'accusé . Il rassemble les preuves et procède à l'audition de l'accusé.
Chaque arme dispose d'un parquet militaire indépendant de la chaîne de commandement qui est dirigé par un magistrat possédant au moins dix ans d'expérience. Il doit s'agir d'un officier de l'arme en question.
Le militaire chargé de l'enquête doit, lorsqu'il conclut à la culpabilité de l'accusé, en référer à l'officier supérieur. Celui-ci saisit alors le parquet qui décide seul des charges retenues contre l'accusé et dirige le procès.
En matière de droits de la défense , dans l'armée de l'air et de terre, le supérieur immédiat de l'accusé, chargé de l'enquête, désigne un « officier chargé de la défense » , qui a pour mission d'aider l'accusé à préparer et conduire sa défense, sauf si ce dernier s'y oppose expressément. Toutefois, l'accusé peut choisir de désigner, en plus, un avocat pour le représenter.
Dans la marine, l'accusé peut nommer quelqu'un pour le représenter dans ses relations avec le tribunal, l' « ami de l'accusé ». Il peut également le représenter valablement aux audiences, s'il est avocat.
La personne condamnée peut faire appel de sa condamnation ou de la peine prononcée. Cependant, comme dans la procédure pénale ordinaire, l'autorisation de la juridiction d'appel est nécessaire.
Comme dans la procédure pénale ordinaire également, la personne condamnée en appel peut se pourvoir en cassation devant la Chambre des Lords, mais ceci n'est possible qu'avec l'autorisation du conseil de guerre d'appel ou, si celle-ci est refusée, avec l'autorisation de la Chambre des Lords elle-même.