II. LA POLITIQUE DES GRANDS FLEUVES

Les populations résidant aujourd'hui dans les zones inondables des grands fleuves ont été multipliées par dix depuis un siècle et demi (environ 2 millions d'habitants et des infrastructures d'importance nationale sont concernés selon les services) et les dommages de crues catastrophiques similaires à celles observées au XIX e siècle seraient multipliés dans des proportions encore plus considérables en raison de l'extraordinaire aggravation de la vulnérabilité des infrastructures exposées aux inondations depuis cette période.

La prise de conscience de l'augmentation du risque et de l'inadéquation des outils existants a conduit les pouvoirs publics à développer une nouvelle politique de gestion des grands fleuves, à travers des actions interdépartementales structurées dépassant les frontières départementales et régionales et épousant la circonscription des bassins hydrographiques.

A. UNE GESTION GLOBALE DES GRANDS FLEUVES, À L'ÉCHELLE DES BASSINS VERSANTS

Les travaux de planification de la gestion des risques d'inondation menés depuis quinze ans et les crues catastrophiques qui ont frappé la vallée du Rhône à trois reprises en 1993, 1999 et 2003 ont mis en évidence la gravité des conséquences de l'absence de gestion globale des zones inondables de ces grands fleuves sur les cent cinquante dernières années malgré l'avertissement des grandes crues du milieu du XIX e siècle.

Parallèlement, les récentes inondations dans l'Aude en 1999, en Bretagne en 2000, dans la Somme en 2001 et dans le Gard en 2002 ont montré l'efficacité limitée des actions classiques de protection contre les inondations menées souvent de façon sectorielle et sans prendre en compte la totalité des bassins versants.

Pour répondre à ces lacunes, les pouvoirs publics ont initié deux actions spécifiques.

D'une part, un cadre partenarial entre l'Etat et les collectivités territoriales qui ont, en la matière, des responsabilités complémentaires, est en cours de réalisation, visant à mettre en oeuvre des programmes globaux d'actions de prévention des inondations à l'échelle des bassins versants .

D'autre part, il a été décidé d'étendre aux autres grands fleuves français l'organisation mise en place par le plan Loire : sur la base du diagnostic des quatre grands fleuves, les préfets coordonnateurs des bassins de la Garonne, du Rhône et de la Seine se sont vus confier la même responsabilité budgétaire et de coordination que le préfet coordonnateur du bassin de la Loire . La mission confiée à ce dernier pour le plan Loire a d'ailleurs été prolongée, dans le cadre de plans globaux intégrant tous les aspects liés à la gestion de l'eau et des milieux.

1. Les programmes globaux d'actions de prévention des inondations à l'échelle des bassins versants (PAPI)

Dans l'objectif de mobiliser les collectivités territoriales et les maîtres d'ouvrage sur la prévention des inondations et de développer des méthodes globales prenant en compte la totalité des bassins versants, notamment afin de limiter le saupoudrage inefficace de moyens, un appel à projet (par circulaire en date du 1 er octobre 2002) pour des programmes globaux d'actions de prévention des inondations menés à l'échelle de bassins versants a été lancé en octobre 2002 .

Il visait à rassembler l'Etat et les collectivités territoriales autour d'initiatives communes destinées à réduire les conséquences des inondations, et conduites sur des bassins versants sur les quatre années 2003 à 2006.

a) Le succès de l'appel à projet...

La centaine de dossiers de candidature transmis par les préfets coordonnateurs de bassin ont été évalués et sélectionnés au regard des critères exposés dans la circulaire du 1 er octobre 2002.

A l'issue de ce processus de sélection, 42 programmes d'actions ont été retenus pour le financement d'études ou d'actions , en fonction notamment de la qualité des projets.

Presque tous les bassins sur lesquels des crues importantes ont été enregistrées depuis une quinzaine d'années font partie des bassins expérimentaux (Somme, Odet, Saône, Meuse, Maine, bassin des Gardons, de l'Ouvèze, de la Siagne, du Vidourle,...). Près d'un quart du territoire sera couvert par un plan résultant d'une démarche globale de prévention des inondations menée à l'échelle de bassins versants.

Les projets retenus relèvent aussi bien de la catégorie des crues dites lentes (crues de plaine ou crues de nappes) que de la catégorie souvent ravageuse et meurtrière des crues torrentielles.

Concernant les thèmes abordés par les maîtres d'ouvrage, les résultats de l'appel à projet permettent d'augurer une réorientation des méthodes de prévention des inondations dans une quadruple direction :

- la régulation du débit en amont, grâce à la création ou à la restauration des champs d'expansion des crues ;

- le développement de l'information préventive ;

- la réduction de la vulnérabilité des constructions établies en zone inondable ;

- le développement de maîtres d'ouvrages locaux agissant à l'échelle de bassins versants.

Le dispositif national de pilotage repose sur les préfets coordonnateurs de bassin et les chefs de projets , généralement issus de l'administration préfectorale. Une circulaire a précisé en janvier 2005 les modalités de pilotage et de suivi des programmes d'actions de prévention des inondations.

b) ... remis en cause par un plan de financement prévisionnel revu à la baisse

La démarche de contractualisation, qui s'inscrit dans le cadre de la stratégie nationale de développement durable mise en oeuvre par le Gouvernement, constitue le principal volet financier de la réforme de la politique de prévention des inondations engagée depuis 2002.

L'enveloppe financière avait, dans un premier temps, été réévaluée à la hausse, pour répondre au succès de l'appel à projets.

En juin 2003 en effet, seuls 34 projets avaient été retenus, conformément aux objectifs fixés par le ministre.

La qualité des dossiers collectés a amené le ministère à demander aux maîtres d'ouvrage de retravailler ces projets avec le concours des services de l'Etat, notamment pour quelques bassins non sélectionnés représentant un enjeu important en termes de risques.

En janvier 2004, 42 programmes d'actions ont finalement été retenus pour le financement d'études ou d'actions, en fonction notamment de la qualité des projets. Le quasi-triplement du nombre de lauréats s'est traduit par un besoin de financement de 190 millions d'euros pour un montant prévisionnel d'engagement de dépenses d'environ 500 millions d'euros.

Au 1 er mars 2005, trente-cinq conventions financières relatives à la mise en oeuvre des projets étaient signées pour un total de 463 millions d'euros d'actions prévues et 158 millions d'euros de besoins de financement.

Or, la nécessaire mise au point des programmes d'actions et le contexte budgétaire difficile a conduit à étaler la dépense sur les cinq années 2003 à 2007. Jusqu'à la fin 2004, 15,8 millions d'euros ont été engagés. Ils ont donné lieu à 3,1 millions d'euros de mandatement. Il était prévu de mobiliser 46 millions d'euros d'autorisations d'engagement en 2005, 54 millions d'euros en 2006 et 43 millions d'euros en 2007.

En réalité, le projet de budget pour 2006 propose l'ouverture de 26 millions d'autorisations d'engagement en 2006, soit une baisse de près de 50 % par rapport au montant annoncé.

Dans le projet de budget pour 2006, le plan de financement prévisionnel est le suivant :

Programme d'actions de prévention des inondations (2002-2007 )

AE 2006

CP 2006

CP 2006 sur engagements antérieurs

CP 2006 sur AE nouvelles

- dont titre 3

220 500

220 500

?

220 500

- dont titre 5

0

123 750

123 750

?

- dont titre 6

25 900 00

12 881 439

6 490 719

6 390 720

Total

26 120 500

13 225 689

6 614 469

6 611 220

Dans ces conditions, les engagements seront difficiles à honorer, et certains programmes d'actions de prévention des inondations devront être étalés dans le temps.

D'après les informations fournies par le ministère, le Gouvernement pourrait déposer un amendement en séance publique tendant à étendre le domaine d'intervention du fonds dit « Barnier » à l'ensemble de la prévention des risques naturels. Votre rapporteur souhaite qu'une partie des crédits supplémentaires (environ 40 millions d'euros, selon les mêmes sources) permette de financer la mise en oeuvre des programmes d'actions.

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