Projet de loi de finances pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale - Tome I : Solidarité

BLANC (Paul)

AVIS 91 - TOME I (2001-2002) - Commission des Affaires sociales

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Table des matières




N° 91

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME I

SOLIDARITÉ

Par M. Paul BLANC,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Joël Billard, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Jean-René Lecerf, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Valérie Létard, MM. Jean Louis Masson, Serge Mathieu, Mmes Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 et 87 (annexe n° 18 ) (2001-2002)


Lois de finances .

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Les crédits relatifs à la solidarité, examinés dans cet avis, augmentent de 2,6 % en 2002. Cette hausse modérée ne doit pas masquer le fait que cette année le budget enregistre pour la première fois une projection en baisse des crédits destinés au RMI.

Face à cette amélioration permise par une conjoncture plus favorable et une diminution conséquente du chômage de longue durée non indemnisé, votre rapporteur a souhaité conserver la grille d'analyse très pertinente que son excellent collègue Jean Chérioux a appliquée avec constance depuis la création de l'avis budgétaire relatif à la solidarité.

A cet égard, votre rapporteur tient à rendre un hommage particulier à la qualité de son travail et à le remercier d'avoir bien voulu lui faire confiance pour poursuivre le chemin tracé à travers les cinq avis présentés depuis 1997 sur les crédits relatifs à la solidarité.

Comme M. Jean Chérioux l'a souligné avec vigueur, les besoins sont tellement immenses dans les domaines de la lutte contre l'exclusion et de la solidarité envers les personnes handicapées qu'il serait vain de se borner à repérer les manques ou les lacunes ; la question qui se pose est donc celle de savoir si le ministère se donne les moyens de mieux utiliser, sur le plan qualitatif, les crédits dont il dispose, en un mot de savoir si le budget permet, non pas de « dépenser plus », mais de « dépenser mieux ».

Concernant le volet relatif à la lutte contre les exclusions, votre commission a constaté que la marge de manoeuvre dégagée par les économies réalisées sur le revenu minimum d'insertion et la couverture maladie universelle, grâce au retour de la croissance, semblaient encore fragiles.

Au demeurant, ces économies sont contrecarrées par les dépenses nouvelles prévisibles en matière de prise en charge des personnes de nationalité étrangère dans les centres d'accueil et d'hébergement d'urgence et par les engagements pluriannuels en matière de formation des travailleurs sociaux.

S'agissant du volet relatif à l'action en faveur des personnes handicapées, votre commission s'est inquiétée que l'attentisme du Gouvernement concernant les réformes de fond que nécessiteraient les dispositifs actuels ne finisse par conduire à une remise en cause du statu quo .

Votre commission a pris acte de la poursuite de l'effort financier prévu dans le cadre du plan triennal tout en constatant que l'apport de crédits nouveaux ne permettait pas de rénover ou de réformer un cadre d'intervention qui date largement de la première loi d'orientation en faveur des personnes handicapées en date du 30 juin 1975.

Votre commission a souhaité tout d'abord une réforme en profondeur des Commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) qui devraient être articulées et coordonnées dans le cadre d'un réseau global sous l'autorité d'une Agence aux prérogatives renforcées pouvant agir en synergie avec les organismes existants.

Par ailleurs, les besoins en matière d'accueil en institutions spécialisées demeurent très importants dans notre pays pour les jeunes handicapés mentaux mais aussi pour les personnes gravement handicapées sur le plan physique ou à mobilité très réduite. Le dispositif actuel a besoin non seulement d'un effort financier mais aussi d'un mécanisme nouveau qui permette de réaliser une meilleure adéquation entre l'offre de places en établissements et les besoins des personnes handicapées elles-mêmes à partir d'une évaluation des situations personnelles.

Votre commission a appelé de ses voeux un engagement particulier pour l'accélération de la mise en place des sites pour la vie autonome et le développement des soins infirmiers à domicile, en tenant compte des faiblesses constatées aujourd'hui du fait de la pénurie d'infirmières qualifiées, notamment en milieu rural.

Enfin, une réflexion doit être menée pour créer les structures qui devront accueillir demain les personnes handicapées vieillissantes.

Concernant l'action sociale et médico-sociale des départements, la commission a constaté que si l'année 2000 s'inscrivait encore dans un cycle de modération de dépenses, le risque était grand d'assister à un dérapage de ces dépenses à partir de 2001 en raison de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail et de l'entrée en vigueur de l'allocation personnalisée d'autonomie.

Votre commission s'est inquiétée de la persistance des risques liés à la remise en cause de la rémunération versée au titre des heures de permanence en chambre de veille, tout en regrettant l'absence de décision gouvernementale en ce domaine. Elle a constaté par ailleurs l'apparition de nouveaux facteurs d'aggravation des dépenses structurelles résultant de l'augmentation de l'indemnité de précarité prévue par le projet de loi de modernisation sociale et par l'effet d'imitation que pourrait susciter la mise en place de la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière sans retenue ni modération salariale.

Pour toutes ces raisons, votre commission vous proposera un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à la solidarité dans le projet de loi de finances pour 2002.

I. LA MARGE DE CROISSANCE FRAGILE DÉGAGÉE SUR LES DISPOSITIFS DE LUTTE CONTRE L'EXCLUSION NE COUVRE PAS LES NOUVEAUX BESOINS SOCIAUX

Le budget de l'emploi et de la solidarité représente au total 208 milliards de francs en 2002, dont 42 % sont consacrés aux deux actions qui relèvent de cet avis budgétaire, à savoir l'intégration et la lutte contre les exclusions , d'une part, et le développement social , d'autre part.

L'action dite de « lutte contre l'exclusion », qui recouvre notamment les dépenses liées au revenu minimum d'insertion (RMI), représente 47 milliards de francs.

L'agrégat relatif au développement social , soit 40 milliards de francs, assez hétérogène, regroupe notamment les dépenses relatives aux interventions en faveur des droits des femmes, aux rapatriés, à la formation des travailleurs sociaux, au financement des centres d'aide par le travail (CAT), ainsi que les dépenses d'action sociale de l'Etat destinées aux personnes handicapées et aux personnes âgées, y compris les prestations obligatoires telles que l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

Au total, les crédits relatifs à la solidarité dans le budget de l'Etat représentent donc 87 milliards de francs, soit 5 % des dépenses nettes du budget général qui s'établissent à 1.730 milliards de francs.

La croissance retrouvée permet de dégager des économies sur les crédits relatifs au revenu minimum d'insertion (RMI) et sur le financement de la protection complémentaire au titre de la couverture maladie universelle (CMU) ; toutefois, les économies réalisées en 2002 apparaissent difficiles à consolider.

A. LES MARGES DE MANoeUVRE DÉGAGÉES AU TITRE DU RMI SONT ENCORE FRAGILES

1. Les économies réalisées au titre du RMI doivent être relativisées

Le retour de la croissance aurait pu laisser espérer une baisse plus rapide des effectifs du RMI. En réalité, la décrue n'a été enregistrée qu'à partir du premier semestre 2000 et encore sur le seul territoire de la métropole ; le dispositif fait preuve d'une forte « inélasticité au retour de la croissance ».

Peuvent bénéficier du RMI tous les résidents en France, sans condition de nationalité -une condition de résidence de trois ans étant toutefois requise pour les ressortissants de pays étrangers- à condition qu'ils soient âgés de plus de 25 ans et qu'ils ne soient pas étudiants, ou s'ils ont moins de 25 ans, qu'ils aient au moins un enfant à charge. L'allocation versée complète les ressources des intéressés de façon à leur garantir un revenu minimum fixé à 2.608,50 francs par mois au 1 er janvier 2001 pour une personne isolée sans enfant à charge et à 3.912,75 francs par mois 1 pour un couple (ce montant est majoré de 782,55 francs par mois pour chaque enfant à charge). L'allocation est conditionnée à un engagement du bénéficiaire à participer aux actions ou activités définies avec lui et nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle. Cet engagement peut être formalisé dans un contrat d'insertion.

a) Le dispositif du RMI bénéficie tardivement du retour de la croissance

Au 31 décembre 1999, la France a enfin enregistré une baisse nette de 52.000 bénéficiaires du RMI en métropole dont le nombre s'élève néanmoins à 965.000.

Evolution des effectifs et des crédits afférents au RMI

 


Métropole


Evolution


DOM


Evolution


France


Evolution

Crédits budgétaires en MF (1)


Evolution

Décembre 1989

335.514

 

71.567

 

407.081

 

6.000

 

Décembre 1990

422.101

25,8 %

88.044

23,0 %

510.145

25,3 %

8.668

+ 45 %

Décembre 1991

488.422

15,7 %

93.939

6,7 %

582.361

14,2 %

14.325

+ 65 %

Décembre 1992

575.034

17,7%

96.208

2,4 %

671.242

15,3 %

13.168

- 8 %

Décembre 1993

696.589

21,1 %

96.355

0,2 %

792.944

18,1 %

16.631

+ 26 %

Décembre 1994

803.303

15,3 %

105.033

9,0 %

908.336

14,6 %

19.217

+ 16 %

Décembre 1995

840.839

4,7 %

105.171

0,1 %

946.010

4,1%

22.022

+ 15 %

Décembre 1996

903.804

7,5 %

106.668

1,4 %

1.010.472

+ 6,8 %

23.179

+ 5 %

Décembre 1997

956.596

5,8 %

111.305

4,3 %

1.067.901

+ 5,7 %

24.230

+ 4,5 %

Décembre 1998

993.286

3,8 %

118.822

6,8 %

1.112.108

+ 4,1 %

26.227

+ 8,24 %

Décembre 1999

1.017.847

2,5 %

127.176

7 %

1.145.023

+ 3 %

31.900 (2)

+ 21,63 %

Décembre 2000

965.000

- 5,1 %

131.000

3 %

1.096.000

- 4,3 %

29.255 (3)

- 8,78 %

(1) En millions de francs, compte tenu des lois de finances rectificatives.

(2) Dont 1,82 milliard de francs pour couvrir les insuffisances de la dotation 1998 (l'augmentation budgétaire nette de 1999 sur 1998 s'élèverait donc à 7,25 %).

(3) Prévision.


L'évolution des effectifs du RMI en métropole a été forte jusqu'en 1994, avec une croissance annuelle moyenne de 15 % par an, liée d'abord à la montée en charge initiale du RMI puis à la réforme de l'assurance chômage en 1992 qui a conduit à une diminution du nombre de chômeurs indemnisés. L'évolution du RMI est en effet largement conditionnée par le nombre de chômeurs non bénéficiaires des régimes d'assurance chômage et solidarité, pour qui cette prestation offre une couverture financière minimum.

De 1995 à 1997, le rythme d'évolution du RMI a fortement diminué, mais s'est maintenu à un niveau proche ou supérieur à 5 %, et globalement plus élevé que celui du chômage.

Depuis quatre ans, le taux de croissance du RMI s'est progressivement essoufflé (+ 5,8 % en 1997 et + 3,8 % en 1998, + 2,5 % en 1999) pour atteindre - 0,9 % en 2001.

Au cours de l'année 2000, pour la première fois depuis la création du dispositif, le nombre d'allocataires a diminué de 5,2 % en métropole 1( * ) . En parallèle, la croissance des effectifs dans les départements d'outre-mer s'est ralentie passant de 7 % en 1999 à 3,5 % en 2000. En un an, le nombre d'allocataires du RMI a ainsi reculé de plus de 52.000 en métropole.

Cette évolution favorable reflète l'amélioration de la conjoncture économique et, plus particulièrement, la baisse du chômage non indemnisé.

La baisse du RMI profite principalement aux moins de trente ans et à ceux qui sont entrés récemment dans le dispositif : le nombre d'allocataires du RMI de moins de trente ans a diminué de 20 % depuis 1997, soit une baisse de près de 55.000 allocataires.

En outre, quatre signes encourageants sont constatés en 2000.

Tout d'abord, le nombre d'allocataires présents depuis plus d'un an a ainsi diminué de près de 2 % pour la première fois depuis la création du dispositif. En 1999, les jeunes et les allocataires récents étaient les seules catégories à bénéficier du contexte favorable de l'activité économique.

Ensuite, le mouvement de baisse touche désormais toutes les classes d'âge , à l'exception des personnes de plus de 50 ans qui relèvent de dispositifs spécifiques.

Par ailleurs, grâce aux créations d'emploi, le rythme des sorties du dispositif s'est nettement accéléré en 2000 pour atteindre 350.000 en métropole, soit une progression de 9 % par rapport à 1999. Ce résultat est d'autant plus remarquable que la forte diminution du flux d'entrées (+ 345.000 en 2000 contre + 392.000 en 1999), a mécaniquement limité le potentiel des sorties (on rappellera en effet qu'un tiers des entrants au RMI sortent du dispositif avant six mois).

Enfin, on peut se féliciter que la baisse du RMI se soit largement diffusée à travers tout le territoire.

A l'exception de trois départements ruraux (Haute-Corse, Ariège et Lozère), la baisse du RMI profite à l'ensemble des départements. Les diminutions les plus fortes sont observées dans l'ouest du pays, autour de l'axe Rhin-Rhône et, pour le bassin parisien, dans les Yvelines. Les départements qui enregistrent les résultats moins favorables sont concentrés principalement dans la partie sud du pays. Globalement, la baisse du RMI a été modérée dans les départements où le chômage a le moins diminué et forte lorsque la baisse du chômage a été vigoureuse.

b) Des économies grevées par les dépenses à venir

Au total, le Gouvernement envisage donc pour 2002 une diminution des dépenses de lutte contre les exclusions de 470 millions de francs au titre du RMI en tenant compte de la revalorisation de l'allocation.

La dotation pour 2002 prend en considération une revalorisation du montant de l'allocation de 2,2 % au 1 er janvier 2001 et de 1,2 % au 1 er janvier 2002 compte tenu de l'hypothèse relative au rythme de l'inflation fournie par la direction de la prévision du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Les prévisions établies pour l'évolution du nombre d'allocataires sont les suivantes : - 4,2 % en métropole et + 4,4 % dans les DOM en 2001 ; - 1 % en métropole et + 4,4 % dans les DOM pour 2002.

L'économie nette de 470 millions de francs doit être rapprochée toutefois des 29,38 milliards de francs que représente au total la dotation budgétaire pour le RMI dans le projet de loi de finances pour 2002.

L'économie doit être relativisée également au regard du coût des revalorisations successives du montant de l'allocation qui apparaissent dans les comptes d'exécution. En décembre 1999, le Premier ministre a ainsi décidé d'une allocation forfaitaire de fin d'année dont le montant a représenté 1,6 milliard de francs sur l'exercice correspondant ; de même, les dépenses liées à l'allocation exceptionnelle de la fin d'année 2000 représentait 1,53 milliard de francs. En d'autres termes, les économies constatées en prévision sur 2002 ont été plus que « gagées » par le coût des revalorisations de fin d'année intervenues successivement depuis 2000 .

Pour 2002, la presse a fait état d'informations concernant la prime de Noël selon lesquelles « bien que la réunion d'arbitrage officielle n'ait pas encore eu lieu, il paraît acquis que l'enveloppe consacrée à cette aide aux personnes sans emploi sera identique à celle de 2000 à près de 2 milliards de francs » 2( * ) .

Ensuite, le Gouvernement engage une dépense de 270 millions de francs pour renforcer, au titre de l'API et du RMI, les procédures d'intéressement à la reprise d'activité .

Actuellement, le cumul entre allocation et revenu d'activité joue intégralement pour un trimestre puis fait l'objet d'un abattement à hauteur de 50 % pour les trois trimestres suivants. L'objectif de la réforme est de parvenir à un cumul intégral pendant un trimestre supplémentaire soit pendant près de six mois.

Cette mesure a été mise en place par le décret n° 2001-1078 du 16 novembre 2001 : ainsi, jusqu'à la première révision trimestrielle, le cumul des revenus avec le RMI demeure intégral. Lors de la première révision trimestrielle suivant l'exercice de l'activité, les revenus du trimestre précédent, appréciés en moyenne annuelle, sont pris en compte avec un abattement de 100 % (et non plus 50 %). Enfin, pour les trois révisions trimestrielles suivantes, les revenus du trimestre écoulé sont affectés d'un nouvel abattement de 50 % (inchangé). Les modalités de cumul de l'allocation de parent isolé (API) avec des revenus d'activité sont semblables à celles retenues en matière de RMI.

Les dépenses prévisionnelles prennent également en compte l'exclusion des bourses de l'enseignement supérieur des ressources prises en compte pour le calcul du RMI.

Si les bourses de l'enseignement primaire et secondaire (collège et lycée) sont exclues du calcul des revenus des parents percevant le RMI, le montant des bourses d'enseignement supérieur perçues par les étudiants était pris en compte pour le calcul des ressources de la famille lorsque celle-ci était bénéficiaire du RMI. Le décret n° 2001-1073 du 16 novembre 2001 a mis fin à ce qui était perçu comme une injustice.

Votre commission est favorable aux formules d'incitation à la reprise d'activité . Il reste que le dispositif issu du décret du 16 novembre dernier aura une incidence au-delà de la seule année 2002 puisque les mécanismes d'intéressement ont pour effet de limiter numériquement le nombre de sorties du dispositif.

Certes, le ministère fait valoir que, dans la majorité des cas, les formules d'intéressement ne sont pas utilisées au-delà de trois mois, les revenus professionnels de l'intéressé entraînant le dépassement des seuils fixés par la loi.

Il reste que cet élément statistique repose sur les constatations établies au cours de l'année 2000 qui peuvent être remises en cause par l'évolution de la conjoncture économique et le retournement du marché de l'emploi observé depuis six mois.

On sait que la mise en place, au début de 1999, des mesures d'amélioration de l'intéressement prévues par la loi du 29 juillet 1998 de lutte contre les exclusions, renforçant les possibilités de cumul du RMI et des mesures d'activité, a eu un impact important sur le nombre de bénéficiaires de la mesure : 127.000 personnes bénéficiaient, au 31 décembre 2000, de ce mécanisme en métropole, soit 13,5 % des allocataires du RMI.

c) Les dépenses d'ensemble du RMI se situent toujours à niveau élevé

Comme les années précédentes, le coût total du RMI excède largement, pour la collectivité nationale, celui de la seule dotation budgétaire destinée à financer l'allocation. Il s'élève en réalité à 46 milliards de francs en 2000, dont 17 % à la charge des conseils généraux 3( * ) .

La créance de proratisation dans les DOM, le coût de l'aide médicale assurée par l'Etat pour les personnes sans domicile fixe et le coût de la mise en oeuvre des aides à l'emploi, viennent s'ajouter aux crédits destinés au financement de l'allocation stricto sensu.

Le coût de la créance de proratisation 4( * ) dans les DOM s'élève à 913 millions de francs. Les majorations d'aide au logement dont bénéficient les allocataires du RMI s'élèvent à 1 milliard de francs.

Le poste essentiel reste celui du coût des mesures pour l'emploi (contrat emploi consolidé, contrat emploi-solidarité, emplois-jeunes) mises en oeuvre au profit des titulaires du RMI dont le montant total est estimé à 7,2 milliards de francs pour 2000 , soit une multiplication par sept depuis la mise en place du dispositif (1 milliard de francs en 1989).

A cela, il faut ajouter les crédits d'insertion des départements résultant de l'obligation légale d'inscrire à leurs budgets 20 % des sommes versées par l'Etat l'année précédente au titre de l'allocation, afin de financer des actions d'insertion pour les bénéficiaires du RMI : ce montant, qui représentait 1,98 milliard de francs en 1992, est passé à 4,9 milliards de francs en 2000 (dont 4,5 milliards de francs pour les dépenses en métropole).

Tableau récapitulatif des dépenses liées au RMI en 2000

(en milliards de francs)

 

Etat

Conseils généraux

Total

Allocation RMI

30,8

 
 

Mesures emploi (e)

7,2

 
 

Crédits d'insertion DOM

0,8

 
 

Majoration d'aide au logement (e)

1

 
 

Exonération de taxe d'habitation

1,16

 
 

Crédits d'insertion

 

4,9

 

Total

40,96

4,9

45,86

Total en %

89 %

11 %

100 %

d) Le maintien d'un « noyau dur » de personnes installées dans le RMI appelle des solutions innovantes

Près d'un tiers des allocataires ne perçoit l'allocation que pendant moins de six mois, tandis qu'à l'inverse plus d'un tiers reste dans le dispositif plus de quatre ans .

Sur les 345.000 entrées au RMI enregistrées en 1999, un tiers des allocataires perçoit l'allocation pendant moins de six mois. Comme dans la plupart des processus d'insertion, les chances de sortie sont plus élevées lorsque les allocataires sont jeunes, diplômés ou plus proches de l'emploi.

Phénomène plus inquiétant : la décrue des effectifs du RMI ne concerne pas fortement les personnes entrées depuis longtemps dans le dispositif : ainsi en 2000, a-t-on constaté que le nombre d'allocataires présents depuis plus de deux ans au RMI avait augmenté de 1,6 %.

Les politiques d'insertion des départements ne sont pas en cause.

La consommation des crédits d'insertion RMI a représenté 4,8 milliards de francs en 1999 (731.755.282 euros), soit 98 % du montant de l'obligation légale et des concours de l'année. Le taux de consommation est en hausse significative : 98 % contre 94 % en 1997. Un effort particulier semble avoir été fait par les départements dont le niveau de consommation était faible.

Taux de consommation des crédits départementaux d'insertion

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

97 %

101 %

96 %

94 %

94 %

98 %

98 %

En même temps, les politiques d'insertion professionnelle par le recours aux contrats aidés d'accès à l'emploi non marchand (contrats emploi-solidarité ; contrats emplois consolidés) semblent avoir atteint les limites de leur efficacité.

Le nombre d'entrées de bénéficiaires du RMI en mesures ciblées de la politique de l'emploi (CES, CEC, CIE et SIFE) a diminué en 2000 passant de 174 600 à 156 000.

Le recentrage de l'offre d'insertion autour du public RMI demeure stable conformément aux orientations données au service public de l'emploi. La part des contrats ou stages attribués à ces allocataires est de l'ordre de 30 % dans les mesures ciblées pour 2000 (30.8% en 1999).

Dans un contexte de diminution du nombre de mesures aidées pour l'emploi, liée au développement plus important des opportunités d'accès direct à l'emploi marchand, le taux de couverture a connu une certaine baisse : moins de 16 % des allocataires ont pu accéder à l'une des mesures ciblées dans l'année 2000 contre 19 % en 1999 et plus de 21 % en 1996, dans un contexte d'accès à l'emploi il est vrai très différent.

Dans un tel contexte, il est nécessaire d'imaginer de s solutions innovantes .

Au cours de la séance publique du jeudi 8 février 2001, réservée aux textes d'initiative parlementaire, le Sénat a examiné en première lecture, sur le rapport de M. Philippe Nogrix 5( * ) la proposition de loi n° 317 (1999-2000) portant création du revenu minimum d'activité (RMA), déposée par M. Alain Lambert, président de la commission des Finances et M. Philippe Marini, rapporteur général.

Ce dispositif innovant permet au titulaire d'un minimum social (RMI par exemple) de convertir son allocation en un salaire qui lui serait versé directement par l'entreprise.

Ce dispositif, dégressif sur trois ans, serait neutre pour les finances publiques et ne remettrait pas en cause le droit aux minima sociaux existants. Il vise à lutter contre le chômage structurel par une incitation à l'embauche dans le cadre de contrats de travail à durée indéterminée. La rémunération des salariés, qui devrait être légèrement supérieure au SMIC, serait fixée par des accords de branche professionnelle.

Votre commission des Affaires sociales a approuvé entièrement la démarche. Elle a souhaité que les négociations de branche mettent en place un plan de formation, accompagné ou non d'un tutorat, au profit des personnes embauchées ainsi qu'une prise en charge des frais de retour à l'emploi.

Votre rapporteur ne peut que regretter que l'Assemblée nationale n'ait pas souhaité engager la navette sur un dispositif incontestablement utile.

2. L'allocation de parent isolé (API) ne connaît pas de diminution de ses effectifs

L'API est à la fois une prestation à vocation familiale et un minimum social . Il s'agit d'assurer un minimum de ressources aux personnes isolées assumant seules la charge d'un ou plusieurs enfants. L'API est versée par la caisse d'allocation familiale (CAF) ou par les caisses de mutualité sociale agricole.

Ce n'est que depuis le budget pour 1999 que l'API est inscrite sur les crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité : la décision de procéder à la « budgétisation » de l'API -auparavant financée par la branche famille de la sécurité sociale- a été prise pour compenser le rétablissement du principe de l'universalité des prestations familiales.

L'allocation de parent isolé (API) est versée à la future mère en situation d'isolement ou à toute personne qui du fait du décès du conjoint ou concubin, d'un divorce, d'une séparation de droit ou de fait se retrouve seule pour élever un ou plusieurs enfants. L'allocation est au plus versée pendant un an ou jusqu'au troisième anniversaire du dernier enfant. Il s'agit d'une allocation strictement différentielle qui n'est versée que si les ressources totales du demandeur sont inférieures au montant garanti variable selon le nombre d'enfants. Pour une personne seule (femme enceinte), le montant garanti s'élève à 3.295 francs pour une femme enceinte sans enfant à charge et à 4.395 francs pour un parent isolé avec un enfant à charge . Les ressources prises en compte pour calculer la différentielle intègrent tous les revenus du trimestre précédant à l'exclusion de l'allocation logement et de l'allocation pour jeune enfant (APJE) versée du 4 ème mois de grossesse au 3 ème mois suivant la naissance ; elles comprennent donc toutes les autres prestations familiales.

L'API a été créée en 1976 : ses effectifs ont connu une forte progression de l'ordre de 14 % par an entre 1978 et 1988. De 25.000 personnes en 1977, le nombre de personnes concernées est passé à 75.000 en 1981, 125.000 en 1985 et 150.000 en 1989.

Les effectifs concernés par l'API connaissent à nouveau une augmentation en 1999 et 2000, alors que la tendance au ralentissement était encore observée en 1998.

Evolution de l'API

Année

Nombre de bénéficiaires

Evolution par rapport à l'année précédente en %

Niveau des crédits consommés en trésorerie
(en millions de francs)

1989

156.000

 

3.945

1990

157.000

+ 0,6

4.104

1991

157.000

0

4.189

1992

160.000

+ 1,9

4.311

1993

164.000

+ 2,5

4.517

1994

169.000

+ 3

4.720

1995

164.000

- 3

4.750

1996

163.000

- 0,6

4.985

1997

164.000

+ 0,6

4.649

1998

163.000

+ 0,6

4.561

1999

168.000

+ 3,2

4.635

2000

170.000

+ 1,2

4.731

La dotation budgétaire qui était fixée à 4,35 milliards de francs en 2000 et à 4,7 milliards de francs en 2001 augmenterait de 3,6 % en 2002 pour atteindre 4,8 milliards de francs .

L'API, plus encore que le RMI, est une prestation qui s'avère lente à enregistrer les effets d'une amélioration de l'activité économique, alors même qu'elle a été conçue pour faciliter la vie des familles pendant une période de recherche d'emploi.

L'hypothèse, selon laquelle les mesures tendant à améliorer la couverture des frais pour garde d'enfants liés à la reprise d'un emploi devaient contribuer à diminuer le nombre de titulaires de l'API, ne s'est pas vérifiée.

Les créations d'emploi sur la période 1997-2000 auraient dû entraîner une baisse d'environ 25.000 allocataires, mais cette diminution théorique ne se retrouve pas dans l'évolution d'ensemble des allocataires de l'API. En effet si sur cette période, le nombre d'allocataires a continué de croître à un rythme plus faible en raison de l'amélioration de la situation de l'emploi  (+ 3,2 % en 1999, + 1,2 % en 2000) l'impact d'une meilleure conjoncture sur l'évolution des effectifs a été atténué par deux phénomènes.

Tout d'abord, la mise en place des mesures de cumul avec des revenus d'activité, tout en garantissant une meilleure couverture en cas de reprise d'activité, a pour conséquence de maintenir plus longtemps les allocataires dans le dispositif : sur la période 1997-2000, 10.000 bénéficiaires ont été concernés.

Ensuite, le nombre des familles monoparentales évolue parallèlement à celui des naissances et augmente depuis 1996 (sur la période 1997-2000, contribution de 11.000 bénéficiaires).

La dotation pour 2002 a été fixée en se fondant, selon les éléments transmis à votre rapporteur, sur une stabilisation de l'évolution des effectifs de la dotation, d'une revalorisation du montant de l'allocation en fonction de la base mensuelle des allocations familiales, la majoration du barème de l'API dans les départements d'outre-mer conformément à la loi d'orientation du 13 décembre 2000 sur l'outre-mer et la prolongation d'un trimestre de la période de cumul intégral de l'allocation avec un revenu d'activité dans le cadre de l'amélioration du régime d'intéressement.

En fait, votre rapporteur partage l'objection émise par votre commission lorsque le financement de l'API avait été transférée de la branche famille au budget de l'Etat et que M. Jean Chérioux avait reprise à son compte dans son avis de l'année dernière.

Tant qu'elle était considérée avant tout comme une prestation familiale, l'API pouvait éviter de devenir un dispositif stigmatisant comme peut l'être parfois le RMI ; en revanche, le financement direct par l'Etat ne peut que conduire à faire prévaloir la dimension de minimum social de cette prestation au détriment de la volonté d'insérer les parents isolés dans la vie économique .

3. Les incertitudes sur les économies prévues au titre de la couverture maladie universelle (CMU)

a) Le dispositif de la CMU

La loi du 27 juillet 1999 a prévu deux dispositifs :

- une couverture maladie universelle de base obligatoire ouverte aux personnes résidant en France de façon stable et régulière dont les ressources n'excèdent pas 3.600 francs par mois pour une personne seule. Les dépenses de cette couverture de base sont prises en charge directement au sein de la branche assurance maladie ; en 2000, le coût des prestations de la CMU de base s'est élevé à 10,941 milliards de francs pour le régime général.

- une couverture complémentaire ouverte sous conditions de ressources, permettant de bénéficier d'une prise en charge à 100 % des soins (avec la prise en charge intégrale du ticket modérateur), de la prise en charge du forfait hospitalier, ainsi que de divers appareillages. Le bénéfice du tiers payant est étendu aux intéressés qui ont le choix de leur organisme d'affiliation, soit une caisse d'assurance maladie, soit une mutuelle, soit une institution de prévoyance, soit une compagnie d'assurance.

b) La révision à la baisse des crédits

Pour 2001, la prévision de dépenses était de 7,4 milliards de francs au titre de la couverture complémentaire.

Les effectifs détaillés de la CMU au 30 décembre 2000

•  A la date du 30 décembre 2000, dernier chiffre connu, l'effectif des bénéficiaires de la couverture de base , ou « régime de résidence » s'établit à 1.130.717 personnes . Parmi ces bénéficiaires, 80 % sont domiciliés en France métropolitaine, et la très grande majorité (73 %) sont également bénéficiaires du RMI. 5,4 %, acquittent une cotisation du fait qu'ils dépassent le plafond de ressources en deçà duquel a été instaurée une franchise de cotisations. En outre, 165.519 bénéficiaires du régime de résidence n'ont pas de couverture CMU complémentaire.

•  A la date du 30 décembre 2000, dernier chiffre connu, les effectifs des bénéficiaires de la couverture complémentaire sont les suivants :

- 4.360.000 bénéficiaires affiliés à la CMU complémentaire gérée par une CPAM ou une CGSS pour le compte de l'Etat, hors section locale mutualiste ;

- 103.000 bénéficiaires affiliés à la CMU complémentaire gérée par une caisse mutuelle régionale ;

- 6.860 bénéficiaires affiliés à la CMU complémentaire gérée par une caisse de mutualité sociale agricole ;

- près de 400.000 bénéficiaires affiliés à la CMU complémentaire gérée par un organisme complémentaire, dont 344.000 affiliés au régime général, 22.000 au régime des non salariés non agricoles et 15.740 au régime agricole.

En définitive, les comptes prévisionnels du fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie s'établissent comme suit pour 2001.

Compte prévisionnel du fonds CMU pour 2001

(en millions de francs)

Recettes

Dépenses

Dotation budgétaire de l'Etat

6.599

Versements aux organismes de sécurité sociale et aux organismes de couverture maladie complémentaire

7.589

Contribution de 1,75 % à la charge des organismes de couverture maladie complémentaire

1.000

Gestion administrative

10

Total

7.599

 

7.599

Le financement de la couverture complémentaire de la couverture maladie universelle, créée par la loi du 27 juillet 1999, soulève des interrogations (chapitre 46-82). La dotation pour 2002 fait apparaître une économie de 450 millions de francs . Par ailleurs, l'arrêté d'annulation de crédits du 14 novembre 2001, repris en annexe du projet de loi de finances rectificative pour 2001, fait apparaître une économie de 521 millions de francs . On rappellera qu'un milliard de francs avait également fait l'objet d'une annulation en 2000.

La dotation budgétaire pour 2000 avait été fixée à 7 milliards de francs et celle pour 2001 à 6,6 milliards de francs en se fondant sur l'hypothèse de 6 millions de bénéficiaires.

Selon les informations transmises par le Gouvernement, le montant de 6,6 milliards de francs fixé par la loi de finances pour 2001 reposait sur une « connaissance limitée de la montée en charge du dispositif » (nombre de bénéficiaires, dépense individuelle), comme des conditions de sortie des anciens bénéficiaires de l'aide médicale.

« Cette dernière variable reste la plus difficile à déterminer. Selon la CNAMTS, environ 900 000 anciens bénéficiaires de l'aide médicale ont vu leurs droits s'interrompre au 30 juin 2001. Cependant, le bilan définitif de cette opération de fin de droits reste incertain : d'une part, de nombreux anciens bénéficiaires doivent faire réexaminer leurs droits au cours du deuxième semestre, d'autre part il est impossible d'apprécier avec exactitude le nombre de personnes qui ne se sont pas manifestées avant le 30 juin 2001 mais qui tenteront d'entrer à nouveau dans le dispositif d'ici la fin de l'année.

« Néanmoins, sur la base des premières données disponibles concernant le nombre de bénéficiaires et le montant moyen de la dépense individuelle, l'exécution de la loi de finances pour 2001 devrait dégager un léger reliquat de crédits non consommés. »

c) Les crédits demandés ne tiennent pas compte des insuffisances du dispositif

Selon les éléments transmis par le Gouvernement : « Le montant de la dotation de l'État au fonds CMU pour 2002 retenu dans le cadre du projet de loi de finances pour 2002 devrait être de 6,1 milliards de francs. La diminution de crédits s'explique notamment par les sorties de bénéficiaires, notamment les personnes dont les droits ont été prolongés jusqu'au 30 juin 2001 et qui sont sortis à cette date si leurs ressources étaient inférieures à une moyenne mensuelle de 4.000 francs pour une personne seule. »

Votre rapporteur considère que la situation prévue budgétairement pour 2002 ne tient pas compte de la réalité des besoins : le Gouvernement procède à l'affichage d'un abattement de 450 millions de francs pour tenir compte des sorties prévisibles parmi la population des 900.000 personnes qui bénéficiaient auparavant de l'aide médicale gratuite et ont été maintenues à titre temporaire dans le champ de la nouvelle CMU.

Il reste que les droits de ces personnes qui devaient expirer au 30 juin 2001 ont été finalement reconduits jusqu'à la fin de cette année par décision ministérielle. Les pressions seront fortes au cours de l'exercice 2002 pour que les personnes concernées soient à nouveau maintenues.

En effet, le seuil de 3.600 francs de revenu mensuel prévu pour la couverture complémentaire de la CMU ne permet toujours pas de couvrir la population des titulaires des minima sociaux. Les associations de handicapés et l'UNIOPSS regrettent particulièrement que les bénéficiaires de l'AAH ou du minimum vieillesse ne puissent pas avoir droit à la CMU, à 50 francs près .

Au demeurant, un certain nombre de personnes qui sont aujourd'hui écartées du dispositif bénéficiaient de l'ancienne aide médicale gratuite grâce aux initiatives prises dans de nombreux départements.

Toutefois, dans la mesure où la suppression de la compétence des départements en matière d'aide médicale gratuite a pour contrepartie des abattements effectués sur la dotation générale de décentralisation des départements qui sont calculés en tenant compte de l'ensemble des dépenses d'aide médicale auparavant financées par les collectivités locales, qu'il s'agisse de dépenses obligatoires ou de dépenses facultatives et en tenant compte d'un abattement forfaitaire de 5 %. Les départements ont donc déjà été amputés des crédits qu'ils auraient pu consacrer à l'amélioration du dispositif de la CMU, ceci même en tenant compte de l'abattement de 5 %.

Enfin, va se poser inéluctablement la question de l'adaptation du montant forfaitaire de 1.500 francs par affilié versé par le Fonds aux organismes complémentaires. Ce forfait apparaît manifestement sous-évalué .

En ce qui concerne les organismes de protection sociale complémentaire, le fonds CMU a effectué en 2000 près de 450 remboursements représentant environ 71 millions de francs. Du fait de l'augmentation du nombre d'adhésions et de contrats gérés par les organismes de protection sociale complémentaire, ce montant devrait augmenter fortement en 2002. Ainsi, pour 2002, la prévision de dépenses est de 7,492 millions de francs.

La consommation moyenne par bénéficiaire et par an, en 2000, est de l'ordre de 1.500 à 1.600 francs soit d'ores et déjà supérieure au seuil des 1.500 francs précités. Selon une étude de la Fédération nationale de la mutualité interprofessionnelle , le coût moyen de la prise en charge aurait atteint 1.845 francs en 2001.

Les crédits relatifs à la CMU sont donc frappés par une double incertitude : sur l'avenir des personnes bénéficiant d'un maintien des droits d'une part ; sur la pérennité du remboursement forfaitaire aux organismes complémentaires, d'autre part.

Dans ces conditions, votre commission ne peut que s'interroger sur la réalité des économies prévisionnelles affichées sur ce poste.

B. L'ÉMERGENCE DE NOUVEAUX BESOINS À SATISFAIRE EN MATIÈRE D'HÉBERGEMENT ET DE RÉINSERTION SOCIALE ET DE FORMATION DES TRAVAILLEURS SOCIAUX

1. Les difficultés rencontrées par les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS)

a) Un dispositif opérationnel

Destinés à l'accueil, au soutien ou à l'accompagnement social, à l'adaptation à la vie active et à la réinsertion de personnes ou de familles en détresse, les CHRS relèvent de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales. Comme le confirme la loi du 22 juillet 1983 portant répartition des compétences, les CHRS relèvent du financement et du contrôle de l'Etat, au titre de l'aide sociale obligatoire (chapitre 46-81 du budget solidarité).

L'aide sociale en matière de logement et d'hébergement incombant à l'Etat résulte de la loi du 23 novembre 1953 et qu'elle a été élargie à l'accueil des familles par la loi du 19 novembre 1974.

La capacité des 735 CHRS, qui emploient environ 9.500 personnes, peut être évaluée doublement : les places financées par les crédits d'aide sociale obligatoire de l'Etat s'élevaient au 1 er janvier 2000 au nombre de 29.968 . Au 1 er janvier 2000, le coût moyen annuel par place représentait 85.524 francs.

Mais, si l'on examine l'ensemble des places installées, y compris celles financées par exemple par certaines collectivités locales, le nombre total est évalué à 31.000. A cela, il convient d'ajouter la possibilité pour les CHRS de suivre près de 3.000 personnes en milieu de vie ordinaire sans les héberger.

Au total, les CHRS ont donc une possibilité d'accueil de plus de 30.000 personnes qui peut être évidemment augmentée temporairement en cas de situation très difficile.
Le programme de prévention et de lutte contre les exclusions annoncées le 4 mars 1998 prévoyait l'objectif de transformation de 1.500 places d'hébergement d'urgence en places de CHRS sur trois ans (1998-1999-2000), afin de permettre aux personnes hébergées d'entrer dans un véritable processus d'insertion.
La dotation aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale représentera 2,73 milliards de francs en 2002. Le Gouvernement a prévu une mesure nouvelle de 42 millions de francs permettant la création de 500 places nouvelles, à laquelle sont ajoutés 10 millions de francs pour la réalisation de 30 places pour les mineurs étrangers.
En revanche, il est observé une diminution des subventions d'investissement en matière de rénovation : les crédits de paiement passent de 30 millions de francs à 12,4 millions de francs en 2002. Ces subventions d'investissement sont destinées également aux opérations sur les centres d'accueil de jour.
b) Les insuffisance du décret du 3 juillet 2001

Près de trois ans après la publication de la loi d'orientation du 25 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, le décret d'application n° 2001-576 du 3 juillet 2001 a enfin été publié. Ce décret qui était très attendu dans le secteur marque des progrès en matière de reconnaissance du rôle des gestionnaires et de légalisation des modes de rémunération des personnes hébergées.

Le décret précise :

- les conditions de mise en oeuvre des activités, de leur organisation et de leur budgétisation, notamment celles relatives à l'adaptation à la vie active et celles relevant de l'insertion par l'activité économique ;

- les procédures assouplies et différenciées d'admission à l'aide sociale ;

- les conditions de participation des personnes accueillies à leurs frais d'hébergement et d'entretien et les modalités de rémunération des personnes qui prennent part aux actions d'adaptation à la vie active.

Il détermine, en outre, les dispositions financières applicables aux CHRS selon les activités qu'ils mettent en oeuvre :

- les actions prévues par l'habilitation ou par la convention d'aide sociale sont retracées au sein d'un budget principal financé en tout ou partie par l'aide sociale de l'Etat ;

- les actions pour lesquelles la convention le prévoit expressément et les activités de production et de commercialisation liées aux actions d'adaptation à la vie active font l'objet d'un budget annexe financé en tout ou partie par l'aide sociale de l'Etat ;

- les actions relatives à l'insertion par l'activité économique et les actions que l'organisme gestionnaire met en oeuvre dans un cadre autre que celui du CHRS font l'objet d'un ou plusieurs budgets spécifiques non financés par l'aide sociale de l'Etat.

Interrogé sur les conséquences budgétaires, le Gouvernement a précisé que l'instauration d'un délai de transition « permettant la stabilisation progressive des charges et produits imputables retracés au sein de chacune des catégories de budgets (principal, annexes, spécifiques) évitera un impact qui, à défaut, aurait pu se révéler difficile à gérer pour certains CHRS, notamment pour ceux qui fonctionnaient sur des bases minimales. Aucune incidence directe n'est en revanche attendue sur le niveau des moyens financiers existants au titre de l'aide sociale de l'Etat. Ceux-ci devraient connaître leur propre logique d'évolution, en lien en particulier avec la démarche de renforcement progressif des capacités mise en oeuvre dans le cadre du programme de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. »

Il reste que les associations gestionnaires concernées regrettent certaines positions du décret parfois en retrait par rapport à l'esprit de la loi du 29 juillet 1998 précité.

Elles considèrent que la logique du projet de loi qui créait un statut du CHRS, indépendant de l'activité d'hébergement et la diversité des activités possibles n'est pas affirmée assez clairement ; la possibilité de faire de l'insertion par l'activité économique, certes confirmée, apparaît concrètement « fortement limitée » par des modalités budgétaires très restrictives ; en outre, la pratique de la sous-location en CHRS n'est pas mentionnée alors que c'est « une pratique positive et largement développée » ; enfin, la veille sociale, la coordination territoriale et le rôle des réseaux associatifs sont « quasiment absents ».

c) Le problème récurrent de l'accueil des familles

L'article 135 de la loi du 29 juillet 1998 susvisée a posé le principe du droit à la vie familiale normale des personnes accueillies en centres d'hébergement, ce qui génère des dépenses supplémentaires, soit sous forme de travaux d'aménagements d'appartements à la place des actuels dortoirs collectifs, soit sous forme d'aide provisoire à l'hébergement en solution hôtelière.

La mise en oeuvre de l'accueil familial, qui est une excellente mesure, nécessiterait sans doute un effort plus soutenu en matière d'investissement sur les CHRS.

Un tel engagement est en fait de nature à générer des économies car la dislocation des familles et les conséquences négatives, entraînent des coûts sociaux d'autant plus élevés que l'éloignement des parents et des enfants rend souvent plus difficile psychologiquement et socialement le processus de réinsertion .

A cet égard, la baisse des crédits d'investissement amorcée en 2001 et confirmée en 2002 montre que le Gouvernement n'a pas décidé de tirer toutes les conséquences de l'article 135 de la loi du 29 juillet 1998 relatif à l'accueil des familles .

d) L'explosion des besoins liés à la présence de personnes de nationalité étrangère en situation précaire

La Fédération nationale des associations d'accueil et de réadaptation sociale (FNARS) souligne la présence, en nombre important dans les CHRS, de personnes de nationalité étrangère en situation irrégulière ou ayant présenté une demande pour bénéficier du statut de l'asile politique.

Ces étrangers « en situation précaire » sont des personnes soit en situation irrégulière, soit ayant des titres inférieurs à trois mois soit des demandeurs d'asile (asile territorial ou statut de réfugié) ou ayant été déboutés et ayant déposé un recours.

Le nombre de ces personnes accueillies dans le réseau semble augmenter fortement depuis deux ans : estimées à environ 1 % des hébergés en CHRS (hors urgence) en 1998, elles représenteraient aujourd'hui plus du tiers des hébergés dans certains départements . Dans les CHRS d'urgence ou les foyers et accueils d'urgence n'ayant pas le statut de CHRS, elles sont encore plus nombreuses.

Ces personnes ont besoin d'être hébergées et sont en général sans ressources, n'ayant droit ni aux prestations familiales, ni aux aides au logement.

La difficulté pour les CHRS tient au fait que nombre de ces personnes ne sont pas réglementairement autorisées à travailler dans notre pays. Se pose la question de savoir au demeurant, si un étranger en situation irrégulière peut participer aux travaux d'entretien, aux actions de réadaptation à la vie active organisées par les CHRS ou travailler dans un atelier relevant de leur responsabilité. C'est pourquoi les CHRS ne peuvent, à l'égard de ces populations, jouer le rôle de réinsertion qui est fondamentalement le leur .

Cet afflux, sur lequel de nombreux observateurs avaient appelé l'attention l'année dernière aboutit en fait à « engorger » le dispositif d'accueil d'urgence au risque d'aboutir, dans certains cas, à une « saturation », alors que les besoins d'hébergement vont se faire ressentir au cours de l'hiver, comme chaque année.

Le Gouvernement procède donc à la mise en place de 255 millions de francs pour financer 1.500 places nouvelles en centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) et 2.400 places d'hébergement d'urgence pour « demandeurs d'asiles ».

Toutefois l'attention de votre rapporteur a été appelée sur le fait qu'il n'y aura pas de « transfert » des populations concernées, depuis les CHRS où ils sont éventuellement hébergés jusqu'aux CADA, pour des raisons tenant à un manque de mobilité ou pour des motifs juridiques.

Le réseau des CHRS devra donc continuer à gérer le flux des réfugiés déjà accueillis , sans moyens supplémentaires par rapport aux années précédentes, tandis que s'installe un réseau parallèle, de plus en plus développé, orienté vers l'accueil des réfugiés.

On observera par ailleurs que l'aide médicale de l'Etat destinée à la CMU des personnes de nationalité étrangère est fixée à 400 millions de francs pour 2002, soit une hausse de 14 % par rapport à l'année dernière : Les dossiers se sont accumulés et les retards se sont multipliés en 2001. Là encore, apparaît un poste de dépense qui n'apparaît nullement maîtrisé .

2. Des engagements pour les établissements de formation des travailleurs sociaux (EFTS) dont le coût sera lisible à partir de 2003

Bien qu'ils soient intégrés à l'action « développement social » dans le bleu budgétaire, les crédits de la formation des travailleurs sociaux participe évidemment de la lutte contre l'exclusion : l'intervention des travailleurs sociaux est parfois déterminante pour éviter à des personnes en difficulté de basculer dans l'exclusion.

Sur les 304 établissements de formation de travailleurs sociaux (EFTS) préparant à l'ensemble des certificats et diplômes d'Etat de niveau V à II, près de 130 seulement préparent aux formations dites « initiales » (assistant de service social, éducateur spécialisé, éducateur de jeunes enfants, éducateur technique spécialisé, conseiller en économie sociale et familiale, moniteur éducateur) ; parmi ceux-ci, 31 ont un statut de droit public sous forme d'établissements publics, soit 23,8 %. Les autres centres ont un statut privé d'association régie par la loi de 1901 ou de 1908. 95 établissements sont subventionnés directement au titre des formations initiales par le ministère.

Les 31 établissements publics recouvrent des lycées publics (20), des instituts universitaires technologiques (3), des universités (1), des hôpitaux (4) ainsi que des services ou établissements publics rattachés à des conseils généraux ou à l'Etat (3).

On comptait, au 1 er janvier 1998, 805.788 travailleurs sociaux ayant un statut reconnu comme tel dont : 230.000 professionnels de l'aide, 125.000 professionnels de l'éducation, 37.000 professionnels de l'animation et 380.000 titulaires d'un agrément d'assistante maternelle.

L'essor des professions sociales -bien que contrasté- est spectaculaire sur les trente dernières années. L'évolution des professions éducatives et des assistants de service social est, à cet égard, particulièrement significative puisque leur nombre a quasiment doublé dans les années 70 et 80. La dernière décennie est, quant à elle, marquée par une très vive croissance du nombre d'aides ménagères (87.000 en 1989, environ 177.000 en 1999) et d'assistantes maternelles (130.000 à la fin des années 80, 306.000 dix ans plus tard), pour une grande part en raison des dispositifs fiscaux favorisant leur emploi par les particuliers 6( * ) .

Nombre de diplômes de travailleurs sociaux délivrés en 1999

 

Nombre

Evolution 99/98

Assistant de service social

1.729

- 0,22 %

Conseiller en économie sociale familiale

762

17,9 %

Éducateur spécialisé

2.443

1,4 %

Éducateur de jeunes enfants

1.030

12,9 %

Éducateur technique spécialisé

328

21,0 %

Moniteur éducateur

1.698

1,9 %

Aide médico-psychologique

2.566

12,7 %

TISF (1)

173

19,3 %

Aide à domicile (CAFAD)

2.244

- 16,2 %

Total

12.973

1,8 %

Source : ministère de l'Emploi et de la Solidarité.

(1) Technicien de l'intervention sociale familiale.

a) Le retard pris dans la mise en oeuvre des mesures prévues par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions
•  L'article 151 de la loi du 29 juillet 1998 clarifie et consolide les fondements juridiques, administratifs et financiers des centres de formation et améliore la reconnaissance des droits des étudiants.
Cinq orientations ont été définies pour mettre en oeuvre la loi contre les exclusions :

- L'élaboration des schémas des formations sociales au niveau national et régional ;

- La détermination d'un contrat-type pluriannuel entre l'Etat et les organismes responsables d'établissements de formation.

Un décret doit porter sur le contrat-type, les formateurs exerçant dans les établissements sous contrat et la détermination de l'aide financière de l'Etat.

Cette aide prendra deux formes :

. une subvention qui couvre les dépenses liées aux charges de personnels formateurs en fonction du nombre de formateurs nécessaires au regard des effectifs d'étudiants ;

. un forfait national annuel par étudiant pour financer les charges administratives et pédagogiques.

- L'accompagnement de la déconcentration des agréments des organismes responsables d'établissements de formation : pour mettre fin à la multiplicité des textes relatifs aux agréments des établissements (plus de 50 textes réglementaires), un projet de décret devrait établir des conditions plus homogènes pour le début 2000.

- La fixation d'une liste d'aptitude nationale des directeurs et formateurs , se substituant aux agréments jusqu'alors individuels. Un projet de décret, s'appuyant sur un travail mené en étroite collaboration avec le secteur professionnel prévu d'ici la fin 1999, devrait permettre tant une simplification administrative qu'une plus grande mobilité professionnelle.

- L'amélioration de la situation financière des étudiants en travail social par l'attribution d'aides sous forme de bourse d'Etat.

Par ailleurs, le programme de prévention et de lutte contre les exclusions prévoit diverses réformes de la formation des travailleuses familiales, des conseillers en économie sociale et familiale, des assistants de service social et de la formation préparant au certificat d'aptitude aux fonctions de directeur d'établissement social (CAFDES).

Votre rapporteur constate que la réforme ne se met en place que lentement .

Concernant le schéma national et régional des formations sociales, il aura fallu attendre près de trois ans après le vote de la loi contre les exclusions pour que celui-ci soit publié le schéma par arrêté du 28 mai 2001.

En revanche, les établissements sont toujours en situation d'attente sur le projet de décret relatif au contrat-type pluriannuel de financement : un premier projet de décret avait donné lieu à quatre réunions d'un groupe de travail entre décembre 1998 et mai 1999. Toutefois, ce texte avait été remanié après examen par le Conseil d'Etat à la fin de mai 2000. Le Gouvernement envisage que le décret soit signé d'ici la fin de l'année 2001.
b) Les crédits de fonctionnement des EFTS pour 2002 ne reflètent pas l'ensemble des dépenses à venir

Les crédits proposés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2002 (chapitre 43-33, art. 20) s'élèvent à 707 millions de francs (+ 12 %) et intègrent une mesure nouvelle de 76 millions de francs, pour les formations initiales, concernant :

- une mesure nouvelle d'ajustement à hauteur de 36,5 millions de francs pour couvrir l'évolution de la masse salariale des centres en 2001, dont le financement de la mise en oeuvre de l'avenant 265 de la convention collective nationale du 15 mars 1966 qui revalorise la rémunération des cadres du secteur.

- une mesure nouvelle d'ajustement de 11,54 millions de francs destinée à la montée en charge du financement des places ouvertes lors des rentrées scolaires antérieures ;

- des moyens nouveaux à hauteur de 28 millions de francs destinés à lancer à la rentrée scolaire 2002 un plan pluriannuel de formation de travailleurs sociaux pour répondre aux besoins de recrutements liés, d'une part à l'évolution défavorable de la démographie des personnels sociaux , mesurée dans le cadre du schéma national des formations, d'autre part à l'accompagnement des nouveaux besoins résultant du nouveau programme national de prévention et de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, de la mise en oeuvre de l'allocation personnalisée à l'autonomie et du plan triennal en faveur des personnes handicapées ou les politiques de la famille.

Le Gouvernement met donc en place, avec un certain retard, le programme de lutte contre les exclusions qui prévoyait une forte augmentation du nombre d'étudiants en travail social. Il a fallu attendre ce projet de budget pour 2002 pour constater une première traduction budgétaire du schéma national des formations sociales annoncé depuis juillet 1998.

Une mesure nouvelle de 28 millions de francs est prévue afin d'accueillir, à la rentrée 2002, 3.000 étudiants supplémentaires en plus des 22.000 qui sont formés aujourd'hui.

Encore, faut-il noter que la mesure votée engage surtout les prochains budgets : en effet, les crédits ont été ajustés pour ne couvrir qu'un trimestre de formation en 2002. Pour 2003 et 2004, ce seront trois fois plus de crédits qui seront nécessaires.

Les écoles de formation seront donc toujours placées dans l'incertitude budgétaire alors même que le décret d'application de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, qui devait jeter les bases d'un contrat pluriannuel de financement, n'est toujours pas paru.

3. Les évolutions préoccupantes de certains crédits

a) Les rapatriés : des crédits en baisse et des dossiers toujours en souffrance

S'agissant des rapatriés, les crédits inscrits au budget du ministère de l'Emploi et de la Solidarité, soit 100 millions de francs, ne représentent qu'une fraction des crédits inscrits sur les budgets de différents ministères qui s'élèvent au total à 1,1 milliard de francs dans le présent budget.

Crédits relatifs aux rapatriés dans le projet de loi de finances pour 2002

(en millions de francs)

 

LFI 2001

PLF 2002

Economie, Finances et Industrie

 
 

I - (Charges communes)

199,00

139,00

II - Services financiers

24,00

24,00

III - Industrie

151,38

143,00

Emploi solidarité et ville

 
 

II - Santé solidarité, ville

96,00

97,00

Anciens combattants

56,20

33,85

Affaires étrangères et coopération

 
 

Equipement, transports et logement

653,00

623 ,00

Agriculture et pêche

97,50

95,97

Total

1.295,00

1.156,00

La diminution des crédits de solidarité

Les crédits relatifs aux rapatriés enregistrent une diminution de 11 % en 2002 pour des raisons largement mécaniques.

D'une part, le dispositif d'indemnisation des rapatriés, relancé par la loi du 16 juillet 1987 et financé sur le budget des charges communes, arrive maintenant à son terme ; d'autre part, le dispositif de contribution de l'Etat pour la garantie des retraites afférentes à certaines périodes d'activité des rapatriés dans le pays où ils ont résidé, connaît dorénavant une diminution du nombre de bénéficiaires pour des raisons démographiques.

La question de la réparation de l'injustice causée par l'article 46 de la loi du 15 juillet 1970 n'est toujours pas réglée

Les associations de rapatriés font valoir le caractère injuste de la situation faite aux rapatriés réinstallés qui ont bénéficié d'une indemnisation de leurs biens au titre de l'article 46 de la loi du 15 juillet 1970. En effet, leur indemnisation a été réduite, avant paiement des annuités, par le remboursement d'office des prêts de réinstallation qu'ils avaient dû contracter à leur arrivée en métropole.

Or, diverses mesures sont intervenues par la suite afin d'autoriser la liquidation des dettes non remboursées en faveur de certaines catégories de rapatriés.

Ainsi, la loi du 30 décembre 1986 a-t-elle prévu l'effacement des dettes (capital et intérêts) des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, non propriétaires de biens en outre-mer.

Par ailleurs, la loi du 16 juillet 1987 a permis aux rapatriés réinstallés, propriétaires de biens en outre-mer, de bénéficier également d'une indemnisation complète sans déduction des prêts de réinstallation.

Le 27 octobre 1998, Mme Martine Aubry avait précisé à l'Assemblée nationale que « le Gouvernement était très sensible à cette question et à cette iniquité et qu'il travaillait à la révision de l'article 46 de la loi du 15 juillet 1970 ».

A la demande de votre rapporteur, le ministère a précisé que le coût de la restitution des prélèvements opérés sur les indemnisations versées en application de la première loi d'indemnisation (1970) et de la deuxième loi d'indemnisation (1978), au titre du remboursement anticipé des prêts de réinstallation accordés dans les années 1960 aux rapatriés reprenant en métropole une activité non salariée, s'établit à 1,8 milliard de francs pour une application à la totalité des personnes concernées.

Il lui a donc été répondu qu'« en raison du montant de la dépense et de l'ordre des priorités, cette dépense n'a pas été inscrite au PLF 2002. »
L'ajournement de la réparation due aux agents publics écartés de leur emploi au cours de la guerre d'Algérie
L'article premier de la loi n° 82-1021 du 3 décembre 1982 relative au règlement de certaines situations résultant des événements d'Afrique du Nord, de la guerre d'Indochine, ou de la seconde guerre mondiale, prévoit la possibilité de prise en compte des annuités correspondant à la période comprise entre la radiation des cadres et la limite d'âge du grade ou de l'emploi occupé, pour les fonctionnaires civils et militaires, ainsi que les magistrats, radiés des cadres en raison des événements de la guerre d'Algérie. Cette mesure a également été appliquée à des cas de démission et de congé spécial pour des motifs politiques.

Cette même loi a également prévu divers dispositifs de reconstitution de carrière pour les agents publics éloignés de leur emploi ou sanctionnés à cette époque pour des motifs du même ordre.

Toutefois, le dispositif ne concernait que les fonctionnaires, magistrats, militaires et non les personnes du secteur privé, générant ainsi une différence de situation. Une commission administrative paritaire avait conclu au versement d'un forfait pour les années qui n'étaient prises en compte par aucun organisme de retraite. Cette mesure concernerait 65 personnes pour un montant de 6 millions de francs.

En dépit de diverses annonces, il semble que des arbitrages intervenus tardivement aient conduit à différer l'inscription des crédits nécessaires.
b) La nouvelle hausse des crédits consacrés à la tutelle et à la curatelle d'Etat

En France, le nombre total de majeurs protégés et de près de 500.000 personnes, soit environ 1 % de la population des plus de 18 ans.

On doit rappeler qu'une personne majeure est placée sous régime de tutelle quand elle a besoin d'être représentée d'une manière continue dans les actes de la vie civile. Elle est alors déchargée de l'exercice de ses droits et ne peut plus passer aucun acte seule.

Une personne majeure qui, sans être hors d'état d'agir elle-même, a besoin d'être conseillée ou contrôlée dans les actes de la vie civile peut être placée sous un régime de curatelle . Les actes qu'elle peut accomplir seule sont les actes d'administration, c'est-à-dire les actes de gestion courante tels que la perception des revenus ou le paiement des dépenses. En revanche, elle ne pourra pas effectuer les actes qui engagent le patrimoine, sans l'assistance du curateur. La curatelle laisse aux intéressés la jouissance de certains droits, en particulier le droit de vote, ce qui explique que cette formule tend à se développer par rapport aux tutelles.

Aux termes de la loi n° 68-5 du 3 janvier 1968 portant réforme du droit des incapables majeurs , deux systèmes de tutelle coexistent en droit :

- la tutelle familiale qui fait reposer la charge tutélaire sur la famille, parents, enfants, collatéraux ;

- la tutelle publique qui consiste à confier à un organisme public ou privé la charge de la tutelle, sous le contrôle de l'Etat. La tutelle d'Etat, la curatelle d'Etat ou la tutelle en gérance appartiennent à cette catégorie.

En principe, la tutelle publique ne doit intervenir que subsidiairement à la tutelle familiale : ainsi, l'article 433 du code civil prévoit que : « Si la tutelle reste vacante, le juge des tutelles la défère à l'Etat s'il s'agit d'un majeur (...) ». Les conditions du transfert à l'Etat de la tutelle sont ainsi, en principe, très strictes puisque le « vide » de la famille restreinte et de la famille étendue doit être constaté (majeurs protégés n'ayant plus de famille ou membres de la famille demandant à être dispensés des charges tutélaires en raison d'un des motifs énumérés à l'article 428 du code civil : âge, maladie, éloignement, occupations professionnelles ou familiales exceptionnellement absorbantes,...).

En réalité, on constate depuis une dizaine d'années une tendance de certains juges des tutelles à écarter la famille même dans des cas où les membres de celle-ci ne font pas preuve d'indifférence à l'égard de la protection de la personne protégée.

La Cour de cassation a ainsi été conduite à censurer certaines décisions de justice qui n'avaient pas tenu compte de la volonté de la famille d'assurer la charge de la tutelle ni constaté l'impossibilité de réunir un conseil de famille.

S'agissant de l'organisation et du financement de la tutelle d'Etat, le décret n° 85-193 du 7 février 1985 a instauré un système de rémunération du tuteur ou du curateur d'Etat, reposant à titre principal sur les ressources du majeur protégé, complétée sous certaines conditions par une rémunération financée par le budget de l'Etat.

Le projet de loi de finances pour 2002 se caractérise par une reprise à la hausse des dépenses de tutelle et de curatelle.

Les renseignements, encore non définitifs, communiqués par les préfets sur le nombre de mesures de tutelle ou de curatelle d'Etat en cours de prise en charge au 31 décembre 2000 font apparaître une augmentation de 12.584 mesures par rapport au nombre de mesures enregistrées au 31 décembre 1999. Cette augmentation qui, après vérifications et corrections, dépassera vraisemblablement le niveau précité, est comparable à celle qui avait été observée en 1999 par rapport à 1998 (11.282 mesures supplémentaires).

Pour l'établissement du budget, l'estimation de l'évolution du nombre de mesures au 31 décembre 2002 est fondée sur une prévision d'augmentation de 13 % en 2001 et en 2002.


Tutelle & Curatelle d'Etat

2001

2002

Nombre de mesures au 31 décembre (estimations)

141.860

160.300

Augmentation du nombre de mesures

16.320

18.441

Crédits inscrits

680 MF

800,2 MF

Il est prévu, au projet de loi de finances initiale pour 2002, une ouverture de crédits de 800,2 millions de francs , soit 120,2 millions de francs supplémentaires par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2001.

Votre rapporteur regrette la lenteur avec laquelle il est envisagé d'améliorer le dispositif

Il lui a été indiqué que « la réforme du dispositif de protection juridique des majeurs constitue une des préoccupations du Gouvernement ». Une suite va donc être donnée aux propositions du groupe interministériel présidé par M. Favard. La mise en oeuvre de nombre d'entre elles relève du ministère de la justice.

En revanche, deux mesures essentielles seraient de la compétence du ministère de l'emploi et de la solidarité.

Il s'agirait, d'une part, d'instituer, en amont de l'entrée dans le dispositif de protection judiciaire, une procédure d'évaluation médico-sociale des situations individuelles afin d'apprécier la nécessité de recourir à une mesure restrictive de liberté ou bien de proposer un accompagnement social personnalisé renforcé et, d'autre part, d'expérimenter un nouveau mode de financement des mesures de protection, sous forme de dotation globale. Les principaux organismes concernés seront associés à ces travaux.

Il est indiqué que, pour ce faire, « des groupes de travail vont être mis en place, en ce qui concerne l'évaluation médico-sociale, d'ici la fin de l'année et, pour le volet financier, dans le courant de l'année prochaine ».

Le poste « tutelle et curatelle » devrait donc continuer d'enregistrer des dérives en 2003.

II. LA POLITIQUE EN FAVEUR DES HANDICAPÉS

Il est nécessaire de rappeler les caractéristiques de la population handicapée avant de faire le point sur la réalisation du programme triennal (2001-2003) ainsi que les principaux aspects des divers dispositifs mis en place en faveur des personnes handicapées.

Enfin, la politique en faveur des handicapés appellera diverses observations de la part de votre commission.

A. L'IMPORTANCE DE LA POPULATION HANDICAPÉE

Au moins trois millions de personnes sont confrontées au handicap dans la société française ce qui soulève, d'une manière générale, la question de la prévention du handicap.

1. Une population nombreuse

L'estimation de la population des personnes handicapées est un exercice difficile car les chiffres disponibles varient en fonction de l'appréciation subjective de la notion de handicap ou du choix des critères objectifs retenus.

L'enquête décennale relative à la santé conduite par l'INSEE en 1991 fait ressortir qu'en France, 5,5 millions de personnes déclarent un handicap ou une gêne dans la vie quotidienne. Toutefois, sur la base d'une définition plus stricte ne retenant que les personnes se déclarant handicapées, une enquête sur échantillon réalisée en 1987 a fait ressortir le chiffre de 3,2 millions de personnes , soit environ 6 % de la population.

Une autre approche consiste à prendre en compte l'ensemble des bénéficiaires des prestations prévues en faveur des handicapés. Ainsi, la population des personnes handicapées dont l'incapacité génère un handicap sévère restreignant significativement leur autonomie et affectant durablement ou définitivement leur vie scolaire, sociale et professionnelle, est évaluée à 1,814 million de personnes en 1991, soit 3,4 % de la population.

Cette statistique est obtenue à partir de l'addition du nombre des bénéficiaires de l'abattement spécial pour le calcul de l'impôt sur le revenu (1,6 million de personnes), des titulaires de l'AAH présentant donc un taux d'invalidité supérieur à 50 % (139.000 personnes), des enfants handicapés accueillis en établissements ou services d'éducation spéciale (40.000 enfants estimés) et d'une fraction des titulaires d'une pension d'invalidité importante de la sécurité sociale (55.000 personnes).

Les origines du handicap sont diverses. Par ordre décroissant, les quatre principales causes d'un handicap sont : la maladie, la vieillesse, l'accident et la naissance.

Les origines des handicaps, gênes ou difficultés
chez les 18 ans et plus

Origine

Pourcentage

Naissance

10,2

Maladie

38,3

Accident

12,2

Vieillesse

28,2

Autre

11,1

Source enquête santé 1991

Ces données devraient prochainement connaître une actualisation : le Centre Technique national d'Etudes et de Recherches sur le Handicap et les Inadaptations (CTNERHI) procède à une enquête statistique et prospective sur le thème « Handicap et démographie ». En cours de réalisation, elle devrait élaborer un outil de connaissances quantitatives et prospectives du handicap, mobilisant les informations disponibles sur ce sujet et permettant d'anticiper, pour décider des priorités dans la politique en faveur des personnes handicapées.

Par ailleurs, le Conseil national de l'Information statistique (CNIS) dans le cadre d'un groupe spécifique de réflexion « handicap et dépendance » a préconisé en 1997 le lancement, au cours des trois prochaines années, d'une grande enquête, sous l'égide de l'INSEE qui serait centrée sur les incapacités et les dépendances à partir de l'observation, non plus des déficiences, mais des situations réelles et de leurs évolutions.

L'enquête « Handicap-Incapacité-Dépendance » est en cours de réalisation sur la période 1998-2001 par l'INSEE auprès de 15.000 personnes. Ces mêmes personnes seront à nouveau interrogées à la fin de l'année 2000.

Cette enquête permettra d'estimer le nombre de personnes affectées par des incapacités physiques ou mentales selon les grilles habituellement utilisées telles que la grille AGGIR. Elle permettra enfin de mieux appréhender le nombre de personnes handicapées qui vivent à domicile. Elle apportera en outre des informations sur l'entourage ou l'isolement des personnes, sur les aides formelles et informelles dont elles bénéficient, mais aussi sur la formation, l'emploi, les revenus et le logement des personnes handicapées.

La mise à disposition d'informations statistiques plus précises sur cette question serait en effet utile, en particulier pour les départements concernés par cette question cruciale .

Les commissions départementales de l'éducation spéciale (CDES) et les COTOREP représentent en effet aujourd'hui des « mines » d'information potentielles encore mal exploitées en raison de difficultés de fonctionnement récurrentes. Le passage d'une informatisation de gestion à un système d'information sur le handicap devrait permettre selon le Gouvernement de mieux connaître la population handicapée. L'effort engagé par l'Etat doit être particulièrement soutenu.

A l'évidence, l'ensemble de ces données statistiques montre l'importance de la population handicapée en France, qui justifie pleinement une politique globale mobilisant des moyens substantiels. Elle révèle également l'utilité de la prévention des accidents quelle que soit leur origine.

2. La prévention du handicap revêt une dimension essentielle

Les accidents de la circulation et de la vie domestique, de sports ou de loisirs sont impliqués dans 6,8 % des handicapés ou gênes (soit 370.000 des 5,5 millions de personnes souffrant de handicaps ou gênes vivant à domicile) et environ 11 % des handicaps au sens strict du terme (soit environ 380.000 des 3,5 millions de personnes handicapées gravement vivant à domicile ou en institution).

Les accidents dans les origines du handicap

 

INSEE 1

CTNERHI

CTNERHI

 
 

Saône-et-Loire 2

Paris 3

 

1991

1990

1994

1995

Tous accidents dont :

11,8 %

17,5 %

21,6 %

21,5 %

travail (trajet exclu)

5,0 %

-

7,4 %

 

travail (trajet inclus)

 

-

9,7 %

 

circulation

3,9 %

-

6,5 %

8,0 %

sport ou loisirs

1,0 %

-

2,0 %

4,6 %

vie domestique

1,9 %

-

0,8 %

0,9 %

 
 

-

 
 

Autres

-

-

1,5 %

4,2 %

Non réponse

 
 

3,4 %

2,7 %

Total accidents hors travail

6,8 %

-

10,8 %

10,8 %

Sources :

1) Enquête réalisée par l'INSEE en 1991 auprès d'un échantillon de 8.235 ménages, soit 21.597 individus représentatifs de la population nationale des ménages ordinaires. (Définition large du handicap : handicap ou quelques gênes dans la vie quotidienne).

2) Enquête du CTNERHI précité.

3) Enquête du CTNERHI et de la DASES précités.


La politique de prévention peut jouer un rôle essentiel pour sauver des vies et préserver des existences.

Les réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur sont éclairantes à cet égard : la consommation médicale annuelle des personnes victimes d'un handicap dû à un accident (hors accidents du travail) s'élève à 10,4 milliards de francs. Le CTNERHI évalue à 5,5 % le pourcentage des déficiences dues aux accidents de la route : selon la sécurité routière, le coût des accidents corporels est estimé en 1996 à 58 milliards de francs.

Coût de l'insécurité routière en 1996

Accidents corporels

Tués

Blessés graves

Blessés légers

Total coûts unitaires 1990 (1)

3.258.400

338.700

72.400

Actualisation en 1996 (1)

3.834.000

394.840

83.940

Population concernée en 1996

8.541

35.743

133.913

(1) (en millions de francs).

Source : Revue de la sécurité routière.

Il est nécessaire d'insister également sur le nombre important des accidents de sport chez les jeunes de 10 à 24 ans.

Une enquête réalisée en 1999 pour le compte de la cellule nationale d'observation des accidents de la vie courante (COAC) et du comité français d'éducation pour la santé (CFES) permet d'estimer à 382.000 le nombre annuel d'accidents de sport chez les jeunes de 10 à 24 ans. Sur ce nombre, 50.000 ont nécessité une hospitalisation d'une durée moyenne de 7 jours.

B. LE PROGRAMME TRIENNAL (2001-2003) DU GOUVERNEMENT ET L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES

1. Le programme triennal 2001-2003

Lors de la réunion du Conseil national des personnes handicapées (CNCPH) du 25 janvier dernier, le Premier ministre a présenté un plan triennal (2001-2003) en faveur des enfants, adolescents et adultes handicapés, assorti d'un financement de 1,52 milliard de francs. Ce plan amplifie le programme quinquennal (1999-2003) de créations de places pour adultes lourdement handicapés et porte l'effort de l'Etat en faveur des personnes handicapées à 2,52 milliards de francs sur la période.

Le plan triennal 2001-2003 en faveur des enfants, adolescents handicapés

Pour un financement total de l'Etat et de l'assurance maladie de 1,5 milliard de francs sur trois ans, le plan triennal annoncé par le Premier ministre devant le CNCPH le 25 janvier 2000 comporte trois catégories de mesures.

Favoriser le maintien ou le retour des personnes handicapées en milieu ordinaire

S'agissant des enfants et des adolescents, une enveloppe de crédits d'assurance maladie d'un montant de 300 millions de francs sur la période considérée permettra de développer les services médico-sociaux de prise en charge précoce, d'accompagnement des familles et d'appui à l'intégration scolaire : augmentation des capacités d'accueil des centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP) et des services de soins et d'éducation spéciale à domicile (SESSAD).

170 millions de francs sur 3 ans, inscrits au budget du ministère de l'éducation nationale, sont destinés à renforcer le parc de matériels pédagogiques et techniques adaptés . Ces crédits seront affectés en fonction d'une évaluation des besoins des élèves handicapés intégrés réalisée par les inspections académiques et les rectorats.

En ce qui concerne les adultes, la mobilisation de 185 millions de francs sur la période, affectés au budget du ministère de l'emploi et de la solidarité, permettra de généraliser les sites pour la vie autonome .

Les services d'auxiliaires de vie seront développés afin de couvrir des besoins non encore satisfaits : 200 millions de francs sont prévus sur 3 ans, au budget du ministère de l'emploi et de la solidarité, pour permettre à l'Etat de contribuer au financement de 3 000 emplois supplémentaires d'auxiliaires de vie (en équivalent temps plein).

Enfin, les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) seront plus largement ouverts aux personnes handicapées grâce à une modification réglementaire (décret en préparation) : 45 millions de francs de mesures nouvelles sur 3 ans sur les crédits d'assurance maladie seront consacrés à cet effet.

Pour permettre la modernisation et le renforcement des commissions départementales de l'éducation spéciale (CDES) et des commissions d'orientation technique et de reclassement professionnel (COTOREP), 45 millions de francs seront affectés au budget du ministère de l'emploi et de la solidarité.

Enfin, une enveloppe de crédits d'Etat d'un montant de 10 millions de francs sur 3 ans est destinée à favoriser l'interprétariat en langue des signes française (LSF) ou en langage parlé complété (LPC).

Amplifier les efforts de création de places en établissements ou services médico-sociaux pour la période 2001-2003

45 millions de francs de crédits d'assurance maladie seront consacrés sur la période à la prise en charge institutionnelle des personnes handicapées vieillissantes.

S'agissant des enfants handicapés, 120 millions de francs de crédits d'assurance maladie sont destinés à répondre à l'insuffisance, dans certains départements, de places dans les établissements médico-sociaux pour les enfants et adolescents les plus lourdement handicapés (polyhandicapés, déficients intellectuels profonds).

Certains types de handicaps (autisme, traumatisés crâniens) appellent un plan de rattrapage spécifique, afin de développer un équipement médico-social qui apparaît encore insuffisant. 300 millions de francs de crédits d'assurance maladie sur la durée du plan seront consacrés à des créations de places en établissements médico-sociaux.

Moderniser et à renforcer les ateliers protégés
Une enveloppe de 100 millions de francs de crédits du ministère de l'emploi et de la solidarité sera affectée sur trois ans à la modernisation et au renforcement des ateliers protégés. (chapitre 44-71, article 30).

Votre rapporteur avait interrogé le Gouvernement par écrit afin que lui soit transmis « le point sur la mise en oeuvre du programme interministériel ». Il souhaitait également que soit présenté « l'impact du programme sur le budget 2002 ».

La réponse au questionnaire se borne à transmettre les éléments de chiffrage prévisionnel déjà connus du programme et repris dans l'encadré ci-dessus.

Un programme pluriannuel n'a de sens que si l'on peut en présenter les résultats concrets, faute de quoi il risque fort de n'être considéré que comme un simple effet d'affichage.

2. Les crédits budgétaires consacrés aux personnes handicapées

Les crédits budgétaires consacrés aux personnes handicapées sont principalement situés dans le fascicule consacré à la solidarité et à la santé au sein de l'agrégat relatif au « développement social ».

Comme on le sait, cet agrégat est au demeurant plus large que la seule question des handicapés puisqu'il est composé d'une quinzaine de chapitres aux sujets très divers (objection de conscience, droits des femmes, professions sociales, etc.).

L'enveloppe des crédits inscrits au ministère de l'Emploi et de la Solidarité ne correspond pas à l'ensemble des dépenses en faveur des travailleurs handicapés : il faudrait, pour être exhaustif, tenir compte des sommes engagées par l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (AGEFIPH) ou encore le coût du financement des institutions de soins ou d'hébergement pris en charge respectivement par la sécurité sociale et par les départements. S'agissant du budget de l'Etat, il convient de ne pas oublier les crédits relatifs à l'allocation d'éducation spéciale (AES) inscrits au budget du ministère de l'Education nationale.

Le budget social du handicap peut être évalué en première analyse à plus de 160 milliards de francs répartis comme suit :

- 42 milliards de francs à la charge de l'Etat (hors dépenses fiscales),

- 50 milliards de francs à la charge de la sécurité sociale dont 16 milliards de francs au titre des pensions d'invalidité du régime général et 33 milliards de francs au titres des établissements,

- 16 milliards de francs à la charge des départements,

- 48 milliards de francs de dépenses diverses, à savoir les pensions militaires d'invalidité et les rentes d'accident du travail.

Une annexe spécifique (jaune budgétaire) qui récapitulerait l'ensemble des moyens consacrés à l'intégration des personnes handicapées serait un instrument utile.

Crédits consacrés à la politique en faveur des adultes handicapés de 1998 à 2002

(en millions de francs)

Dépenses

1998

1999

2000

LF 2001

PLF 2002

Garantie de ressources des travailleurs handicapés

5.036,80

5.199,50

5.385,70

5.596,42

5.976,40

Chapitre 44-71 article 40

 
 
 
 
 

Financement des tutelles aux incapables majeurs

515,00

571,50

600,00

680,00

800,10

Chapitre 46-33 article 20

 
 
 
 
 

Allocations et prestations diverses en faveur des personnes handicapées

40,30

40,20

36,00

32,00

25,60

Chapitre. 46-33 article 30

 
 
 
 
 

Financement du fonctionnement des centres d'aide par le travail

6.039,50

6.263,50

6 476,90

6.680,00

6.894,00

Chapitre 46-31 article 40

 
 
 
 
 

Financement des ateliers protégés

145,30

155,05

160,00

208,97

254,10

Chapitre 44-71 article 30

 
 
 
 
 

Dépenses d'aide sociale : total des dépenses d'aide sociale en faveur des personnes handicapées

108,00

112,40

112,40

112,40

108,20

Chapitre 46-33 article 50

 
 
 
 
 

Dépenses d'allocations aux adultes handicapés

23.389,00

24.769,00

25.550,00

26.540,00

28,05

Chapitre 46-33 article 10

 
 
 
 
 

Crédits déconcentrés d'action sociale en faveur des personnes handicapées

17,85

16,85

16,85

16,85

16,85

Chapitre 46-31 article 30

 
 
 
 
 

Crédits concentrés d'action sociale en faveur des personnes âgés et des personnes handicapées

130,20

129,00

144,00

251,00

366

Chapitre 47-21 article 50

 
 
 
 
 

Subvention d'équipement social - Établissements pour enfants et adultes handicapés

46,50

0

10,00

70,00

77,00

Chapitre 66-20 article 10 (AP)

 
 
 
 
 

TOTAUX

35.468,50

37.257,00

38.491,90

40.187,64

42.578,30

(1) La garantie de ressources prise en charge par le budget de l'Etat correspond aux travailleurs employés en CAT ou en ateliers protégés ; l'AGEFIPH assure le financement de la garantie de ressources en milieu ordinaire.

C. LES INSTRUMENTS DE L'ACTION EN FAVEUR DES HANDICAPÉS

L'analyse des instruments de la politique en faveur des handicapés tend naturellement à se porter sur la capacité d'accueil des établissements spécialisés tant les besoins sont immenses en ce domaine.

Cela étant, cela ne doit pas faire oublier que l'objectif premier doit être d'assurer pleinement l'intégration des handicapés à la société.

Comme l'a souligné M. Christian Poncelet, président du Sénat, lors de la journée-débat sur l'intégration des handicapés au Conseil économique et social, le 14 janvier 1999, « la capacité de la société à intégrer les handicapés est en quelque sorte le meilleur test de la solidarité nationale, de l'acceptation de la différence, de l'efficacité des politiques publiques et de nos modes d'organisation ».

C'est pourquoi le présent avis examinera également les dispositifs d'intégration scolaire, d'accès à l'emploi et d'aide au maintien à domicile en faveur des personnes handicapées. Il conviendra enfin d'examiner le niveau de ressources minimales mis à leur disposition à travers l'allocation aux adultes handicapées (AAH).

1. L'accueil en établissement des personnes les plus handicapées

a) Les structures d'hébergement pour adultes handicapés

Le financement de ces établissements est assuré, non par le budget de l'Etat, mais par l'assurance maladie, lorsque des soins sont assurés, ou par l'aide sociale départementale lorsque l'établissement a seulement une vocation d'hébergement.

Le dispositif d'hébergement institutionnel des adultes handicapés repose essentiellement sur l'hébergement en établissement et, plus accessoirement, sur l'accueil familial.

Les modes d'hébergement institutionnel des adultes handicapés

 

Nombre de personnes

%

Foyer d'hébergement

38.000

46,6

Foyer occupationnel

22.100

27,1

Foyer à double tarification

5.300

6,5

Maison d'accueil spécialisé

10.300

12,6

Accueil familial

5.800

7,1

Total

81.500

100,0

Source : ministère de l'emploi et de la solidarité (enquêtes ES - estimations au 1 er janvier 1997 - et accueil familial).

L'accueil en établissement des adultes handicapés

Les foyers d'hébergement pour travailleurs handicapés assurent l'hébergement et l'entretien des travailleurs handicapés exerçant une activité pendant la journée en centres d'aide par le travail, en ateliers protégés ou en milieu ordinaire. Ils peuvent être publics ou privés.

Une équipe composée de travailleurs sociaux assure l'encadrement du soir et du week-end, des travailleurs hébergés au foyer. Les prestations médicales sont assurées par des médecins libéraux rémunérés à l'acte.

Les dépenses d'exploitation du foyer d'hébergement sont prises en charge par l'aide sociale départementale sous forme de prix de journée. Les travailleurs handicapés sont appelés à contribuer à leurs frais d'hébergement et d'entretien.

Les foyers occupationnels ou foyers de vie pour personnes handicapées sont des établissements médico-sociaux accueillant toute la journée des personnes qui ne sont pas en mesure de travailler mais qui, disposant d'une certaine autonomie physique ou intellectuelle, ne relèvent pas des maisons d'accueil spécialisées (MAS). En général, les foyers de « vie » sont ouverts toute l'année et peuvent offrir un accueil à la journée ou à temps complet.

Une équipe composée, en majorité, de travailleurs sociaux et éventuellement de personnel médical et paramédical assure le fonctionnement de la structure.

Les dépenses d'exploitation des foyers de vie sont prises en charge par l'aide sociale départementale sous forme de prix de journée.

Les foyers expérimentaux à double tarification pour adultes lourdement handicapés (FDT) sont destinés à accueillir des personnes lourdement handicapées dont la dépendance totale ou partielle, constatée par la COTOREP, les rend inaptes à toute activité à caractère professionnel, leur fait obligation de recourir à l'aide d'une tierce personne pour la plupart des actes essentiels de l'existence, et nécessite une surveillance médicale et des soins constants.

Les FDT sont financés par :

- les régimes d'assurance maladie, qui prennent en charge, de manière forfaitaire, l'ensemble des dépenses afférentes aux soins, personnels et matériels médicaux et paramédicaux. Le montant maximum du forfait-soins a été fixé primitivement à 250 francs, dans la limite de 45 % du prix de journée global net. Pour 1998, son montant est de 362,77 francs ;

- l'aide sociale départementale, qui assume le coût de l'hébergement et l'animation des établissements.

Les maisons d'accueil spécialisées (MAS) sont des établissements médico-sociaux recevant des adultes handicapés qui ne peuvent effectuer seuls les actes essentiels de la vie et dont l'état nécessite une surveillance médicale et des soins constants.

Les soins constants, dont la personne admise dans une maison d'accueil spécialisée a besoin, ne sont pas des thérapeutiques actives ni des soins intensifs qui ne pourraient être dispensés que dans un établissement de soins.

Il s'agit essentiellement d'une surveillance médicale régulière avec recours au médecin, en cas d'urgence, et de la poursuite des traitements et des rééducations d'entretien, des soins de maternage et de nursing requis par l'état des personnes accueillies.

Compte tenu de la lourdeur du handicap, le taux d'encadrement dans ce type d'établissement est de un pour un. Il comprend du personnel médical et paramédical permettant d'assurer la surveillance médicale, du personnel nécessaire pour les aides et les soins quotidiens d'entretien et de rééducation ainsi que du personnel d'animation pour les activités occupationnelles et d'éveil.

Les MAS sont financées à 100 % par les organismes de sécurité sociale, et par le biais d'un prix de journée.

Les établissements d'hébergement

Le dispositif des établissements sociaux ou médico-sociaux accueillant des personnes handicapées forme une sorte de « constellation » à propos de laquelle l'encadré précédent s'efforce de fournir quelques points de repères.

Par ailleurs, le nombre d'établissements et de places installées au titre de l'hébergement des handicapés a augmenté au cours de ces dernières années. L'effort a impliqué l'Etat, mais plus encore les départements, qui ont développé des initiatives utiles à travers la mise en place des foyers de vie ou des foyers à double tarification.

Les données les plus récentes transmises dans les réponses aux questionnaires budgétaires portent sur les places disponibles au 1 er janvier 1998.
 

Nombre de structures (au 1 er janvier)

 

1990

1992

1994

1996

1998

Foyers d'hébergement

1.019

1.096

1.152

1.210

1.236

Foyers occupationnels

472

606

718

831

892

Foyers à double tarification

-

61

102

149

191

Maisons d'accueil spécialisées

164

190

208

249

297


 

Nombre de places installées (au 1 er janvier)

 

1990

1992

1994

1996

1998

Foyers d'hébergement

32.816

35.005

36.589

38.607

39.497

Foyers occupationnels

17.428

20.752

24.422

27.500

30.022

Foyers à double tarification

-

1.701

3.212

4.860

6.427

Maisons d'accueil spécialisées

6.322

7.534

8.469

10.193

11.774


 

Nombre de personnes accueillies (au 1 er janvier)

 

1990

1992

1994

1996

1998

Foyers d'hébergement

31.941

33.698

35.678

37.451

38.589

Foyers occupationnels

17.073

20.464

23.939

27.024

29.533

Foyers à double tarification

-

1.653

3.219

4.740

6.325

Maisons d'accueil spécialisées

6.205

7.529

8.346

10.093

11.618

Source : Enquêtes ES 1996 - Ministère de l'emploi et de la solidarité - SESI - ST7 - Février 1997, actualisé au 1 er janvier 1998.

Champ : France entière.


L'accueil familial

La loi n° 89-475 du 10 juillet 1989 relative à l'accueil des particuliers, à leur domicile, à titre onéreux, de personnes âgées ou handicapées adultes a pour objectif de réglementer une forme d'accueil qui s'était développée de manière spontanée mais qui ne présentait pas toutes les garanties que réclamaient les personnes handicapées et leur famille. Aujourd'hui le dispositif de l'accueil familial, qui concerne également les personnes âgées, s'adresse à près de 6.000 adultes handicapés .

L'article 14 du projet de loi de modernisation sociale actualise et rénove les dispositions de la loi du 10 juillet 1989 précitée afin de donner une nouvelle impulsion au régime de l'accueil familial.
b) Les établissements spécialisés pour les enfants lourdement handicapés

L'éducation des enfants les plus lourdement handicapés est assurée par des établissements ou services sociaux et médico-sociaux spécialisés financés par l'assurance maladie. En 1998, ces 2.500 établissements accueillaient une population de 125.500 enfants pour une capacité de 130.000 places installées environ.

Capacité d'accueil des équipements de l'éducation spéciale
relevant des annexes XXIV au décret du 9 mars 1956 modifié

Au 1 er janvier 1998

Nombre de structures

Nombre de places installées

Nombre de personnes accueillies

Etablissements d'éducation spéciale pour déficients intellectuels

1.194

73.518

73.090

Etablissements d'éducation spéciale pour enfants polyhandicapés

132

4.057

3.937

Instituts de rééducation

345

16.880

16.657

Etablissements d'éducation spéciale pour enfants déficients moteurs

125

7.767

7.745

Instituts d'éducation sensorielle pour déficients visuels.

33

2.235

2.065

Instituts d'éducation sensorielle pour déficients auditifs

87

7.606

6.479

Instituts d'éducation sensorielle pour sourds-aveugles.

18

1.936

1.723

Services autonomes d'éducation spéciale et de soins à domicile (1)

563

13.466

13.804

TOTAL

2.497

127.465

125.500

(1) Les services d'éducation spéciale et de soins à domicile rattachés à un établissement d'éducation spéciale ne sont pas comptabilisés ici.

Source : ministère de l'emploi et de la solidarité : DREES.


Depuis quelques années, il est apparu une évolution des modalités de prise en charge des enfants et adolescents handicapés :

La place occupée par la prise en charge en établissement, même si elle reste prépondérante (85,8 %), ne cesse de diminuer. Cette diminution s'explique par la baisse des places en internat qui ne constitue plus la première forme d'accueil comme c'était encore le cas en 1985. Quant à la prise en charge en semi-internat et en externat, elle constitue, depuis 1988, le mode principal d'accueil des enfants et adolescents handicapés.

La part des prises en charge par les SESSAD augmente depuis 1994.

Evolution de la répartition par type de prise en charge entre 1994 et 1998

 

1994

1998

Etablissements d'éducation spéciale

 
 

Internat complet ou de semaine

40,7 %

37,9 %

Semi-internat et externat

48,7 %

47,9 %

Sous-total

89,4%

85,8 %

SESSAD

10,6 %

14,2 %

TOTAL

100 %

100 %

Il convient de rappeler également le rôle des instituts médico-éducatifs (IME) qui sont de deux sortes :

- les instituts médico-pédagogiques (IMP) ont pour mission d'assurer l'éducation générale et pratique adaptée aux possibilités intellectuelles de chacun dès l'âge de 6 ans (ou 3 ans en cas de dérogation) ;

- les instituts médico-professionnels (IMPRO) permettent de dispenser, en même temps qu'un complément d'enseignement générale, une formation professionnelle adaptée au handicap à partir de 14 ans.

c) La lancinante question de la résorption des effets de l'amendement « Creton »

Le point sur l'état des places disponibles dans les établissements ne saurait être complet sans aborder l'amendement « Creton ».

L'amendement « Creton » -qui devrait être appelé amendement « Gillibert » du nom du ministre qui en avait accepté l'adoption- résulte du I bis de l'article 6 de la loi d'orientation en faveur des handicapés du 30 juin 1975, introduit par la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses dispositions d'ordre social.

Celui-ci prévoit qu'un jeune adulte handicapé peut être maintenu dans l'établissement d'éducation spéciale au-delà de l'âge réglementaire s'il ne peut être admis immédiatement dans un établissement pour adultes handicapés désigné par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) ; cette décision s'impose à l'organisme ou à la collectivité compétente pour prendre en charge les frais d'hébergement et de soins dans l'établissement pour adulte désigné par la COTOREP (...) ».

Bien que procédant d'une intention généreuse, -qui était de limiter les ruptures de prise en charge des jeunes adultes-, le dispositif n'a pas eu les effets attendus dans la mesure où, loin de susciter automatiquement la création de nouvelles places de CAT, il a entraîné de véritables situations « d'embouteillage » dans les établissements d'éducation spécialisée. Ces derniers ont dû prendre en charge des personnes handicapées adultes, que les personnels n'étaient pas toujours prêts à encadrer, au détriment d'enfants handicapés plus jeunes qui ne pouvaient accéder aux structures qui leur étaient destinées.

Au 31 décembre 1998, 3.920 jeunes adultes bénéficiaient de l'amendement « Creton ».

d) L'évolution des crédits en 2002

Le plan pluriannuel de création de places pour adultes lourdement handicapés (1999-2003) prévoit la création, sur cinq ans, sur les crédits d'assurance maladie (loi de financement de la sécurité sociale) de 5.500 places supplémentaires de maisons d'accueil spécialisé (MAS) et de foyers à double tarification (FDT), soit 1.100 places par an.

Pour 2002, le plan pluriannuel de création de places pour adultes lourdement handicapés (1999-2003) se traduit par l'inscription d'une enveloppe de 230 millions de francs dans la loi de financement de la sécurité sociale, auquel s'ajouteront 270 million de francs au titre du plan triennal (2001-20003) en faveur des enfants, adolescents et adultes handicapés.

Concernant le budget de l'Etat, le projet de loi de finances initiale pour 2002 comprend 98 millions de francs (chapitre 46.31, article 40) pour la création de 1.500 places nouvelles de CAT et 9,8 millions de francs (chapitre 44-71, article 30) pour la création de 500 places d'ateliers protégés. Comme en 2001, une enveloppe de 40 millions de francs sera consacrée, en 2002, à la poursuite de la modernisation de ces dernières structures.

2. L'intégration scolaire des jeunes handicapés

Il convient de rappeler que la loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées fixe comme objectif prioritaire leur intégration en milieu scolaire ordinaire. Ce principe a été réaffirmé par la loi n° 89-486 d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 et rappelée aux recteurs d'académie par la circulaire du 19 novembre 1999 dans le cadre du plan Handiscol.

Confronté au défi de la scolarisation, les enfants et adolescents handicapés devraient avoir le choix entre diverses solutions.

a) Les modalités variées d'intégration scolaire

L'intégration de l'enfant handicapé en crèche, en halte garderie ou à l'école maternelle peut être bénéfique pour une première socialisation hors de la famille. Il a été précisé toutefois à votre rapporteur qu'avant 6 ans l'accueil dans ces structures est fonction de conditions internes, et notamment de la disponibilité du personnel, mais aussi des attentes de la famille, ainsi que de l'accompagnement spécialisé qui peut leur être proposé.

Après 6 ans, si leur handicap le permet, les enfants handicapés peuvent être intégrés individuellement dans une classe ordinaire en bénéficiant, le cas échéant, d'un accompagnement ad hoc ou peuvent être scolarisés dans une classe spéciale dans un établissement scolaire ordinaire.

Dans les écoles élémentaires, l'intégration peut ainsi s'effectuer collectivement dans des classes d'intégration scolaire (CLIS).

Dans l'enseignement secondaire, la circulaire n° 95-124 du 17 mai 1995 a prévu la mise en place des unités pédagogiques d'intégration (UPI) destinées aux adolescents qui présentent un handicap mental et ne peuvent être scolarisés à temps complet dans une classe ordinaire.

Il est à observer que lorsque l'intégration implique des aménagements matériels particuliers, ceux-ci sont à la charge de la collectivité territoriale de rattachement.

D'une manière générale, alors que certains pays ont fait le choix de programmes adaptés pour les handicapés, la France retient l'option d'un même contenu d'enseignement pour tous les élèves mais « avec une pédagogie adaptée aux possibilités de chacun ».

Les enfants et adolescents handicapés dans les établissements scolaires

L'intégration individuelle dans les écoles maternelles et élémentaires

- à temps partiel : 6.000 élèves.

- à plein temps : 18.000 élèves.

L'intégration individuelle dans les collèges et lycées

- premier degré : 27.800 élèves environ ;

- second degré : 17.200 élèves environ.

L'intégration collective dans les classes d'intégration scolaire (CLIS)

- 48.000 élèves environ.

L'intégration collective en unité pédagogique d'intégration

- 1.100 élèves environ.

Source : ministère de l'éducation nationale, année scolaire 1999-2000.

b) L'accompagnement par une structure sociale ou médico-sociale

Deux structures sont particulièrement intéressantes dans la mesure où elles permettent d'accompagner et de soutenir un enfant handicapé plusieurs heures par semaine tout en lui permettant d'être inséré dans une classe scolaire normale.

Tout d'abord, les centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP), cofinancés à 80 % par l'assurance maladie et à 20 % par les départements, qui ont pour objet le dépistage, la cure ambulatoire et la rééducation des enfants des premier et deuxième âges en vue de leur adaptation sociale et éducation. 208 CAMSP ont pris en charge environ 14.162 enfants en 1996.

Ensuite, les services d'aide, de soutien, de soins et d'éducation à domicile (SESSAD) sont des services médico-sociaux autonomes ou rattachés aux établissements d'éducation spéciale, réglementés par les annexes XXIV modifiées du décret n° 56-284 du 9 mars 1956.

Les SESSAD assurent trois missions principales : le conseil et l'accompagnement de la famille et de l'entourage en général, l'aide au développement psychomoteur, et le soutien à l'intégration scolaire et à l'acquisition de l'autonomie. Composés d'équipes pluridisciplinaires (psychologues, médecins, rééducateurs, aides médico-pédagogiques...), ils peuvent intervenir au domicile familial de l'enfant ou de l'adolescent, mais aussi à la crèche, à l'école, au centre aéré ou encore dans les locaux du SESSAD, si la nature de l'intervention et la proximité s'y prêtent.

Le financement des SESSAD est assuré par l'assurance maladie dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. Les SESSAD ont accueilli 18.273 enfants en 1998.

c) Les formules spécifiques

Des dispositifs d'accompagnement scolaire, essentiellement financés par l'Etat et le ministère de l'éducation nationale, sont destinés à faciliter, dans l'établissement scolaire, l'intégration des enfants et adolescents handicapés. Il s'agit :

- des enseignants spécialisés itinérants : lorsqu'il n'existe pas de SESSAD, des enseignants spécialisés rayonnent sur un secteur géographique déterminé. Ils assurent ainsi un relais auprès des enseignants des classes ordinaires, afin de les conseiller sur l'intégration des élèves handicapés ;

- des réseaux d'aide spécialisée aux élèves en difficulté (RASED) : ils interviennent dans les écoles maternelles et élémentaires pour apporter un soutien scolaire aux enfants en difficulté d'apprentissage, et peuvent à ce titre aider les enfants handicapés ;

Le dispositif emplois-jeunes, créé en 1997, contribue également à l'intégration d'élèves handicapés, et se présente sous deux formes :

- les auxiliaires d'intégration collective recrutés par le ministre de l'Education nationale interviennent dans les établissements scolaires qui accueillent de manière permanente des élèves handicapés. Ils apportent une aide d'ensemble à l'équipe éducative, afin de lui permettre de mieux prendre en compte la présence de ces élèves au sein de l'établissement ;

- les auxiliaires d'intégration individuelle sont affectés auprès d'un élève qu'ils accompagnent au cours de sa journée scolaire. Ils sont parfois recrutés par le ministère de l'éducation nationale en qualité d'aides éducateurs, mais ce sont généralement des emplois-jeunes recrutés par une association ou une collectivité locale et mis à disposition de l'établissement scolaire fréquenté par l'élève handicapé.

Votre rapporteur n'a pas obtenu de précisions sur le nombre d'élèves concernés par ces dispositifs.

3. L'accès à l'emploi des personnes handicapées

La politique de l'emploi des personnes handicapées repose à la fois sur l'obligation d'emploi qui est imposée aux employeurs publics et privés, sur le concours apporté aux dispositifs d'insertion en milieu ordinaire par l'AGEFIPH et sur le financement par l'Etat de places en milieu protégé.

a) L'obligation d'emploi des travailleurs handicapés

La loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 fait obligation à tous les établissements de plus de vingt salariés d'employer l'équivalent de 6 % de travailleurs handicapés (art. L. 323-1 à L. 328-8 du code du travail).

En dehors de la solution de l'emploi direct, les entreprises peuvent conclure et appliquer des accords d'entreprise ou de branche prévoyant des programmes annuels ou pluriannuels d'embauche, d'insertion, de formation, d'adaptation aux mutations technologiques ou de maintien dans l'entreprise en cas de licenciements collectifs. L'entreprise peut également verser une contribution volontaire à l'AGEFIPH pour chaque salarié handicapé non employé. Elle peut également s'acquitter partiellement de son obligation en passant avec les établissements de travail protégé, des contrats de fournitures, de services et de sous-traitance.

L'obligation d'emploi dans les entreprises

La Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du ministère de l'Emploi et de la Solidarité a récemment fait connaître les statistiques disponibles pour 1998 7( * ) .

Il apparaît tout d'abord que, depuis 1993, le taux d'emploi direct de travailleurs handicapés est marqué par une forte stabilité : il fluctue légèrement autour de 4 %. Il atteint 4,03 % en 1998. Sur les 91.500 établissements assujettis à l'obligation en 1998, qui emploient au total 7,8 millions de salariés, 220.000 salariés était handicapés. Cet effectif était comparable à celui de l'exercice précédent.

Ce résultat doit néanmoins être apprécié en considérant que la comparaison du taux d'emploi direct au taux objectif de 6 % est biaisé du fait d'une règle, inscrite dans la loi, qui précise que le nombre de handicapés à employer est égal à 6 % de l'effectif arrondi à l'entier inférieur. De ce fait, par exemple, une entreprise de 33 salariés doit employer un seul handicapé, soit un taux d'emploi direct de 3,3 %. Dans ces conditions, le taux d'emploi réellement visé dans la loi est de 4,3 % en moyenne pour les entreprises de 20 à 49 salariés et de 5,4 % pour l'ensemble des établissements assujettis .

Si on rapporte ce dernier taux au taux d'emploi direct observé, 4 %, on constate alors que l'objectif est atteint à 74 % , le quart restant représentant la sous-traitance et les versements à l'AGEFIPH.

37 % des établissements assujettis n'emploient aucun travailleur handicapé et remplissent leur obligation légale en versant une contribution à l'AGEFIPH ou en recourant à la sous-traitance. Pour 30 % d'entre eux, le versement d'une contribution à l'AGEFIPH est la seule réponse pour satisfaire à leur obligation.

21 % des établissements combinent l'emploi direct de travailleurs handicapés et le versement d'une contribution à l'AGEFIPH, complétés éventuellement par le recours à la sous-traitance.

38,8 % remplissent leur obligation d'emploi des travailleurs handicapés par l'emploi direct uniquement (30,9 %) ou par la combinaison de l'emploi direct et de la sous-traitance (7,9 %).

Les travailleurs handicapés sont très majoritairement des hommes (75 %) nettement plus âgés que les autres salariés puisque 72 à 74 % d'entre eux ont plus de 40 ans (contre 48 % en moyenne dans les établissements concernés).

Ils occupent avant tout des emplois d'ouvriers (56 % de l'emploi handicapé) souvent non qualifiés et le principal secteur employeur reste l'industrie qui emploie 48 % des travailleurs handicapés contre 42 % pour le tertiaire.

Il est à noter que les salariés reconnus par la COTOREP sont dorénavant la catégorie de travailleurs handicapés la plus importante (52 % de l'ensemble) devant les accidentés du travail (32 %).

Par ailleurs, les travailleurs handicapés entrent dans les catégories les plus vulnérables sur le marché de l'emploi.

L'obligation d'emploi dans le secteur public
Comme dans le secteur privé, les employeurs publics d'au moins 20 agents sont également astreints à une obligation d'emploi des travailleurs handicapés à hauteur de 6 % de leur effectif. Les dernières statistiques communiquées à votre rapporteur sont celles de l'année 1998.

S'agissant de la fonction publique de l'Etat , les résultats étaient les moins satisfaisants en termes de pourcentage des bénéficiaires par rapport aux effectifs8( * ).

Le bilan élaboré par la Direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP) permet de constater qu'au 31 décembre 1998 les bénéficiaires de l'obligation d'emploi (39.112 bénéficiaires) représentaient 4,16 % des effectifs de la fonction publique de l'Etat. (Toutefois, ces chiffres ne tiennent pas compte du ministère de l'Education nationale, de la recherche et de la technologie).

En 1995, des décisions avaient été prises pour améliorer les résultats : tout d'abord, le recrutement des travailleurs handicapés par la voie contractuelle avait été étendu à toutes les catégories statutaires (décret n° 95-680 du 25 août 1995) ; ensuite, un correspondant « handicap » a été nommé dans chaque ministère afin de définir et de coordonner la politique générale à mener au sein de l'administration concernée en matière d'insertion des handicapés ; enfin, une augmentation des aides techniques ainsi que des actions de sensibilisation et d'information et de formation a été prévue.

Votre rapporteur ne peut que souhaiter une actualisation des statistiques de l'ensemble des ministères concernés par l'obligation d'emploi afin que l'action de l'administration puisse s'appuyer sur des données fiables.

S'agissant de la fonction publique hospitalière , la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins procède à une remontée d'informations par le biais d'un échantillon comprenant 140 établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux. Les résultats de l'enquête pour l'année 1999 permettent de dénombrer 41.560 personnes handicapées exerçant en milieu hospitalier ou médico-social. L'emploi direct de personnes handicapées représente un pourcentage de 5,68 % de l'effectif d'ensemble de la fonction publique hospitalière. Les contrats de sous-traitance conclus avec les organismes du milieu protégé correspondent à 0,05% de l'effectif d'ensemble. Le taux global est égal à 5,73 %.

Le taux progresse assez nettement par rapport à celui de l'année précédente (4,49 % en 1998), et se rapproche significativement du taux d'obligation légale d'emploi de personnes handicapées.

L'évolution des résultats d'une année sur l'autre est due en partie à la variation du taux de réponses des établissements de taille importante que sont les centres hospitaliers universitaires. Or, les plus grandes structures disposent de moyens plus conséquents, en termes de poste de travail ou de formation, pour favoriser l'inclusion ou le reclassement professionnel des personnes en situation de handicap.

S'agissant des collectivité locales , le taux moyen d'emploi, pour l'ensemble de celles qui ont répondu à l'enquête, soit 3.082, s'établit pour 1998 à 5,12 %.

Par rapport aux années précédentes (4,6 % en 1996 et 4,5 % en 1997), le taux d'emplois de personnes handicapées dans la fonction publique territoriale a progressé de 11 % en trois ans.

Les communes et établissements publics communaux ou de coopération intercommunale emploient à eux seuls plus des trois quarts des agents territoriaux bénéficiaires. Parmi l'effectif total des bénéficiaires, 90,9 % appartiennent à la catégorie C, 6,8 % à la catégorie B et 2 % à la catégorie A. 70 % des agents territoriaux handicapés sont des hommes.

Certains types de collectivités ont fourni un effort important afin de remplir leur obligation légale : c'est notamment le cas des départements puisqu'en 1998, 28,38 % remplissent l'obligation d'emploi contre 7 % en 1993. De manière semblable, les régions sont passées de 11 % à 26 % sur la même période.

Les communes font état d'un bon résultat de l'ordre de 5,12 % : votre rapporteur souligne néanmoins que le taux réel des communes en matière d'insertion de personnes handicapées est en réalité vraisemblablement plus élevé , les personnes handicapées n'étant pas nécessairement reconnues comme telles par les COTOREP, en particulier en milieu rural.
b) Le soutien par l'AGEFIPH de l'emploi en milieu ordinaire

Les données disponibles dans le dernier rapport d'activité de l'AGEFIPH pour l'exercice 2000 montre une progression de 1,98 à 2,18 milliards de francs du programme d'intervention ordinaire, soit 10 % de progression.

Il convient de rappeler que le programme exceptionnel (PEX) de 1,5 milliard de francs sur la période 1999-2001 vient s'ajouter au programme ordinaire, soit un montant total d'intervention de 2,56 milliards de francs en 2000 .

On rappellera que le programme exceptionnel (PEX) s'articule autour des quatre axes suivants :

- préparation et accompagnement de l'insertion des personnes handicapées ;

- développement et modernisation des dispositifs d'orientation et de formation professionnelle ;

- valorisation de l'action des entreprises ;

- développement de l'alternative au secteur spécialisé et expérimentation de dispositifs d'observation des besoins.

Votre rapporteur a eu la confirmation que le programme exceptionnel (PEX) se déroulait dans des conditions satisfaisantes.

La progression des dépenses est corrélée à l'augmentation du niveau des ressources perçues auprès des entreprises qui ne satisfont pas l'obligation d'embauche des travailleurs handicapés. Ces ressources se sont élevées à 2,06 milliards de francs en 2000 contre 1,97 milliard de francs en 1999.

L'AGEFIPH intervient de plusieurs manières en faveur de l'insertion des handicapés dans le monde de l'entreprise :

•  60 % des dépenses de l'AGEFIPH, soit 1,3 milliard de francs environ en 2000, sont consacrés à l'accès et au maintien dans l'emploi des personnes handicapées .

Ainsi, l'AGEFIPH finance diverses aides directes à l'embauche dont la prime à l'insertion (668 millions de francs en 2000).

Cette prime prend la forme d'une subvention forfaitaire attribuée, à la fois, à l'entreprise pour l'embauche d'une personne handicapée et à la personne handicapée elle-même.

A compter du 1 er octobre 1995, pour l'entreprise, la prime est d'un montant de 10.000 francs, à l'acceptation du dossier complet et conforme, puis une somme supplémentaire de 5.000 francs, est allouée sur la présentation du bulletin de salaire du 12 ème mois de travail effectif suivant l'embauche ayant donné lieu au premier versement.

En cas de maintien dans l'emploi, à l'issue d'un contrat en alternance ou d'un contrat d'apprentissage, l'employeur peut bénéficier d'une prime de 5.000 francs, à l'acceptation d'un nouveau dossier complet et conforme, répondant aux mêmes critères de durée et d'éligibilité de contrats que pour le cas général.

Pour la personne handicapée, la prime est de 10.000 francs à l'acceptation du dossier complet et conforme. La prime pour la personne handicapée n'est pas renouvelable.

Des mesures sont également prévues pour faciliter l'accès des jeunes handicapés aux formations en alternance ou à l'apprentissage .

Une subvention de 70.000 francs, dans la limite du coût total de 50 % du projet, est prévue en cas de création d'une entreprise ou de démarrage d'une activité indépendante par une personne handicapée.
Par ailleurs, l'AGEFIPH participe, avec l'Etat et les conseils généraux, au financement des organismes de placement spécifique pour les personnes handicapées, c'est-à-dire les 43 organismes d'insertion et de placement (OIP) et les 70 équipes de préparation et de suite du reclassement (EPSR). Il est à noter qu'à compter de 1999 l'AGEFIPH a repris le financement de 33 EPSR publiques jusqu'alors financées sur le budget de l'Etat.

Enfin, depuis la loi de finances pour 1997, l'AGEFIPH assume la compensation du complément de rémunération -ainsi que des cotisations afférentes- au titre de la garantie de ressources en milieu ordinaire de travail (GRTH). L'AGEFIPH a consacré 220 millions de francs à ce poste en 2000.
L'employeur est autorisé à procéder à un abattement de salaire lorsque la COTOREP constate une diminution notoire du rendement ou reconnaît la nécessité d'un emploi de travail protégé en milieu ordinaire.

Selon le rendement du travailleur handicapé, son salaire peut être réduit dans la limite de 20 % du SMIC pour un abattement de salaire simple, ou de 50 % dans le cas d'un emploi de travail protégé. Indexée sur le SMIC, la garantie de ressources comprend d'une part le salaire direct à la charge de l'employeur et, d'autre part, un complément de rémunération remboursé trimestriellement à l'employeur par l'AGEFIPH.

•  L'AGEFIPH intervient à hauteur de 40 % de son budget également dans trois domaines supplémentaires :
- la préparation des personnes handicapées à l'emploi en aidant à leur formation : ce travail s'effectue avec l'AFPA mais aussi avec les conseils régionaux, dans le cadre des schémas régionaux de la formation des personnes handicapées (418 millions de francs en 2000) ;

- la mobilisation du monde économique et des salariés par des actions d'information et de sensibilisation (112 millions de francs en 2000) ;

- la prise en charge par des aides spécifiques les problèmes particuliers que rencontrent les handicapés en matière d'accessibilité aux lieux de travail, d'aménagement du poste de travail de soutien et de suivi (483 millions de francs en 2000).

164.149 personnes ont bénéficié d'interventions de l'AGEFIPH au cours de 2000 , contre 139.430 en 1999 , étant à noter toutefois que certaines personnes ont pu bénéficier de plusieurs actions différentes sur l'année de référence.

La mise en oeuvre du programme exceptionnel est utile car la baisse du chômage pour les personnes handicapées (- 8 % sur 12 mois) demeure moins importante pour les travailleurs handicapés que pour l'ensemble des chômeurs en 2000 .

Il est essentiel, de surcroît, de relancer l'insertion en milieu ordinaire car le secteur « protégé » ne peut répondre à l'ensemble des besoins et doit être « ciblé » plus nettement vers les personnes handicapées les plus éloignées de l'emploi.
c) Le travail en milieu protégé

Deux types d'établissements, les centres d'aide par le travail (CAT) et les ateliers protégés -financés respectivement par les crédits de la solidarité et ceux de l'emploi-, permettent aux personnes handicapées de travailler dans une structure spécialisée.

Les centres d'aide par le travail
Il s'agit d'établissements publics ou privés qui ont pour vocation d'offrir aux adultes handicapés qui ne peuvent, momentanément ou durablement, travailler ni dans les entreprises ordinaires, ni dans un atelier protégé ou pour le compte d'un centre de distribution de travail à domicile, ni exercer une activité professionnelle indépendante, des possibilités d'activités diverses à caractère professionnel, un soutien médico-social et éducatif et un milieu de vie favorisant leur épanouissement personnel et leur intégration sociale.

Les centres sont créés sur autorisation du préfet, donnée après avis du comité régional de l'organisation sanitaire et sociale (CROSS) . Ils sont habilités par le préfet à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale de l'Etat dans le cadre d'une convention.

L'accès d'un handicapé à un CAT est subordonné à trois conditions :

- être orienté par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) ;

- être âgé de plus de vingt ans :
toutefois, les centres d'aide par le travail peuvent également accueillir les personnes handicapées dont l'âge est compris entre seize et vingt ans ; dans ce cas, la décision de la commission technique est prise après avis de la commission départementale de l'éducation spéciale ;

- avoir une capacité de travail inférieure à un tiers de la normale : toutefois, la commission technique peut orienter vers des centres d'aide par le travail des personnes handicapées dont la capacité de travail est supérieure ou égale au tiers de la capacité normale, lorsque leur besoin de soutien ou leurs difficultés d'intégration en milieu ordinaire de travail ou en atelier protégé le justifient. Elle peut prononcer pour les mêmes raisons le maintien en centre d'aide par le travail d'un travailleur handicapé qui aura manifesté, au terme de la période d'essai, une capacité de travail supérieure.

Les CAT font partie, avec les CHRS, des établissements sociaux et médico-sociaux qui sont financés par l'aide sociale obligatoire de l'Etat, et donc sur des crédits budgétaires.

Il existait 1.336 CAT environ offrant 95.811 places en 2000 .

Pour 2002, la dotation aux CAT est majorée de 3,2 % pour atteindre 6,9 milliards de francs. 1.500 places nouvelles devraient être financées.
Les ateliers protégés

Il convient de rappeler que les ateliers protégés et les centres de distribution de travail à domicile (CDTD) constituent des unités économiques de production dépendant d'associations ou d'entreprises ordinaires. Ils mettent les travailleurs handicapés à même d'exercer une activité professionnelle salariée dans des conditions adaptées à leurs possibilités. Ils doivent, en outre, favoriser la promotion des travailleurs handicapés et leur accession à des emplois dans le milieu ordinaire de travail.

Les ateliers protégés ne peuvent embaucher que les travailleurs handicapés dont la capacité de travail est au moins égale au tiers de la capacité de travail d'un travailleur valide. Selon les nécessités de leur production, les ateliers protégés peuvent embaucher des salariés valides dans la limite de 20 % de leurs effectifs.

Au 31 décembre 1999, 16.765 travailleurs handicapés (effectif réel) sont employés dans 532 ateliers protégés dont 16 centres de distribution de travail à domicile (CDTD) répartis sur l'ensemble de la France.

Les crédits inscrits au titre des ateliers protégés s'élevaient à 210 millions de francs en 2001. Ils atteindront 254 millions de francs dans le présent projet de loi de finances. Une mesure nouvelle de création de 500 places est prévue comme les années précédentes ( chapitre 44-71, article 30 ).

La garantie de ressources

Le mécanisme de la garantie de ressources (GRTH) met à la charge de l'Etat un complément de rémunération, versé aux travailleurs handicapés et leur permettant d'obtenir une rémunération globale équivalente à celle d'un travailleur valide.

Depuis 1997, comme on l'a vu, l'AGEFIPH assure le financement de la garantie de ressources en milieu ordinaire, conformément à ses missions.

Le budget de l'Etat ne prend plus, pour sa part, directement à sa charge que la garantie de ressources due aux travailleurs employés en CAT ou en atelier protégé.

Les moyens mobilisés à ce titre s'élèvent à 5,97 milliards de francs en 2002 pour 108.050 personnes bénéficiaires.

Cette évolution correspond à l'ajustement de la dotation ainsi qu'à l'incidence de la création de 500 nouvelles places d'accueil en ateliers protégés et de 2.000 places nouvelles en CAT.

Les équipes de préparation et de suite du reclassement (EPSR)
Les EPSR relèvent de deux catégories juridiques mentionnées à l'article R 323-33-13 du code du travail .

Les EPSR publiques ressortissent de la compétence des directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle dont elles constituent un service administratif interne. Sans personnalité juridique propre, elles ne disposent pas de financements particuliers autres que ceux dévolus par le ministère de l'emploi et de la solidarité à l'ensemble de ses services déconcentrés.

En revanche, les EPSR privées prennent la forme d'associations régies par la loi de 1901. Financées par l'AGEFIPH, elles concluent, avec l'État, l'AGEFIPH et l'ANPE, une convention portant cahier des charges dont les clauses déterminent les missions particulières qui leur incombent.

A compter du 1 er juillet 1999, le financement des EPSR privées a été transféré à l'AGEFIPH. Celle-ci a consacré 280 millions de francs au financement du réseau Cap Emploi en 2000 et y consacrera 285 millions de francs en 2001.

Comme en 2001, l'Etat ne participera pas en 2002 au financement des EPSR privées. En effet, dans sa décision d'approbation du budget de l'AGEFIPH pour 1999, la Ministre de l'emploi et de la solidarité a confirmé le transfert du financement de l'ensemble des EPSR privées à partir du 1 er juillet 1999.

Il est précisé dans les réponses transmises à votre rapporteur que « ce transfert ne vise cependant en aucun cas à désengager l'Etat de ses responsabilités en matière de politique de l'emploi des personnes handicapées. L'Etat entend assumer pleinement son rôle d'impulsion et de régulation, dans le cadre d'un partenariat rénové qui mobilise plus efficacement les moyens du service public de l'emploi. A ce titre, l'Etat conservera la faculté de déterminer conjointement avec l'AGEFIPH, les objectifs retenus et les financements accordés à chacune des EPSR. »

4. L'allocation aux adultes handicapés en progression sensible

L'allocation aux adultes handicapés (AAH), prestation non contributive, soumise à condition de ressources, est un minimum social garanti par la collectivité nationale à toute personne reconnue handicapée par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP). L'allocataire doit justifier d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 %. En application de l'article 95 de la loi de finances pour 1994, l'AAH est également versée aux personnes handicapées qui sont, en raison de leur handicap, dans l'incapacité de se procurer un emploi et qui justifient d'un taux minimal d'incapacité de 50 % et inférieur à 80 %.

L'AAH n'est pas encadrée par des critères de revalorisation propres, mais évolue, aux termes de l'article D. 821-3 du code de la sécurité sociale, comme le minimum vieillesse. Le choix de cette base d'indexation a permis une amélioration sensible du pouvoir d'achat de l'allocation au cours de ces dernières années.

Ainsi, au 1 er janvier 2001, le montant de l'AAH a été porté à 3.654,50 francs , soit une revalorisation de 2,2 %. Les ressources personnelles du titulaire de l'AAH ne doivent pas dépasser 43.947 francs par an (3.662 francs par mois) s'il s'agit d'une personne seule et 87.894 francs par an (7.234 francs par mois) s'il s'agit d'un couple marié.

Il existe également une allocation dite « complément d'AAH » versée aux personnes handicapées à plus de 80 % et vivant à leur domicile, afin de couvrir les dépenses supplémentaires à engager pour les adaptations nécessaires à une vie autonome. Le montant du complément d'AAH est de 585 francs par mois.

a) La progression toujours vive de l'AAH

Sur le plan financier, l'AAH et son complément représentent un engagement de 28,06 milliards de francs pour le ministère de l'emploi et de la solidarité dans le projet de budget pour 2002. Les mêmes crédits s'élevaient à 26,54 milliards de francs en 2000, soit une progression significative de près de 1,5 milliard de francs.

Le coût de la dotation pour 2002 a été calculé en se plaçant dans l'hypothèse d'une évolution des effectifs « recalée » à 2,5 % sur 2001 et en recourant pour 2002 à une hypothèse d'évolution du nombre d'allocataires de 2,3 %. Une augmentation du minimum vieillesse au moins égale à 1,2 % a été également prise en compte.

De plus, le Gouvernement a décidé de supprimer le mécanisme de l'évaluation forfaitaire des ressources, mesure pénalisante pour les bénéficiaires percevant de faibles revenus d'activité et les travailleurs indépendants dont l'activité est déficitaire ou faiblement excédentaire. Cette mesure vise à ne pas décourager les efforts d'insertion des bénéficiaires de l'AAH. Le coût prévisionnel de cette mesure est de 70 millions de francs prévus pour 2002.

Dans la réponse aux questionnaires budgétaires, le ministère met en avant plusieurs facteurs d'explication de la forte hausse du coût de l'AAH.

Une meilleure connaissance de l'accès aux droits peut engendrer une augmentation du nombre d'entrées dans le dispositif.

L'examen des relevés statistiques du régime général ferait apparaître une forte inertie dans la structure démographique des bénéficiaires. Ainsi, près de la moitié des allocataires ont moins de quarante ans. De l'âge peu élevé des bénéficiaires découle un effet mécanique, qui explique la présence longue des allocataires dans le dispositif de la prestation.

Par ailleurs, environ 63 % des allocataires perçoivent une AAH à taux plein, ce qui montre l'absence de ressources propres des intéressés . Cette situation trouverait ses racines dans la période de dégradation de la situation économique, le chômage touchant particulièrement les personnes handicapées

Le ministère fait enfin une analyse inattendue de l'effet de la mise en place du RMI.

« Après l'instauration du RMI en 1988, la situation du marché de l'emploi a pu faire obstacle au basculement de certains bénéficiaires de l'AAH dans le champ du RMI et à l'inverse favoriser l'orientation vers la COTOREP et donc de l'attribution de l'AAH, notamment au titre de l'article L. 821-2 du code de la sécurité sociale (personnes atteintes d'un handicap au moins égal à 50 % et dans l'impossibilité, reconnue par la COTOREP, de se procurer un emploi). »

Evolution du nombre de bénéficiaires et des crédits d'AAH

 

AAH

 

Complément AAH

Années

Bénéficiaires
en milliers

Evolution
en %

Dotation budgétaire (1) en milliards de francs

Bénéficiaires en milliers

Part au sein de la dotation budgétaire (en millions de francs)

1990

539

2,8

15,1

 
 

1991

552

2,5

15,9

 
 

1992

563

3,1

16,6

 
 

1993

583

2,5

17,9

 
 

1994

597

2,4

18,7

 
 

1995

617

3,3

20,1

 
 

1996

630

2,1

21,5

 
 

1997

649

2,9

22,4

113

782

1998

668

2,8

23,4

121

844

1999

694

3,7

26,5

133

933

2000

712

2,6

28,1

139

988

(1) compte tenu des modifications budgétaires en cours d'année.

b) Un phénomène dangereux

Votre rapporteur doit souligner le caractère préoccupant de l'augmentation continue de l'augmentation des titulaires de l'AAH .

Certes, le phénomène a une origine démographique mais celle-ci n'explique pas tout. Il est exact que beaucoup de personnes handicapées sont entrées relativement jeunes dans le dispositif de l'AAH créé en 1975 et qu'elles ont vocation à en bénéficier toute leur vie. Le dispositif de l'AAH procède donc d'une logique cumulative.

Mais il est frappant de constater que le rythme d'entrée à l'AAH, qui s'établissait à 3 % en 1997 et 1998, s'est accéléré en 1999 où il a atteint près de 4 % alors que la conjoncture économique s'est améliorée : en 2000, ce taux de progression s'est établi à 2,6 %.

Comme M. Jean Chérioux l'avait observé l'année dernière, votre rapporteur souligne que les bénéficiaires du RMI constituent ainsi près de 17 % des nouveaux entrants à l'AAH en 1996 et que l'AAH est attribuée de plus en plus souvent en raison de déficiences intellectuelles (18,8 % des demandeurs) ou de troubles du psychisme (24,2 % des demandeurs).

La relative « dilution » de l'AAH du fait de l'assouplissement des critères donnant lieu à son attribution rendent d'autant plus difficile à réussir l'objectif de la revalorisation du montant de cette allocation demandée par les associations.

D. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION

Votre commission reconnaît que le plan triennal (2001-2003), annoncé le 25 janvier 2000, n'est pas un effort négligeable sur le plan financier.

Toutefois, parce qu'il ne s'accompagne pas d'une réforme de fond des dysfonctionnements, sinon des insuffisances, du dispositif d'aide aux personnes handicapées, ce plan fait courir le risque de ne masquer que temporairement la montée des mécontentements.

1. L'absence d'une réforme de fonctionnement des COTOREP

Tout d'abord, la réforme de fond des COTOREP, constamment différée, ne s'engage pas de manière favorable.

On se souvient que lorsque le Gouvernement avait, en 1999, transféré du budget de l'Etat à l'AGEFIPH le financement de la garantie de ressources pour les personnes en ateliers protégés, il s'était engagé en contrepartie à faire un effort sur la modernisation des COTOREP.

Force est de constater que cette modernisation n'a pas beaucoup avancé, mises à part la mise en place de crédits d'informatisation et la revalorisation des rémunérations des médecins coordinateurs.

Le décret qui vise à fusionner les deux sections de COTOREP est toujours à l'état préparatoire. Ce décret ne suscite pas l'unanimité puisque certaines associations regrettent que l'accent soit mis sur la médicalisation des COTOREP au détriment de la pluridisciplinarité et de la prise en compte de la dimension médico-sociale de l'intégration des personnes handicapées.

Comme le souligne un rapport du Conseil économique et social (CES) 9( * ) de septembre 2000, les délais de traitement des dossiers sont trop longs. Par ailleurs, on peut reprocher aux COTOREP d'aggraver l'incapacité en privilégiant l'assistance plutôt que d'inciter à l'autonomie et à l'intégration ceux qui en seraient capables avec un accompagnement. Plus grave encore, les orientations des COTOREP ne sont pas prononcées en fonction des besoins réels des personnes handicapées mais plutôt de l'existence d'établissements spécialisés susceptibles de les accueillir.

Selon le CES, l'existence de deux sections dans les COTOREP a un effet pervers puisque la possibilité est laissée aux personnes handicapées de tenter un parcours professionnel en s'adressant à la première section ou de bénéficier d'un système d'aide sociale automatique si le taux d'invalidité requis est reconnu par la deuxième section.

Comme l'indique le rapporteur du Conseil économique et social : « un tel dispositif conduit à faire entrer une personne dans un système d'assistance dès l'âge de 20 ans au lieu de l'aider à bâtir un parcours professionnel au plus près de ses capacités. Cette démarche revient à lui refuser l'accès à une citoyenneté pleine et entière, basée sur l'obtention de ses droits et l'exercice de ses devoirs.» 10( * )

Au demeurant, les COTOREP souffrent de deux défauts récurrents : tout d'abord, elles ne peuvent prendre que des décisions « binaires », c'est-à-dire attribuer une allocation ou une prise en charge, sans favoriser au contraire la mobilité entre des prises en charge différentes en institution ou à domicile ; par ailleurs, les COTOREP ne sont pas intéressées par les conséquences financières des décisions qu'elles prennent .

Il manque en réalité un véritable réseau des COTOREP, articulé autour d'une Agence ou d'un établissement public rattaché au Premier ministre pour lui assurer toute l'autorité nécessaire.

Cette agence serait chargée d'évaluer les besoins au niveau national et assurerait une synergie entre les domaines de la prise en charge médicalisée, du soutien à la vie à domicile et de la formation ou de l'intégration professionnelle
.

2. L'évaluation des besoins en matière d'accueil en institution doit être améliorée

La plupart des associations estiment que le plan triennal lui-même reste bien en deçà des besoins à satisfaire. S'agissant des personnes handicapées mentales, le plan devrait être doublé pour obtenir des résultats tangibles.

De nombreux enfants handicapés mentaux -près de 20.000- sont en liste d'attente pour accéder à des instituts spécialisés ; la situation des polyhandicapés est toujours très difficile à tous les âges de la vie. Les traumatisés crâniens accèdent difficilement à des établissements. Le nombre de places pour les enfants autistes est cruellement insuffisant, ce qui conduit les parents à placer leurs enfants dans des établissements spécialisés en Belgique.

Parallèlement, le réseau visant à faciliter l'accès au travail des personnes handicapées enregistre des difficultés croissantes. Les ateliers protégés ne disposent pas des compensations nécessaires pour assurer leur activité à un niveau concurrentiel. Cette situation les conduit à retenir leurs meilleurs éléments plutôt que de les orienter vers un travail en milieu ordinaire.

Les centres d'aide par le travail (CAT), de même, sont de plus en plus des institutions où les personnes accueillies le demeurent à titre permanent sans perspective de sortie même si les textes ne le reconnaissent pas encore clairement.

Face à cet afflux de demandes, un travail d'évaluation est indispensable avant de créer les structures, votre rapporteur a ainsi constaté l'échec d'un CAT pour adulte-autiste conçu pour 20 personnes et qui n'en accueille que cinq.

Il importe d'assurer la meilleure adéquation possible entre les institutions de prise en charge et les demandes des personnes handicapées pour un travail d'évaluation des besoins de la personne handicapée . Les COTOREP ne jouent qu'imparfaitement le rôle qui devrait être le leur.

3. Les aides à la vie autonome sont à un niveau insuffisant

Tout d'abord, votre commission regrette que les sites pour la vie autonome ne soient pas développés plus rapidement. Ces sites sont très appréciés par les personnes handicapées parce qu'ils permettent de regrouper en un lieu unique, les compétences requises pour évaluer tous les besoins d'aide, qu'il s'agisse des aides techniques, humaines ou de l'aménagement du logement. Toutefois, l'effort devrait être plus énergique pour accélérer la mise en place de ces structures.

Les personnes handicapées rencontrent depuis plusieurs années de difficultés pour trouver des infirmières.

Le ministère prépare depuis le printemps 2000 un projet de décret pour l'extension des services de soins infirmiers à domicile aux personnes handicapées (SSIAD). Ce décret est néanmoins toujours en attente.

Il est important que le plan de soins infirmiers soit élaboré dans le cadre d'une évaluation globale des besoins de la personne. En effet, pour les personnes les plus dépendantes, les moyens à mettre en oeuvre pour compenser les situations de handicap et le suivi médical quotidien sont très liés.

En outre, les moyens de financement du droit à compensation doivent être pris en compte. Avec la mise en oeuvre du projet de soins infirmiers, certaines personnes ne pourront plus bénéficier de l'intervention d'une infirmière pour certains actes de la vie courante. Ces actes seront réalisés par du personnel qu'elles devront rémunérer. Cela constituera pour ces personnes des charges financières importantes supplémentaires.

En tout état de cause, la pénurie d'infirmières, due au caractère attractif des carrières en hôpital public, crée une situation de carence préoccupante dans le secteur de l'aide à domicile -notamment en milieu rural.

4. La question du sort des personnes handicapées vieillissantes est toujours à l'étude

Le plan triennal du 25 janvier 2000 a prévu 45 millions de francs pour créer de nouvelles places d'accueil. Mais le problème demeure puisque les personnes handicapées âgées quittent souvent l'établissement où elles avaient pourtant leur cadre de vie habituel. Elles subissent le traumatisme de la séparation avec ce qui constituait leur milieu de vie ordinaire. Des expériences montrent qu'il est préférable de maintenir ces personnes dans des structures situées à proximité des foyers traditionnels où elles ont vécu.

Cela suppose néanmoins la reconnaissance de la dimension médico-sociale spécifique de ces nouveaux organismes, notamment pour faciliter le financement des « activités occupationnelles » qui doivent être assurées dans ces structures d'un nouveau type.

Sur toutes ces questions, le Gouvernement prend du retard. Le mécontentement des handicapés s'accroît et sera d'autant plus difficile à désamorcer. Il devient particulièrement urgent de réformer la « première » loi du 30 juin 1975, c'est-à-dire la loi d'orientation relative aux personnes handicapées.

III. L'ÉVOLUTION PRÉOCCUPANTE DES CONDITIONS DE FONCTIONNEMENT DU SECTEUR SOCIAL ET MÉDICO-SOCIAL

Comme le faisait M. Jean Chérioux chaque année, votre rapporteur a souhaité que cet avis continue de permettre de faire le point sur l'évolution des dépenses d'aide sociale prise en charge par les départements dans le cadre des lois de décentralisation.

En effet, aux termes de l'article 34 de la loi du 22 juillet 1983, le département s'est vu transférer une compétence de droit commun dans le domaine des prestations d'aide sociale légale , dans les domaines de l'aide sociale à l'enfance, de l'aide sociale aux familles, de l'aide sociale aux personnes âgées et de l'aide sociale aux personnes handicapées adultes, comprenant notamment l'hébergement en établissements.

S'agissant des données chiffrées exposées ci-après, votre rapporteur souligne l'importance du travail de l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée (ODAS) dont la qualité est incontestable. Il a recouru également aux travaux de l'Assemblée des départements de France sur les budgets primitif 2001.

A. L'ANNÉE 2000 CONFIRME LA RELATIVE STABILITÉ DES DÉPENSES CONSTATÉE DEPUIS CINQ ANS

Avant de présenter les données les plus récentes sur l'évolution des dépenses d'aide sociale départementale et les divers facteurs d'évolution 11( * ) , il convient de rappeler au préalable quelques précisions terminologiques.

Les données rassemblées par l'ODAS sont établies à partir des informations fournies par les responsables des services financiers de 29 départements, Paris inclus.

Elles portent sur les dépenses nettes d'aide sociale qui sont égales aux dépenses brutes -c'est-à-dire au montant total des prestations versées par les départements- diminuées des recettes ultérieurement encaissées auprès des bénéficiaires de l'aide sociale, de leurs obligés alimentaires et des organismes de sécurité sociale. Cette donnée apparaît en effet la plus proche de la charge financière réelle qui pèse sur les départements.

Les dépenses indirectes d'aide sociale, correspondent aux dépenses de fonctionnement liées à l'exercice de leurs compétences par les départements.

1. La croissance des budgets sociaux départementaux en 2000

En 2000, les dépenses départementales d'action sociale se sont élevées à 77 milliards de francs : hors les dépenses d'aide médicale qui ont été retirées de la compétence départementale par la loi du 27 juillet 1999 relative à la CMU, la hausse est de 1,5 % par rapport à l'année dernière, ce qui montre que l'année 2000 s'inscrit toujours dans le cycle de ralentissement de la hausse des dépenses observé depuis 1996 (+ 3,5% en 1997 ; + 2,2 % en 1998 ; + 2 % en 1999).

Toutefois, les départements sont à la veille d'une reprise forte du mouvement de progression des dépenses.

Dépenses nettes d'aide sociale départementale (France métropolitaine)

(en milliards de francs)

 

1984

1989

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Dépense nette totale

38,3

45,3

73,0

75,7

78,3

81,0

83,2

77,5

Total hors aide médicale*

36,0

42,7

66,6

69,4

71,4

73,8

75,3

76,5

* Ont été retranchées de la dépense totale : l'aide médicale au sens strict, ainsi que les cotisations d'assurance personnelle au titre du RMI formellement rattachées au chapitre de l'insertion.

Le caractère cyclique de la dépense sociale départementale

L'ODAS met en évidence que, sur la période 1984-1995, pendant laquelle la dépense d'action sociale départementale a plus que doublé, trois périodes distinctes peuvent être distinguées.

De 1984 à 1989, la dépense annuelle augmente de 3,5 % en moyenne , soit moins vite que l'inflation qui demeure à des niveaux relativement élevés : cette période fait apparaître dans certains cas des baisses d'activité dans les secteurs de l'aide sociale à l'enfance et de l'hébergement des personnes âgées tandis que simultanément le recouvrement des recettes est amélioré.

De 1990 à 1995, la dépense sociale départementale augmente de plus de 8 % en moyenne en francs courants.

Cette période est marquée, dans un contexte de ralentissement de l'inflation, par la prise en charge de plus en plus lourde de l'insertion des bénéficiaires du RMI et de leurs frais d'assurance personnelle ainsi que par la mise en oeuvre, pour les personnels sous convention collective du secteur social et médico-social, des revalorisations exceptionnelles d'indice prévues dans le cadre des « accords Durafour ».

Depuis 1996, s'est ouvert un cycle de progression ralentie de la dépense de l'ordre de 3,5 % par an tandis que l'inflation demeure à des niveaux modérés.
Les départements développent des systèmes de prise en charge en milieu ouvert moins coûteux qu'en structure d'accueil. Corrélativement, les dépenses liées au RMI, tout en se maintenant à un niveau élevé, évoluent moins vite et les revalorisations salariales sont entrées en vigueur.

2. L'analyse des différentes composantes de la dépense d'action sociale

Le tableau ci-dessous, transmis par l'ODAS, permet d'analyser les différentes composantes de l'action sociale des départements en 1999.

Evolution des dépenses nettes d'aide sociale en 1999

(en milliards de francs)

 

Dépense nette 1999

Dépense nette 2000

Evolution 1999/2000 (en %)

Aide sociale à l'enfance

27,8

28,2

+ 1,44

Aide sociale en direction des personnes âgées

11,6

11,2

- 3,45

Aide sociale en direction des personnes handicapées

15,7

16,7

+ 6,37

Autres dépenses

20,2

20,1

- 0,5

TOTAL

75,3

76,5

+ 1,59

Source : ODAS

a) L'aide sociale à l'enfance

Les dépenses d'ASE sont constituées par :

- les frais de prise en charge des enfants, faisant l'objet d'une décision de placement en établissement d'éducation spécialisée ou en famille d'accueil, financés par le département. En 1997, ces dépenses représentent 70 % des dépenses d'ASE ;

- les dépenses liées au soutien en milieu ouvert, qu'il s'agisse des mesures d'action éducative en milieu ouvert (AEMO), du recours aux travailleuses familiales ou des aides aux associations.

L'ASE représente un peu plus de 28 milliards de francs en 2000 et constitue encore le premier poste de l'action sociale départementale. La faible progression de 2000 semble due à une baisse du nombre de signalements d'enfants en danger.

Dépense nette d'aide sociale à l'enfance (France métropolitaine)

(en milliards de francs)

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Dépense nette

18,6

20,5

21,9

22,9

23,9

24,9

25,9

27,1

27,8

28,2

Source : ODAS

b) Les dépenses d'aide sociale aux personnes âgées

Selon l'ODAS, l'aide sociale aux personnes âgées représente un coût total de 11,2 milliards en 2000 en tenant compte du montant de l'allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) lorsque celle-ci est versée à des personnes âgées de plus de 60 ans ainsi que de la PSD.

Sans empiéter sur l'excellent rapport de M. Dominique Leclerc consacré à la vieillesse dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, les données fournies par l'ODAS font apparaître :

- une stabilité des dépenses au titre de l'aide sociale en établissement, au cours de la dernière année de fonctionnement de la prestation spécifique dépendance (PSD) ;

- une baisse de l'aide sociale à l'hébergement à domicile, en raison des difficultés de fonctionnement de la PSD.

Dépense nette d'aide sociale en direction des personnes âgées

(en milliards de francs)

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Aide sociale en établissement

5,5

5,7

6,0

6,5

6,7

7,0

7,0

6,9

6,9

7

Aide sociale à l'hébergement

4,8

4,9

5,1

5,5

5,7

6,0

6,0

5,9

5,7

5,5

Allocation compensatrice *

0,7

0,8

0,9

1,0

1,0

1,0

1,0

0,6

0,4

0,3

PSD **

 
 
 
 
 
 
 

0,4

0,8

1,2

Aide sociale à domicile

5,2

5,8

5,9

6,0

6,4

6,5

6,1

5,4

4,7

4,2

Aide ménagère

1,5

1,5

1,4

1,3

1,3

1,2

1,1

1,0

0,9

0,9

Allocation compensatrice *

3,7

4,3

4,5

4,7

5,1

5,3

4,9

3,5

2,1

1,3

PSD **

 
 
 
 
 
 

0,1

0,9

1,7

2,0

TOTAL

10,7

11,5

11,9

12,5

13,1

13,7

13,3

12,3

11 ,6

11,2

Source : ODAS

* Estimation ODAS mars 2000.

c) L'aide sociale aux personnes handicapées

L'aide sociale aux personnes handicapées donne lieu à une répartition de compétence complexe entre l'Etat, l'assurance maladie et les départements. La prise en charge des enfants handicapés fait l'objet d'un financement intégralement assuré par la sécurité sociale tandis que celui-ci est partagé avec les départements pour l'hébergement des personnes handicapées adultes.

Le département assure les frais d'hébergement des handicapés adultes au sein de diverses structures telles que les foyers de vie, les foyers occupationnels et les hospices, à l'exception toutefois des maisons d'accueil spécialisé (MAS) qui, parce qu'elles sont réservées aux handicaps les plus lourds, sont financées par l'assurance maladie. Par ailleurs, les centres d'aide par le travail (CAT) et les ateliers protégés, comme on l'a vu plus haut, relèvent de la responsabilité de l'Etat.

De plus, les foyers dits à double tarification (FDT) connaissent, au sein d'un même établissement, un financement assuré par l'Etat pour la prise en charge des soins et par le département pour les frais d'hébergement.

Le poste le plus important est celui des dépenses d'hébergement qui s'élève à 13,3 milliards de francs en 2000. Celles-ci connaissent un taux de progression de 6 % essentiellement dû à la progression des dépenses en établissement de créations de places à la fois pour accueillir un nombre croissant d'adultes handicapés et moderniser les places des hospices.

En revanche, les dépenses d'allocations compensatrices -qui ne recouvrent ici par convention que les dépenses d'ACTP versée aux personnes âgées de moins de 60 ans- font preuve d'une relative stabilité depuis la décentralisation.

Il convient de souligner l'effort considérable entrepris par les départements, de manière volontariste en matière d'ouverture d'établissements, qui a permis d'accroître sensiblement le nombre de personnes hébergées qui a triplé -de 39.000 à 92.000 places- entre 1986 et 1998.

Dépense nette d'aide sociale en direction des personnes handicapées

(en milliards de francs)

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Hébergement

6,5

7,0

8,1

9,1

9,8

10,5

11,0

11,8

12,4

13,3

Allocation compensatrice (moins de 60 ans)

2,7

2,8

2,9

3,0

3,0

3,0

3,1

3,2

3,2

3,4

TOTAL

9,2

9,8

11,0

12,1

12,8

13,5

14,1

15,0

15,7

16,7

Source : ODAS

Il faut relever que, sur ces 53.000 ouvertures de places, près de la moitié (22.000) l'ont été en structure d'accueil de jour ou en milieu ouvert. Le développement de ces types d'accueil a permis de limiter les coûts des prises en charge, tout en permettant aux adultes handicapés une meilleure intégration sociale.

d) Les dépenses d'insertion

L'ensemble des dépenses d'insertion prises en charge par les départements s'élève à 20,1 milliards de francs en 1999. Ces dépenses comprennent deux postes :

- les dépenses d'insertion liées au RMI dans le cadre de l'obligation qui est faite au département d'inscrire annuellement à son budget un crédit au moins égal à 17 % des sommes versées, au cours de l'exercice précédent, par l'Etat au titre de l'allocation attribuée à des personnes résidant dans le département : le montant de ces dépenses est évalué à 4,0 milliards de francs en 1999 ;

Les dépenses d'accompagnement social : Il s'agit des dépenses des services de protection maternelle et infantile (PMI), du service social départemental ainsi que sur les frais communs et d'action sociale facultative. Ces dépenses sont évaluées à 16,1 milliards de francs en 2000.

Dépense nette d'insertion et d'accompagnement social

(en milliards de francs)

 

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

RMI

1,3

1,8

2,2

2,7

3,1

3,2

3,5

4,0

4,5

4,0

Accompagnement social

10,7

11,2

12,0

12,4

13,6

14,1

14,7

15,3

15,7

16,1

TOTAL

12

13

14,2

15,1

16,8

17,3

18,2

19,3

20,2

20,1

Source : ODAS

3. Les budgets primitifs des départements pour 2001

A partir des données fournies par 72 départements, l'Assemblée des départements de France (ADF) a évalué les budgets primitifs des conseils généraux en 2001 (source : ADF-CEDI).

Les dépenses brutes totales d'action sociale représentent 56,4 % des dépenses de fonctionnement en 2001.

Elles s'élèvent à 89,5 milliards de francs en 2001 soit une progression de 1,9 % par rapport en 2000.

Les dépenses directes passent de 73,5 milliards de francs en 2000 à 74,5 milliards de francs en 2001 , soit une hausse de 1 milliard de francs et les dépenses indirectes progressent de 0,7 milliard de francs.

Les départements devraient consacrer principalement :

- 26,8 milliards de francs pour la protection de l'enfance et de la famille : l'aide sociale à l'enfance et à la famille reste le premier poste de dépenses de l'action sociale, en progression de 5,5 % par rapport en 2000 ;

- 21,1 milliards de francs pour les personnes handicapées ;

- 17,3 milliards de francs pour les personnes âgées ;

- 4,3 milliards de francs pour l'insertion.

B. DES FACTEURS RÉCURRENTS ET NOUVEAUX DE PRESSION À LA HAUSSE SUR LA DÉPENSE D'AIDE SOCIALE DES COLLECTIVITÉS LOCALES

Les années 2000 et 2001 pourraient bien être les deux dernières années du « cycle de répit » des dépenses sociales départementales.

En effet, l'ODAS 12( * ) estime que les dépenses devraient fortement augmenter après 2001 « sous l'influence conjointe des 35 heures et de la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie »

En l'an 2000, l'application de la réduction du temps de travail s'est faite de manière « indolore » pour les conseils généraux en raison du soutien financier transitoire de l'Etat et du caractère progressif des créations de postes supplémentaires dans les établissements. Par ailleurs, la mise en place définitive de l'APA en janvier 2002, assortie de l'ouverture des droits aux personnes âgées moyennement dépendantes (GIR 4), devrait se traduire par une forte augmentation de la dépense d'aide sociale à domicile et en établissement, sans même parler des coûts de gestion particulièrement lourds.

Au total, l'ODAS n'exclut pas que l'on rentre à nouveau, dans un cycle de cinq ans de forte expansion des dépenses d'aide sociale départementale . De tels cycles ont déjà été observés par le passé. L'ODAS avance ainsi comme « réaliste » des taux annuels d'augmentation de dépenses supérieurs à 5 % à partir de 2002.

Votre rapporteur souligne pour sa part qu'aux facteurs déjà connus de nature à alourdir le coût structurel des prestations d'aide sociale viennent se surajouter des éléments nouveaux tendant à aggraver la situation.

1. Les facteurs déjà connus d'alourdissement des coûts

M. Jean Chérioux avait largement commenté, dans ses avis des années précédentes, les conséquences du passage aux 35 heures hebdomadaires de travail, de la remise en cause contentieuse des règles de rémunération des heures de permanences en chambre de veille et de l'avenant relatif à la rémunération des cadres agréé au titre de convention collective de 1966.

a) La mise en place ardue de la réduction du temps de travail

Les salariés des établissements sociaux et médico-sociaux, soit près de 300.000 personnes, relèvent principalement de deux conventions collectives.

- la convention collective du 15 mars 1966 de la Fédération 13( * ) des syndicats nationaux d'employeurs des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées à but non lucratif qui concerne 180.000 salariés ;

- la convention collective du 31 octobre 1951 de la Fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privée à but non lucratif (FEHAP) du 31 octobre 1951 qui concerne dans le champ médico-social environ 80.000 salariés.

Les deux conventions collectives participent à la branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif (UNIFED) régi par des conventions collectives « agréées » par décision ministérielle.

Le secteur social et médico-social a été expressément inclus par la loi « Aubry I » dans le champ de la réduction du temps de travail.

La difficulté par rapport aux entreprises du secteur marchand est que les gains de productivité qui seraient susceptibles de compenser la baisse du temps de travail et d'atténuer ainsi le surcoût de la mesure, sont faibles, voire inexistants dans le secteur social et médico-social.

Tout d'abord, la durée des soins et de l'assistance requise par une personne handicapée reste la même au cours d'une journée, quels que soient les horaires des travailleurs sociaux. Comme le souligne l'UNIOPSS, le secteur médico-social « fait face à des hommes et non pas à des machines ».

Mais surtout, deux phénomènes sont apparus qui aggravent la situation.

Tout d'abord, le Gouvernement a ouvert la possibilité d'agréer les accords collectifs relatifs aux trente-cinq heures au niveau de chaque association responsable : Or, une même association peut comprendre plusieurs établissements de petite taille. Le passage aux trente-cinq heures s'est effectué rapidement dans les unités de moins de vingt salariés dans le secteur social et médico-social. Or, dans ces petits établissement, la réorganisation du temps de travail est particulièrement complexe compte tenu des seuils d'encadrement des publics accueillis.

Ensuite, la mise en oeuvre du temps de travail entraîne des « réactions en chaîne » : c'est ainsi que des travailleurs en CAT sont passés aux trente-cinq heures dans le cadre de mesure spécifiques ; dès lors que ces travailleurs handicapés rejoignent plus tôt les foyers d'hébergement, les personnels de ces foyers sont soumis à des sollicitations croissantes, alors qu'ils doivent eux-mêmes tirer les conséquences de la réduction du temps de travail. Il en résulte automatiquement le recours à des embauches compensatrices dans des proportions plus importantes que prévues, dont le coût devra être évalué.

Le succès de la réduction du temps de travail, sans dérapage pour les financeurs départementaux, nécessite une compréhension par les personnels concernés de l'effort de modération.

Dans certains cas, d es ajustements ont dû être opérés sur la durée des services offerts aux personnes accueillies dans les établissements. Le réaménagement du temps de travail conduit alors à une diminution de la qualité du service pour les personnes accueillies.

Ainsi, par exemple, les CHRS ont dû renoncer à maintenir certaines activités d'insertion qui étaient proposées pendant les périodes de congé annuel. Dans les établissements de protection de l'enfance, il a été procédé à des regroupements plus importants d'enfants pour l'exercice des activités socio-éducatives. Dans les établissements pour adultes handicapés, les activités sont également plus réduites qu'auparavant pendant les périodes de congés annuels. Certains instituts médico-éducatifs ont réduit l'amplitude de leurs horaires d'ouverture.

Par ailleurs, les deux lois relatives à la réduction du temps de travail (RTT) ont prévu diverses dispositions à respecter concernant la durée quotidienne et hebdomadaire de travail, les temps de pause, les repos quotidiens et les repos hebdomadaires. Les dispositions relatives au compte épargne-temps (CET) sont également à prendre en compte.

Ces mesures ont des effets assez importants pour les structures qui vis-à-vis des personnes hébergées ont la responsabilité lourde d'une prise en charge permanente , de jour comme de nuit, et tout au long de l'année, y compris les samedi et dimanche.

Une simulation réalisée par l'UNIFED montre ainsi que, pour une structure d'hébergement accueillant entre 15 et 20 personnes handicapées et employant actuellement cinq salariés, l'application rigoureuse de la loi conduit à faire passer les effectifs du personnel de 7 à 12 personnes, dont 2 gardiens de nuit n'ayant pas le statut de travailleur social. Paradoxalement, il serait possible d'appliquer la loi à moindre coût en imposant des contrats de travail à temps réduit aux nouveaux salariés, ce qui ne serait ni réaliste, ni adapté à leur demande.

Le secteur est rentré dans une période d'incertitude partagée entre la préoccupation d'appliquer correctement la loi et la tentation de reporter massivement sur le financeur, et donc sur le contribuable local ou l'usager, le surcoût dû aux nouvelles mesures législatives.

b) La question toujours pendante de la validation des heures de surveillance en chambre de veille

Adapté à l'initiative du Sénat, l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail à valider les «  versements effectués au tire de la rémunération des périodes de permanence nocturne, comportant des temps d'inaction, effectuées sur le lieu de travail en chambre de veille ».

Cette validation faisait suite à une décision de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 29 juin 1999 qui avait constaté que les régimes d'équivalence pour les heures de travail en chambre de veille n'étaient pas applicables dans la mesure où il s'agissait d'un dispositif dérogatoire qui ne pouvait relever que d'un accord collectif étendu, ce qui n'était pas le cas de la convention de 1966.

Compte tenu des effets rétroactifs, la remise en cause des accord d'équivalence sur les chambres de veille, entraînerait pour les financeurs une charge de 3,7 milliards de francs, répartis pour près de 90 % entre les départements et l'assurance maladie, le solde incombant à l'Etat.

Toutefois, dans un arrêt de la Cour d'Appel de Versailles du 11 mai 2000, puis dans un arrêt de la Cour d'Appel de Paris du 27 juin 2000, les juges judiciaires ont écarté l'application de l'article 29 précité au motif qu'il contreviendrait à l'article 6, paragraphe I, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

Par voie de décision du 24 avril 2001 14( * ) , la Cour de Cassation a suivi la Cour d'Appel de Versailles en se fondant sur l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme qui « s'oppose, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêts général, à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice afin d'influer sur le dénouement judiciaires d'un litige ».

En l'espèce, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a estimé que l'article 29 précité « dont il n'est pas établi qu'un motif impérieux d'intérêt général le justifiait, remettait en cause une jurisprudence favorable au salarié en matière d'heures d'équivalence » et qu'il convenait donc d'en écarter l'application.

Les positions prises par les juges judiciaires remettent en cause la portée des validations législatives.

De surcroît, sur quelle légitimité peut s'appuyer le juge nommé pour se faire l'interprète du caractère d'intérêt général d'une disposition appréciée comme telle, à la fois par les parlementaires démocratiquement élus et par le Gouvernement lui-même nommé par le Président de la République élu au suffrage universel ?

Quelle que soit l'indifférence portée par le pouvoir judiciaire aux conséquences « générale » des décisions qu'il prend, il n'en demeure pas moins que la régularisation rétroactive du paiement des heures de permanence entraînerait un surcoût de 3,7 milliards de francs pour l'ensemble des employeurs de la branche. Faute de prise en charge des dépenses, ce sont de nombreuses associations qui seront demain en cessation de paiement et devront interrompre leur activité.

Enfin, la loi du 19 janvier 2000 prévoit pour l'avenir que le régime dérogatoire des équivalences doit être mis en place par décret en Conseil d'Etat, ou par décret simple pris après conclusion d'une convention ou d'un accord de branche étendu.

Il apparaît aujourd'hui que les négociations en ce sens ayant échoué au niveau de la branche sanitaire, sociale et médico-sociale à but non lucratif, seul un décret en Conseil d'Etat permettrait d'instituer un régime d'équivalence dans notre secteur. Il ne semble pas que le Gouvernement montre de l'empressement à clarifier la situation.

Au demeurant, il est regrettable que le manque d'attention du Gouvernement sur le caractère exceptionnel et dangereux de la situation juridique ainsi créé n'aboutisse à des procédures « ubuesques ».

Sur le terrain, les situations se compliquent : il est frappant de constater que le 19 septembre 2001 un directeur d'établissement, qui continuait de rémunérer les heures passées en chambre de veille sur la base des horaires d'équivalence, s'est vu dresser un procès-verbal par l'inspection du travail pour infraction à la durée du travail. Alors que le Gouvernement tarde à publier le décret sur les équivalences qui permettrait de donner une base stable pour l'avenir, les directions du travail continuent, elles, à alimenter les contentieux.

Par ailleurs, votre rapporteur a été informé d'un récent arrêt d'un tribunal d'instance, qui, à la suite du dépôt d'une plainte, a condamné un directeur d'établissement à 700.000 francs d'amende et trois mois de prison avec sursis pour n'avoir pas respecté les règles de rémunération intégrale des heures de permanence en chambre de veille : la « pénalisation » du droit du travail conduit à des excès regrettables dans un domaine où les associations gestionnaires n'assurent pas par elles-mêmes la maîtrise de leur financement.

c) L'avenant « cadre » à la convention collective du 15 mars 1966

Le 26 avril 1999, a été signé un avenant n° 265 revalorisant le statut du personnel d'encadrement dans le cadre de la convention collective de 1966, qui a finalement, après diverses péripéties, été agrée par le Gouvernement par une décision du 6 septembre 2000.

Cet avenant prévoit une revalorisation du régime indemnitaire des cadres ainsi qu'une nouvelle classification en fonction de leur niveau de qualification afin de résorber l'écart qui était apparu avec les personnels équivalents relevant de la convention FEHAP du 31 octobre 1951.

Cet avenant répond à un besoin de rattrapage qui avait été, semble-t-il, trop longtemps différé ; il n'en reste pas moins qu'il devrait avoir un coût au cours des prochaines années pour les établissements sociaux et médico-sociaux qui accueillent des personnes handicapées. Ce coût est évalué à 1,75 % de la masse salariale.

2. Les nouveaux risques de dérapages incontrôlés

a) La question de maintien du niveau des rémunérations pendant la période transitoire d'entrée en vigueur des accords agréés

Divers contentieux ont été introduits sur la maintien du niveau de rémunération appliqué par des établissements dans l'attente de la validation définitive des accords de réduction du temps de travail qu'ils avaient conclus avec leurs salariés.

Compte tenu des délais d'examen de ces accords, -délais imputables à la lourdeur de la procédure-, les accords n'ont pu être effectivement appliqués qu'en février ou mars 2000 alors que la loi s'appliquait, elle, au 1 er janvier de l'année.

Plusieurs salariés ont alors intenté des recours pour obtenir que les heures supplémentaires, -qui pouvaient atteindre jusqu'à un tiers de la durée prévue dans le contrat de travail-, fassent l'objet de la majoration de salaire à hauteur de 25 % prévue par la loi à compter de l'entrée en vigueur de la RTT au 1 er janvier 2000. Le coût de ces contentieux pourrait porter sur 2,54 % de la masse salariale globale versée par les associations concernées.

b) L'augmentation de l'indemnité de précarité

L'article 35 B du projet de loi de modernisation sociale, actuellement en cours d'examen devant le Parlement, a été introduit à l'initiative de l'Assemblée Nationale en première lecture.

Cet article a pour objet d'aligner le taux de l'indemnité de précarité dont bénéficie un salarié à l'issue de son contrat de travail à durée déterminée (CDD) sur celui appliqué en faveur des travailleurs intérimaires. Le taux de 6 % de la rémunération brute actuellement appliqué aux salariés sous CDD doit donc passer à 10 %.

La majoration du taux à laquelle le Sénat était opposé, aura une incidence importante dans le secteur social et médico-social, car de nombreux salariés sont actuellement dans le cadre de CDD.

Le surcoût peut être évalué à 0,64 % de la masse salariale pour l'ensemble du secteur.

c) Le risque d'une remise en question des accords de modération salariale conclus en 2000

La réussite de la réduction du temps de travail repose très largement sur le respect des accords de modération salariale passés avec les personnels couverts par les conventions collectives.

Par exemple, l'accord SNAPEI du 12 mars 1999 a prévu un gel de la valeur du point et des mesures catégorielles en 1999 et 2000 ainsi qu'une suspension à durée indéterminée de la majoration familiale de traitement : la mesure de gel des salaires a porté au minimum sur 2,58 % de la masse salariale.

Les accords, compte tenu des aides budgétaires versées par l'Etat, de la diversité des durées hebdomadaires de travail selon les établissements et du moindre niveau des salaires des personnes nouvellement embauchées, ont permis de financer le passage aux trente-cinq heures et en, particulier, de compenser le seuil de 11,4 % d'embauches supplémentaires que nécessite logiquement le dispositif.

Il reste que le succès de la réduction du temps de travail, sans dérapage pour les financeurs départementaux, nécessite une compréhension par les personnels concernés de l'effort de modération salariale qui leur est demandé et par la possibilité d'une réorganisation des astreintes et des périodes de permanence.

On regrettera de surcroît que la politique suivie par le Gouvernement dans le secteur hospitalier aboutisse un peu plus à brouiller les cartes et à amplifier le risque d'une explosion des dépenses.

Traditionnellement, les salariés du secteur médico-social se placent dans la perspectives d'une parité avec la fonction publique hospitalière.

Au demeurant, cette parité est souvent imposée dans les faits, car les employeurs souhaitent pouvoir recruter du personnel à compétence égale sur des missions dont la nature est proche de celles effectuées dans le secteur hospitalier.

Dès lors que le Gouvernement choisit d'opérer le passage aux 35 heures dans la fonction publique hospitalière « sans retenue ni modération salariale », il ne faut pas s'étonner si les salariés du secteur médico-social réclament à leur tour un rattrapage rétro-actif sur les 2,58 % de salaire auxquels ils avaient renoncé en 2000 au nom de la bonne application de la RTT.

*

* *

Compte tenu des analyses et observations exposées ci-dessus, et parce que ce budget est en fait lourd de menaces pour l'avenir, votre commission a décidé d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de solidarité pour 2002.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DE MME ELISABETH GUIGOU, MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ

Cette audition, fixée le 20 novembre 2001, ayant dû être annulée en raison de l'indisponibilité de la ministre, la commission s'est prononcée définitivement le 21 novembre 2001 sans avoir pu entendre le gouvernement (voir ci-après examen de l'avis).

II. EXAMEN DE L'AVIS

Réunie le mercredi 21 novembre 2001 sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l' examen du rapport pour avis de M. Paul Blanc sur le projet de loi de finances pour 2002 (crédits consacrés à la solidarité).

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis,
a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. exposé général).

M. Jean Chérioux a souligné que les besoins dans le domaine social étaient immenses et que, pour éviter la surenchère entre les diverses demandes, il était important de ne pas évaluer le budget uniquement à l'aune du montant des crédits supplémentaires. Il a estimé prioritaire d'éviter la saturation de la capacité d'accueil des CHRS et il a appelé de ses voeux une réforme en profondeur des COTOREP.

M. André Vantomme a rappelé que les crédits affectés à la santé et à la solidarité augmentaient de 2,8 milliards de francs de crédits supplémentaires, soit une augmentation équivalente à celle de l'an dernier. Il s'est félicité que la part consacrée aux mesures nouvelles, en dehors de l'augmentation automatique des minima sociaux, s'élève à 1,3 milliard de francs soit le double des années antérieures. Il a observé que le budget continuait à contribuer à la prévention et à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, permettait de soutenir la formation des professionnels de santé et d'augmenter les moyens à destination des programmes prioritaires de santé publique, de renforcer les COTOREP, de créer des places supplémentaires en CAT et des postes d'auxiliaires de vie et, enfin, de mettre en oeuvre la loi relative à l'allocation personnalisée d'autonomie grâce à la création des nouveaux centres locaux d'information et de coordination (CLIC). Pour toutes ces raisons, il a précisé que le groupe socialiste soutiendrait le projet de budget de la solidarité pour 2002.

M. Roland Muzeau a rappelé que, malgré les inquiétudes exprimées par le rapporteur pour avis sur l'évolution des dépenses du secteur social et médico-social, le Sénat avait adopté récemment le projet de loi portant rénovation de l'action sociale et médico-sociale conformément aux conclusions de M. Paul Blanc lui-même. Il a souhaité que le travail sur la réforme de la loi du 30 juin 1975 d'orientation relative aux personnes handicapées aboutisse le plus rapidement possible.

Sur proposition de M. Paul Blanc, rapporteur pour avis, la commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs à la solidarité dans le projet de loi de finances pour 2002.

ANNEXE
-
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR VOTRE RAPPORTEUR

(par ordre chronologique)

• M. Patrick GOHET, Directeur général de l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (UNAPEI)

• M. Philippe CALMETTE, Directeur général du Syndicat national des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (SNAPEI), et M. Frédéric LEFRET, responsable des relations institutionnelles

• M. Jean-Louis SEGURA, Directeur général de l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés (AGEFIPH)

• M. Marc ROUZEAU, Directeur général de l'Association des paralysés de France (APF) et Mme Fabienne JEGU, Directrice du service de la défense des droits de la personne handicapée

• M. Jean-Louis SANCHEZ, Délégué général de l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée (ODAS)

• M. Jean-Paul PENEAU, Directeur général de la Fédération nationale des Associations d'accueil et de réadaptation sociale (FNARS)

• M. Fernand TOURNAN, Président de l'Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH)

• M. Christian CHASSERIAUD, Président, Mme Marie-France MARQUES, Directrice, de l'Association française des organismes de formation et de recherches en travail social (AFORTS)

• M. Marc GONZALVEZ, Vice-président, Mme Anne-Sophie PARISOT, Mme Marie-France BOUDOT, du Collectif des Démocrates handicapés



1 Régime général métropole et régime agricole.

2 Le Monde, samedi 24 novembre 2001 (le chiffre de 2 milliards de francs incorpore le coût au titre de l'API et de l'allocation d'insertion (AI) en plus de celui au titre du RMI).

3 L'obligation d'inscription des crédits est passée de 20 à 17 % du fait de la mise en place de la CMU.

4 En compensation du taux inférieur du RMI dans les DOM, l'Etat participe dans ces départements au financement d'actions d'insertion au profit des bénéficiaires du RMI, en plus de celles de droit commun déjà financées. Ces crédits appelés « créances de proratisation du RMI » représentent la différence entre les allocations versées dans les DOM chaque année, et le montant qu'elles auraient atteint, en prenant en compte le nombre de personnes qu'elles auraient concernées, si le barème métropolitain avait été appliqué. Cette créance est en voie d'extinction au fur et à mesure de l'alignement du niveau du RMI dans les DOM sur celui appliqué en métropole.

5 Rapport n° 206 (2000-2001) de M. Philippe Nogrix, sénateur au nom de la commission des Affaires sociales.

6 Etudes et résultats - n° 79 septembre 2000 - Direction de la recherche, des études de l'évaluation et des statistiques (DREES).

7 Premières informations et première synthèse DARES n°2000- juillet - n° 28-1 : disponible sur le site du ministère de l'emploi et de la solidarité (www.travail.gouv.fr/).
8 Pour être complet, il importe de préciser toutefois que, dans la fonction publique, un travailleur handicapé ne compte que pour une unité alors qu'il peut être décompté dans le secteur privé pour plusieurs unités suivant la gravité de son handicap. De plus, les administrations ne peuvent pas exclure de l'assiette de calcul du taux d'emploi certaines catégories de personnels dans lesquelles il ne peut être, par définition, recruté de travailleurs handicapés (gardiens de la paix notamment).

9 Avis du Conseil économique et social sur le rapport présenté par M. Vincent Assante au nom de la section du cadre de vie - Situations de handicap et cadre de vie - Séance des 12 et 13 septembre 2000.

10 Idem.

11 La lettre de l'ODAS, numéro spécial mai 2001.

12 La lettre de l'ODAS, numéro spécial, mai 2001.

13 La fédération rassemble : le syndicat général es organismes privés sanitaires et sociaux à but non lucratif (SOP), le syndicat national des associations pour la sauvegarde de l'enfant à l'adulte (SNASEA), le syndicat national des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales (SNAPEI).

14 Cour cass. Ch Soc. 24 avril 2001, Association « Être enfant au Chesnay » c/Terki


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