II. LE TRAITEMENT DIFFÉRENCIÉ DES CHAMPS D'ACTION DU MINISTÈRE

La pertinence de la présentation des crédits du ministère de l'écologie et du développement durable pour 2005 dans la nomenclature traditionnelle, et sa comparaison avec le budget voté de 2004 impliquent que soient ventilées les dépenses liées aux expérimentations, regroupées en 2004 dans les moyens des services (Titre III), et en 2005 dans les investissements exécutés par l'Etat (Titre V) et les subventions d'investissements accordés par l'Etat (Titre VI).

Après avoir réparti les crédits correspondants entre les différents agrégats budgétaires, l'évolution des enveloppes budgétaires des agrégats peut être résumée dans le tableau suivant :

(En millions d'euros)

 

LFI 2004

PLF 2005

Evolution  %

Protection de la nature, des sites et des paysages

107,63

122,7

+ 14

Protection de l'eau, et des milieux aquatiques

108,42

95,4

- 12

Prévention des pollutions et des risques

408,79

384,27

-6

Soutien aux politiques environnementales

231,29

222,86

-3,6

TOTAL

856,14

825,23

- 3,6

(Source : bleu « Ecologie et développement durable »)

La répartition des crédits par « actions » au sein des « programmes » de la nouvelle nomenclature budgétaire donne, comme le montre le tableau ci-après, une vision plus claire de la destination des fonds, conformément à l'esprit de la réforme de la loi organique.

L'évolution des enveloppes budgétaires dans la nomenclature LOLF (en tenant compte de l'ADEME) est établie comme suit :

(En millions d'euros)

Libellé des programmes, actions et sous-actions

LFI 2004
(DO+CP)

PLF 2005

Évolution %

Programme 1- Prévention des risques et lutte contre les pollutions

245

205,64

- 19,2 %

Action 11 - Prévention des risques technologiques et des pollutions

81,6

77,5

- 5,2 %

Action 12 - Prévention des risques naturels

9,2

12,3

+ 24,8 %

Action 13 - Protection des dommages

40,25

48

+ 16,2 %

Action 14 - Gestion des déchets et évaluation des produits

58,7

34,24

- 71,3 %

Action 15 - Lutte contre les pollutions de l'eau et des milieux aquatiques

28,6

10,1

- 183 %

Action 16 - Lutte contre le changement climatique

26, 65

23,4

- 13,8 %

Programme 2- Gestion des milieux et biodiversité

153,7

159,97

+ 3,9 %

Action 21- Préservation du bon état écologique de l'eau et des milieux aquatiques

37,73

30 467

- 23,9 %

Action 22 - Gouvernance dans le domaine de l'eau

6, 08

6,81

+ 10,6 %

Action 23 - Développement du réseau des espaces réglementés au titre de la nature et des paysages

48,51

47,1

- 3 %

Action 24 - Incitation à la gestion durable du patrimoine naturel

61,43

75,6

+ 18,7 %

Programme 3 - Soutien aux politiques environnementales et de développement durable

208,7

208,6

- 0,1 %

Action 31 -Développement durable

14,9

14,85

- 0,9 %

Action 32 - Données environnementales

5,8

3,4

- 71,2 %

Action 33 - Action internationale

3,05

2,95

- 3,4 %

Action 34 - Qualité de la réglementation et efficacité de la police de l'environnement

1,14

1,1

- 3 %

Action 36 - Information et communication

3,4

3,07

- 11 %

Action 35 - Management et soutien

177,55

181,23

+ 2 %

Action 37 - Commission nationale du débat public

2,012

2,012

 

Programme recherche

249,65

251

+ 0.53 %

Action R1 - Recherche sur l'évaluation et la prévention des risques technologiques et des pollutions

4,57

4,57

 

Action R2 - Recherche sur l'évaluation et la prévention des risques sanitaires environnementaux

0, 824

0, 824

-

Action R3 - Recherche sur l'évaluation et la prévention des risques nucléaires

235,43

236,779

+ 0,6 %

Action R4 - Recherche et développement dans le domaine de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie

0

0

0

Action R5 - Pilotage et animation du programme

8,83

8,83

-

(Source : MEDD)

Il ressort de la lecture comparative de ces deux tableaux que, sous la contrainte financière, le ministère a fait porter l'effort budgétaire sur certaines actions, dont les contours et les moyens d'intervention ont été réévalués. Il s'agit notamment de :

- la politique de l'eau (-183 % et -24 % sur les « actions 15 et 21 »), pour laquelle le ministère poursuit un effort de clarification des compétences et de décroisement des financements, dans l'attente de l'adoption d'un projet de loi sur l'eau en 2005 ;

- la politique des déchets (« Action 14 - Gestion des déchets et évaluation des produits »), dont les crédits correspondants passent de 58,7 millions en 2004 à 34,24 millions d'euros en 2005, en diminution de 71,3 %, traduisant les nouvelles priorités opérationnelles définies en 2003 par l'Etat, à savoir un recentrage -notamment des missions de l'ADEME dans ce domaine- sur l'animation et l'apport technique, au détriment des aides financières, plus ciblées et plus resserrées, restreintes à certains types d'opérations.

Parallèlement, certaines politiques jugées prioritaires sont dotées de crédits supplémentaires, afin de permettre le renforcement des actions portant sur :

- la mise en oeuvre de la stratégie nationale en faveur de la biodiversité adoptée en février 2004. En 2005, ce sont ainsi 75,60 millions d'euros (inscrits à « l'action 24 - Incitation à la gestion durable du patrimoine naturel ») qui seront consacrés au partenariat avec les collectivités territoriales et les opérateurs publics (parcs naturels régionaux, réserves de biosphère, opérations Grands Sites...), à la préservation des espèces animales et végétales, à la sauvegarde de l'espace littoral, à l'inventaire, l'expertise, aux méthodes de gestion et à la formation relatives au patrimoine naturel et paysager, ainsi qu'à la conservation des espèces et des habitats d'intérêts européens dans le réseau Natura 2000 ;

- le contrôle des installations industrielles, -auquel sont consacrés 32,6 millions d'euros en 2005, ce qui représente une augmentation de 26,3 % par rapport à 2004 ;

- la mise en oeuvre du plan national santé-environnement, confiée à l' Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE), dont les crédits augmentent de 73 % , pour atteindre 4,02 millions d'euros (DO+CP) en 2005.

A. LE SOUTIEN AUX POLITIQUES ENVIRONNEMENTALES

Les crédits consacrés à l'agrégat « soutien aux politiques environnementales » s'élèvent à 222,86 millions d'euros dans le projet de budget pour 2005, ce qui correspond quasiment à une reconduction à l'identique par rapport à 2004 (soit une baisse de 0,1 %).

• Cet agrégat est composé pour plus de la moitié de dépenses en personnel qui s'élèvent à 181,23 millions d'euros en 2005, en progression de 2 % par rapport à 2004.

Cet accroissement traduit, d'une part, l'augmentation des effectifs globaux (+ 20 emplois), détaillée plus haut, et d'autre part, le transfert dans le budget général des 69 emplois de l'IFEN, transformé d'établissement public à caractère administratif en service à compétence nationale à compter du 1 er janvier 2005.

Le maintien à un niveau constant de l'enveloppe globale du programme, en dépit des créations de postes, est le reflet des économies de structure réalisées en 2005, dont on a précédemment vu qu'elles s'élèveraient à 3 millions d'euros .

La spécificité du programme, -tel qu'il est présenté dans la nouvelle nomenclature LOLF-, réside dans le fait que l'ensemble de la masse salariale y est regroupé. Ceci est contraire aux recommandations émises par le ministère de l'économie et des finances, qui préconisait une ventilation des effectifs au sein des différents programmes techniques, permettant une lecture plus pertinente de la réalité budgétaire.

Interrogé à ce sujet, le ministère de l'écologie et du développement durable a fait savoir que, au regard de la relative faiblesse des masses budgétaires en jeu -le budget du ministère représente 0,19 % du budget de l'Etat- la répartition des effectifs à l'intérieur des programmes aurait entraîné des contraintes disproportionnées par rapport au gain en terme de souplesse que permet le regroupement dans un seul programme.

• Le second poste du programme, en terme de masse budgétaire, correspond à l'« action 31 - développement durable », dotée de 14,8 millions d'euros en 2005. Cette action regroupe les activités du ministère ayant pour finalité d'animer et de suivre, en lien avec le comité permanent des hauts fonctionnaires du développement durable, les actions transversales de la stratégie nationale pour le développement durable (SNDD) concernant le long terme. Elles portent sur le développement des démarches d'éco-responsabilité au sein de l'ensemble des ministères et visent également à favoriser l'évolution des comportements, par l'ouverture du débat public et le renforcement des actions d'éducation à l'environnement.

• Le programme héberge par ailleurs les moyens de la Commission nationale du débat public (CNDP) , autorité administrative indépendante dont le budget a été rattaché à celui du ministère de l'écologie et du développement durable à compter du 1 er janvier 2004.

B. LA PROTECTION DE L'EAU ET DES MILIEUX AQUATIQUES : LA CLARIFICATION DES RÔLES RESPECTIFS DE L'ETAT ET DES AGENCES DE L'EAU, EN PRÉVISION DE L'ADOPTION DE LA LOI SUR L'EAU

1. Des crédits en baisse, reflet du décroisement des financements entre le ministère et les agences de l'eau

Les actions liées à la « protection de l'eau et des milieux aquatiques » sont dotées en 2005 d'une enveloppe budgétaire de 95,4 millions d'euros (Agrégat 22 de l'ancienne présentation budgétaire), en recul de 12 % par rapport à celle prévue en loi de finances 2004.

Si l'on examine les actions correspondantes de la nouvelle nomenclature budgétaire, le recul apparaît encore plus important. Toutefois, le regroupement au sein d'une même action des interventions liées à la prévention des risques technologiques et des pollutions explique la difficulté à procéder à une comparaison significative.

En tout état de cause, la contraction des crédits alloués aux actions 15 et 21, regroupant d'une part les mesures de lutte contre les pollutions de l'eau et des milieux aquatiques (en baisse de 183 %), et de préservation du bon état écologique de l'eau et des milieux aquatiques (en baisse de presque 24 %) rend compte des arbitrages opérés par le ministère, comme le montre le tableau suivant :

(En millions d'euros)

PRÉSENTATION PAR PROGRAMME
ET PAR ACTION

TOTAL DO
ET CP 2004

PLF 2005

Évolution en %

Programme 1- Prévention des risques et lutte contre les pollutions

 
 
 

Action 11 - Prévention des risques technologiques et des pollutions

81,6

77,5

- 5,2

Action 15 - Lutte contre les pollutions de l'eau et des milieux aquatiques

28,6

10,1

- 183

Programme 2- Gestion des milieux et biodiversité

 
 
 

Action 21- Préservation du bon état écologique de l'eau et des milieux aquatiques

37,73

30,467

- 23,9

Action 22 - Gouvernance dans le domaine de l'eau

6,08

6,81

10,6

TOTAL

154

124,8

- 19

Cette baisse importante s'explique essentiellement par la volonté du Gouvernement de poursuivre la clarification des rôles respectifs du ministère et des agences de l'eau, en mettant en oeuvre le « décroisement des financements », dans un souci de lisibilité de la politique de l'eau.

Après avoir repris en charge une partie des dépenses, la direction de l'eau a, en effet, manifesté l'intention de demander en sens inverse aux agences de l'eau de se substituer à l'Etat pour gérer certaines subventions d'investissement allouées aux collectivités territoriales et aux associations.

Cette intention s'est traduite dans une circulaire du 12 août 2003 qui prévoyait de transférer aux agences de l'eau :

- les aides aux contrats de rivière et de baies conclus après le 1 er janvier 2004, contrats dont la procédure d'approbation, aujourd'hui centralisée serait par ailleurs déconcentrée ;

- les aides au titre du plan poisson migrateur.

La poursuite et le renforcement du décroisement des financements expliquent la baisse (- 37,2 %) des crédits destinés notamment à la « gestion des eaux et des milieux aquatiques » (chapitre 44-10 dans l'ancienne nomenclature budgétaire).

En contrepartie, l'État reprendra entièrement à sa charge les actions liées à la connaissance des milieux, qui recouvrent l'hydrométrie (la production de données), la piézométrie (hauteur d'eaux dans les nappes) et la qualité des eaux de surface.

La politique de lutte contre les inondations reste, par ailleurs, une priorité nationale, les actions entreprises en 2003 et 2004 continuant à bénéficier de financements appropriés.

2. La lutte contre les inondations : une priorité nationale

S'inscrivant dans le prolongement des orientations du programme décennal de prévention des risques naturels adopté en 1994, la politique de l'Etat en matière de prévention des inondations a été relancée en octobre 2002 à la suite des inondations catastrophiques survenues dans le Gard, le Vaucluse et l'Hérault.

Élevée au rang de priorité nationale, elle repose sur trois piliers :

- un pilier législatif : la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 sur la prévention des risques a instauré plusieurs dispositifs destinés à améliorer l'information des populations, à renforcer les capacités d'intervention des collectivités, et à élargir le champ d'intervention des fonds de prévention des risques naturels majeurs ;

- la réorganisation de l'annonce des crues ;

- la promotion de programmes d'actions globaux et coordonnés chacun par un pilote unique, conduits à l'échelle des bassins versants et mettant l'accent sur le ralentissement des écoulements dès l'amont des bassins.

En matière de prévision des crues, les services oeuvrant à l'annonce des crues ont été entièrement réorganisés depuis 2002 : 140 agents, aujourd'hui encore dispersés sur 70 sites en équipes sont en train d'être regroupés dans 22 services de prévision des crues dotés chacun de 5 à 12 agents.

Le service central d'hydrométéorologie et d'appui à la prévision des inondations (SCHAPI) créé en 2003 a été installé sur le « météopôle » à Toulouse, de façon à développer la synergie entre météorologie et hydrologie encore trop distantes : aux 11 agents déjà affectés à ce service en 2003, viendront se joindre 20 personnes dont les postes sont inscrits au budget 2004 et commencent à se pourvoir, les derniers recrutements devant intervenir en 2005.

Pour ce qui concerne les plans globaux d'actions, enfin, le plan Loire, dont la mise en place de la tranche 2000-2006 avait à peine commencé début 2002, a fait l'objet d'une relance spécifique, permettant d'augmenter le rythme annuel des dépenses consacrées à la prévention des inondations, portées de 6 millions d'euros en 2002 à 11 millions d'euros en 2003 et à 20 millions d'euros en 2004, de façon à atteindre le rythme moyen prévu au contrat interrégional pour les années 2000 à 2006 adopté pour ce plan.

Il est prévu de reconduire à l'identique ce niveau de dépense dans le projet de budget 2005.

Une stratégie globale est en cours de définition, par ailleurs, sur les deux autres fleuves français susceptibles d'engendrer les dommages les plus importants: la Seine et le Rhône.

Ceci ne peut que satisfaire votre rapporteur, particulièrement sensible aux risques générés par les grands fleuves.

• Le « plan Loire-grandeur nature » : des financements reconduits dans le cadre d'une relance spécifique

Lancé le 4 janvier 1994, le « Plan Loire » comportait un engagement prévisionnel de l'Etat de 107 millions d'euros, répartis entre les ministères de l'écologie, de l'agriculture et de l'équipement, sur un programme global évalué à 288 millions d'euros qui devait s'étaler entre 1994 et 2003.

Réexaminé à partir de 1998, le plan est entré dans une seconde étape couvrant les années 2000 à 2006 , financée à hauteur de 119,2 millions d'euros par le budget de l'Etat, dont les actions s'inscrivent dans les contrats de plan conclus avec les régions concernées dont il constitue une partie spécifique.

L'effort de l'Etat porte sur :

- la poursuite des actions de prévention des inondations (59 millions d'euros en provenance du budget de l'écologie) ;

- la restauration de la qualité des eaux et des milieux aquatiques des vallées ligériennes (20,6 millions d'euros partagés entre le FNSE et le ministère) ;

- la mise en valeur touristique et culturelle (programme interministériel de 35,1 millions d'euros, dont 4,6 millions d'euros au titre du ministère de l'écologie).

Sévèrement critiquée par la Cour des comptes en 2002, la mise en oeuvre de la tranche 2000-2006 a fait l'objet d'une relance spécifique consistant à donner un véritable rôle de pilotage au préfet coordonnateur de bassin, devenu le gestionnaire unique des moyens de l'Etat affectés à ce plan.

L'appel d'offres lancé le 1 er octobre 2002 auprès des maîtres d'ouvrages locaux par l'intermédiaire des préfets coordonnateurs de bassin pour proposer de véritables programmes pluriannuels (2003-2006) et globaux d'actions de prévention des inondations conduits à l'échelle des bassins versants a permis de sélectionner à ce jour 42 projets, portant à près d'un quart le territoire métropolitain couvert par des programmes d'actions.

Treize conventions relatives à la mise en oeuvre des projets sont aujourd'hui signées pour un montant global de 170 millions d'euros d'actions (mobilisés sur la période 2004 à 2007), portant la part de l'Etat et du FPRNM à 65 millions d'euros. Douze autres conventions sont en cours de signature, ce qui porte le nombre de projets opérationnels à vingt-cinq sur quarante-deux. L'intégralité des conventions doit être signée à la fin de l'année 2004.

En 2004, 30 millions d'euros d'autorisations de paiement ont été consacrés à leur mise en oeuvre. Pour la poursuite de ces actions, 40 millions d'euros (AP) sont inscrits en 2005.

Le Rhône, à l'origine depuis octobre 1993 d'inondations catastrophiques, et la Seine, dont le risque de dommage a été évalué à près de 10 millions d'euros en région Ile-de-France en cas de renouvellement d'une crue similaire à celle de 1910, font aujourd'hui l'objet de programmes similaires.

En ce qui concerne le bassin du Rhône, le préfet coordonnateur du bassin, à qui a été confiée en janvier 2004 la mission de piloter la mise en oeuvre des aides exceptionnelles mobilisées par l'Etat et l'agence de l'eau pour aider la réparation des ouvrages hydrauliques endommagés lors de la crue de début décembre 2003, a été chargé d'élaborer une stratégie globale de prévention des dommages liés aux crues de ce fleuve, en concertation avec les collectivités riveraines du fleuve et de ses affluents.

En ce qui concerne la Seine, le préfet de la région Ile-de-France, qui a engagé depuis deux ans une rénovation complète du plan de secours inondation de la région, sera chargé d'engager la concertation avec les collectivités de ce bassin pour définir également une stratégie globale de prévention sur le bassin de la Seine.

3. Vers une nouvelle gouvernance : la réforme de la loi sur l'eau

D'ores et déjà, la loi du 21 avril 2004 a introduit des aménagements législatifs au dispositif issu des lois sur l'eau de 1964 et de 1992, pour transposer la directive cadre européenne sur l'eau adoptée en octobre 2000 dans le droit français.

Comme l'avait, par ailleurs, annoncé la ministre de l'écologie et du développement durable, l'année 2003 a été marquée par un grand débat national sur la politique de l'eau, dont l'objectif était d'établir un diagnostic partagé et de proposer un plan d'action en étroite concertation avec tous les acteurs de l'eau, afin de modifier l'encadrement législatif de la politique de l'eau.

Il s'agit de répondre aux critiques émises -notamment par la Cour des comptes- depuis 2002 :

- dégradation de la qualité des eaux ;

- insuffisance des politiques de prévention et d'alerte dont les récentes inondations survenues dans diverses régions ont servi de témoin ;

- déséquilibres chroniques entre les besoins et les ressources en eau, préjudiciables aux activités économiques et à l'équilibre écologique des milieux aquatiques ;

- forte augmentation du prix de l'eau et insuffisance de contrôle du Parlement sur l'établissement des redevances des agences de l'eau.

Après avoir réuni les contributions des représentants nationaux des principaux acteurs du monde de l'eau (élus, associations, industriels de l'eau, syndicats...), mobilisé plus de 5 000 personnes au niveau local (collectivités, services de distribution d'eau et d'assainissement, chambres consulaires, principaux acteurs économiques, associations..) et consulté le grand public, le ministère de l'écologie et du développement durable a rendu publiques ses propositions de réforme, qui ont été diffusées sur Internet au cours du premier semestre de l'année 2004.

Les principales mesures contenues dans l'avant-projet de loi ont pour objectif d'instaurer un contrôle parlementaire sur les programmes et les redevances, de concrétiser le principe du « pollueur payeur » et de mettre en oeuvre le principe de récupération des coûts des services liés à l'utilisation de l'eau. Enfin, les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) devraient être mieux pris en compte dans les programmes des agences.

Les outils issus de la loi pêche et de la loi sur l'eau devraient être unifiés, de façon à ce que les rivières soient traitées par un corpus réglementaire unique.

S'agissant du volet budgétaire, il reviendrait au Parlement de fixer les grandes orientations du programme d'intervention des agences ainsi que les objectifs de leurs dépenses pluriannuelles, alors, qu'actuellement, seul un compte-rendu d'activité doit lui être présenté annuellement en annexe au projet de loi de finances.

L'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques pourrait, par ailleurs, être invité à procéder à une évaluation des programmes d'intervention en cours.

Cet encadrement permettrait une déconcentration de l'adoption du programme d'intervention, qui relèverait de la responsabilité du comité de bassin sur proposition du conseil d'administration puis approuvé par le préfet coordonnateur de bassin, alors qu'actuellement l'approbation des ministères de tutelle est requise et l'avis du comité de bassin est non obligatoire.

C. LA PRÉVENTION DES POLLUTIONS ET DES RISQUES : DES PRIORITÉS IDENTIFÉES

Les crédits regroupés dans l'agrégat « prévention des pollutions et des risques » s'élèvent à près de 384 millions d'euros en 2005, en recul de 6 % par rapport à 2004.

L'absence de correspondance entre ce montant et celui inscrit au programme 1 du même nom ( « Prévention des pollutions et des risques ») dans la nouvelle nomenclature LOLF -crédité de 205,64 millions d'euros -, s'explique par deux facteurs :

- d'une part, le rattachement au programme « Recherche » (« Action R3- Recherche sur l'évaluation et la prévention des risques nucléaires » ), de la subvention versée à l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), qui s'élève à 236,8 millions d'euros dans l'agrégat 23 de l'ancienne nomenclature (chapitre 44-40 du titre III), -ce qui représente plus de 60 % des crédits totaux de l'agrégat- et contribue essentiellement à la minoration du montant inscrit en LOLF ;

- d'autre part, en sens inverse, le rattachement au programme n° 1 de crédits liés à la gestion de la politique de l'eau (« Action 11 - Prévention des risques technologiques et des pollutions » et « Action 15 - Lutte contre les pollutions de l'eau et des milieux aquatiques »), dont les montants chutent substantiellement entre 2004 et 2005, -respectivement de 183 % et 13,8 %-, contribuant au recul important (-19,2 %) des crédits de ce programme.

Les autorisations de programme y sont en revanche portées de 203 millions d'euros en 2004 à 272,5 millions d'euros en 2005, soit une augmentation de 34, 2%.

La baisse globale des crédits consacrés en 2005 à la prévention des pollutions et des risques traduit la redéfinition du périmètre d'intervention du ministère concernant certaines politiques -notamment la politique des déchets- et parallèlement le recentrage sur certaines actions prioritaires, qui bénéficient, à l'instar de l'inspection des installations classées, de moyens renforcés.

1. La prévention des risques industriels : le renforcement de l'inspection des installations à risque, dans la perspective de la transposition des nouvelles directives

Le dispositif de prévention des risques dans les grands sites industriels fait l'objet d'un nouveau renforcement en 2005, puisque 32,6 millions d'euros de crédits de paiement serviront en 2005 au contrôle des installations industrielles, ce qui représente une augmentation de 26,3 % par rapport à 2004.

Cette politique s'inscrit dans le cadre des directives communautaires 82/501/CEE dite SEVESO I et 96/82/CE dite SEVESO II qui ont été transposées en droit français.

Elles imposent notamment aux exploitants des établissements visés de mettre en place une organisation spécifique dédiée à la prévention des accidents majeurs impliquant des substances dangereuses, de définir une politique de prévention des accidents majeurs, et de réviser leurs études de dangers sur une base quinquennale.

Il appartient à l'inspection des installations classées pour la protection de l'environnement d'analyser les études remises par les industriels, lesquelles décrivent les dangers et proposent des actions visant à réduire les risques.

Sur les 626 établissements « seuil haut » (AS) et 478 « seuil bas » visés en France par la directive SEVESO II, le ministère a indiqué que 719 établissements à risques majeurs avaient, en pratique, fait l'objet d'investigations en 2003 , (contre 597 en 2002, 573 en 2001 et 218 en 2000). L'objectif du ministère en 2005 est de procéder à au moins une visite par an de toutes les installations classées « seuil haut ».

Après les récents accidents, -notamment l'explosion de l'usine AZF de Toulouse-, des amendements à la directive SEVESO II ont été apportés en décembre 2003, portant sur la modification des seuils d'assujettissement à la directive et sur l'élargissement de la liste des substances dangereuses concernées.

La transposition de la directive en droit français dans le courant 2005 devant entraîner une recrudescence de l'activité de l'inspection des installations classées, le projet de loi de finances pour 2005 prévoit l'affectation à l'inspection de 50 postes supplémentaires (25 créations et 25 transferts).

2. La prévention des risques naturels : priorité à la poursuite de l'élaboration des plans de préventions des risques (PPR)

Si les crédits inscrits dans le programme de prévention des risques et de lutte contre les pollutions (programme 1 de la nouvelle nomenclature LOLF) sont en baisse, la part réservée à la prévention des risques naturels Action 12 » du programme) connaît, au contraire, une évolution inverse. Cette action bénéficie en effet de la plus forte augmentation , puisqu'elle est dotée de 12,3 millions d'euros, en augmentation de 24,8 % par rapport à 2004.

On retrouve cette dotation répartie notamment au sein des crédits déconcentrés des titres III, IV et V de l'agrégat 23 (ancienne nomenclature budgétaire), pour un montant de respectivement 6,6 millions d'euros (article 60 du chapitre 34-98), 8 millions d'euros (article 80 du chapitre 44-10) et 3 millions d'euros (article 20 du chapitre 59-01).

Le programme de prévention des risques naturels comporte trois actions :

- la connaissance et la diffusion de l'information sur les risques naturels ;

- la prise en compte de ces risques dans les décisions d'aménagement, notamment grâce aux plans de prévention des risques (PPR), et les délocalisations par expropriation ;

- la réduction de la vulnérabilité des personnes et des biens par des études et des travaux de protection ou d'aménagement des biens existants.

• La poursuite de l'élaboration des plans de prévention des risques (PPR) : couvrir 500 communes nouvelles en 2005.

Le projet de budget pour 2005 permettra la poursuite, à un rythme régulier, de l'élaboration des plans de prévention des risques (PPR).

12 millions d'euros doivent être consacrés à cette action en 2005, ce qui représente une augmentation de 17 % par rapport à 2004.

Il faut noter que, depuis 2000, ces opérations sont financées pour moitié par le Fonds de prévention des risques naturels majeurs , dont la contribution s'est élevée à près de 6 millions d'euros en 2003 et 2004 et devrait être reconduite à l'identique en 2005.

(En milliers d'euros)

2003

2004

2005

Chapitre 34-98
Art.60

Chapitre 57-20
Art.50

FPRNM

Chapitre 34-98
Art.60

Chapitre 57-20
Art.50

FPRNM

Chapitre 34-98
Art.60

Chapitre 57-20
Art.50

FPRNM

1 562

3 756

6 120

1 164

3 329

5 738

1 700

4 300

6 000

11 438

10 231

12 000

Les PPR, créés par la loi du 2 février 1995 (codifiée aux articles L. 562-1 et suivants du code de l'environnement) ont vocation à établir notamment les règles d'urbanisme et de construction ayant valeur de servitudes d'utilité publique pour prendre en compte les risques naturels dans les décisions d'aménagement.

Depuis 1995, un programme sur cinq ans a été établi dans chaque département, afin de traiter les 2000 communes considérées comme les plus vulnérables à l'horizon 2000. Cette programmation a été actualisée en 1998 avec l'objectif de renforcer la démarche et de doter d'un PPR les 5 000 communes les plus exposées, à l'horizon 2005.

Au 1 er septembre 2004, 4 340 communes étaient dotées de PPR approuvés , auxquels il convient d'ajouter 1 480 plans de surfaces submersibles qui valent juridiquement PPR. Les services déconcentrés prévoient l'approbation de 350 PPR supplémentaires d'ici la fin de l'année .

Votre rapporteur ne peut se satisfaire de cet objectif, alors que, dans près de 6 200 communes , un PPR est prescrit, mais non approuvé .

Ces communes, souvent à leur initiative, ont entamé une procédure d'enquête publique et établit de nouveaux atlas des risques. Cependant, le PPR ne vaut servitude d'utilité publique qu'après approbation et ce n'est qu'une fois l'arrêté pris qu'il peut être annexé au plan local d'urbanisme (PLU).

C'est la raison pour laquelle il serait vivement souhaitable de mobiliser tant les préfets que les services déconcentrés, afin qu'ils portent une attention particulière à l'achèvement des PPR en cours de réalisation. Une circulaire pourrait leur rappeler les priorités à remplir en la matière, à l'instar de celle qui a été adressée le 21 janvier 2004 à l'attention des préfets des départements les plus exposés aux inondations rapides du Sud-Est.

3. Les subventions aux établissements publics : des évolutions contrastées

• En 2005, les moyens budgétaires de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) seront majorés de 1,34 million d'euros par rapport à 2004 afin de prendre en compte une actualisation des dépenses de personnel.

Mis en place par le décret 2002-254 du 22 février 2002, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), organisme de recherche et d'expertise, regroupe, au sein d'un établissement public à caractère industriel et commercial, l'ancien Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN), désormais séparé du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), et la partie de l'OPRI (Office de protection contre les rayonnements ionisants) tournée vers les activités d'expertise en radioprotection.

En 2005, 151,71 millions d'euros serviront à financer les activités de recherche et les expertises et 54,32 millions d'euros seront consacrés aux analyses de sûreté réalisées en soutien de la direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, la provision pour les charges fiscales de 30,74 millions d'euros étant par ailleurs reconduite d'une année sur l'autre.

• Les subventions versées à l'Institut national de l'environnement et des risques (INERIS) par le ministère de l'écologie et du développement durable s'élèveront en 2005 à plus de 35,6 millions d'euros, en hausse de 4,7 % par rapport à 2004.

Cette progression douce masque une majoration de 5,5 millions d'euros de la dotation de fonctionnement, concomitante à une réduction de 4 millions d'euros (- 50 %) des crédits d'investissement.

La hausse des premiers devrait permettre une actualisation de 1,8 % des dépenses de personnel et de 2,8 % des autres dépenses, le solde contribuant à financer des études à caractère prioritaire du ministère de l'écologie et du développement durable afin :

- d'approfondir les questions concernant les relations entre santé et environnement (cas de la légionellose entre autres) ;

- d'élaborer des outils méthodologiques pour la mise en oeuvre de la nouvelle loi relative aux risques technologiques et naturels ;

- et d'évaluer les substances chimiques (en premier lieu les biocides) en application de la directive européenne 98/8.

• Les subventions d'investissement versées à l'Agence de l'environnement de la maîtrise de l'énergie ont connu des réductions drastiques au cours de ces dernières années de façon à éponger des excédents de crédits non consommés : ramenées à 71 millions d'euros en 2003, reconduites à ce niveau en 2004, elles s'élèvent à 63 millions d'euros dans le projet de budget pour 2005, répartis comme suit entre les différentes actions :

(en millions d'euros)

ACTIONS

AUTORISATIONS D'ENGAGEMENT

(AP+DO)

CRÉDITS DE PAIEMENT

(CP+DO)

Prévention des risques technologiques
et des pollutions

48

15

Gestions des déchets et évaluation des produits

87

25

Lutte contre le changement climatique

98

23

Total du chapitre 69-01

233

63

Afin de lui permettre de poursuivre les programmes d'intervention définis dans son contrat de plan avec l'État et de respecter les engagements pluriannuels pris avec ses partenaires, une dotation supplémentaire de 130 millions d'euros sera accordée à l'ADEME en loi de finances rectificative, ce qui portera ses capacités de paiement à un niveau proche de 200 millions d'euros.

Cette dotation supplémentaire permettra à l'agence de continuer à mettre en oeuvre la politique prioritaire des pouvoirs publics dans le domaine de la maîtrise de l'énergie , notamment dans le cadre du plan « véhicule propre » et du plan « climat », en s'efforçant de mobiliser techniquement et financièrement l'ensemble des acteurs concernés par le développement durable. Les actions dont l'agence a la responsabilité en matière de dépollution des sols et de lutte contre la pollution de l'air seront également poursuivies en 2005.

• La subvention versée à l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) augmente de 73 %, pour atteindre 4,02 millions d'euros en 2005, reflétant la volonté de mettre en oeuvre le plan national santé-environnement.

D. LA PROTECTION DE LA NATURE, DES SITES ET DES PAYSAGES : PRIORITÉ À LA PRÉSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ ET À NATURA 2000

Les crédits consacrés à la « protection de la nature, des sites et des paysages » s'élèvent dans le projet de budget pour 2005 à 122,7 millions d'euros, à comparer aux 107,78 millions d'euros en 2004 , soit une augmentation de près de 14 %.

Comme le montre le tableau suivant, cette augmentation concerne plus fortement les crédits d'investissement que les crédits de fonctionnement : les autorisations de programme, portées de 45,5 millions d'euros à 56,2 millions d'euros dans le projet de budget, bénéficient d'une augmentation de 23,5 %.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE L'AGRÉGAT N° 21
PROTECTION DE LA NATURE, DES SITES ET DES PAYSAGES

(en millions d'euros)

 

LFI 2004

PLF 2005

Évolution en  %

Dépenses ordinaires (DO)

72,4

77,3

+ 6,6

Crédits de paiement (CP)

35,24

45,35

+ 28,7

DO + CP

107,63

122,7

+ 13,8

Autorisations de programme (AP)

45,5

56,2

+  23,5

(source : bleu budgétaire)

L'accroissement significatif des crédits de paiement (+ 28 %) traduit tout d'abord la poursuite de la politique de « désendettement » du ministère vis-à-vis des gestionnaires des espaces réglementés existants et des structures chargées de la mise en oeuvre du réseau Natura 2000.

A la fin de l'année 2003 en effet, 40 millions d'euros d'autorisations de paiement n'avaient pas trouvé de traduction en crédits de paiement, générant de graves retards de versement, particulièrement préjudiciables aux petites structures, contraintes de s'endetter pour financer des investissements engagés conformément aux autorisations de paiement figurant en loi de finances.

En 2005, plus de 10 millions d'euros, inscrits au chapitre 67-20 du titre VI, serviront à apurer les contrats et les subventions antérieures de l'Etat.

L'accroissement des crédits s'explique ensuite par la mobilisation des moyens du ministère en faveur des actions d'incitation à la gestion durable du patrimoine naturel.

L'ensemble des financements attribués à cet objectif sont regroupés au sein de l'action 24 de la nouvelle nomenclature budgétaire, dénommée « incitation à la gestion durable du patrimoine naturel », au sein du programme « gestion des milieux et biodiversité ».

Une lecture comparative en nomenclature LOLF permet d'attribuer à cette action le bénéfice de crédits en augmentation de 23,04 %.

Pour amplifier leurs actions d'intérêt patrimonial, le Conservatoire du littoral et des rivages lacustres et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage -dotés respectivement de 19 millions d'euros et 5 millions d'euros dans le projet de loi de finances- vont par ailleurs bénéficier d'une dotation budgétaire complémentaire, de 8 millions d'euros pour le premier et 3 millions d'euros pour le second.

1. La mise en oeuvre de la stratégie nationale en faveur de la biodiversité

Interrogée par la commission des affaires culturelles en 2004, la ministre de l'écologie et du développement durable avait indiqué que l'année 2004 serait consacrée à l'élaboration d'une stratégie nationale en faveur de la biodiversité (SNB).

La lettre de mission de l'IFB, à qui a été confiée l'élaboration de la SNB, signée par le ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, la ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies et par le ministre de l'écologie et du développement durable, fixait un objectif : parvenir, d'ici à 2010, à une réduction significative du rythme actuel de l'appauvrissement de la diversité biologique.

La stratégie nationale pour la biodiversité, traduction nationale des engagements internationaux de la France, qui a ratifié le 1 er juillet 1994 la Convention sur la diversité biologique , adoptée en 1992, lors du sommet de Rio de Janeiro , a été rendue publique en février 2004 et s'articule autour de 4 axes :

- mobiliser tous les acteurs ;

- reconnaître sa valeur au vivant ;

- améliorer la prise en compte par les politiques publiques ;

- développer la connaissance scientifique et l'observation.

• Les enjeux

Le rythme d'extinction des espèces connues est actuellement de 1 000 à 10 000 fois supérieur au rythme naturel, du fait des activités humaines.

Eu égard à la richesse de son patrimoine naturel, il incombe à la France une responsabilité particulière en matière de sauvegarde de la diversité biologique : à titre d'exemple, le seul département des Alpes-Maritimes héberge davantage d'espèces végétales que l'ensemble du Royaume-Uni ; la Nouvelle-Calédonie est, par ailleurs, après Madagascar, le deuxième foyer au monde le plus riche en espèces endémiques.

Or, les changements globaux et les activités humaines menacent et fragilisent les écosystèmes naturels et cultivés : la France est actuellement au 4 e rang mondial des pays abritant le plus grand nombre d'espèces animales menacées et au 9 e rang pour les plantes 1 ( * ) . Elle possède des territoires dans 5 des 25 points chauds (Méditerranée, Caraïbes, Océan Indien, Nouvelle-Calédonie, Polynésie) et dans une zone forestière majeure sur les trois existantes (Amazonie).

En France métropolitaine, 36 % des espèces de mammifères sont menacées, 486 espèces ou sous-espèces végétales sont en sursis, 19 % des vertébrés ont disparu ou sont gravement menacés, 50 % des zones humides ont été détruites dans les dernières décennies.

La stratégie nationale, élaborée en concertation avec l'ensemble des administrations concernées, mais aussi avec tous les partenaires intéressés, et en particulier les collectivités territoriales, a pour ambition de stopper le rythme de cette dégradation, par une mobilisation générale.

• Intégrer la biodiversité dans toutes les politiques sectorielles

Le caractère interministériel de la mise en oeuvre de la stratégie est une des clefs de son succès.

La préservation de la biodiversité doit en effet être intégrée dans toutes les politiques (environnement, agriculture, éducation, recherche, économie, affaires étrangères, équipement, transport, tourisme, culture, ...) et favoriser l'interdisciplinarité.

C'est la raison pour laquelle le pilotage de la stratégie nationale pour la biodiversité est confié au niveau de l'Etat au Comité interministériel de développement durable (CIDD).

• Impliquer les secteurs socioprofessionnels clés : entreprises, agriculteurs, usagers de la mer...

Les orientations définies dans la SNB, outre leur caractère transversal, ont vocation à être déclinées de façon opérationnelle à chaque contexte territorial ou sectoriel, et à être traduites en initiatives de la part d'acteurs publics ou privés.

La stratégie nationale donne en effet un cadre qui garantit la cohérence et le suivi, dans lequel il faut encourager l'émergence de ces approches multiples.

En particulier, l'élaboration et la mise en oeuvre de plans d'action est le gage au niveau local et sectoriel d'une intégration des objectifs de gestion durable de la biodiversité dans les contextes culturels et professionnels divers qui les caractérisent.

C'est la raison pour laquelle les mesures envisagées reposent essentiellement sur des actions incitatives, dont le succès passe par la mobilisation de l'ensemble des acteurs à l'origine des menaces pesant sur les espèces et les habitats.

2. La traduction budgétaire de la mise en oeuvre de la stratégie nationale

Les crédits destinés à la mise en oeuvre de la SNB sont regroupés, dans la nouvelle nomenclature budgétaire, au sein de l'action 24 - « incitation à la gestion durable du patrimoine naturel », dotée de 75,6 millions d'euros , en augmentation de 18 % par rapport à la loi de finances 2004.

Ils sont destinés à financer :

- l'accompagnement, dans la gestion des espaces naturels et des paysages, des parcs naturels régionaux et des réserves de biosphère, des conservatoires régionaux d'espaces naturels, des opérations grands sites, ainsi que la gestion multifonctionnelle des forêts publiques,via le contrat Etat-ONF. L'enveloppe budgétaire consacrée à ce volet s'élève à 17,5 millions d'euros ;

- la conservation des espèces et des habitats d'intérêt européen dans le réseau Natura 2000, pour un montant de 21,7 millions d'euros ;

- la mise en oeuvre des inventaires (dont ZNIEFF), la conservation du patrimoine génétique, l'organisation et la diffusion de la connaissance, la formation (conservatoires botaniques nationaux, GIP-ATEN, muséum national d'histoire naturelle, écoles des paysages), dotés de 6,6 millions d'euros ;

- la préservation des espèces animales et végétales ( 5,7 millions d'euros ) et la contribution aux missions d'intérêt général et patrimonial de l'office nationale de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), pour un montant de 5 millions d'euros ;

- enfin, la sauvegarde de l'espace littoral et des milieux associés, à travers les actions du Conservatoire du littoral, pour un montant de 19 millions d'euros.

• L'achèvement de la mise en oeuvre du réseau Natura 2000 : une ambition pour la fin de l'année 2006

Les crédits consacrés à la mise en oeuvre du réseau Natura 2000 atteignent 21,08 millions d'euros (DO+CP) dans le projet de loi de finances pour 2005, contre 18 millions d'euros en 2004, soit une augmentation de 17 %. L'ambition du Gouvernement est d'achever la mise en oeuvre du réseau (près de 1 700 sites) d'ici 2006.

La hausse des crédits reflète essentiellement l'inscription d'une dotation de 11,3 millions d'euros à l'article 60 du chapitre 44-10 (titre IV)- destinés aux services déconcentrés de l'État en charge de l'achèvement de la réalisation des plans des sites et de l'élaboration des documents de gestion.

La réalisation du réseau Natura 2000, issu de la directive européenne « Habitats » transposée en droit français par l'ordonnance du 11 avril 2001 et ses décrets d'application, passe en effet par l'élaboration concertée, site par site, de documents de planification appelés « documents d'objectifs Natura 2000 ».

Les documents d'objectifs, établis sous la responsabilité du préfet de département assisté d'un opérateur technique, font une large place à la concertation locale : un comité de pilotage regroupe sous l'autorité du préfet les partenaires concernés par la gestion du site ( collectivités territoriales, parcs nationaux ou réserves naturelles, propriétaires, exploitants, associations, usagers... ) ou leurs représentants.

Le document définit :

- les orientations de gestion,

- les mesures de conservation contractuelles,

- le cas échéant, les mesures réglementaires à mettre en oeuvre sur le site.

Il précise les modalités de financement des mesures contractuelles.

C'est à partir de ce document d'objectifs que seront établis les contrats de gestion .

Possibilité est par ailleurs donnée à des particuliers (propriétaires, agriculteurs, forestiers, chasseurs, associations, communes...), qui prennent en charge la gestion et l'entretien des milieux naturels, de passer des « contrats Natura 2000 » leur permettant d'être rémunérés pour les travaux et les services rendus à la collectivité.

Ils prennent la forme de contrats territoriaux d'exploitation (CTE) ou de mesures agro-environnementales (MAE) hors CTE lorsqu'ils sont conclus avec des exploitants agricoles.

Passés directement entre l'Etat (via le préfet de département) et le titulaire de droits réels ou personnels conférant la jouissance des parcelles concernées, ces contrats sont d'une durée minimale de cinq ans.

Le contrat définit précisément les tâches à accomplir pour conserver ou rétablir les habitats naturels et les espèces qui ont motivé la création du site. Il donne la nature et les modalités de rémunération par l'Etat (et les collectivités territoriales le cas échéant) en contrepartie des prestations à fournir par le bénéficiaire.

Les aides de l'Etat sont accordées sous forme de subventions aux investissements ou d'aides annuelles à l'hectare (ou au linéaire entretenu de haies ou de berges...), insérées dans les contrats de plan Etat-Région.

Ces subventions s'inscrivent le plus souvent dans des plans de cofinancements, les contractants pouvant en effet bénéficier des aides financières du Fonds national de gestion des milieux naturels , du fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), de cofinancements européens des projets retenus au titre de LIFE-Nature et enfin des crédits programmés pour Natura 2000 dans les contrats de plan Etat-Région.

En août 2004, 1 400 sites étaient reconnus d'importance communautaire (SICT), environ 350 documents d'objectifs étaient terminés, près de 500 en cours d'élaboration. Il reste donc environ 600 sites à pourvoir .

Les subventions de l'État seront prioritairement consacrées en 2005 à l'animation, la mise en oeuvre et la gestion de ces documents.

• La protection de la faune et de la flore : des moyens renforcés au service de la mise en oeuvre de la stratégie nationale pour la biodiversité

La France a engagé depuis plusieurs années une politique active de conservation de la faune et de la flore, conformément aux engagements qu'elle a pris dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique , adoptée à Rio en 1992 et ratifiée en 1994.

Pour être efficace, cette politique nécessite une bonne connaissance de l'état et de la répartition des populations.

Elle se concrétise par l'édiction de mesures de protection des espèces et de gestion des populations existantes et de renforcement ou de réintroduction pour certaines d'entre elles particulièrement menacées ou disparues du territoire national. Elle passe aussi par des mesures de préservation de certains milieux écologiquement remarquables ou d'habitats d'espèces particulières.

L'ensemble de ces objectifs, poursuivis par espèce ou par groupes d'espèces dans le cadre des plans nationaux de restauration, bénéficiera d'une enveloppe budgétaire de 5,7 millions d'euros en 2005 , en hausse de + 53,25 % par rapport à 2004.

Cette augmentation sensible, qui traduit la mobilisation des services autour de la mise en oeuvre de la SNB, sera ventilée comme suit entre les différentes actions :

- 400 000 euros serviront à poursuivre la conduite d'inventaires de populations d'espèces animales et végétales sur plusieurs années pour noter les évolutions ;

- 2,27 millions d'euros financeront la politique des grands prédateurs (Convention pour la rémunération et les frais de fonctionnement des équipes techniques et administratives supplémentaires de l'ONCFS pour l'estimation des dégâts de grands prédateurs, compensation des dommages des grands prédateurs sur les cheptels domestiques, rémunération des techniciens pastoraux et participation aux actions de prévention des attaques de grands prédateurs sur les cheptels domestiques) et le soutien aux actions nationales, via notamment les conventions pluriannuelles d'objectifs avec les associations (LPO, SNPN, UNCS ...) ;

- 2,185 millions d'euros sont destinés à cofinancer, dans le cadre du programme LIFE, de nouveaux plans de restauration des espèces animales et végétales sauvages et à apporter un soutien financier aux partenaires, notamment associatifs, participant à la mise en oeuvre de ces plans. Ils doivent aussi servir au développement de l'aide aux actions de prévention et de lutte contre les espèces de faune et de flore introduites et invasives et à la mise en oeuvre d'actions spécifiques dans le cadre de la stratégie nationale en faveur de la biodiversité (un débat sur le loup est d'ores et déjà prévu, suite aux difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre du plan loup) ;

- 800 000 euros, enfin, serviront notamment à soutenir les investissements nécessaires à l'amélioration du milieu ou à l'acquisition de terrains ou de matériels, dans le cadre du développement des plans de restauration d'espèces animales ou végétales.

* 1 Listes rouges de l'UICN (Union mondiale pour la nature).

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page