IV. LE FRANÇAIS : LANGUE DE LA MODERNITÉ ?
A. PRÉSERVER LE STATUT INTERNATIONAL DU FRANÇAIS
L'observatoire de la langue française de l'OIF a publié au mois d'octobre 2010 un ouvrage consacré à l'état de La langue française dans le monde , qui fournit des données quantitatives et qualitatives sur la place qu'occupe le français aussi bien dans les 70 États et gouvernements membres et observateurs de la Francophonie que dans le reste du monde.
Le nombre de locuteurs francophones dans le monde, qui s'établit en 2010 à près de 220 millions , enregistre une progression notable par rapport à 2007 (200 millions). Cette expansion est en grande partie alimentée par une dynamique africaine significative.
Le français demeure l'une des deux seules langues à être parlées sur les cinq continents avec l'anglais et l'une des rares langues à être enseignée dans tous les pays du monde, avec au moins 116 millions d'apprenants. Toutefois, le choix d'un certain nombre de systèmes éducatifs nationaux occidentaux, en particulier en Europe, de n'imposer l'apprentissage que d'une seule langue étrangère (comme l'illustrent les cas du Royaume-Uni et du Japon) menace sérieusement l'avenir de l'apprentissage du français.
L'augmentation du nombre de locuteurs francophones cache deux difficultés majeures sur lesquelles votre commission souhaite attirer l'attention des États et gouvernements membres de l'OIF :
1) Reconnue comme une langue officielle par 32 États et gouvernements, par la plupart des organisations internationales, par la Charte olympique et disposant d'un statut privilégié dans certains territoires (Louisiane aux États-Unis, Pondichéry en Inde, Val d'Aoste en Italie, etc.), le français continue à bénéficier d'un statut de langue internationale . M. Léopold Sédar Senghor identifiait précisément le français comme la « langue adaptée par excellence au caractère universel de la pensée ». Toutefois, l'usage du français se réduit considérablement dans les organisations internationales, en particulier au sein des institutions communautaires, au profit du recours croissant à un idiome unique qui s'apparente plus à de l'anglais très médiocre. Le rapport au Parlement sur l'emploi de la langue française en 2010 de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France souligne, ainsi, que le recul du français au sein des institutions de l'Union européenne s'accentue : pour la première fois, le français est passé sous la barre des 10 % (8,32 %) en tant que langue source des documents traduits par la Commission européenne ;
2) La dynamique africaine ne suffira pas à garantir, à elle seule, le développement de l'apprentissage du français . Comme le soulignait notre président, M. Jacques Legendre, la langue française ne peut raisonnablement espérer continuer à se développer en Afrique si son recul se poursuit en Europe, voire en France, où elle est de plus en plus perçue comme une langue inapte à la modernité incarnée par le développement des sciences et des nouvelles technologies de l'information et de la communication. À cet égard, des efforts considérables doivent être entrepris pour consacrer, en français, une terminologie culturelle et médiatique moderne tenant compte de l'évolution technologique. Les échanges et les coopérations entre partenaires francophones et pas seulement en France doivent se développer dans des secteurs tels que l'évolution de la terminologie, des variétés lexicales dans des domaines spécialisés, de l'orthographe, etc.