Projet de loi de finances pour 2002 - Tome VIII : Défense - Marine

BOYER (André)

AVIS 90 - TOME VIII (2001-2002) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES

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Table des matières




N° 90

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME VIII

DÉFENSE - MARINE

Par M. André BOYER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Xavier de Villepin, président ; MM. Michel Caldaguès, Guy Penne, André Dulait, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Robert Del Picchia, Jean-Paul Delevoye, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe François, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Henri Torre, André Vallet, Serge Vinçon.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 3262 , 3320 à 3325 et T.A. 721

Sénat
: 86 et 87 (annexe n° 43 ) (2001-2002)


Lois de finances .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

L'année 2001 aura été particulièrement riche pour la défense et pour la Marine. Elle aura été marquée par les progrès de l'Europe de la défense, l'entrée en service du porte-avions « Charles de Gaulle » et son engagement dès le mois de décembre au côté des bâtiments de la Marine, déjà sur zone en l'Océan indien, dans la guerre contre les forces terroristes et le régime taliban en Afghanistan et par la présentation du projet de loi de programmation militaire pour 2003-2008 ouvrant un volet supplémentaire vers la modernisation de nos forces et pour la Marine vers le renouvellement attendu de la flotte.

Dans la force de réaction rapide de 100 000 hommes, 400 avions et 100 bâtiments de combats que les Quinze se sont engagés à mettre en place d'ici 2003, la France tient une place importante en apportant 18 bâtiments et au niveau global environ 20 % des forces. La contribution française dans le domaine naval a pour objectif d'assurer à l'Union européenne la maîtrise de l'information dans le milieu aéromaritime grâce à des avions de patrouille maritime, les frégates anti-aériennes et les avions Hawkeye et de fournir des structures de commandement et des éléments majeurs comme le groupe aéronaval (porte-avions, escorte et groupe aérien) ou le groupe amphibie. Par ailleurs, pour compenser les lacunes constatées au niveau européen, la France s'est engagée dans le domaine naval à fournir à l'Union européenne des capacités nouvelles comme l'accueil d'un état-major de force embarqué à bord des NTCD, le tir de missiles de croisière SCALP et l'amélioration des capacités déjà proposées avec l'entrée en service de matériels plus modernes comme le Rafale ou les frégates Horizon. Enfin, en matière de coopération opérationnelle, s'est tenue pour la première fois, en juillet 2001, la première conférence des commandants des forces amphibies de cinq pays de l'Union européenne (France, Pays-Bas, Royaume-Uni, Italie et Espagne) afin d'améliorer leur coopération et d'assurer un meilleur usage commun des capacités nationales.

Dans le cadre de la guerre entamée contre les réseaux terroristes en Afghanistan, la France a tout d'abord déployé des moyens de soutien sur zone grâce aux bâtiments pré-positionnés dans l'Océan indien. Il s'agit essentiellement du bâtiment de commandement et de ravitaillement (BCR) «Var » et de la frégate « Courbet » de type « La Fayette ». Ces moyens logistiques ont été jusqu'à présent très appréciés par les forces américaines et les relations avec elles ont été rapidement confiantes et efficaces, les forces françaises de l'Océan indien ayant déjà permis de sauver les vies de marins américains lors de l'attentat contre le « USS Cole » au Yémen en les soignant à l'hôpital militaire de Djibouti. Ces forces ont été complétées par l'envoi du bâtiment de recueil de renseignement le « Bougainville ». Le Président de la République et le Gouvernement ont en outre décidé de faire appareiller le « Charles de Gaulle » et l'ensemble du groupe aéronaval dès que possible, soit début décembre, pour la mer d'Oman. Sur zone il participera aux opérations en cours soit, grâce à ses moyens de surveillance, en empêchant l'exfiltration de terroristes par voie de mer, soit, grâce à son aviation embarquée, en fournissant un appui aérien et des moyens de reconnaissance à nos troupes en Afghanistan.

Enfin, le projet de budget 2002 s'inscrit d'ores et déjà dans la perspective du projet de loi de programmation militaire (LPM) 2003-2008 approuvé en Conseil des ministres, certains calendriers ou certains investissements étant aménagés dès cette année en fonction des priorités définies par la LPM. Cette loi doit permettre après 2002 d'achever la réforme entamée en 1996 en concentrant l'effort non plus sur la professionnalisation proprement dite des forces mais sur la modernisation des matériels. Pour la Marine, l'enjeu est de taille, puisqu'il s'agit dès cette année et durant les six prochaines de préparer et de mener à bien le renouvellement du coeur de la flotte de surface et sous-marine et d'entamer le remplacement des avions et des hélicoptères actuellement embarqués sur le porte-avions ou dédiés à des missions de service public.

CHAPITRE I -
LES GRANDES LIGNES DU BUDGET DE LA MARINE
POUR 2002

Le budget de la défense s'élèvera en 2002 à 36,9 milliards d'euros. Il sera le 4 e poste de dépense de l'Etat après l'éducation nationale (55 Mds €), la dette (54,8 Mds €) et l'emploi (38,6 Mds €).

La Marine représentera 17 % du budget du ministère de la défense avec 5 006,4 millions d'euros en 2002 ; sa part est légèrement inférieure à 2001 mais sur la longue durée elle est stable. Sa dotation est inférieure d'un tiers à celle de l'armée de terre (7,2 Mds €) et légèrement inférieure à celle de l'armée de l'air (5,06 Mds €). Elle est en revanche supérieure à la celle de la gendarmerie et aux dotations des services communs. Pour 2002, le budget de la Marine est en régression de 1,6 %.

Les crédits d'investissement (titres V et VI) représentent 61,9 % du budget. Les crédits de fonctionnement et de rémunération et charges sociales (RCS) du titre III représentent 38,1 % du budget.

I. LES CRÉDITS DE RÉMUNÉRATION ET DE FONCTIONNEMENT, LE TITRE III DU BUDGET 2002

Le niveau des crédits du titre III paraît satisfaisant. Ils s'élèvent à 1 908,7 millions d'euros en diminution de 2,5 % en euros constants.

Evolution des crédits du titre III de 2001 à 2002

(exprimés en millions d'euros)

 

LFI 2001

(euros courants)

PLF 2002

(euros courants)

Evolution en euros constants (en %)

 

AP

CP

AP

CP

CP

RCS

 

1 521

 

1 507

- 2,1

Fonctionnement courant

 

310

 

326

4,0

Alimentation

 

57

 

56

- 3,0

Subventions

 

2

 

2

- 1,2

EPM

45

45

18

18

- 60,5

Total

45

1 935

18

1 909

-2,5

Les crédits de rémunérations et charges sociales représentent un total de 1 507 millions d'euros, en diminution de 0,95 % en raison de la diminution des effectifs (905 emplois) et malgré les revalorisations indiciaires et de prestations familiales communes à la fonction publique et les mesures de revalorisation en faveur des personnels représentant 5,5 millions d'euros, essentiellement au profit des jeunes officiers mariniers et de certaines spécialités rares (atomiciens, contrôleurs aéronautiques, informaticiens).

Hors RCS, les crédits du titre III pour 2002, soit 402 millions d'euros, permettent de financer l'alimentation, les produits pétroliers, le fonctionnement courant, la subvention accordée au musée de la Marine (1,93 M €) et une part résiduelle de l'entretien programmé des matériels (EPM). Par rapport à 2001, ces crédits évoluent comme l'ensemble du titre III et enregistrent une baisse de 3 %.

Les crédits destinés à financer les produits pétroliers semblent cette année correspondre aux besoins avec 75 millions d'euros soit un augmentation de 1 millions d'euros par rapport à 2001. Ils permettront d'accroître le nombre moyen de jours de mer de 94 à 97. Rappelons qu'au début de la loi de programmation, il était inférieur à 90 jours. Ils restent cependant sujets aux doubles variations du prix du pétrole et du cours du dollar, estimés à 22 $ le baril et 0,99 € dans le PLF. Votre rapporteur regrette que ces crédits ne correspondent pas à une enveloppe provisionnelle souple, permettant quelle que soit l'évolution des marché internationaux de réaliser les objectifs d'entraînement des forces.

Les crédits de fonctionnement courant augmenteront en 2002 de 6,4 % et s'élèveront à 251 millions d'euros pour tenir compte essentiellement de l'augmentation de l'activité. Ils permettront une gestion plus souple que ces dernières années et s'inscrivent dans un plan triennal de réévaluation des besoins débuté en 2001. Une nouvelle hausse est donc attendue en 2003.

Les crédits d'alimentation diminueront de 1,9 % et s'élèveront à 56 millions d'euros.

Les crédits d'EPM ont fortement diminué au titre III en raison d'un transfert de charge, sans compensation financière, vers le titre V, qui a permis d'attribuer des ressources supplémentaires au fonctionnement courant mais obère la gestion du titre V. Ce transfert représentera 27 millions d'euros en 2002.

II. LES CRÉDITS D'INVESTISSEMENTS, LES TITRES V ET VI DU BUDGET 2002

Evolution des crédits des titres V et VI de 2001 à 2002 par chapitre budgétaire

(en millions d'euros)

 
 

LFI 2001

(euros courants)

Crédits disponibles 2002

Evolution en euros constants (en %)

Chapitre

Intitulé

AP

CP

AP

CP

AP

CP

51.61

Espace et SIC

66,8

117,1

89,2

94,1

32,0

- 20,6

51.71

Forces nucléaires

635,7

600,0

712,4

665,0

10,7

9,5

52.81

Etudes

1,4

3,5

2,3

2,1

64,7

- 39,9

53.71

Equipements communs des armées

570,3

479,1

305,9

422,6

- 47,0

- 12,9

53.81

Equipements des armées

1 226

936,6

827,4

910,5

- 33,3

- 3,9

54.41

Infrastructures

50,5

97,0

79,4

97,4

55,5

- 0,7

55.11

Soutien des forces

252,8

355,2

345,6

385,5

35,1

7,2

55.21

EPM

536,0

573,7

670,9

622,9

23,7

7,3

Total titre V

 

3 339,5

3 162,2

3 033,1

3 200,0

-10,3

 

66.50

Autres équipements Marine

 
 

6,6

14,9

 
 

67.10

Subvention au musée de la Marine

1,8

1,8

1,8

1,8

-1,2

- 1,2

Total titre VI

 

1,8

1,8

8,4

16,8

 
 

Total titres V et VI

 

3 341,3

3 164,1

3 041,4

3 216,8

- 10,1

0,5

Pour 2002, le gouvernement a présenté les crédits d'équipement sous forme de « crédits disponibles », c'est à dire en y intégrant l'autorisation de consommer des crédits de reports. Il s'agit en fait d'une convention avec le ministère des finances permettant au ministère de la défense de consommer une partie de son fonds de roulement en fin d'année prochaine. Pour la Marine, ces crédits disponibles supplémentaires s'élèvent à 119 millions d'euros. Ils ne sont toutefois pas inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002 car ils ont déjà été votés par le Parlement les années précédentes, ils ne constituent donc pas vraiment des crédits « supplémentaires ». Ils permettront, cependant, de maintenir cette année le pouvoir d'achat des armées, si, en fin de gestion 2002, la situation budgétaire de l'Etat permet qu'ils soient réellement dépensés et non pas annulés comme c'est souvent le cas.

Hors reports, les crédits d'investissement sont en net recul en euros constants par rapport à 2001 et fournissent un niveau de ressource comparable à celui de 1998. Les autorisations de programme (AP) s'élèveront à 3 042 millions d'euros en baisse de 10,2 % et les crédits de paiement (CP) s'élèveront à 3 098 millions d'euros en baisse de 3,2 %.

La baisse sensible du niveau des autorisations de programme conduira la Marine à mobiliser tout son stock d'AP d'ici la fin de l'année 2002. N'ayant plus alors d'AP disponibles prévisibles à partir de la seconde moitié de l'année, il est à craindre qu'elle ne puisse plus engager de nouveaux contrats et de nouveaux programmes, provoquant de nouveaux retards.

Compte tenu du niveau des ressources, la Marine a choisi de pourvoir, en priorité, aux besoins des programmes conduits en coopération ou nécessitant un achat à l'étranger (Horizon, E-2C), de la dissuasion (SNLE-NG) et du lancement des programmes de renouvellement de la flotte (sous-marins « Barracuda » et frégates multi-missions). Par contre le lancement effectif du Rafale Marine biplace sera reporté d'une année, la dotation du programme NTCD est inférieur aux besoins, ainsi que celle de l'entretien programmé des matériels.

En matière de crédits de paiement, les deux groupes de programme les plus touchés sont la flotte -11% et l'aéronautique -25 %. En revanche, les ressources consacrées à la dissuasion progressent de 10 % en raison de la montée en puissance des programmes SNLE-NG n°3 et n°4.

Enfin, le niveau des crédits en 2002 pose le problème de sa cohérence avec les dotations prévues dans la loi de programmation pour 2003-2008. Sensiblement inférieurs, environ 10 %, à celui prévu pour la première année de la LPM, ils conduiront à des retards dans les engagements et les programmes en raison de la difficulté du ministère de la défense à dépenser rapidement des crédits supplémentaires importants.

CHAPITRE II -
UN PREMIER BILAN DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE

2002 étant la dernière année d'exécution de la loi de programmation militaire pour la période 1997-2002, il paraît possible de tirer un premier bilan de son exécution sur les cinq premières années. Ce bilan apparaît comme contrasté selon que l'on s'attache à la professionnalisation des forces, à l'entretien et à la disponibilité des matériels ou au renouvellement des équipements.

I. LA RÉALISATION DE LA PROFESSIONNALISATION DES FORCES ET DES EFFECTIFS PROGRAMMÉS

Malgré les difficultés qui ont pu apparaître au cours de ces cinq années, la professionnalisation des forces a été réalisée et sera achevée en 2002.

A. EVOLUTION DES EFFECTIFS

Evolution des effectifs 1996-2002 et comparaison avec les prévisions de la LPM

 

1996

LPM 2002

PLF 2002

Officiers

4 844

4 961

4 817

Officiers mariniers

32 530

30 136

29 390

Equipage

8 103

7 998

8 456

Appelés

17 906

0

0

Volontaires

0

1 775

1 613

Total militaires

63 383

44 870

44 276

Civils

6 495

11 594

10 157

Total général

69 878

56 464

54 433

Au cours de cette période, la Marine aura globalement perdu 20 % de ses effectifs soit plus de 15 000, 2 000 de plus que prévu initialement. Cette réduction allait de pair avec la diminution du nombre de bâtiments de 100 à 80. Cependant, les effectifs militaires et civils ont évolué de façon inverse : baisse des personnels militaires (- 19 000), hausse des personnels civils (+ 4 000).

Globalement au cours de la période de professionnalisation, la Marine a choisi de réduire rapidement le nombre de ses appelés ; ils ont disparu dès la fin de 2001 alors qu'ils étaient près de 18 000 en 1996. Elle a également décidé de maintenir un flux de recrutement stable pour préserver la pyramide des âges, le dynamisme des équipages et éviter les variations brutales, de préserver les carrières des engagés de longue durée et d'accroître le taux d'encadrement, qui était inférieur à celui constaté dans les grandes marines occidentales.

B. PERSONNELS MILITAIRES

1. Les hommes d'équipage et les sous-officiers : mesures d'aide au départ et « repyramidage »

Durant la loi de programmation, les effectifs des officiers mariniers devaient diminuer de 7 % tout en accroissant leur part relative dans les effectifs de la Marine en raison du départ des appelés. La diminution des effectifs sera finalement plus importante en raison de la réorganisation de la pyramide des grades. Des postes d'officiers mariniers sont transformés en poste d'hommes d'équipage. En 2002, ce sont 153 postes qui seront ainsi transformés en postes de militaires du rang.

Pour faciliter les départs, tout en maintenant un niveau important de recrutement, la loi de programmation avait mis en place des aides spécifiques. Ce sont près de 2 000 matelots, quartier-maîtres et officiers mariniers qui en ont bénéficié chaque année depuis 3 ans permettant de fluidifier la gestion du personnel.

La Marine a aussi fait évoluer les formes d'engagement dans la Marine. Elle a généralisé les contrats de 10 ans pour les « engagés initiaux de longue durée » (EILD- 2 800 recrutements par an). Elle ouvert son recrutement à des jeunes sans qualification et leur offre ainsi la possibilité de trouver un premier emploi stable et de se former. Cette nouvelle formule d'abord appelée « contrat court marine », a été affinée en quelques années pour mieux adapter les missions qui leur sont confiées et leur permettre, pour les meilleurs, de poursuivre leur carrière dans la Marine. Ces contrats désormais appelés « engagements initiaux de courte durée » sont de 36 mois renouvelables deux fois et peuvent conduire ces engagés à rester 9 ans dans la Marine. Les recrutements s'élèvent à environ 1 000 postes par an.

2. Les officiers

Sur la période 1996-2002, le nombre d'officiers de Marine est stable, en légère diminution en raison de la volonté d'augmenter le taux relatif d'encadrement et de compenser le départ des aspirants.

Le nombre des postes d'officiers sera toutefois inférieur aux prévisions en raison d'un « repyramidage » des effectifs. L'augmentation du nombre des officiers supérieurs a été gagée sur des postes d'officiers subalternes pour faire face aux nouveaux besoins en officiers supérieurs. En 2002, ce sont 51 emplois d'officiers subalternes qui seront transformés en 30 emplois d'officiers supérieurs.

Par rapport aux prévisions affichées par la loi de programmation, la différence entre les effectifs 2002 et ceux prévus en 1996 s'explique également par le transfert sur le budget des services communs de 98 postes d'officiers, il en est de même pour 84 postes d'officiers mariniers, affectés sur des postes permanents à l'étranger.

C. LES VOLONTAIRES ET RÉSERVISTES

La loi de professionnalisation des forces a conduit a développer ou à renouveler des formes anciennes d'engagement. Le service national étant supprimé, elle a préservé la possibilité pour un nombre réduit de personnes d'accomplir un volontariat dans les armées et a modifié les conditions d'emploi de la réserve.

1. Les volontaires

Le recrutement des volontaires est plus difficile que prévu, le nombre de candidature n'est pas aussi important que pour les autres types d'engagement dans la Marine (moins de deux candidats par poste). Ce manque d'engouement pour la formule s'explique essentiellement par la faiblesse des rémunérations si on les compare à celles des hommes du rang engagés ou des officiers pour les volontaires de haut-niveau. Dans ce dernier cas elles sont aussi très substantiellement inférieures « aux prix du marché » s'adressant à des jeunes sortant des grandes écoles de commerce et d'ingénieurs.

2. La réserve

La loi réformant la réserve militaire a conduit à réorganiser complètement les réserves. La réserve est divisée en réserve opérationnelle et réserve citoyenne. Seule la réserve opérationnelle est une force d'emploi intégrée dans les armées. Le nombre de réserviste a été considérablement réduit puisque la réserve opérationnelle de la Marine est désormais plafonnée à 6 500 hommes.

En revanche, le budget alloué à la réserve a progressé rapidement pour augmenter l'entraînement des réservistes. Il s'élèvera en 2002 à un peu moins de 6 millions d'euros permettant d'assurer 8,4 jours d'activité en moyenne par réserviste.

D. LES PERSONNELS CIVILS

1. Des sous-effectifs en résorption

La professionnalisation des forces devait s'accompagner d'une augmentation de près de 80 % des effectifs civils. Cette évolution s'est faite plus lentement que prévu. La Marine devait accueillir une part importante des personnels des arsenaux mais après des mutations assez importantes en 1997 et 1998, le flux s'est presque complètement tari. J'usqu'en 1999, la Marine n'a pu organiser de concours de recrutement ce qui a provoqué en 1998 et 1999, un taux de vacance de postes de plus de 10 %. Ces problèmes de recrutements s'expliquent par la faible mobilité géographique et professionnelle des personnels de arsenaux et par les conditions de départ très favorables qui leur ont été accordées.

Depuis 2000 toutefois le déficit se résorbe progressivement, de nouvelles autorisations de recrutement ont été accordées permettant d'espérer la réduction du nombre de postes vacants à environ 5 % des effectifs soit 400 postes.

2. Vers un développement de la sous-traitance ?

Le recours à la sous-traitance a permis de pallier une partie des déficits dans les effectifs des personnels civils et d'éviter qu'y soient affectés des militaires professionnels. Entre 2000 et 2001 ce sont 722 postes de personnels civils qui ont été transformés en crédit de sous-traitance. Aucun poste supplémentaire ne sera transformé en 2002, le ministère des finances ne souhaitant pas développer plus que nécessaire la sous-traitance et faisant un choix différent de la plupart des entreprises qui préfèrent se concentrer sur leur coeur de métier et déléguer les autres tâches à des sous-traitants. Les crédits d'externalisation sont ainsi reconduits en 2002 pour un montant de 19,39 millions d'euros.

II. UNE RÉALISATION À PLUS DE 80 % DES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT DE LA LOI DE PROGRAMMATION MODIFIÉE

La loi de programmation 1997-2002 est l'une des rares lois de programmation militaire qui sera complètement exécutée. En terme de crédits d'équipement, les résultats paraissent moins bons que ceux obtenus en matière de réalisation des effectifs de l'armée professionnelle. La faiblesse persistance des crédits du titre V a d'ailleurs été aggravée sur cette période par les difficultés de DCN, malgré les réformes engagées, conduisant à réformer l'organisation de l'entretien et du soutien des bâtiments.

A. LES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENTS

L'exécution de la loi de programmation a été affectée par deux éléments majeurs.

Le premier a été organisé et concerté avec les armées, et approuvé de facto et a posteriori par le Parlement, il s'agit de la revue de programme. Elle a conduit à une réduction globale de 594,25 Millions d'euros sur le titre V de la Marine entre 1999 et 2002.

A cette occasion, plusieurs programmes ont été fortement aménagés :

- Les calendriers du quatrième sous-marin lanceur d'engins de nouvelle génération (SNLE -NG n°4) et du missile M 51 ont été coordonnées pour permettre une entrée en service simultanée en 2008 au lieu d'une entrée en service en 2010 du M 51, ce qui aurait nécessité une remise à niveau ultérieure du SNLE-NG n°4 qui devait entrer en service en 2008. Un décalage de 6 mois pour l'admission au service actif du Vigilant a été également décidé. En conséquence, les sous-marins de la génération précédente ont été prolongés et maintenus en service.

- Le retrait, dès l'amission au service actif du porte-avions « Charles de Gaulle », du porte-avions « Foch », alors que sa mise sous « cocon » avait été envisagée pour maintenir la permanence d'un groupe aérien à la mer au moment ou le « Charles de Gaulle » connaîtrait une indisponibilité de longue durée.

En conséquence, la flottille d'Alizé (avions de reconnaissance) qui devait être maintenue jusqu'en 2005, parc que le Foch ne pouvait pas accueillir à son bord l'avion de guet E- 2C Hawkeye, a été dissoute dès 2002.

- Le programme de commandes de Hawkeye a été aménagé pour profiter d'une commande groupée, donc plus économique, de la Marine américaine.

- Le programme de missile porte-torpille MILAS, conduit avec l'Italie, a été arrêté à la fin de son développement.

- La modernisation de la flotte de bâtiments hydrographiques et océanographiques a été retardée de deux ans pour une meilleure coordination avec le programme de l'IFREMER.

- Enfin, la livraison du Rafale dans le standard F 2 « Air-sol » a été repoussée au-delà de 2005, la constitution de la première flottille de 10 appareils étant maintenue fin 2002.

Le second élément important affectant l'exécution de la loi de programmation militaire 1997-2002 est malheureusement habituel. Il s'agit du « syndrome de l'escalier ». Les lois de finances annuelles sont inférieures aux objectifs de la LPM, et sont elles-même victimes d'importantes mesures de régulation, qui ont l'inconvénient, outre la suppression ou du report des crédits, de nécessiter des aménagements d'urgence.

Pour l'essentiel, ces mesures ont conduit à :

- reporter l'admission au service actif du porte-avions Charles de Gaulle de fin 1999 à 2001 ;

- abaisser de 12 à 10 avions Rafale les livraisons sur la période de la LPM, à repousser la commande de la 2 ème tranche d'avions en version air-sol en fin de programmation (2001) et reporter à 2003 le lancement du biplace (non prévu par la loi de programmation) ;

- reporter de 18 mois au total l'admission au service actif du SNLE-NG n°3 et à fixer, malgré la réorganisation des programmes prévue par la revue de programme, la mise en service du SNLE-NG n°4 à 2010 ;

- annuler la commande du bâtiment de soutien logistique futur prévue en 2000, aucune commande n'étant prévue à l'avenir ;

- reporter sine die toute modernisation de la batellerie des transports de chalands de débarquement.

Ecarts entre les LFI et la LPM et annulations de crédits de 1997 à 2002

sur les titres V et VI de la Marine

(millions d'euros 2002)

 

1997

1998

1999

2000

2001

2002

(disponibles)

Total

 

AP

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

AP

CP

LPM

3 268

3 484

3 239

3 506

3 192

3 532

3 431

3 536

3 765

3 591

3 674

3 568

20 569

21 218

LFI

3 326

3 577

2 874

3 104

3 779

3 322

2 950

3 148

3 381

3 202

3 041

3 217

19 351

19 570

Ecarts LFI/LPM

58

+ 93

- 365

- 402

587

- 210

- 481

- 388

- 384

- 389

- 633

- 351

- 1 218

- 1 648

Annulations

456

211

272

274

 

368

709

277

 

238

 
 

1 436

1 142

Total annuel

- 398

- 118

- 637

- 676

+ 587

- 578

- 1 190

- 665

- 384

- 627

- 633

- 351

- 2 654

3 016

Il apparaît donc, que, sans préjuger de ce que sera l'exécution du budget en 2001 et 2002, plus de 15 % des crédits prévus en AP et en CP n'ont pas été dépensés. A la fin de l'année 2002, c'est vraisemblablement une annuité de programmation qui manquera à la Marine. On ne peut que regretter ce retard qui aura bien sûr des conséquences négatives sur les coûts des programmes d'armement, de l'entretien des matériels et sur l'équipement des forces.

A ce titre, l'annuité 2002 ne fait pas exception, elle est comparable à 1998, la plus mauvaise année de la programmation avec 1998 où les crédits s'élevaient en autorisations de programme à 2 874 M € et en crédits de paiement à 3 104 M €. Les crédits prévus en 2002 sont, rappelons le de 3 042 M € en AP et de 3 098 M € en CP, hors reports (+ 119 M €).

B. LA NÉCESSAIRE RÉFORME DE DCN ET DE L'ENTRETIEN DE LA FLOTTE

Le budget de la Marine a été obéré de manière importante par les mesures de restructurations de DCN et par l'augmentation des difficultés de l'entreprise pendant toute cette période malgré la réforme entreprise.

1. L'impact des mesures financières pour l'adaptation des structures industrielles de DCN

Durant toute la loi de programmation, la Marine a dû financer sur son propre budget : l'accompagnement financier de la restructuration de DCN à travers le Fonds d'adaptation industrielle (FAI).

Sur l'ensemble de la loi de programmation, cet appui financier a approximativement représenté le prix d'une frégate.

En 2001 et 2002 les charges prévues à ce titre sont les suivantes :

(en millions d'euros)

 

2001

2002

Ressources budgétaires

117,0

90,1

Retraite anticipée à 55 ans

24,9

20,8

Retraite anticipée à 52 ans

54,6

52,6

Départs volontaires

8,3

13,0

Mutations vers les états-majors ou services centraux

0,9

0,4

Cessations d'activité

1,5

1,7

Total des charges DCN

90,2

88,5

Maintien des rémunérations (charges DFP)

7,6

7,6

Total des charges

97,8

96,1

Le déficit prévisible en 2002 entre les charges et les crédits dégagés par le projet de loi de finances devrait être compensé par les reports dus au solde excédentaire de 2001. La baisse des ressources s'explique par les conséquences financières de l'arrêt en 2000 des mesures de dégagement des cadres.

Or, le FAI, qui devait disparaître avec la fin de la loi de programmation 1997-2002, pourrait être reconduit dans la LPM 2003-2008 pour un montant d'environ 60 millions d'euros. Il servirait notamment à financer le recrutement de cadres de tout niveau dont manque cruellement la DCN.

2. Le changement de statut de DCN s'accompagne pour la Marine d'un risque financier très important.

Le changement de statut suscite une forte inquiétude car le passage du statut d'administration ou de service à compétence nationale à celui de société provoquera mécaniquement la soumission de DCN à la TVA et aux impôts locaux .

Or, la Marine qui est le client presque unique de DCN craint qu'elle ne doive brutalement faire face à une augmentation de près de 20 % des prix de DCN, diminuant d'autant son pouvoir d'achat.

Par ailleurs, l'augmentation de la productivité de DCN se fait attendre. DCN promettait que la réduction de ses effectifs s'accompagnerait de 20 % de gains de productivité, qui bénéficieraient à la Marine. Mais, le ralentissement de la déflation des effectifs, pourtant indispensable compte tenu de la réduction du chiffre d'affaires, les éventuels recrutement et le passage au 35h font craindre une nouvelle hausse des coûts.

Au total, ces coûts supplémentaires sont évalués à 122 M € par la Marine. Il ne semble pas possible qu'elle ait à les supporter seule et sans transition. L'exemple de GIAT devrait inciter au contraire à ne faire supporter que progressivement ce surcoût à la Marine, à rythme proches des réductions de prix qui seraient obtenues grâce aux réformes engagées.

Sans préjuger du rapport de M. Jean Faure qui sera le rapporteur pour avis de votre commission des affaires étrangères et de la défense sur l'article du projet de loi de finances rectificative, qui prévoit la transformation de DCN en société d'ici 2003. Votre rapporteur, estime cette transformation indispensable à la pérennité de l'entreprise et du savoir faire français en matière de construction navale militaire. Le changement de statut devrait permettre à DCN de s'allier avec des partenaires français et étrangers, les négociations avec les partenaires français (Thales et Technicatome) étant pour l'instant très lentes.

Par ailleurs, de nombreux problèmes restent en suspend :

- le financement de la capitalisation de l'entreprise,

- la pérennité du statut des ouvriers d'Etat en raison du poids financier et donc du problème de compétitivité qu'il provoque,

- la négociation d'un contrat d'entreprise avec l'Etat : DCN doit il avoir le monopole de la construction navale militaire ? si oui, pour combien de temps ?

- la transition vers une culture d'entreprise.

3. La réorganisation de l'entretien de la flotte : la création du SSF

L'objectif de disponibilité des bâtiments de combat est normalement de 80 %. Il est aujourd'hui aux environs de 70 %. Plus d'un tiers des indisponibilités sont liées à des difficultés d'approvisionnement de rechanges et à des délais excessifs de passation de marchés. Cette situation est en partie la conséquence du vieillissement de la flotte dont l'âge moyen atteindra 21 ans en 2008 et est aggravée par la situation de DCN qui a enregistré d'importants retards (5 mois de retard pour l'IPER du Rubis, 7 mois pour le BCR Somme).

Face à la gravité de ce constat et à son impact négatif sur la capacité opérationnelle de la Marine et le moral des équipages, la reprise en main par la Marine de l'entretien des bâtiments et de la gestion des rechanges a été décidée. Un service nouveau, le service de soutien de la flotte (SSF) a été créé par un décret du 28 juin 2000.

Il a pour mission de fédérer, sous l'autorité du chef d'état-major de la Marine, l'ensemble des moyens et des acteurs concourant à l'entretien de la flotte de surface et sous-marine. Sa création vise à simplifier l'organisation du soutien, d'éviter toute duplication de responsabilité et de moyens et faciliter la gestion de l'ensemble des problèmes.

Le SSF est constitué d'une direction centrale à Paris et de deux directions locales à Brest et Toulon. C'est un service mixte Marine/DGA. L'objectif essentiel du SSF est d'améliorer la disponibilité des bâtiments grâce au développement d'une relation contractuelle avec DCN et une meilleure gestion des stocks de pièces de rechange. La détention et la comptabilité des rechanges ont ainsi été confiées au Commissariat de la Marine, le SSF gardant les fonctions d'achat, de gestion et de délivrance.

Le SSF doit en outre superviser la totalité de la maintenance quel que soit l'acteur qui l'effectue (DCN, ateliers militaires de la flotte, bâtiments de soutien, industriels privés).

Pour accroître la disponibilité des bâtiments, l'axe principal d'effort résulte de la mise en place d'une gestion par flotte ou type de bateau ce qui permet aux commandants de n'avoir qu'un seul interlocuteur et aux équipes de gestion de mieux anticiper les besoins et de capitaliser l'expérience acquise. A terme, le SSF souhaite mettre en place un système logistique intégré permettant d'effectuer très tôt les commandes et d'optimiser les rythmes d'entretien des différents bâtiments.

Créé il y a encore peu de temps, le SSF n'a encore eu beaucoup de résultats concrets mais a entrepris des « opérations coup de poing » dans des domaines précis comme les petites rechanges.

Enfin, on peut s'interroger sur la pertinence de la reprise par la Marine de la gestion des rechanges et de l'entretien alors qu'elle est soumise aux mêmes lourdeurs juridiques que DCN et que cette fonction industrielle ne fait pas partie de son coeur de métier.

CHAPITRE III-
LE RENOUVELLEMENT DE LA FLOTTE ET DE L'AÉRONAUTIQUE NAVALE

Le problème du renouvellement de la flotte de surface et de l'aéronautique navale est devenue la question majeure des prochaines années.

La flotte de surface vieillit. L'âge moyen des bâtiments sera de 21 ans en 2008, alors que « l'âge idéal » d'une flotte serait de 15 ans, la durée de vie des bâtiments étant de 30 ou 40 ans. Il devient donc urgent de préparer son renouvellement pour la fin de la décennie, la période récente étant caractérisée par la faiblesse du nombre des bâtiments entrés en service (9 depuis 1997 tous navires confondus).

Certains programmes sont déjà engagés comme les nouveaux transports de chalands de débarquement (NTCD) ou les frégates anti-aériennes Horizon. En matière d'aéronautique navale embarquée, les programmes Rafale et NH 90 sont en place et un nombre important de commandes effectué. Il faudra toutefois veiller au respect du calendrier, le nombre des livraisons de NH 90 ayant été réduit au minimum contractuel et l'essentiel des livraisons des Rafale ayant été repoussé au-delà de 2006.

D'autres programmes ont récemment débuté ou vont débuter en 2002. Il s'agit des programmes de frégates multi-missions et des sous-marins « Barracuda » pour respectivement 17 et 6 unités. Ces deux programmes permettront de renouveler le coeur des forces de la Marine à partir de 2010. Dès aujourd'hui se prépare la Marine de demain.

Les lignes directrices de ces renouvellement sont au niveau opérationnel la polyvalence des outils, l'adaptation aux nouvelles menaces (missiles) et aux nouvelles missions avec la réorientation des moyens d'action de la mer vers la terre.

D'un point de vu industriel et financier, la diminution des coûts d'acquisition et de maintien en condition grâce à des effets de série et des programmes en coopération sont particulièrement recherchées.

La maîtrise des coûts est en effet indispensable à la réussite du renouvellement de la flotte en raison de la concomitance, entre 2008 et 2012, de l'arrivée à terme d'un grand nombre de programmes. Les livraisons devraient être beaucoup plus importantes qu'aujourd'hui, pour la flotte mais également en ce qui concerne l'aéronautique, ce qui provoquera un accroissement des paiements.

I. LE PORTE-AVIONS « CHARLES DE GAULLE » UN OUTIL PERFORMANT MAIS INCOMPLET

A. L'ADMISSION AU SERVICE ACTIF DU PORTE-AVIONS « CHARLES DE GAULLE »

Le porte-avions « Charles de Gaulle » a été admis au service actif le 18 mai 2001, 15 ans après le lancement du programme par Paul Quilès en février 1986.

Le bâtiment disposera de ses nouvelles hélices fin 2002. Elles seront installées lors d'une période d'entretien intermédiaire. Jusque là, il naviguera avec des hélices de l'ancien « Foch ». La commande de deux paires d'hélices supplémentaires a représenté un surcoût de 3,81 millions d'euros.

Lors de cette même période d'entretien (normalement de juin à septembre 2002) d'importants travaux seront effectués pour assurer le respect par le porte-avions de la convention internationale MARPOL (sur les pollutions marines et les rejets des navires), compléter l'isolation acoustique, installer un réseau intranet et moderniser le réseau de commandement.

Le système d'autoprotection anti-aérien mettant en oeuvre le missile Aster 15 sera opérationnel début 2002.

B. UN OUTIL INCOMPLET

Le porte-avions « Charles de Gaulle » reste toutefois un outil incomplet en raison de son niveau de disponibilité de l'ordre de 60 %, de l'absence d'un second porte-avions et du vieillissement de ses frégates d'escorte et de son groupe aérien. Un porte-avions n'est en effet efficace que s'il existe une cohérence d'ensemble entre les différentes composantes du groupe aéronaval.

Seul porte-avions en service, le « Charles de Gaulle » ne peut en effet être disponible la totalité du temps en raison des périodes d'entretien (22 % du temps) et de disponibilité et de requalification de son équipage et des pilotes. Au total, la disponibilité du bâtiment est estimée à 60 % du temps mais durant les immobilisations, notamment celles nécessitant l'arrêt et l'ouverture des réacteurs le porte-avions sera indisponible pendant plus d'une année.

La Marine étudie donc aujourd'hui, en concertation avec l'autorité de sûreté, d'optimiser l'utilisation des coeurs pour réduire le nombre des périodes d'entretien de ces derniers, réduire le nombre de changement de coeurs sur la vie du bateau et augmenter le temps entre chaque visite de contrôle.

Comme votre rapporteur l'a montré dans son rapport sur la question du second porte-avions, son acquisition reste indispensable pour assurer la permanence du groupe aéronaval (projection de force, dissuasion aéroportée embarquée, relève sur zone, entraînement et formation des pilotes).

L'acquisition d'un second porte-avions (1,83 Md €) ne représenterait que 15 % de l'investissement total (deux porte-avions et leur groupe aérien) et permettrait une disponibilité permanente.

Le projet de loi de programmation militaire pour 2003-2008 ne prévoit toutefois que des crédits d'études pour la réalisation d'un second porte-avions. La France ne disposera donc pas de second porte-avions avant 2015 voire au-delà.

II. LES PROGRAMMES DE RENOUVELLEMENT OU DE MODERNISATION DE LA FLOTTE

A. LES NOUVEAUX TRANSPORTS DE CHALANDS DE DÉBARQUEMENT (NTCD)

Le programme NTCD vise à remplacer les TCD les plus anciens « Ouragan » et « Orage » en 2005 et 2006 par les TCD « Mistral » et « Tonnerre ». Leur livraison a été reculée d'un an. Ils viendront compléter les deux bâtiments amphibies les plus modernes « Foudre » et « Siroco ». Ces deux bâtiments ont été commandés en décembre 2000.

Bâtiments d'un tonnage de l'ordre de 20 000 tonnes à pleine charge, les NTCD auront une vitesse maximale de 19 noeuds, seront propulsés par « pods » orientables et seront armés par un équipage de 160 hommes. Ils pourront embarquer 450 hommes et 60 véhicules. Ils seront dotés d'un pont d'envol continu avec 6 spots pour hélicoptères (NH 90 ou Tigre) et d'une capacité de stocker 10 à 16 hélicoptères. Leur radier pourra contenir quatre chalands de débarquement ou deux engins sur coussin d'air américain. Les choix techniques sont en cohérence avec le concept national des opérations amphibies (CNOA) qui donne la priorité à l'aéromobilité des troupes transportées grâce aux hélicoptères. L'accueil d'avions à décollage vertical n'entre pas dans ce concept. Lors d'une opération amphibie, l'appui feu aérien serait fourni par les avions embarqués à bord du porte-avions. En cas d'indisponibilité du « Charles de Gaulle », cet appui serait fourni par des porte-aéronefs alliés.

Ces NTCD sont également des bâtiments de commandement car ils seront dotés d'importants moyens de transmission et de traitement de l'information. Ils pourront accueillir un PC de théâtre interarmées et interalliés de 150 postes de travail. Des extensions seront possibles grâce à des modules (50 à 100 postes supplémentaires).

Leurs capacités de combat et d'autodéfense sont par contre réduites au minimum, ils devront donc être escortés.

Globalement leurs capacités d'action seront supérieures aux deux LPD (Landing platform dock) HMS Albion et Bulwark de la Royal Navy qui ont un déplacement de 18 500 tonnes, peuvent embarquer 300 hommes et des hélicoptères sur une distance 8 000 nautiques à 15 noeuds (11 000 pour les NTCD). Ils seront toutefois tous les deux en service, dès 2003, plusieurs années avant les bâtiments français.

Ces bâtiments seront construits sur des normes civiles comme les LPD néerlandais « Rotterdam » ou LPH britannique « Ocean » (porte-hélicoptères sans radier) pour des raisons d'économie. La maîtrise d'oeuvre d'ensemble est confiée à DCN ainsi que le système de combat. Les Chantiers de l'Atlantique construiront la partie avant des navires, l'assemblage avec la partie arrière sera réalisé à Brest.

La batellerie ne pourra en revanche être remplacée dans le même temps (coût évalué à 61 M €) en raison de la concomitance de programmes majeurs dans une enveloppe budgétaire réduite.

Le coût prévisionnel du programme est de 606,75 M €. Les crédits inscrits en 2002 représentent, en AP 68 M € et en CP 153,9 M €.

Dans le cadre d'opérations de projection, le ministère de la défense peut également faire appel à des navires marchands affrétés dans le cadre d'un appel d'offres restreint en urgence (article 61-II du code des marchés publics). Cette pratique est courante, en 1999 par exemple, 29 navires ont été affrétés dans le cadre des opérations Trident et Salamandre.

Le besoin en navires de transport maritime a été dégagé lors des conférences d'engagement visant à la construction d'une force européenne de réaction rapide. 48 navires rouliers civils seraient nécessaires pour le soutien de la force projetée (60 000 hommes pendant un an) en complément des moyens militaires. Pour l'instant, seuls les Britanniques ont proposé la mise à disposition de trois navires civils. En outre, les perspectives d'évolution de la flotte civile avec l'augmentation du nombre de pore-conteneurs au détriment des navires rouliers conduit à penser que l'affrètement de moyens civils ne permettra pas de faire face aux besoins militaires en temps de crise.

Prenant en considération cette situation, les Etats-Unis prévoient de garder une totale autonomie en la matière et le Royaume-Uni a décidé d'acquérir la disponibilité de 6 navires de transport rouliers par l'intermédiaire d'un marché spécifique de fourniture de service (PFI- private finance initiative). Au niveau européen, la coopération avec les Pays-Bas n'a pas encore abouti, tandis qu'un prochain accord est envisagé avec l'Allemagne pour gérer en commun cette capacité.

Votre rapporteur souhaite donc vivement que, comme en matière de transport et de ravitaillement aérien militaire, un accord européen soit conclu permettant la mise en commun des moyens et la résorption du déficit de capacité mis en évidence pour le déploiement d'une force européenne.

B. LES FRÉGATES « HORIZON »

Le remplacement des deux frégates lance-missiles « Suffren » et « Duquesne », qui datent de 1967 et 1970, est une des priorités de la Marine. Car depuis le retrait du service actif du « Suffren » le 1er avril 2001, elle ne dispose plus que de trois frégates anti-aériennes au lieu de quatre prévues dans le modèle 2015. Un réarmement de la frégate « Suffren » est exclu, des prélèvements de matériels étant effectués pour assurer l'entretien de son « sister ship » le « Duquesne ». Jusqu'à l'admission de la seconde frégate anti-aériennes Horizon le « Chevalier Paul » en 2008, la Marine assurera un moins grand nombre de missions, les bâtiments restants étant affectés en priorité à la protection du groupe aéronaval ou du groupe amphibie. Le format de quatre frégates (disponibles environ la moitié du temps) apparaît comme minimal pour assurer la protection d'une force navale dans un environnement hostile. La protection simultanée de deux groupes nécessiterait six frégates en parc. Il faut d'ailleurs souligner que la Royal Navy maintient son objectif d'acquérir 12 frégates antiaériennes T 45 très proches des frégates Horizon pour assurer l'escorte de leurs deux porte-avions futurs et pour peser systématiquement dans les opérations aéromaritimes à venir.

Le programme Horizon a pour but de remplacer les deux frégates les plus anciennes, puis ultérieurement, les deux autres (« Cassard » et « Jean-Bart », en service depuis 1988 et 1991). Ce programme comprend deux volets : la construction de nouveaux bateaux stricto sensu et celle de leur système d'armes.

La construction des nouvelles frégates se fera dans le cadre d'un programme en coopération avec l'Italie, le Royaume-Uni s'étant retiré en avril 1999. La définition d'une frégate aux caractéristiques communes a été décidée en septembre 1999 entre les deux pays, le Royaume-Uni continuant de participer à l'élaboration du système de combat dans le programme PAAMS (Principal Anti Airmissile System). Le contrat des quatre premières frégates a été notifié le 27 octobre 2000 : deux frégates pour chaque pays. En conséquence, la charge de travail est partagée à égalité.

La construction de la première frégate débutera en 2004. Les frégates françaises seront livrées en décembre 2006 (le « Forbin ») et mars 2008 (le « Chevalier Paul »). A titre de comparaison, la première frégate T 45 britannique sera livrée en 2008 et les suivantes à un rythme rapide. Ces deux frégates seront en définitive très proches. Les T 45 seront un peu plus grosses : 7 350 tonnes contre 6 700. Elles auront la même vitesse, la même autonomie et un équipage de même taille (190 personnes). La principale différence sera l'adoption par les T 45 d'un radar plus moderne qui devrait permettre une meilleure détection des missiles mais qui doit être mis au point.

Le coût total du programme, pour deux frégates Horizon, est estimé à 1 881,5 M €. En 2002, 424 millions d'euros d'autorisations de programme et 289 M € de crédits de paiement sont prévus.

Le programme PAAMS doit permettre aux frégates d'assurer la protection d'une force navale contre une menace aérienne comprenant des missiles supersoniques manoeuvrants. Il mettra en oeuvre des missiles Aster 15 (30km de portée) et 30 (70 à 100 km de portée et 20 000 mètres d'altitude) issus du programme franco-italien FSAF (Future Surface-Air Family). 48 missiles par navire sont prévus et seront lancés verticalement (lanceurs Sylver). 5,17 M € d'autorisations de programme et 71,04 M € de crédits de paiement sont prévus en 2002 pour la poursuite de ce programme.

C. LES FRÉGATES MULTI-MISSIONS (FMM)

L'objet de ce programme est d'assurer le remplacement du coeur de la flotte de surface. Un seul type de navire remplacera, à partir de 2008, trois séries de bateaux : les avisos A 69, et les frégates anti-sous-marines F67 et F70. La Marine a décidé de privilégier la logique industrielle avec la mise en place d'un seul programme sur une brève durée plutôt que de remplacer sur une longue durée et en fonction de leur âge ces bâtiments. Il aurait été trop coûteux de conduire trois programmes différents sur 15 ans.

Dans le cadre du programme FMM, la Marine s'efforce également d'intégrer les réflexions les plus récentes visant à maîtriser le coût de possession sur la durée de vie des bâtiments. Au-delà de la logique industrielle retenue pour la construction, les efforts portent surtout sur la réduction de l'équipage (95 personnes environ) et des coûts de maintien en condition.

17 frégates multi-missions sont prévues au total. A partir d'une base unique modulaire, deux versions seront déclinées : lutte anti-sous-marine (ASM- 8 unités à partir de 2010) et action vers la terre (AVT- 9 unités à partir de 2008). Les frégates AVT seront plus particulièrement dédiées à l'appui et au soutien des opérations de projection avec une capacité de frappe dans la profondeur, de recueil de renseignement, de déploiement de forces spéciales, d'appui et d'escorte de forces amphibies ou logistiques. Les frégates ASM seront dédiées aux opérations de lutte contre les sous-marins pour assurer la mise en oeuvre de la force océanique stratégique et d'un groupe aéronaval ou amphibie.

Les premières commandes sont prévues en 2003 et le début des construction en 2004. Les livraisons se feront à un rythme rapide de deux frégates par période de trois ans.

Pour 2002, 22,87 millions d'euros d'AP et 21,34 M € de CP sont inscrits au PLF (avec reports).

D. LE PROGRAMME DE SNA FUTUR  « BARRACUDA »

Depuis le retrait courant 2001 du dernier sous-marin diesel du type « La Praya », le « Ouessant », la Marine française ne dispose plus que de six sous-marins nucléaires d'attaque (SNA).

Le programme Barracuda, lancé en octobre 1998, vise à remplacer les six SNA du type « Rubis », modernisés au standard « Améthyste » (Amélioration tactique, hydrodynamique, silence, transmissions, écoute). Le plus ancien de ces SNA a été mis en chantier en 1976 et est entré en service en 1983. Le dernier SNA de cette génération, le « Perle », a été admis au service actif en 1993. Ces sous-marins doivent être retirés du service au bout de 30 ans de service, donc entre 2010 et 2030.

L'entrée en service du premier sous-marin « Barracuda », initialement prévue en 2010, est désormais programmée pour 2012 dans le PLF 2002 et le projet de loi de programmation militaire pour 2003-2008. Les sous-marins anciens ont donc été prolongés d'autant.

Ces sous-marins reprendront l'ensemble des missions dévolues aux Rubis : sûreté des déploiements de la force océanique stratégique (FOST), liberté d'action du groupe aéronaval par des actions anti-sous-marine et anti-surface. Ils seront également dotés de la capacité de mener des opérations de renseignement (écoute et mise en oeuvre de commandos- nageurs de combat) et de frappe dans la profondeur grâce à des missiles de croisières lancés à partir des tubes lance-torpilles. Ils pourraient en embarquer plus d'une dizaine. Rappelons que ce type de missiles de croisière à changement de milieu est déjà en service depuis plusieurs années dans les marines américaines et britanniques.

Ce sous-marin aura un tonnage d'environ 4 000 tonnes, sera capable d'une vitesse supérieure à 22 noeuds. Son équipage sera de 60 hommes avec une autonomie de 70 jours.

La première unité devrait être mise en chantier en 2004. A partir de 2012, le rythme des livraisons devrait être d'un sous-marin tous les deux ans.

Le coût estimé du programme est de 4,5 milliards d'euros (1999). Le PLF 2002 prévoit de consacrer 48,17 millions d'euros de CP et 89,9 millions d'euros d'AP à son développement.

E. LE PROGRAMME SCALP-NAVAL

Ce programme est au stade de préparation depuis juillet 2000, il devrait être lancé dès le début de l'année 2002. Il a pour objectif de mettre au point une version navale du missile SCALP-EG (emploi général)/ Storm Shadow qui sera tiré à partir des avions Rafale Air ou Marine. Il doit permettre de doter les bâtiments de la Marine de la capacité de frapper avec précision dans la profondeur des terres et ainsi de participer à toutes les phases de la gestion de crise, le lancement de missiles de croisière intervenant le plus souvent avant les frappes aériennes. La France disposerait ainsi d'un outil politique supplémentaire à parité avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni qui possèdent des Tomahawk. Il aura d'ailleurs des performances comparables à celles du « tactical tomahawk » qui prendra la relève du missile actuellement en service.

Ce missile devrait équiper les frégates multi-missions d'action vers la terre (FMM-AVT) à partir de 2011. Leur lancement s'effectuerait par tubes verticaux (lanceurs Sylver des missiles Aster). Chaque frégate pourrait disposer d'une trentaine de missiles. Le respect de cette échéance impose la livraison des premiers missiles dès 2010. Les SNA Barracuda devrait également en disposer à partir de 2013, ce qui imposera une adaptation du missile à son lancement par les tubes lance-torpilles en plongée (changement de milieu, enveloppe cylindrique, évolution de l'aérodynamique et de la charge militaire du missile).

Ce missile est a priori conçu pour équiper la marine française mais il n'est pas exclu qu'il puisse intéresser la Royal Navy pour équiper ses futures frégates. Ces bâtiments, qui doivent être opérationnels à partir de 2013, devraient être dotés des mêmes lanceurs pour les missiles Aster ; le Scalp-Naval serait alors le missile le plus adapté. Si tel était le cas, les marines et les armées de l'air des deux pays seraient dotées des mêmes missiles dans leurs différentes versions.

F. LA MODERNISATION DES CHASSEURS DE MINES

Les principales missions des chasseurs de mines sont d'assurer en permanence la sûreté de déploiement de la FOST, la protection des approches des principaux ports français et la projection en dehors de métropole pour participer au déminage de certaines zones et ainsi assurer la sécurité des déplacements des bâtiments de guerre et de commerce. Lors de la guerre du Golfe en 1991, les CMT français avaient ainsi détruit plus de 250 mines.

Les chasseurs de mines de la Marine, dits "chasseurs de mines tripartites" (CMT) en raison de l'origine multinationale du programme, doivent être modernisés pour leur donner la capacité de détecter les mines les plus modernes, qui sont plus discrètes grâce à des formes furtives, des matériaux absorbants et une taille réduite (types Manta et Rockan). Ces chasseurs de mines ayant été conçus avec la Belgique (7 CMT) et les Pays-Bas (15 CMT), il aurait été souhaitable d'opérer cette modernisation à mi-vie dans le même cadre trilatéral. Cette solution n'a pu être retenue en raison de problème budgétaire en Belgique et de choix industriels et techniques différents de la Marine néerlandaise.

Le programme de modernisation porte essentiellement sur le système d'armes des 13 chasseurs de mines :

- acquisition de 10 véhicules porteurs de sonar à immersion variable (PVDS) et mise à niveau des 13 CMT pour exploiter ce nouveau matériel ;

- le remplacement du sonar de coque "détecteur" par un sonar numérique bi-fréquences ;

- le remplacement du système tactique ;

- la numérisation du sonar de coque « classificateur » ;

- le remplacement d'une partie du système de pilotage automatique ;

- l'amélioration de la chaîne de visualisation du véhicule d'intervention ( poisson autopropulsé -PAP 104) ;

- la mise en place d'une capacité d'entraînement à bord des bâtiments.

Il résulte de ces modifications que le système de détection des CMT passera d'un ensemble comprenant deux sonars et deux fréquences à cinq chaînes de sonar et trois fréquences. L'intégration d'un sonar propulsé améliorera très sensiblement les capacités d'action de ces bâtiments.

Toutes les modernisations ont fait l'objet d'une commande globale. Les livraisons vont commencer à partir de juin 2002. En 2003, quatre CMT seront modernisés, cinq en 2004 et trois en 2005. Ces travaux sont combinés avec les IPER des bâtiments.

Le coût de l'ensemble du programme est estimé à 134,46 millions d'euros (2000). On constate pour l'instant de légers surcoûts, le prix unitaire de ces modernisations passant de 7,2 millions d'euros à 7,34. En 2002, ce programme disposera de 4,61 millions d'euros d'autorisations de programme et de 27,93 millions d'euros de crédits de paiement.

III. LE RENOUVELLEMENT DE L'AVIATION EMBARQUÉE

Comme d'autres composantes de la Marine, l'aviation embarquée a une moyenne d'âge assez élevée et devra être presque entièrement renouvelée d'ici 2015.

EVOLUTION PRÉVISIBLE DU PARC JUSQU'EN 2015

 

SEM

E-2C

Rafale

WG 13 Lynx

Super Frelon

Dauphin Pedro

NH90

2002

51

2

8

32

8

15

 

2003

49

2

10

32

8

15

 

2004

48

3

10

31

8

15

 

2005

48

3

10

31

8

15

 

2006

47

3

10

30

7

15

1

2007

46

3

16

29

6

14

3

2008

41

3

21

26

5

14

5

2009

32

3

28

22

0

14

7

2010

20

3

33

21

 

14

9

2011

8

3

39

17

 

14

11

2012

0

3

44

14

 

14

13

2013

 

3

50

9

 

14

15

2014

 

3

55

8

 

14

17

2015

 

3

55

7

 

14

19

A. LA MODERNISATION DU SUPER ETENDARD DANS L'ATTENTE DU RAFALE

La modernisation des Super Etendard se poursuit pour donner au groupe aéronaval des capacités supplémentaires d'attaque d'objectifs (armement guidé laser) et de reconnaissance (châssis de reconnaissance), et pour améliorer leur autoprotection. Ces différents éléments ont respectivement été commandés en 1992, en 1995 et en 1997.

En 2001, 41 appareils sont capables de délivrer des armements guidés laser, ils seront 51 en 2002. La livraison des appareils dotés de systèmes d'autoprotection est décalée. Ils n'étaient que 16 en 2001. Leur nombre progressera de 10 par an. La dotation sera complète en 2005.

Ces différentes modifications amenant le Super Etendard au « standard 4 » représentent un coût total de 224,3 millions d'euros (2001). 9,3 millions d'euros de crédits de paiement seront consacrés à ces programmes en 2002.

En outre, les retards dans les livraisons du Rafale nécessitent de maintenir l'avion en service jusqu'en 2011 et donc de le doter de capacités de bombardement et de reconnaissance de nuit « standard 5 ». Mais, compte tenu du vieillissement des cellules, seuls 35 Super Etendard seront dotés de toutes les fonctions de ce nouveau standard. Outre la capacité de frappe de nuit, cette nouvelle phase de modernisation touchera : le brouilleur pour la protection de l'appareil lors de bombardements à haute altitude, l'amélioration du débit des systèmes de communication, des performances du radar, du système de navigation en augmentant son degré de précision, l'acquisition d'un système portable de lecture de situation tactique et géographique et la modernisation du pilote automatique.

La commande de la modernisation au standard 5 aura lieu en 2002. Les premiers appareils (5) seront livrés dès 2003 et toutes les opérations seront achevées en 2005. Elles représentent un coût de 134,2 millions d'euros. 12,2 millions d'euros d'autorisation de programmes sont inscrits au PLF 2002 et 29 millions de crédits de paiement (27,3 M € de CP + 5,3 M € de reports).

B. LE RAFALE

Le programme Rafale doit permettre de remplacer progressivement trois types d'avions dont un seul est toujours en service : le Super-Etendard (attaque au sol), le Crusader (chasse, retiré du service) et l'Etendard IVP (reconnaissance, retiré du service). Il est prévu d'acquérir 60 Rafale en trois versions successives : F1 chasse air-air, F2 chasse et air-sol, F3 polyvalent chasse, air-sol, nucléaire et reconnaissance.

Les 10 premiers appareils au standard F1 ont été commandés avant 1997. Les sept autres appareils ont été commandés en 1999, une seconde tranche de 8 devrait être « affermie » fin 2001 ou début 2002, portant le nombre des commandes à 25 avions. Cette dernière commande s'intégrait dans une commande globale de 48 avions Rafale, dont 15 Rafale Marine en deux tranches (28 dont 7 M et 20 dont 8 M). La prochaine commande de 18 Rafale M dont 17 biplaces devrait intervenir en 2003. Le développement des biplaces, qui devait être lancé en 2001 grâce au déblocage de 30,49 millions d'euros, a été reporté à 2003.

La Marine disposera fin 2001 de sa première flottille de 7 appareils au standard F1 (chasse Air-Air) et de 10 appareils opérationnels fin 2002.

Les Rafale au standard F2 (Air-sol) monoplaces et biplaces (35 appareils) arriveront dans la Marine à partir de 2007 au rythme de 5 à 6 par an. Il y en aura 16 en 2007 et 55 en 2014. Parallèlement les SEM disparaîtront progressivement. Il y en a 52 aujourd'hui, il y en aura 46 en 2007 et ils auront disparu en 2012. Le caractère tardif des livraisons du Rafale et leur coût peuvent susciter l'inquiétude car à partir de 2008 il faudra aussi assurer la livraison d'un grand nombre de bâtiments neufs. Le calendrier est également très tendu puisque les Super Etendard ne pourront guère être prolongés au-delà de 2010.

En 2002, la Marine consacre 298,2 M € de CP au programme Rafale, soit 9,3 % de ses crédits d'investissement.

C. LE E-2C HAWKEYE

La Marine dispose depuis mars 2000 de deux appareils, qui avaient été commandés en 1995. Cet avion, proche dans ses fonctions de l'Awacs, assure l'alerte lointaine pour le groupe aéronaval et l'information des avions de combat en mission.

La commande d'un troisième et dernier est prévu en 2001, la France profitant d'une commande de 21 avions par l'US Navy. Il sera livré en 2003. En 2002, la flottille 4 F qui met en oeuvre le Hawkeye recevra le simulateur de pilotage.

Le coût total du programme est estimé à 958,5 M € pour trois avions et l'ensemble de leur environnement. En 2002, 38,1 millions d'euros sont inscrits en AP et 53,2 millions d'euros en CP dans le projet de loi de finances.

D. LE NH 90

Ce programme est mené en coopération avec l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas et le Portugal depuis juin 2001, géré par un agence de l'OTAN (Nahema - Nato helicopter management agency) et un consortium industriel ad hoc (NHI). Pour ces pays 605 appareils sont prévus dont 160 pour la France. Le premier contrat a été signé le 30 juin 2000. Pour ces cinq pays 308 appareils sont commandés dont 253 fermes dans deux versions l'une de transport tactique pour quatre armées de terre et deux armées de l'air et l'autre navale à l'attention de quatre marines (NFH- nato frigate helicopter) pour remplir des missions de lutte anti-sous-marine et anti-surface. Dans cette version, il sera également capable d'accomplir des missions de soutien, d'alerte avancée, de recherche et de sauvetage.

Le Portugal devrait commander 10 appareils en version tactique (TTH- tactical transport helicopter) et son industrie devrait assurer 1,2 % de la charge de travail. L'armée de terre portugaise recevra ses hélicoptères à partir de 2007.

La Suède, la Norvège et la Finlande regroupées dans le Nordic standard helicopter project (NSHP) ont également choisi le NH 90 en octobre 2001. Ces trois pays devraient commander 69 appareils (52 + 17 en option).


PAYS

TTH

NFH

France

133

27

Allemagne

134

20

Italie

150

46

Pays-Bas

-

20

Portugal

10

-

Ce programme permettra à la Marine de remplacer les Super Frelon puis les Lynx par un seul hélicoptère biturbine moyen lourd de classe 9 tonnes. 27 NH 90 en version NFH ont été commandés dans deux sous-variantes (13 soutien, 14 combat) lors de la signature du contrat d'industrialisation en juin 2000.

L'échéancier des livraisons a dû être revu à la baisse pour des raisons financières. Un seul exemplaire, au lieu de trois, sera livré en 2005 puis les livraisons s'effectueront au rythme de deux par an jusqu'en 2018, au lieu de quatre par an jusqu'en 2011.

Le coût total du programme pour la Marine est estimé pour le développement et la production à 1 731,8 millions d'euros (2001). 38 M € de CP sont inscrits en 2002 au titre de ce programme.

CHAPITRE IV-
LA DISSUASION

La réorganisation des structures de commandement des forces sous-marines comprenant la Force océanique stratégique (FOST), qui a à sa charge la mission de dissuasion et l'escadrille des six sous-marins nucléaires d'attaque (SNA), est achevée. Elle a consisté à déménager l'état-major de Houilles à Brest à l'été 2000, où il est implanté dans l'enceinte de la base navale sur le site des Roches-Douvres. Il est ainsi placé à proximité immédiate du site qui abrite les SNLE et le centre de préparation des équipages.

De même, le centre opérationnel de la Force océanique stratégique (COFOST) est installé depuis septembre 2002 à Brest. Le COFOST de secours, encore installé à Houilles sera déplacé à Lyon Mont-Verdun auprès du centre de contrôle opérationnel des forces aériennes stratégiques.

A. LES SNLE-NG

Le renouvellement de la flotte des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) se poursuit avec le programme de SNLE de nouvelle génération. Ces bâtiments ont un déplacement de 14 000 tonnes en plongée et emportent 16 missiles nucléaires. Leur discrétion acoustique, leurs systèmes de navigation et de détection et leur autonomie sont sensiblement améliorés.

La loi de programmation 1997-2002 prévoyait l'admission au service actif du SNLE-NG n°4 en 2008 en version M45 et la mise en service du M 51 en 2010. Ce calendrier a été une première fois modifié par la revue de programme en 1998. Il avait été décidé de faire des économies sur le développement du M 51 et la remise à niveau du SNLE-NG n°4 en coordonnant leur mise en service simultanée en 2008.

Ce calendrier a été à nouveau modifié par le projet de loi de programmation militaire pour 2003-2008 et le PLF 2002, portant les retards sur le « Vigilant » à 18 mois et sur le « Terrible » à 36 mois par rapport aux prévisions initiales. Le SNLE-NG n°4 et le M 51 n'entreront en service qu'en 2010. Cette décision s'explique essentiellement par des raisons financières et par l'organisation du plan de charge de l'établissement de DCN à Cherbourg. Des retards ont, en effet, été pris sur la construction du « Vigilant » (SNLE-NG n°3, environ 5 mois en 2001) et la prochaine période d'entretien majeur du « Triomphant » (SNLE-NG n°1, entré en service en 1997) est prévue à partir d'avril 2002. Notifiée à DCN en octobre 2001, elle durera 29 mois et représente un contrat d'environ 150 millions d'euros.

En conséquence, les deux derniers SNLE de génération précédente, « l'Indomptable » et « l'Inflexible » ont été prolongés d'un an. Leurs retraits respectifs sont désormais prévus en 2004 et 2007.

Le retrait de « l'Indomptable » sera coordonné avec l'admission au service actif du « Vigilant » et la fin du grand carénage du « Téméraire » (2006-2007).

Le recul de deux ans de l'admission au service actif du « Terrible » conduit néanmoins à un espacement de trois ans avec le retrait du service actif de « l'Inflexible ». Pendant trois ans, la France descendra en dessous du seuil de quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins définis par le modèle d'armée 2015.

Cette diminution temporaire du nombre des SNLE en service ne devrait cependant pas avoir de conséquences opérationnelles puisque le nombre de quatre SNLE a été fixé en prenant en compte le fait qu'un SNLE sur les quatre serait en entretien majeur (24 mois tous les 7 ans et demi environ), un serait en période d'entretien périodique et deux seraient aptes à appareiller. De 2007 à 2010, trois sous-marins seront disponibles, il n'y aura pas de sous-marin en entretien majeur mais un sous-marin en construction.

Calendrier des retraits et admissions au service actif des SNLE

 

Retraits du service actif

Admissions au service actif

1996

Le Terrible

 

1997

 

Le Triomphant

1998

Le Foudroyant

 

1999

Le Tonnant

Le Téméraire

2004

L'Indomptable

(au lieu de 2003)

Le Vigilant

2007

L'inflexible

(au lieu de 2006)

 

2010

 

Le Terrible - M 51

(au lieu de 2008)

Les opérations d'adaptation des trois premiers sous-marins de nouvelle génération au missile M 51 s'étaleront de 2010 à 2016 et nécessiteront de mettre à profit les immobilisations de longue durée des bâtiments pour ne pas obérer les capacités opérationnelles.

Le programme de SNLE de nouvelle génération a fait l'objet de dépassements considérables. Le coût total estimé du programme pour 4 sous-marins (9 788 millions d'euros 1986) est assez proche du coût estimé à l'origine pour 6 sous-marins (9 955 millions d'euros 1986), le coût unitaire ayant progressé de près de 40 % (1 405 millions d'euros contre 1 030 millions d'euros de 1986).

Pour 2002, ce programme est doté de 280,66 millions d'euros d'autorisations de programme et de 282,6 M € de crédits de paiement.

B. LE M 51

Le programme M 51 vise à remplacer le missile M 45 (MSBS - missile mer sol balistique stratégique) tiré à partir des SNLE en patrouille.

Il constitue un progrès dans tous les domaines : précision, portée (6 000 km), résistance. Comme les missiles M4 et M45, il sera capable d'emporter plusieurs têtes thermonucléaires. Issu du programme M 5 plus ambitieux lancé en 1992, le programme M 51 a été lancé en 1996. Il est prévu de construire un peu moins de 50 missiles opérationnels.

Les premiers missiles dotés des têtes nucléaires TN 75 seront en service à bord du SNLE-NG n°4 en 2010. En 2015, ils seront dotés d'une nouvelle tête, la TNO (tête nucléaire océanique).

Le coût total du programme est estimé à 4 713 millions d'euros (2001), soit un coût inférieur d'environ 21 % à celui du programme M 5.

Les crédits attribués à ce programme en 2002 sont de 71,6 millions d'euros en AP et de 550,9 millions d'euros en CP.

C. LE NOUVEAU RÉACTEUR D'ESSAI À TERRE (RES)

Le programme RES est destiné a remplacer le réacteur d'essai à terre actuel (RNG - réacteur de nouvelle génération) qui date des années 1970 et dont la fin d'exploitation est prévue en 2005. Il est en construction sur le site de Cadarache. Le bon déroulement de ce programme est indispensable pour qu'au moment de l'entrée en service des sous-marins Barracuda en 2012 les chaudières nucléaires aient fonctionné suffisamment longtemps, l'objectif du réacteur à terre étant de les tester pour éviter que ne se produisent des accidents en mer.

Disposer d'un réacteur d'essai à terre reste en effet nécessaire pour :

- la qualification technique des chaufferies en service, l'expérience acquise à terre permettant de mettre en place des évolutions sur les bâtiments pour rendre les réacteurs plus sûrs et plus efficaces ;

- la qualification des combustibles nucléaires ;

- le développement de nouveaux composants pour les chaufferies.

C'est par exemple grâce aux expérimentations menées à terre que peut être optimisée l'utilisation des coeurs des réacteurs. Ce problème est particulièrement important pour le porte-avions « Charles de Gaulle » dont la disponibilité doit être portée à son maximum tant qu'il sera le seul porte-avions français. Il serait donc souhaitable, sans porter atteinte à la sécurité, de réduire la durée des immobilisations liées aux travaux sur les réacteurs (durée de vie totale des coeurs, des périodes de disponibilité entre deux entretiens...).

La décision de réalisation du RES a été prise en 2000 et sa divergence est prévue en 2007. Le RES comprendra deux installations principales : une piscine permettant l'examen et l'entreposage des éléments combustibles de la propulsion nucléaire (achèvement en 2004) et un réacteur. Son coût estimé est de 593 millions d'euros (2000).

Crédits destinés aux programmes de propulsion navale nucléaire

(en millions d'euros courants)

Programmes

Chapitres

LFI 2001

PLF 2002

AP

CP

AP

CP

RES

51 71-51

33,7

34,3

102,3

53,8

SNLE NG

51 71-31

29,7

24,9

18,8

27,9

PA CDG

53 81-71

0

0,9

 
 

Barracuda

53 81-77

0,8

0,8

17,1

10,3

Installations à terre

51 71-37 et 32

4,7

3,1

2,9

2,9

Entretien SNLE

51 71-36

9,5

9,5

13

13

Entretien SNA et PA

55 21-35

2,3

2,0

2,1

2,1

Adaptation des coeurs

53 81-62

1,1

1,1

3,9

1,5

Formations spécifique

55 11-37

1,1

1,1

1,2

1,2

Total

 

82,9

77,7

161,3

112,7

Les crédits actuellement dévolus au RES sont à peine suffisants pour le bon déroulement du programme. La décision a été prise de ralentir les travaux sur la piscine pour maintenir la date de divergence du réacteur et il faudra en 2003 une hausse significative du budget alloué à ce programme, de l'ordre de 60 millions d'euros, pour en assurer le bon déroulement et éviter l'arrêt des travaux.

CHAPITRE V-
LE DÉVELOPPEMENT DES MISSIONS DE SERVICE PUBLIC DE LA MARINE

Les missions de service public regroupent l'hydrographie, la protection des approches maritimes, la lutte contre les pollutions, la surveillance maritime, la recherche et le sauvetage, l'information nautique, la police des pêches et la sécurité des plates-formes en mer. La Marine intervient le plus souvent en coopération avec d'autres administrations. Son action est complémentaire puisqu'elle est la seule à disposer de moyens hauturiers lourds capables d'agir durablement dans des conditions météorologiques difficiles. Les préfets maritimes, commandants des régions maritimes, interviennent comme coordinateur de l'action de l'Etat en mer en Manche, Atlantique et Méditerranée.

I. L'ÉVOLUTION DE L'ACTIVITÉ ET DES COÛTS DES MISSIONS DE SERVICE PUBLIC

Ces missions de service public représentent en moyenne 17 % de son activité. En 2000, ces missions ont mobilisé 51 000 heures de mer (17 % de l'acitivité globale). Au 30 juin 2001, elles ont représenté 23 000 heures de mer (15 % de l'activité).

L'année 2000 a été marquée par deux événements majeurs, les naufrages de « l'Erika » et du « Ievoli Sun ». Le remorquage puis le naufrage de « l'Erika » a mobilisé du 12 décembre 1999 au 22 septembre 2000 12 710 heures de mer (soit 287 jours) pour les bâtiments de surface et 498 h et 132 missions pour les aéronefs.

Le naufrage puis la surveillance de l'épave du « Ievoli Sun » du 31 octobre 2000 au 31 décembre 2000 ont mobilisé pendant 1 455 h (61 jours) les moyens de surface et 39 h (9 missions) les aéronefs.

On constate ainsi depuis deux ans une hausse de 10 % des dépenses de la Marine en faveur de ses missions de service public essentiellement à cause des naufrages de « l'Erika » et du « Ievoli Sun », mais aussi de leurs conséquences puisque les moyens destinés à assurer la lutte contre la pollution et la sécurité des approches maritimes ont été accrus.

Evolution du coût pour la Marine des missions de Service public depuis 1999

(en millions d'euros)

Moyens

1999

2000

2001

(estimation)

Bâtiments de service public

29

29,2

27

Bâtiments affrétés

Remorqueurs d'intervention

8

8,1

8,1

Bâtiment de soutien de haute mer

5,5

5,5

5,5

Remorqueur du Pas-de-Calais

0

2

2

Bâtiments de la Gendarmerie maritime

16,5

16

15,4

Grands bâtiments de la marine

114,3

123,5

123,5

Aéronefs

16,8

19

28,2

Sémaphores

16,8

16,8

16,8

Equipements de lutte antipollution

3,7

4,7

5,9

Total

210,6

224,6

231,3

II. LE RENFORCEMENT DES MOYENS DE LUTTE CONTRE LES POLLUTIONS

Le comité interministériel de la mer du 27 juin 2000 a décidé de renforcer le dispositif de surveillance du trafic maritime en Manche et Mer du Nord par la présence d'un bâtiment supplémentaire de la Marine pouvant exécuter des missions de longue durée dans des conditions météorologiques difficiles. L'état-major a décidé de positionner la frégate de surveillance « Germinal » à Brest pour remplir cette mission, le bâtiment d'expérimentation de guerre des mines (BEGM) « Thétis » pouvant compléter le dispositif. La contribution effective de ces bâtiments en Manche et mer du Nord équivaut à 15 jours de patrouille supplémentaire.

En outre, la permanence d'un remorqueur supplémentaire d'intervention a été mise en place dans le Pas-de-Calais, en partage avec les Britanniques, depuis le 1 er avril 2000.

La Marine devrait accroître ce dispositif en affrétant dans le courant de l'année 2002 un navire de lutte contre la pollution.

III. LA MODERNISATION ET LA RÉORGANISATION DES MOYENS AÉRONAUTIQUES DE SAUVETAGE ET DE SURVEILLANCE

A. LA LIVRAISON EN 2002 DU CINQUIÈME FALCON 50M

2001 et 2002 permettront à la Marine de moderniser et de compléter ses moyens aéronautiques de surveillance maritime grâce à la livraison de deux avions Falcon F50 M de Dassault, portant à quatre le nombre de ces appareils en service dans la Marine.

Ces appareils transformés à partir de versions civiles sont à même de remplir un grand nombre de missions grâce à leurs caractéristiques techniques (triréacteur, subsonique, 4 heures environ d'autonomie de vol) : surveillance des pêches, recherche et sauvetage (SAR) en mer de bâtiments ou d'aéronefs naufragés, lutte contre les pollutions maritimes, sécurisation des zones de tir « sensibles » (Kourou, Centre d'essais des Landes ou Centre d'essais de Méditerranée), soutien aux sous-marins nucléaires, renseignement, lutte anti-drogue.

Ces appareils disposent en outre d'un fort potentiel de disponibilité, de l'ordre de 90 %, en raison du bon déroulement du contrat de soutien avec Dassault Falcon Service (DFS). Si l'achat d'un cinquième avion n'est pas programmé dans la loi de programmation militaire, la modernisation du radar est envisagée pour lui permettre de suivre un plus grands nombres de pistes en même temps, notamment dans le cadre de sa mission de surveillance de la navigation maritime dans les zones les plus fréquentées comme en Manche et Mer du Nord.

B. LA RÉORGANISATION DU SOUTIEN DES HÉLICOPTÈRES SUPER-FRELON ET DAUPHIN

Pour les missions de recherche et de sauvetage (SAR), la Marine met en oeuvre deux types d'hélicoptères : le Super Frelon et le Dauphin.

Elle dispose depuis 1999 de 6 Super-Frelon dédiés à ces missions, les 18 autres appareils de ce type ayant été retirés du service actif en raison de leur ancienneté. Cet hélicoptère lourd de classe 13 tonnes est en effet en service dans la Marine depuis 1970 (1 er vol en 1962). Depuis cette date, il a effectué plus de 1 500 interventions et sauvés plus de 2 000 vies. Aujourd'hui, un Super Frelon est en alerte sur chaque façade maritime à Lanvéoc-Poulmic et à Saint-Mandrier.

La Marine s'est dotée à partir de 1994 de cinq hélicoptères légers Dauphin de service public, de la même famille que les Dauphin-Pedro, implantés sur quatre sites sur le littoral : Le Touquet, Cherbourg, La Rochelle et Hyères. Ils assurent une alerte permanente à une heure de jour et deux heures de nuit. Un hélicoptère Lynx, qui sera remplacé au premier semestre 2002 (décision prise par le CIM le 27 juin 2000) par un hélicoptère Dauphin, assure l'alerte à partir de la base de Lanvéoc-Poulmic.

Le nombre réduit des appareils et leur dispersion sur le territoire a conduit à modifier l'organisation de leur soutien à partir du 1 er juin 2001. Cette mesure doit aussi permettre une meilleure formation des équipages et des équipes techniques et faciliter l'exploitation du retour d'expérience. L'ensemble des Super-Frelon doit être regroupé au sein de la flottille 32 F à Lanvéoc-Poulmic qui assurera leur soutien et permettra de concentrer ce moyen lourd d'intervention là où il est le plus utile, c'est à dire sur la façade atlantique. Un détachement de la flottille 32 F assurera toutefois une alerte à 4 heures sur la base de Hyères. Le soutien de tous les Dauphin est en revanche regroupé sur la base de Saint-Mandrier (flottille 35 F).

IV. L'ADAPTATION AUX NOUVELLES MENACES DES MOYENS DE SURVEILLANCE DES APPROCHES MARITIMES

La Marine assure la surveillance des approches maritimes en haute mer et sur le littoral grâce au réseau de sémaphores. L'organisation de ce dispositif qui date de la fin de la guerre froide a été récemment revu en raison d'une part du risque nouveau que représente l'immigration clandestine par voie de mer et d'autre part du danger terroriste.

Le premier semestre de l'année 2001 a, en effet, été marqué par l'échouage du navire « East Sea » sur la côte du département du Var le 17 février 2001. Cet événement a conduit à réévaluer l'importance et l'organisation de notre dispositif de surveillance en mer de l'immigration clandestine et de la surveillance des côtes par veille sémaphorique.

Depuis mars 2001, ces missions sont susceptibles de mobiliser des frégates pouvant mettre en oeuvre des hélicoptères, des avions de surveillance ou de patrouille maritime comme les Atlantique 2 ou des Falcon, des vedettes de la Gendarmerie maritime ou un détachement de commandos. La mise en place d'une surveillance au large est nécessaire pour disposer d'un préavis supérieur à celui que donne les sémaphores (environ deux heures) en cas d'incident. Dans cette perspective la Marine française a également mis en place des coopérations ponctuelles avec la marine militaire italienne. Un effort accru de renseignement reste toutefois le moyen le plus sûr de limiter ce risque en donnant une connaissance aussi précise que possible des mouvements et des chargements des bâtiments suspects ce qui permet de les intercepter grâce à des moyens appropriés. Il faut rappeler que le déploiement pour ces missions de grands bâtiments est particulièrement onéreuse.

Par ailleurs, la loi n°94-589 du 15 juillet 1994, relative aux modalités de l'exercice par l'Etat de ses pouvoirs de contrôle en mer, permet aux commandants des navires et des aéronefs de l'Etat de reconnaître, contrôler et dérouter tous navires, à l'exception des navires de guerre ou d'Etat. Le refus d'obtempérer est sanctionné d'un million de francs d'amende, sans préjudice d'éventuelles poursuites pénales. Les commandants ou officiers en second du navire ou le commandant de bord de l'aéronef sont habilités à constater les infractions.

La mission de veille sur le littoral est remplie par la Marine en coopération avec d'autres administrations et se décline en deux volets l'un militaire, l'autre civil. Le volet militaire s'intègre dans la défense maritime du territoire (DMT- Décret n°73-237 modifié du 2 mars 1973) qui a pour objectif de protéger les installations les plus importantes pour la défense nationale sous la responsabilité du commandant de zone maritime. Cette mission mobilise certes les sémaphores sur les côtes mais surtout les moyens navals hauturiers de la Marine et les avions de patrouille et de surveillance maritime pour exercer un contrôle en profondeur, du large vers la côte, de nos approches maritimes.

Dans le cadre de leurs missions civiles, les sémaphores participent sous la responsabilité du préfet maritime, à la sauvegarde des vies humaines en mer en coordination avec les CROSS (centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage) placés sous l'autorité du ministère des transports, et à la surveillance de la navigation en vue de la prévention des pollutions marines accidentelles.

Jusqu'à l'échouage de « l'East Sea », seuls les sémaphores situés à proximité des installations prioritaires de défense (IPD), des ports de commerce d'intérêt majeur (PCIM), des zones de mouillage les plus fréquentées ou des zones frontalières, étaient en veille permanente (jour et nuit). Les autres sémaphores n'étaient armés par du personnel que durant la journée, entre le lever et le coucher du soleil pour l'exercice d'une veille optique, la veille VHF (écoute radio) étant assurée 24h sur 24 par les CROSS ou par les sémaphores remis en veille nominale en quelques minutes. Depuis cet événement, tous les sémaphores de la façade méditerranéenne sont en veille permanente optique et radar.

V. LE RENOUVELLEMENT DES MOYENS HAUTURIERS HYDROGRAPHIQUES ET OCÉANOGRAPHIQUES DU SHOM

Depuis le désarmement du bâtiment hydrographique « Espérance » en 2000, le service hydrographique et océanographique de la Marine (SHOM) ne dispose plus que d'un seul navire hauturier, le « d'Entrecasteaux ». En effet, à l'origine, les livraisons de nouveaux BHO pour les remplacer était envisagée en 1999 et 2001. Un programme de construction de deux bâtiment a été engagé en 2000 avec la commande du premier, celle du second devant intervenir en 2002.

La Marine a besoin de deux navires capables d'effectuer chacun une moyenne de 180 jours d'activité par an pour l'exécution des missions suivantes :

- océnaographie et hydrographie d'intérêt militaire répondant aux besoins des forces maritimes ;

- travaux d'hydrographie générale, dont la Marine est responsable dans le cadre de ses attributions de service public.

Ce programme est conduit en coopération avec l'IFREMER (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer). Un protocole a été signé avec le ministère de la recherche le 17 juillet 2000. Un premier bâtiment militaire sera livré en 2003 pour les besoins prioritaires de la Marine. Il est dérivé du navire civil « Thalassa ». L'IFREMER aura sur ce navire un droit d'utilisation de 5% moyennant une participation financière de même ampleur. Un second bâtiment sera réalisé ensuite et livré en 2004. Il aura un statut civil, répondant à la fois aux besoins de l'IFREMER et à ceux de la Marine. Il sera armé par la société Genavir et exploité et financé à parts égales par la Marine et l'IFREMER.

Le premier navire, le « Beautemps-Beaupré » aura un déplacement de 3 250 tonnes, un équipage de 25 personnes et la capacité d'accueillir à son bord le même nombre de scientifiques et de techniciens.

Le second navire sera plus important (déplacement à pleine charge d'environ 5 000 t), pourra accueillir 40 scientifiques et techniciens en plus d'un équipage de 30 personnes et aura la capacité de mettre en oeuvre des engins sous-marins.

Le coût total de l'acquisition de ces deux bâtiments par la Marine est de 110 millions d'euros, le premier navire représentant 72 millions d'euros (95 %) et le second 38 millions d'euros (50 %).

Au titre du budget 2002, pour le BHO n°1, 2,1 M € d'autorisations de programme (AP) sont prévus et 21,2 M € en crédits de paiement (CP) au titre V. Le BHO n°2 est financé sur le titre VI. 6,6 M € d'AP lui sont consacrés ainsi que 14,9 M € de CP.

CONCLUSION

Le budget de la Marine pour 2002 est à l'image de l'exécution de la loi de programmation 1997-2002. Leur examen provoque des réactions contrastées.

La professionnalisation des forces entreprises depuis 1997 est globalement une réussite, accomplie selon le modèle fixé, elle apparaît comme un exemple réussi de réforme de l'Etat 1( * ) . En effet, les effectifs ont évolué conformément aux prévisions établies en 1996. Dès la fin de l'année 2001, les appelés auront quitté la Marine alors qu'ils étaient plus de 18 000 début 1997. Ils ont laissé la place à des engagés plus nombreux, aux volontaires et au personnel civil. Le nombre de personnels civils passera de 6 500 en 1996 à plus de 10 000 en 2002 où il représenteront 20 % des effectifs ce qui constitue un changement considérable pour une armée. Les sous-effectifs qui représentaient 10 % des emplois en 2000 devraient être inférieurs à 5 % à la fin de l'année 2002 en raison de recrutements et des conversions, déjà effectuées, de postes en crédits de sous-traitance. Les personnels militaires gradés (officiers et officiers mariniers) ont évolué conformément aux objectifs même si en fin de loi de programmation des ajustements ont été effectués afin d'optimiser la pyramide des grades aux besoins et pour essayer de palier les déficiences dans certaines spécialités.

De même, les crédits de fonctionnement, après avoir suscité des inquiétudes dans la première partie de l'exécution de la loi de programmation, permettent aujourd'hui une gestion moins tendue et surtout le retour à un niveau correct d'entraînement. La Marine retrouvera en 2002 une moyenne de 97 jours de mer, ce qui lui permettra de poursuivre sa politique de déploiements lointains de longue durée et d'approcher l'objectif d'entraînement de 100 jours. C'est assurément l'un des domaines où des progrès indispensables sont encore à accomplir pour assurer à nos forces le même niveau d'entraînement qu nos partenaires de l'Alliance atlantique.

En revanche, le niveau des crédits d'équipement provoque l'inquiétude. En 2002, hors « crédits disponibles supplémentaires » ils seront à un niveau comparable à celui de 1998 où une « encoche » avait été faite dans le budget et donc un des plus bas des six dernières années. S'ils étaient totalement exécutées en 2002, le taux d'exécution des crédits d'équipement de la loi de programmation s'établirait entre 80 et 90 % selon les estimations, ce qui pourrait correspondre à une annuité sur six de crédits d'équipement en moins. Or, à ce niveau de ressources, la Marine ne pourra pas réaliser le format prévu dans le « modèle d'armée 2015 » à la date prévue.

Plus inquiétant encore, le renouvellement de la flotte de surface et sous-marine risque de devenir problématique. Les bâtiments vieillissent ; si le calendrier prévu est respecté, ils auront tous plus de 30 ans de service au moment de leur remplacement. Il y a donc peu de marge de manoeuvre si la France souhaite continuer à disposer d'une des marines les plus modernes et performantes du monde dans la prochaine décennie.

Certes, certains programmes sont déjà avancés comme les nouveaux transports de chalands de débarquement ou les deux premières frégates anti-aériennes Horizon, mais les programmes qui permettront de remplacer le coeur de la flotte de surface et sous-marine débutent tout juste en 2002 pour se concrétiser en 2008 et 2012. Les mener à leur terme en respectant délais et coûts est un enjeu majeur.

Dans les années qui viennent, la Marine devra aussi assurer le renouvellement d'une grande partie de son parc aéronautique : remplacement du Super-Etendard par le Rafale, des Super-Frelon et Lynx par le NH90. Comme pour la flotte, il est devenu indispensable de réaliser ces investissements dans les temps, les livraisons ayant déjà été réduites au niveau minimum autorisé par les contrats, les hélicoptères Super-Frelon sont à bout de souffle et les SEM arrivent en fin de potentiel malgré les modernisations successives.

Qu'il s'agisse de l'aéronautique ou de la flotte, un effort substantiel devra être fait dans la prochaine loi de programmation militaire pour éviter des ruptures de capacité qui apparaîtraient presque inévitablement si rien n'était fait. La Marine est à même de remplir ses missions mais il faut déjà préparer la Marine des années 2010.

Au moment où s'achève avec succès une professionnalisation des forces qui a focalisé l'essentiel des énergies et qui permet à notre pays de disposer d'une armée très qualifiée et projetable à l'extérieur, adaptée aux crises, il devient nécessaire de réaliser le second volet de la modernisation de notre outil de défense en le dotant des matériels adaptés aux défis de demain.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent rapport pour avis lors de sa réunion du 22 novembre 2001.

A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Xavier de Villepin, président, a souhaité savoir quelles décisions la marine avait décidé de prendre pour assurer le contrôle des approches maritimes après l'échouage de l'East Sea sur les côtes méditerranéennes.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a précisé que, seuls, les sémaphores qui n'étaient pas situés à proximité de zones portuaires ou militaires importantes ne fonctionnaient que durant la journée. Depuis cet événement, le chef d'état-major de la marine a ordonné le réarmement, de jour comme de nuit, de tous les sémaphores, qui assurent ainsi en permanence une veille visuelle et radio de nos côtes. D'autres moyens ont été mis en alerte pour assurer la surveillance au large.

M. Xavier de Villepin, président, a ensuite souhaité obtenir des précisions sur les modalités de l'appareillage du porte-avions Charles-de-Gaulle, annoncé par le Premier ministre, et notamment sur la présence à bord d'avions Rafale.

M. André Boyer, rapporteur pour avis, a indiqué que le déploiement du Charles-de-Gaulle s'inscrivait dans le cadre de la deuxième phase de la guerre menée contre Al Qaida en Afghanistan. Cette phase risque d'être de longue haleine et de porter sur de vastes espaces. Le groupe aéronaval sera composé d'une frégate anti-aérienne, de deux frégates anti-sous-marines, d'un sous-marin nucléaire d'attaque et d'un pétrolier ravitailleur. Ces bâtiments rejoindront les forces déjà déployées dans l'Océan indien, notamment le bâtiment de commandement et de ravitaillement (BCR) Var, dont l'apport logistique a été très apprécié par les Américains, et l'avion de patrouille maritime Atlantique, basé à Djibouti. A son bord, le porte-avions embarquera des avions Super-Etendard, des Hawkeye, des Rafale et des hélicoptères. Les Rafale effectueront à cette occasion leur évaluation opérationnelle. Ils ne seront normalement pas employés pour des missions de combat.

Le groupe aéronaval aura notamment pour mission d'empêcher toute exfiltration des terroristes par la mer ou par aéronef au-dessus de la mer. Il s'agit d'une mission de surveillance maritime qui nécessite des moyens très importants compte tenu de l'immensité des zones à couvrir. Elle requiert des moyens aériens et de surface et des moyens de commandement et de transmission des données. Le groupe aéronaval sera à même de répondre à ces besoins grâce aux Hawkeye dont la portée de détection radar est de 800 km, aux Super-Etendard capables de faire des reconnaissances optiques rapides à grande distance sur des échos suspects, au système de combat du porte-avions pour gérer et transmettre toutes les informations. Enfin, les hélicoptères et les bâtiments d'escorte pourront assurer l'inspection des navires.

Répondant à M. Christian de La Malène, M. André Boyer, rapporteur pour avis, a expliqué que le groupe aéronaval pourrait effectuer ces missions pendant six mois environ et qu'il aurait également pour rôle de soutenir les forces françaises et alliées à terre. Le groupe aérien du portes-avions permettra d'effectuer des missions de reconnaissance, de surveillance de l'espace aérien, d'appui-feu et de protection aérienne, essentiellement dans la partie sud de l'Afghanistan.

La commission a ensuite examiné l'ensemble des crédits du ministère de la défense pour 2002.

Avant que la commision ne se prononce sur l'ensemble des crédits de la défense pour 2002, M. Xavier de Villepin, président, a rappelé que le projet de budget de la défense pour 2002 prend en compte, au titre III et de façon positive, les exigences de la professionnalisation. Il prévoit à cet effet un abondement substantiel des crédits liés à la condition militaire, ainsi qu'à l'entraînement des forces. Cependant, a-t-il déploré, le projet n'apporte aucune marge de manoeuvre pour tout ce qui relève des crédits d'équipement.

La condition militaire, et notamment les mesures catégorielles en faveur des sous-officiers, sont un des aspects positifs des crédits du titre III. Ils permettent également d'améliorer les normes d'entraînement des trois armées, qui constituaient un sujet de préoccupation depuis plusieurs années.

Le titre V, en revanche, n'est plus à la hauteur des besoins. Si l'on excepte le nucléaire, judicieusement préservé et renforcé, ce titre, pour ce qui est des forces classiques, s'inscrit dans la logique des diverses encoches qui ont affecté plusieurs annuités de l'actuelle programmation. Il rend par ailleurs irréaliste la transition avec le niveau de la première annuité telle que définie dans le projet de loi de programmation 2003-2008.

Enfin, le niveau des crédits de paiement du projet 2002 n'est guère compatible avec l'état des engagements réalisés depuis 1998 qui auraient justifié, au contraire, a souligné M. Xavier de Villepin, président, de dégager une marge de gestion accrue pour les armées. Les autorisations de programmes, pour leur part, n'augmentent pas de façon suffisante. Pour l'armée de terre, notamment, certaines commandes ne pourront être passées au moment prévu, entraînant de nouveaux retards.

Concluant une programmation 1997-2002 qui aura, au fil des encoches et des annulations, manqué de l'équivalent budgétaire d'une annuité, ce projet de budget de la défense pour 2002, a estimé M. Xavier de Villepin, président, est d'autant plus critiquable -en dépit des efforts importants consentis sur le titre III- qu'il intervient à un moment où la situation internationale requiert une disponibilité accrue de nos forces dont on sait qu'elles seront, à moyen terme, confrontées à des lacunes capacitaires importantes comme, notamment, le transport aérien ou les hélicoptères de transport de troupe.

Autant de raisons qui, a conclu M. Xavier de Villepin, président, le conduisaient à émettre un avis défavorable à l'adoption de ces crédits.

M. Jean-Pierre Masseret n'a pas contesté les préoccupations exprimées dans le constat formulé par M. Xavier de Villepin, président. Il a toutefois estimé, d'une part, qu'une appréciation rigoureuse des crédits devait tenir compte des conséquences de la décision de professionnaliser nos forces et que, d'autre part, l'actuelle loi de programmation militaire avait -après certes une revue de programmes- à peu près atteint ses objectifs, ce qui ne s'était pas produit souvent dans le passé.

Pour M. Jean-Pierre Masseret, c'est la décision, qu'il a jugée improvisée, de professionnaliser les forces qui affectait aujourd'hui les crédits d'équipement. Chacun savait le surcoût que ne manquerait pas d'entraîner cette réforme qui a quand même été menée à bien. Dans un cadre budgétaire global nécessairement contraint, l'incidence de la professionnalisation ne pouvait que peser sur le titre V.

Cela étant, a poursuivi M. Jean-Pierre Masseret, ce constat ne devait pas empêcher d'identifier les difficultés capacitaires qui pouvaient affecter le rôle de nos forces dans le monde ou dans le cadre d'une défense européenne que la France, à son avis, était bien seule à vouloir réellement promouvoir.

Prenant ainsi en compte que les objectifs majeurs de la programmation avaient été atteints en dépit du coût de la professionnalisation et rendant hommage aux personnels des forces armées, M. Jean-Pierre Masseret a indiqué que le groupe socialiste voterait les crédits de défense pour 2002.

M. Michel Caldaguès s'est élevé contre une forme de chantage moral selon lequel un rejet des crédits de défense porterait atteinte au moral des armées. C'était bien plutôt, selon lui, si le Parlement se montrait aveugle et négligent dans ses analyses que ce moral pouvait être légitimement atteint. Pour M. Michel Caldaguès, un mauvais budget légitimait un vote négatif.

M. Michel Caldaguès s'est déclaré inquiet de ce que la loi de programmation militaire, en s'assignant un modèle d'armée, au demeurant cohérent, à l'horizon 2015, avait sacrifié le moyen terme, renvoyant à plus tard les exigences capacitaires indispensables à bref délai. Ainsi, à l'horizon 2008, ce constat capacitaire lui apparaissait consternant et directement lié, notamment, au non-respect de l'engagement, inclus dans la loi de programmation militaire, de crédits d'équipement constants, alors même que la plus grande partie de la période couverte par la loi avait coïncidé avec une relative embellie budgétaire. M. Michel Caldaguès a estimé que nos forces se trouvaient cruellement démunies dans de trop nombreux domaines : risque de non-permanence de notre composante nucléaire navale, de défaut de permanence dans le transport stratégique -dont la capacité future dépendait d'une décision allemande- enfin non-permanence du groupe aéronaval. Que restait-il sinon une situation dramatique, du fait du non-respect d'une loi de programmation pourtant votée par la représentation nationale ?

Enfin, M. Michel Caldaguès a contesté le raisonnement tendant à faire porter à la professionnalisation la responsabilité de la situation. Elle était la seule réussite de cette programmation et ce n'est pas elle qui avait conduit à l'état actuel des crédits d'équipement.

M. Michel Caldaguès a alors indiqué qu'il se joindrait à l'avis défavorable proposé par M. Xavier de Villepin, président.

M. Jean-Yves Autexier a relevé l'effort consenti sur l'espace, la communication, le renseignement ainsi que la réaffirmation d'une dissuasion indépendante. Il a cependant souligné les conséquences négatives de la décision, prise, a-t-il estimé, dans l'improvisation, de mettre un terme au service national. On recueillait à présent, a-t-il poursuivi, les fruits amers de la programmation. Celle-ci avait eu deux objectifs : la professionnalisation tout d'abord, qui dans un contexte de diminution de la croissance ne pouvait que peser sur les crédits d'équipement. Ensuite, la configuration de nos forces en vue de leur projection pour des opérations extérieures : or, celles-ci ne relevaient pas toujours de l'intérêt national et s'avéraient par ailleurs excessivement coûteuses. Relevant cependant que malgré une marge de manoeuvre réduite les objectifs essentiels avaient été préservés, M. Jean-Yves Autexier a indiqué que le groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendrait sur les crédits de la défense pour 2002.

M. Jean-Guy Branger a rappelé qu'il y a plus de vingt ans, les crédits de défense correspondaient à 3,5 % du PIB. A l'époque, chacun estimait qu'un taux de 4 % était nécessaire pour le bon fonctionnement et un équipement adapté des forces armées. Aujourd'hui la part de la défense dans le PIB était ramenée à moins de 2 % . Cela illustrait, a estimé M. Jean-Guy Branger, un manque de volonté politique et il relevait de la responsabilité de la représentation nationale d'expliquer à l'opinion les conséquences très négatives de cette insuffisance.

La commission a alors émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de défense figurant dans le projet de loi de finances pour 2002.



1 Rapport spécial de Jean-Michel Boucheron sur les crédits du ministère de la défense pour 2002, Assemblée nationale, commission des finances, n°3320, session 2001-2002.


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