3. Une compensation partielle des charges imposées par des décisions de l'Etat aux collectivités territoriales
La compensation financière des compétences transférées aux collectivités territoriales constituait l'un des principes forts des lois de décentralisation. Elle apparaissait comme l'un des socles du contrat de confiance avec l'Etat.
Passée la première vague des transferts de compétences, le financement budgétaire des transferts, conçu au départ comme un solde, est progressivement devenu la norme .
Les nouveaux transferts n'ont pas donné lieu à des transferts de fiscalité mais à des majorations de dotation générale de décentralisation. L'assiette et le taux des impôts transférés se sont progressivement réduits. La politique de réduction et d'unification des taux des droits de mutation, outre qu'elle a supprimé au passage le pouvoir des départements de voter les taux de ces impôts, a entraîné une diminution importante de la part de la fiscalité dans les ressources transférées.
Comme le fait remarquer justement notre collègue Michel Mercier rapporteur spécial de la commission des Finances dans sa note de présentation précitée : « Le système en vigueur depuis les lois de décentralisation fonctionne convenablement, même s'il est indéniable qu'à mesure que la compétence est exercée par les collectivités locales, un écart (plus ou moins grand selon les collectivités) peut apparaître entre le montant de la compensation et celui du coût de l'exercice de la compétence. Une réévaluation périodique du coût de l'exercice des compétences transférées, s'accompagnant le cas échéant d'une modification du montant de la compensation, pourrait être envisagée . »
En outre, les collectivités territoriales subissent un alourdissement des charges non compensées.
Les transferts de charges ne concernent pas seulement les domaines mentionnés par les lois de décentralisation. En effet, les collectivités territoriales doivent de plus en plus supporter des charges résultant de décisions sur lesquelles elles n'ont aucune prise.
Les exemples sont nombreux, les plus récents et les plus coûteux étant l'organisation des services départementaux d'incendie et de secours et la création de l'allocation personnalisée d'autonomie.
La détermination exacte du montant des charges transférées est parfois délicate car, parmi les dépenses résultant de la mise en oeuvre des charges nouvelles, il n'est pas toujours possible de distinguer quelles sont les dépenses relevant de l'application de la loi et quelles sont les dépenses qui relèvent de la libre décision des collectivités locales.
Pour cette raison, les transferts de charges ne peuvent pas toujours faire l'objet d'une compensation intégrale, comme en témoigne l'exemple des dépenses de personnel : les revalorisations des traitements des agents de la fonction publique territoriale décidées par l'Etat, auxquelles les collectivités ne sont pas associées, devraient-elles être compensées intégralement par l'Etat, alors même que celui-ci ne maîtrise pas les décisions des collectivités en matière de recrutement ?
Par ailleurs, les ressources des collectivités territoriales évoluent moins vite que ces charges nouvelles . Ainsi pour les trois années d'application de l'accord salarial du 10 février 1998, la dotation globale de fonctionnement a augmenté nettement moins vite que le surcoût provoqué par cet accord.
Le surcoût induit par le financement des charges non compensées peut aboutir à une augmentation de la pression fiscale sur les contribuables locaux. Ainsi, dans son rapport au nom de l'Observatoire des finances locales pour 2002, notre collègue Joël Bourdin indique qu'il est pour l'instant difficile de savoir quel sera le coût exact de l'allocation personnalisée d'autonomie pour les départements, mais que la fiscalité locale a d'ores et déjà été sollicitée.
Enfin, comme l'a relevé à juste titre le rapport de la mission sénatoriale d'information sur la décentralisation, l'Etat incite fortement les collectivités territoriales à financer des dépenses qui relèvent de ses compétences , notamment en matière d'enseignement supérieur et de voirie. Les contrats de plan Etat-région ont ainsi constitué un cadre privilégié pour faire financer par les collectivités territoriales des politiques nationales.
Comme on l'a vu, toutes ces charges pèsent lourdement sur les budgets locaux. Elles sont inégalement ressenties dans la mesure où la part de la péréquation dans les concours de l'Etat reste insuffisante.