projet de loi de finances pour 2002 - Tome XIII : Francophonie
LEGENDRE (Jacques)
AVIS 88 - TOME XIII (2001-2002) - commission des affaires culturelles
Rapport au format Acrobat ( 191 Ko )Table des matières
-
INTRODUCTION
-
I. L'ACTION INTERNATIONALE DE LA FRANCE EN FAVEUR DE LA
FRANCOPHONIE
- A. LE FINANCEMENT DES ACTIONS RELEVANT DU SERVICE DES AFFAIRES FRANCOPHONES
-
B. L'ACTION DE LA FRANCOPHONIE MULTILATÉRALE :
LE RÔLE CENTRAL DES SOMMETS
- 1. Les sommets de la francophonie
- 2. Les opérateurs de la francophonie
- 3. L'Assemblée parlementaire de la francophonie
- 4. Les jeux de la francophonie
-
II. LA DÉFENSE DE LA FRANCOPHONIE EN FRANCE ET
DANS LES INSTITUTIONS EUROPÉENNES
- A. LA POLITIQUE EN FAVEUR DE LA LANGUE FRANÇAISE EN FRANCE
- B. LA DÉFENSE DU FRANÇAIS DANS LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES
-
I. L'ACTION INTERNATIONALE DE LA FRANCE EN FAVEUR DE LA
FRANCOPHONIE
- EXAMEN EN COMMISSION
- CONCLUSION
N° 88
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2001
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
TOME XIII
FRANCOPHONIE
Par M. Jacques LEGENDRE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Xavier Darcos, Ambroise Dupont, Pierre Laffitte, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Philippe Richert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Philippe Nogrix, Jean-François Picheral, secrétaires ; MM. Jean Arthuis, François Autain, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Louis Carrère, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Fernard Demilly, Christian Demuynck, Jacques Dominati, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Daniel Eckenspieller, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean François-Poncet, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Marcel Henry, Jean-François Humbert, André Labarrère, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Pierre Martin, Jean-Luc Miraux, Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jack Ralite, Victor Reux, René-Pierre Signé, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, Jean-Marie Vanlerenberghe, Marcel Vidal, Henri Weber.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème
législ.) :
3262
,
3320
à
3325
et T.A.
721
Sénat
:
86
et
87
(annexe n°
1
)
(2001-2002)
Lois de finances . |
Francophonie :
business (in english) as usual
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Chaque année nous examinons un budget qui témoigne d'un certain
effort financier de l'Etat en faveur de la francophonie.
Mais pour quel résultat ?
Cet effort répété, répétitif, pour ne pas
dire routinier n'est pas mis au service d'un élan, d'une volonté.
Chaque année nous dénonçons des abandons, des reculs, des
renoncements.
On condescend à nous rassurer, à expliquer que l'essentiel n'est
pas en cause, que la bonne volonté existe. Mais l'usage international du
français continue à reculer. L'anglais ne cesse de progresser au
sein des entreprises et même de l'armée !
Le français est la langue de la République. Personne ne le remet
en cause. Mais une traduction coûte cher. Alors pourquoi ne pas accepter
un demi-recul qui est une capitulation supplémentaire. Il y a toujours
pour cela de bons arguments économiques et financiers.
En 2001, année qui devait être celle du Sommet de Beyrouth, le
gouvernement français, qui exprime sincèrement son attachement
à la langue française, se résigne à l'abandon dans
l'affaire des brevets et officialise l'anglais comme langue des transactions
financières de la bourse de Paris à l'occasion d'un texte
d'apparence anodine (la loi MURCEF) obligeant votre rapporteur à
déposer un recours devant le Conseil constitutionnel.
En fait tout se passe comme si une large partie des élites politiques,
administratives, économiques de notre pays n'avait plus confiance en
l'avenir de leur langue.
Certains de nos meilleurs écrivains s'inquiètent de ces
revirements et multiplient des mises en garde.
C'est Erik Orsenna, qui déclare dans le Figaro Madame d'octobre
2001 : « J'entends dire, et de plus en plus d'ailleurs, avec
l'anglais parlé par tous, on va économiser sur les traductions.
Ça me rend fou ! L'Europe, c'est le minimum d'étendue avec
le maximum de diversité, voilà notre richesse... »
C'est Alain Decaux qui, par deux fois, nous met en garde. Dans le Figaro du 10
décembre 1999, il proclame : « Ma patrie, c'est ma
langue » et il s'inquiète : « Une France
désabusée, voilà qui pourrait comporter dans cinquante ans
un résultat qui déjà semble se profiler : les organes
d'une francophonie folle délibèreraient indéfiniment entre
eux -mais personne n'y parlerait plus français ».
Et le 17 octobre 2001, dans Le Monde, il renouvelle son appel et proclame
« la survie du français, cause nationale » en
s'interrogeant à nouveau publiquement : « Le
français se trouvera-t-il un jour dans la situation de ces langues
indiennes d'Amérique dont Chateaubriand disait que seuls les vieux
perroquets de l'Orénoque en avaient gardé le
souvenir » ?
Pour nous, pour notre culture, notre pays, la question est essentielle.
En refusant cette année les crédits de la francophonie, nous
marquons notre volonté de ne pas céder à
l'engourdissement, à la bureaucratisation qui guette. Parce qu'il s'agit
de notre langue, de notre culture, mais aussi de la langue de ceux qui ont,
avec nous, le français en partage, et qui, comme nous, croient à
la nécessaire diversité culturelle, nous devons exiger avec force
que la francophonie retrouve l'imagination, l'élan, la
détermination qui assureront son avenir.
L'organisation gouvernementale de la francophonie s'articule entre deux
pôles principaux, qui s'appuient chacun sur une administration
différente.
La francophonie intérieure regroupe les actions qui concourent à
la diffusion, à l'emploi, et à l'enrichissement de la langue
française, et en particulier à l'application de la loi Toubon
relative à la langue française. Ces questions relèvent du
champ de réflexion du conseil supérieur de la langue
française, placé auprès du Premier ministre. Les missions
qui s'y rapportent sont du ressort du ministère de la culture et de la
communication, et plus particulièrement de la délégation
générale à la langue française et aux langues de
France.
La francophonie extérieure comprend les actions qui tendent au
rayonnement de la francophonie dans le monde, champ de réflexion par
excellence du Haut conseil de la francophonie, présidé par le
Président de la République qui en nomme les membres. Elle
s'attache également à la politique de coopération avec les
organismes internationaux à vocation francophone. Ces actions
relèvent du ministre des affaires étrangères, qui
délègue cette compétence au ministre
délégué à la coopération et à la
francophonie.
I. L'ACTION INTERNATIONALE DE LA FRANCE EN FAVEUR DE LA FRANCOPHONIE
Même si plusieurs ministères, et en particulier le
ministère de l'Education nationale, apportent leur participation
à l'action internationale en faveur de la francophonie, celle-ci
relève cependant, pour l'essentiel, du ministère des affaires
étrangères, et plus particulièrement de deux de ses
services.
La direction générale de la coopération internationale et
du développement (DGCID) est née de la fusion de l'ancienne
Direction générale des relations culturelles, scientifiques et
techniques du ministère des affaires étrangères, et de la
Direction du développement du ministère de la coopération.
Elle a pour mission de mettre en oeuvre l'action culturelle de la France, et
comporte une Direction de la coopération culturelle et du
français, chargée, au plan bilatéral, à la fois de
la promotion de la langue française et de la diffusion de la culture
française. Au sein de cette direction, la sous-direction du
français est plus particulièrement chargée des programmes
et projets consacrés à l'enseignement et à l'emploi de la
langue française.
Le poids financier des
actions bilatérales
conduites par la
France en faveur de la francophonie est très difficile à
évaluer. Selon les critères d'élection que l'on applique,
il peut varier entre 1 et plusieurs milliards de francs. Ceux-ci correspondent
notamment à la gestion des 440 établissements scolaires
français à l'étranger, à l'animation du
réseau des 162 établissements culturels et des alliances
françaises répartis partout dans le monde, ainsi qu'à la
politique d'octroi de bourses. Ceux-ci font l'objet d'une étude
détaillée dans le rapport pour avis de notre collègue Mme
Danièle Pourtaud, sur les crédits des relations culturelles
extérieures.
Le service des affaires francophones est désormais le seul pôle
administratif chargé du suivi de
l'action multilatérale
en
faveur de la francophonie. A ce titre, il est plus particulièrement
chargé d'assurer la préparation et le suivi des instances
politiques de la francophonie, les relations avec les cinq
« opérateurs » de la francophonie et la coordination
avec l'ensemble des services officiels de la langue française.
A. LE FINANCEMENT DES ACTIONS RELEVANT DU SERVICE DES AFFAIRES FRANCOPHONES
Le
service des affaires francophones est chargé de l'exécution des
décisions prises à l'occasion des conférences des chefs
d'Etat et de gouvernement dont les crédits transitent par le Fonds
multilatéral unique.
Il dispose en outre d'une enveloppe de crédits destinés à
apporter un appui financier à diverses associations oeuvrant en faveur
de la francophonie.
1. Les subventions versées aux associations oeuvrant en faveur de la francophonie
Les
subventions versées aux associations se sont élevées, en
2000 et en 2001, à environ 8,1 millions de francs.
L'enveloppe budgétaire qui leur est consacrée n'est plus que de
580 166 euros (3,8 millions de francs) dans le projet de budget pour
2002. Cette contraction n'est cependant qu'apparente. Elle résulte de la
décision de regrouper au sein du Fonds multilatéral unique
l'ensemble des crédits budgétaires consacrés à
l'Agence universitaire de la francophonie, en y intégrant les deux
enveloppes budgétaires qui faisaient encore l'objet d'une imputation
distincte :
- les 2,8 millions de francs correspondant au loyer des locaux parisiens
de l'Agence ;
- les 1,5 million de francs consacrés au financement du Fonds
international de coopération universitaire (FICU).
Par-delà cette opération purement comptable, les crédits
consacrés à l'appui aux associations sont, dans le projet de
budget 2002, reconduits au même niveau qu'en 2001. C'est le cas, en
particulier de la subvention versée à l'Assemblée
parlementaire de la francophonie qui disposera en 2002, comme en 2001, d'un
budget de 850 000 francs (130 000 euros).
2. La participation française au financement des opérateurs de la francophonie : les incertitudes liées à l'annulation du sommet de Beyrouth.
Le
financement de quatre des opérateurs de la francophonie
que sont
l'Agence de la francophonie, l'Agence universitaire de la francophonie,
l'Assemblée internationale des maires francophones et
l'université Senghor d'Alexandrie est assuré par le
Fonds
multilatéral unique
qui, comme son nom l'indique, regroupe les
contributions des différents Etats membres de la francophonie.
Le montant de ces contribution est arrêté, pour un
biennum
,
c'est-à-dire pour deux années, à l'occasion des
conférences des chefs d'Etat et de
gouvernement
ayant en
commun l'usage de la langue française.
Le sommet de Hanoï en 1997 avait ainsi défini le montant des
engagements pris par les Etats pour les années 1998 et 1999 et le sommet
de Moncton, en 1999, pour les années 2000 et 2001.
Il appartenait au sommet de Beyrouth, prévu pour le mois d'octobre
dernier et à la conférence ministérielle qui devait le
suivre, d'arrêter le montant des contributions de la France et de ses
partenaires pour les exercices budgétaires 2002 et 2003.
Son report contrarie ce calendrier, et il faudra attendre la tenue de la
conférence ministérielle, qui pourrait se tenir à Paris,
dans les mois à venir, pour prendre les décisions qui s'imposent.
Il est donc impossible à votre rapporteur, en l'état actuel
des choses, de vous préciser le montant de la contribution
française au fonds multilatéral unique pour 2002.
Au cours de
son audition, le ministre délégué à la
coopération et à la francophonie a indiqué à votre
commission que son montant serait,
à tout le moins, égal
à celui des deux précédents exercices
. Votre
rapporteur constate en effet que, si l'on met à part l'effet optique
résultant du transfert évoqué plus haut, le projet de
budget pour 2002 reconduit les crédits consacrés par le ministre
des affaires étrangères au Fonds multilatéral unique au
niveau qu'il avait atteint en 2001, soit 36,8 millions d'euros.
Le tableau ci-après indique, à titre indicatif, la
répartition de cette enveloppe budgétaire entre les
différents opérateurs de la francophonie en 2000 et 2001.
RÉPARTITION DES CRÉDITS DU SERVICE DES AFFAIRES FRANCOPHONES ENTRE LES OPÉRATEURS DE LA FRANCOPHONIE
(en
millions de francs)
(en millions d'euros)
2001 : affectation crédits
|
Montant |
Agence de la francophonie (AIF) |
98,3
|
Agence universitaire de la francophonie (AUF) |
118,5
|
Association internationale des maires de villes francophones (AIMF) |
9
|
Université Senghor |
11,5
|
Total |
237,3
|
La
volonté de renforcer les programmes en faveur de la promotion de l'Etat
de droit et de la démocratie pourrait conduire, en 2002 et 2003,
à renforcer le montant des crédits affectés à
l'Agence de la francophonie, pour un montant qui n'est, semble-t-il pas encore
arrêté.
Le transfert au Fonds multilatéral unique (FMU) des enveloppes
financières qui faisaient l'objet d'une imputation budgétaire
distincte, provoquera en outre une augmentation purement optique des
crédits consacrés à l'Agence universitaire de la
francophonie.
3. La contribution globale de la France à la francophonie multilatérale
La
contribution globale de la France à la francophonie multilatérale
s'est élevée à 760 millions de francs (116 millions
d'euros) en 2001.
Elle transite, pour une large proportion par le Fonds multilatéral
unique, sans exclure l'existence d'autres mécanismes de financement
particuliers.
a) La part prépondérante de la contribution française dans le fonds multilatéral unique
Le
report du sommet de Beyrouth ne permet pas de connaître avec
précision les montants qu'atteindront, lors du prochain biennum,
l'enveloppe globale annuelle du Fonds multilatéral unique et le montant
de la contribution française.
On récapitulera cependant à titre indicatif les données
afférentes aux trois derniers biennums.
Le tableau ci-dessous présente l'évolution globale des enveloppes
budgétaires affectées au Fonds multilatéral unique pour
les trois derniers biennums, ainsi que la répartition de ces
crédits entre les différents opérateurs de la
francophonie. Il fait apparaître une progression de 21 % entre le
biennum 1996-1997 et le biennum 1998-1999 suivie d'une légère
contraction de 3 % pour le biennum 2000-2001. La progression des
crédits sur les six dernières années a principalement
profité à l'Agence internationale de la francophonie dont les
crédits sont passés de 142,5 à 194 millions de francs
soit une progression de 36 %.
ENVELOPPES BUDGETAIRES ANNUELLES DU FMU
Affectation |
Biennum 1996-1997 |
Biennum 1998-1999 |
Biennum 2000-2001 |
Agence de la francophonie |
142,5
|
205,6
|
194
|
Agence universitaire de la francophonie |
144,9
|
144,8
|
146,1
|
Université Senghor |
13,8
|
12,4
|
12,1
|
Association internationale des maires de villes francophones |
12
|
14,1
|
14,1
|
TOTAL FMU |
313,2
|
377
|
366,3
|
(en
millions de francs)
(en millions d'euros)
La
France est son premier bailleur de fonds, et sa contribution, d'un montant de
283,5 millions de francs, a représenté au cours du biennum
2000-2001, plus de 77 % du financement du Fonds multilatéral
unique, devant les contribution du Canada (17 %) et celle de la
Communauté française de Belgique (4 %).
Le tableau ci-dessous présente l'évolution de la contribution
française et sa répartition entre les opérateurs de la
francophonie. Elle permet de vérifier que la progression de
40 millions de francs de la contribution française entre 1996-1997
et 1998-1999 s'est concentrée sur l'Agence internationale de la
francophonie ; la progression plus modeste de 2,5 millions de francs
entre le biennum 1998-1999 et le biennum 2000-2001 a
bénéficié en revanche à l'Agence universitaire de
la francophonie.
CONTRIBUTIONS ANNUELLES DE LA FRANCE AU FMU
(en
millions de francs)
(en millions d'euros)
Affectation |
Biennum 1996-1997 |
Biennum 1998-1999 |
Biennum 2000-2001 |
AIF |
82
|
122,5
|
122,5
|
AUF |
135
|
135
|
137,5
|
Senghor |
11,5
|
11,5
|
11,5
|
AIMF |
12
|
12
|
12
|
TOTAL FMU |
240,5
|
281
|
283,5
|
b) Les crédits de la francophonie multilatérale hors FMU
D'autres
financements destinés aux opérateurs de la francophonie ne
transitent pas par le Fonds multilatéral unique.
Il s'agit, en premier lieu de la contribution du ministère des affaires
étrangères au financement de TV5 qui passe de 337 à
384,7 millions de francs (51,3 à 58,6 millions d'euros) en hausse
de 14 %.
D'autres crédits, de moindre montant sont destinés à
assurer le financement de :
- la contribution statutaire de 70 millions de francs (10,6 millions
d'euros) versée par la France à l'Agence internationale de la
francophonie, à laquelle s'ajoute la prise en charge à hauteur de
1,15 million de francs (176 000 euros) de l'Ecole de la francophonie
à Bordeaux ;
- la subvention de 8 millions de francs (1,2 million d'euros)
destinée aux programmes et au fonctionnement des deux conférences
ministérielles spécialisées de la francophonie, la
conférence des ministres de la jeunesse et des sports et la
conférence des ministres de l'éducation (CONFEJES et CONFEMEN).
- la subvention de 4,13 millions de francs (0,63 million d'euros) au
comité international des jeux de la francophonie.
B. L'ACTION DE LA FRANCOPHONIE MULTILATÉRALE : LE RÔLE CENTRAL DES SOMMETS
Le report du sommet de Beyrouth et ses conséquences immédiates démontrent, a contrario, à quel point les « sommets » de la francophonie jouent un rôle fondamental dans le fonctionnement de la francophonie multilatérale, qu'il s'agisse de fixer les grandes orientations, ou de déterminer les moyens dont disposent les opérateurs de la francophonie qui sont chargés de la mise en oeuvre de ses décisions.
1. Les sommets de la francophonie
Les
« Conférences des chefs d'Etat et de gouvernement ayant le
français en partage »,
initialement appelées
sommets francophones, constituent l'instance de décision suprême
de la francophonie.
Elle s'appuient sur la
Conférence ministérielle de la
francophonie (CMF)
, qui est composée des ministres des affaires
étrangères ou de la francophonie et qui doit veiller à
l'exécution des décisions prises par les sommets, ainsi que sur
le
Conseil permanent de la francophonie (CPF),
composé des
représentants des chefs d'Etat et de gouvernement, qui est plus
particulièrement chargé de la préparation et du suivi des
sommets.
Ces organes se réunissent
tous les deux ans
.
a) Le rôle des sommets dans l'émergence d'une francophonie politique
Des
réunions entre les chefs d'Etat francophones se sont
régulièrement tenues dès les années soixante.
Toutefois, la pratique ne s'en est institutionnalisée que dans le
courant des années quatre-vingt.
Elles ont permis à la francophonie de se doter progressivement des
institutions nécessaires à son action et d'enrichir sa vocation,
d'abord essentiellement linguistique et culturelle, par une dimension politique
fortement axée sur l'approfondissement de la démocratie et le
respect des droits et libertés.
Le premier sommet, qui s'est tenu à
Paris et à Versailles en
février 1986
, a réuni 41 chefs d'Etat et de gouvernement qui
ont adopté 28 résolutions.
Le deuxième sommet, organisé en
octobre 1987,
arrêta
la liste des secteurs prioritaires de la francophonie, décida
l'institutionnalisation des sommets, ainsi que la création d'une
université francophone et d'un centre d'échanges multinationaux
d'actualités francophones.
C'est au cours du
sommet de Dakar, en 1989
, que la francophonie a
commencé de porter une attention particulière à la
nécessité d'une démocratisation des régimes
politiques, en apportant son soutien aux processus de nature à favoriser
l'Etat de droit, la démocratie, et les droits de l'homme.
Le
sommet de Chaillot, en novembre 1991
, qui regroupa une cinquantaine
de pays, décida la création de nouvelles institutions et confirma
l'Agence de coopération culturelle et technique (ACCT) dans son
rôle d'opérateur principal et de secrétariat des instances
de la francophonie.
Le
sommet
tenu à
l'Ile Maurice en octobre 1993
insista sur
la place de l'économie dans la culture des peuples et définit les
paramètres d'une coopération économique entre les pays
membres de la francophonie. Jouant ainsi un rôle précurseur dans
la lutte contre l'uniformisation culturelle, il adopta une résolution
sur « l'exception culturelle ». Il insista sur les liens
qui unissent démocratie et développement. Il remplaça en
outre l'appellation de « sommet » par celle de
« conférence des chefs d'Etat et de gouvernement ayant le
français en partage ».
Souhaitant renforcer la dimension politique de la francophonie sur la
scène internationale, la
conférence de Cotonou, en
décembre 1995
, décida la création d'un poste de
secrétaire général de la francophonie
, transforma
l'agence de coopération culturelle et technique (ACCT) en
Agence de
la francophonie
, ou agence intergouvernementale de la francophonie (AIF)
avec à sa tête un administrateur général et
révisa la charte de l'ACCT pour l'ériger en charte de la
francophonie. Sa résolution finale invitait, en outre, les pays membres
à ratifier les conventions des Nations Unis relatives aux droits de
l'homme, et celles, spécifiques, portant sur les femmes et sur les
enfants.
La septième conférence, organisée
en 1997 à
Hanoï
, marqua l'ouverture de la francophonie au continent asiatique et
conféra à la francophonie sa pleine dimension politique en
l'érigeant en
organisation internationale à part
entière.
Elle reconnut également à l'Assemblée internationale des
parlementaires de langue française (AIPLF) le rôle
d'Assemblée consultative de la francophonie.
Les représentants des 49 Etats et gouvernements membres élurent
pour quatre ans M. Boutros-Ghali au poste de secrétaire
général de la francophonie et travaillèrent sur le
thème de la prévention des conflits et du respect des droits de
la personne.
Enfin, le huitième sommet, qui réunissait 52 chefs d'Etat et de
gouvernement de pays membres ou de pays observateurs, s'est tenu à
Moncton
, au Canada en
septembre 1999
.
b) Le tournant des derniers sommets
(1) Le sommet de Hanoï : une grande réforme institutionnelle
Les
principales réformes apportées par le sommet de Hanoï ont
été la nomination d'un secrétaire général de
la francophonie, le renforcement du conseil permanent de la francophonie, et la
réforme de l'agence de la francophonie.
* Le
secrétaire général de la francophonie
est
élu pour quatre ans par les chefs d'Etat et de gouvernement auxquels il
rend compte ; il préside le conseil permanent de la
francophonie ; il est le porte-parole politique et le représentant
officiel de la francophonie sur la scène internationale, et le plus haut
responsable de l'agence de la francophonie (AIF).
Dès sa nomination, M. Boutros-Ghali s'est attaché à
promouvoir l'image de la francophonie, à multiplier les échanges
avec d'autres organisations internationales, et à rapprocher la
francophonie d'autres aires linguistiques, en particulier l'arabophonie, la
lusophonie et l'hispanophonie, dans le cadre d'une défense commune de la
diversité culturelle et linguistique.
Il a également encouragé la francophonie à accompagner les
processus électoraux dans l'espace francophone par le biais de missions
d'observation conduites par la francophonie à titre exclusif ou mises en
place conjointement avec les Nations Unies, l'Organisation de l'Unité
africaine, le Commonwealth ou la Ligue des Etats arabes.
Enfin, il a également permis à la francophonie de contribuer
à la recherche de solutions dans des situations de crise :
participation de M. Lebatt, ancien ministre des affaires
étrangères de Mauritanie, en qualité d'observateur aux
pourparlers d'Arusha, au Burundi (à partir de janvier 2000) ;
mission d'information en Côte d'Ivoire du président Zinsou et de
M. Stéphane Tagrov, ambassadeur de Bulgarie en France (en octobre
2000) ; mission de M. Ide Oumarou, ancien secrétaire
général de l'OUA, au Togo en juillet 2000 ; mission
d'information en Haïti de M. Ridha Bouabid, directeur de la
représentation permanente de l'organisation internationale de la
francophonie à l'ONU, à l'occasion du second tour des
élections législatives en juillet 2000 ; mission
d'écoute et d'information d'André Salifou, ancien ministre des
affaires étrangères du Niger aux Comores, à compter de
2000 ; mission d'écoute d'information et de bonne volonté de
M. Alioune Séna, ancien ambassadeur du Sénégal en
Centrafrique en 1999 et en 2000.
C'est également sous la responsabilité du secrétaire
général de la francophonie que se sont déroulées
l'évaluation de l'Agence universitaire de la francophonie en 1999 puis
celles de l'Université Senghor d'Alexandrie et de l'Agence
intergouvernementale.
*
Le conseil permanent de la francophonie (CPF)
est désormais
composé des représentants personnels de tous les chefs d'Etat et
de gouvernement et non plus seulement de 18 d'entre eux comme auparavant. Cette
réforme a contribué à asseoir le caractère
représentatif de cette instance.
En outre, c'est le conseil permanent de la francophonie qui, tout en conservant
sa mission initiale de préparation et de suivi des sommets, siège
comme conseil d'administration de l'agence. Auparavant, c'était la
conférence ministérielle qui remplissait ce rôle mais ses
réunions n'étaient pas assez fréquentes pour assurer un
fonctionnement satisfaisant.
* L'agence internationale de la francophonie
a fait l'objet d'une
réorganisation visant à accroître son efficacité
tout en diminuant ses coûts de fonctionnement. Ce projet de
réforme a été adopté par la Conférence
ministérielle de la francophonie qui s'est tenue à Bucarest les 4
et 5 décembre 1999. Il vise pour l'essentiel à supprimer
l'échelon des directions générales pour lui substituer
celui des directions (10 directions fonctionnelles et 2 de gestion).
L'organigramme adopté au terme de cette réforme répond
à une volonté de simplifier la hiérarchie, et s'est
efforcé de réduire le nombre de directions en s'attachant
à faire correspondre un bloc de compétences à chaque
unité de gestion, avec une attention particulière portée
aux directions de pilotage, d'administration et de contrôle de gestion.
*
L'Assemblée internationale des parlementaires de langue
française
a été reconnue dans la charte de la
francophonie, comme
l'Assemblée consultative de la
francophonie
.
(2) Le plan d'action de Moncton
Le
sommet de Moncton n'a souhaité prendre aucune décision
institutionnelle, après les avancées réalisées aux
deux sommets précédents ; il a cependant permis d'engager la
réforme de l'agence universitaire de la francophonie et d'engager un
processus d'évaluation qui doit être étendu à
l'ensemble des opérateurs de la francophonie.
Revenant sur le thème de la
diversité culturelle
, il a
décidé de mettre en place un processus de concertation entre pays
francophones pour accompagner l'ouverture du cycle de négociations de
l'Organisation mondiale du commerce à Seattle. Il a en outre retenu le
dialogue des cultures comme thème pour le sommet de Beyrouth.
Le sommet de Moncton a été également l'occasion de
réaffirmer les exigences posées par l'organisation internationale
de la francophonie en matière de
respect des droits de l'homme et de
défense de la démocratie
. Sur proposition de la France, les
membres de la francophonie ont décidé d'organiser l'année
suivante un symposium permettant de tracer le bilan des pratiques de la
démocratie et des droits de l'homme dans les pays membres. La
Conférence ministérielle qui s'est tenue en nombre 1999 à
Paris, a précisé que ce symposium ne devrait pas se limiter
à un simple constat mais devrait aboutir à des propositions
concrètes.
(3) La déclaration de Bamako : un texte fondateur
Ce
symposium
qui réunissait les ministres et chefs de
délégation des pays de la francophonie, s'est tenu au
mois de
novembre 2000 à Bamako
.
Il s'est conclu par l'adoption d'une
déclaration
qui marque un
véritable tournant dans l'engagement de la francophonie en faveur de la
démocratie. Par les objectifs qu'il se fixe, les engagements qu'il
prend, et les mesures qu'il envisage, il prend la valeur d'un
véritable texte fondateur.
Partant du constat que le bilan des pratiques de la démocratie, des
droits et des libertés dans l'espace francophone au cours de ces dix
dernières années, comporte des acquis indéniables, mais
qu'il présente aussi des insuffisances et des échecs, les
délégués des Etats et gouvernements membres de la
francophonie se sont engagés dans cette déclaration à
consolider l'Etat de droit, à tenir des élections libres, fiables
et transparentes, et à promouvoir une véritable culture
démocratique, ainsi que le respect des droits de l'homme.
Les principes fondamentaux autour desquels se rejoignent les membres de la
francophonie apportent un témoignage très positif des
résultats auxquels peut parvenir le dialogue mené au sein des
enceintes francophones. Le fait que des représentants d'Etat et de
gouvernements, provenant d'horizons politiques, géographiques et
culturels différents puissent cependant se retrouver autour d'une
conception commune de la démocratie
constitue, au regard de
l'histoire, une avancée dont on n'a peut-être pas encore
suffisamment mesuré l'importance.
La déclaration de Bamako proclame en effet que
« Francophonie et démocratie sont
indissociables »
et que
« la francophonie fait de
l'engagement démocratique une priorité ».
Elle décrit la
démocratie
comme un
système de
valeurs universelles
, fondé sur la reconnaissance du
caractère inaliénable de la dignité et de l'égale
valeur des êtres humains.
Si elle proclame qu'
« il n'y a pas de mode d'organisation unique
de la démocratie »
et que celle-ci doit s'inscrire dans
les réalités spécifiques de chaque peuple, elle n'en
manque pas moins un consensus autour d'un certain nombre de
traits
constitutifs des régimes démocratiques
:
-
l'Etat de droit
, qui implique la soumission de l'ensemble des
institutions à la loi, la séparation des pouvoirs, le libre
exercice des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et
l'égalité devant la loi ;
- la tenue, à intervalles réguliers d'
élections libres,
fiables et transparentes
, l'absence de modifications arbitraires du
régime électoral ;
- le
pluralisme des partis politiques
, égaux en droit et libres
dans leur expression, complété par un
statut de
l'opposition
exclusif de tout ostracisme ;
- une pratique du
dialogue
à tous les niveaux entre citoyens
comme entre partenaires sociaux, entre partis politiques, ou encore dans les
relations entre l'Etat et la société civile.
L'engagement de la francophonie en faveur de la démocratie s'appuie en
outre sur
l'expression d'un certain nombre de convictions communes
:
- que la démocratie est le régime qui favorise le mieux la
stabilité à long terme et la sécurité
juridique ;
- que le climat de liberté qu'elle suscite favorise la mobilisation
volontaire de la population en faveur du développement ;
- que les principes démocratiques doivent également
imprégner les relations internationales ;
- que, pour préserver la démocratie, la francophonie doit
condamner les coups d'Etat, et tout autre forme de prise du pouvoir par la
violence, par les armes, ou par quelque autre moyen illégal.
Le
programme d'action
, annexé à la déclaration de
Bamako, devait formellement être adopté lors du sommet de
Beyrouth ; le report de ce dernier ne doit cependant pas distraire la
francophonie des efforts destinés à sa mise en oeuvre. Ce
programme décline une série de mesures qui s'organisent autour de
quatre objectifs.
Le premier de ces objectifs est la
consolidation de l'Etat de droit
. Il
passe par un renforcement des institutions de l'Etat de droit et de garanties
apportées à leur indépendance. Il porte, à ce
titre, une attention particulière au renouveau de l'institution
parlementaire, à l'indépendance de la magistrature et à la
liberté du barreau ainsi qu'à l'impartialité et à
l'efficience des organes de contrôle. Doivent entrer, dans ce cadre, des
missions de perfectionnement à l'intention des acteurs locaux, la
réorganisation des services de documentation des Parlements, et des
actions de coopération interparlementaire.
Le second de ces objectifs est la
« tenue d'élections
libres, fiables et transparentes »
.
Il passe par
l'établissement d'un état-civil et de listes électorales
fiables, par la formation du personnel électoral, et par un appui public
au financement des campagnes électorales.
Le troisième objectif est de parvenir à une
« vie
politique apaisée »
, ce qui suppose un large consensus
national autour de l'adoption des textes fondamentaux régissant la vie
publique, une participation de tous les partis politiques à la vie
politique nationale et locale, la mise en place d'une démocratie locale,
des modes pacifiques de règlement des différends, la prise en
compte des autorités morales traditionnelles et des représentants
de la société civile, et le respect de la liberté de la
presse.
Le quatrième et dernier volet a trait à la
« promotion d'une culture démocratique
intériorisée »
.
Il préconise la
ratification des principaux instruments internationaux et régionaux
relatifs aux droits de l'homme, l'adoption des mesures permettant de poursuivre
et sanctionner les auteurs de violations graves de ces droits, et
l'instauration de mesures appropriées en faveur du respect des
minorités.
Enfin, la francophonie s'est dotée, avec la déclaration de
Bamako, d'un texte normatif précisant les
procédures à
engager en cas de crise de la démocratie ou de violations graves des
droits de l'homme
. Suivant la gravité des faits, les mesures
suivantes sont envisagées ;
- l'envoi, par le secrétaire général, de facilitateurs ou
d'observateurs judiciaires ;
- une condamnation publique par le conseil permanent de la francophonie
exigeant le rétablissement de l'ordre constitutionnel ou l'arrêt
des violations des droits ;
- après que sont connus les résultats de la mission d'information
envoyée par le secrétaire général, la
conférence ministérielle peut, en outre, prendre une série
de sanctions qui vont jusqu'à la «
suspension du pays
concerné »
. Celle-ci est décidée, en
particulier, en cas de coup d'Etat militaire dirigé contre un
régime issu d'élections démocratiques.
Cette dernière décision avait été vivement
souhaitée par l'Assemblée parlementaire de la francophonie,
qui a eu a coeur de la mettre en pratique, non sans un courage politique qui
n'a sans doute pas été suffisamment remarqué.
C'est ainsi qu'elle a prononcé
la suspension des sections de la
République démocratique du Congo, du Congo Brazzaville, des
Comores, du Rwanda et de la Côte d'Ivoire.
Il est à noter que
ces sections ont été suspendues à titre provisoire, et que
leur réintégration est de droit en cas d'élections libres
et transparentes. Ainsi, la section du Niger est-elle redevenue membre de
l'Assemblée parlementaire de la francophonie après les
dernières élections législatives, tout comme celle de la
Côte d'Ivoire, réintégrée en juillet 2001.
Il faut rappeler qu'avant même la tenue du symposium de Bamako,
l'Assemblée parlementaire de la francophonie avait adopté une
recommandation proposant que les dirigeants des pays parvenus au pouvoir en
renversant par la force les institutions, ne soient plus invités aux
sommets de la francophonie.
L'Assemblée parlementaire de la
francophonie
a donc joué, en ce domaine, un
rôle
précurseur
qu'il convient de souligner.
(4) Le report du sommet de Beyrouth
Le
prochain sommet de la francophonie devait se tenir à Beyrouth en octobre
2001. Les événements dramatiques du mois de septembre, et la
dégradation de la situation au Moyen-Orient ont conduit à en
décider le report.
Cette décision est compréhensible. Elle est sans doute
raisonnable. Mais comment ne pas éprouver, cependant, une pointe de
regret, alors que le thème central autour duquel devaient s'organiser
les débats -le
« dialogue entre les
cultures »
- prend dans le contexte international présent
une troublante actualité ?
La réunion à Beyrouth, de chefs d'Etat et de gouvernement
démontrant, par leur participation, la possibilité d'un dialogue
entre des peuples issus d'horizons différents, n'aurait-elle pas
constitué
la plus belle des réfutations que la francophonie
pouvait opposer aux tenants du « choc des
civilisations »
? La prudence l'a emporté, il faut
s'y rallier, au moins par raison, bien persuadé, au demeurant que le
« dialogue entre les cultures » restera, et sans doute pour
longtemps, un des enjeux cruciaux qui décidera de la paix ou de la
guerre dans le siècle qui s'ouvre devant nous, dans toute sa
nouveauté saisissante.
Le sommet de Beyrouth devait être en outre l'occasion de confirmer les
principes adoptés lors du symposium de Bamako, en faveur de
l'enracinement de la démocratie, ou lors de la Conférence des
ministres de la culture de Cotonou, en juin 2000, relatif à la promotion
de la diversité culturelle. Le sommet devait en outre faire le point sur
la réforme institutionnelle engagée en 1997 à Hanoï,
et adopter un plan d'action précisant les objectifs de la programmation
des opérateurs de la francophonie pour le biennum 2002-2003. Enfin, il
devait procéder à l'élection du secrétaire
général de la francophonie.
A l'occasion de son audition devant la commission, votre rapporteur a
interrogé le ministre délégué à la
coopération et à la francophonie sur les
conséquences
pratiques
du report du sommet de Beyrouth.
D'après les réponses qui lui ont été
apportées, le report du sommet de Beyrouth ne devrait pas avoir
d'incidences sur le développement de la francophonie
multilatérale ni sur la programmation de ses opérateurs ;
celle-ci sera adoptée, comme pour chaque biennum, par une
conférence ministérielle qui doit se tenir à Paris dans
les prochaines semaines ; cette conférence prorogera
également le mandat du secrétaire général de la
francophonie jusqu'à la tenue du prochain sommet. Celui-ci doit se tenir
à Ouagadougou, à la date qu'auront fixée les chefs d'Etat
mais qui pourrait avoir lieu à la fin de 2003 ou au printemps 2004.
Le ministre délégué a indiqué, en outre, qu'une
réflexion était actuellement en cours sur une éventuelle
modification de la programmation de la francophonie : alors que celle-ci
s'effectue actuellement sur une base biennale, elle pourrait en effet porter
à l'avenir sur une période de quatre ans, ponctuée,
à mi-parcours, par des rapports d'évaluation qui permettraient,
le cas échéant, d'opérer les ajustements
nécessaires.
Quant aux conclusions de la conférence de Bamako, qui devaient
être confirmées par les chefs d'Etat et de gouvernement, elles
n'en continueront pas moins d'inspirer l'action de la francophonie.
2. Les opérateurs de la francophonie
Les opérateurs de la francophonie sont au nombre de cinq. Ils font l'objet d'un financement international. Quatre d'entre eux sont financés par l'intermédiaire du Fonds multilatéral unique : l'Agence de la francophonie, l'Agence universitaire de la francophonie, l'Université Senghor d'Alexandrie et l'Association des maires et responsables de capitales et métropoles francophones. Le cinquième, TV5, fait l'objet d'un financement distinct.
a) L'Agence de la francophonie
Créée par la Convention de Niamey du 20 mars 1970, l'Agence internationale de la francophonie dont on vient de célébrer le 30è anniversaire est l'unique opérateur intergouvernemental de l'organisation internationale de la francophonie. Elle regroupe aujourd'hui 49 Etats et gouvernements. Son siège est implanté à Paris, mais elle dispose également de deux organes subsidiaires : l'institut des nouvelles technologies de l'information et de la formation installé à Bordeaux, et l'institut de l'énergie et de l'environnement, situé au Québec.
ÉVOLUTION DU BUDGET DE L'AGENCE
AU COURS DES QUATRE
DERNIÈRES ANNÉES
(en
millions de francs)
(en million d'euros)
|
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
RECETTES
|
378,71
|
390,77
|
415,01
|
421,13
|
Contributions statutaires |
155,71
|
160,77
|
164,79
|
168,9
|
Contributions FMU |
199
|
199
|
207
|
207
|
Autres ressources |
24
|
31
|
43,23
|
45,23
|
DEPENSES
|
378,71
|
390,77
|
450,85
|
455,43
|
Secrétariat général |
20,10
|
20,40
|
23,65
|
24,40
|
Fonctionnement |
94,86
|
97,2
|
117,06
|
120,97
|
Programmation |
263,75
|
272,65
|
310,04
|
310,04
|
SOLDE |
0 |
0 |
-34,84
|
- 34,3
|
Il n'est
pas possible d'établir un budget prévisionnel de l'Agence pour le
biennum 2002-2003 en raison du report du sommet de Beyrouth.
Au cours de son audition, le ministre délégué à la
coopération et à la francophonie a indiqué toutefois que
la France devrait, au cours de la conférence ministérielle
budgétaire de Paris, reconduire sa contribution au niveau qu'elle a
atteint au cours du biennum 2000-2001 ajoutant cependant qu'il serait utile de
renforcer au cours du prochain biennum les concours apportés aux
programmes conduits par l'agence internationale de la francophonie en faveur de
l'état de droit et de la démocratie
de façon à
répondre aux attentes légitimes suscitées par le symposium
de Bamako.
Deux programmes conduits par l'Agence méritent une mention
particulière.
• Le fonds francophone des inforoutes a été lancé en 1997, par le sommet de Hanoï.
Il
poursuit un objectif linguistique et culturel en améliorant la
présence du français sur les réseaux de l'internet, et un
objectif de développement à travers la démocratisation de
l'accès à l'internet dans les pays du sud francophones.
Logé à l'agence de la francophonie, mais disposant d'une large
autonomie, le fonds est administré par un gestionnaire placé sous
l'autorité d'un comité directeur composé des
représentants des 12 Etats bailleurs de fonds (dont quatre Etats
africains : le Cameroun, la Côte d'Ivoire, le Gabon et le
Sénégal).
Le fonds procède par appel d'offres. Les décisions de
financement, plafonnées à 200 000 F (30 500
euros), ne peuvent excéder 70 % du montant total des projets. Elles
sont arrêtées par le comité directeur, après avis
des comités d'experts. Le fonds a déjà lancé
sept appels à proposition
et accepté de
financer
118 projets
sur les 726 dossiers examinés. Il dispose d'un
budget prévisionnel de
40 millions de francs par an
.
Les engagements pris par la France au sommet d'Hanoï pour les exercices
1998 et 1999 s'élèvent à 21,5 millions de francs (3,3
millions d'euros). Ils ont été portés à
23 millions de francs pour les exercices 1998 et 1999 mais, les versements
restent, en pratique, inférieurs d'un tiers à ce montant, en
raison des retards pris par certains ministères dans le règlement
de leur participation. Il est à souhaiter que la situation de ces
décaissements s'améliore car les premières
évaluations de projets conduites en marge de la conférence de
Bamako en février 2000 semblaient encourageantes, même si l'on
constate
un certain tassement du nombre de dossiers
, et plus encore des
financements, en particulier pour 2001.
RÉCAPITULATIF FFI
(en
millions de francs)
(en millions d'euros)
Appel d'offre |
Nombre de dossiers présentés |
Nombre de dossiers financés |
Montant du financement |
1 er et 2è - 1998 |
n.c. |
45 |
20,7
|
3è - 1999 |
n.c. |
18 |
9,2
|
4è - 1999 |
120 |
16 |
8,5
|
5è - 2000 |
102 |
17 |
7,5
|
6è - 2000 |
89 |
14 |
7,5
|
7è - 2001 |
76 |
8 |
3,3
|
TOTAL |
726 |
118 |
56,7
|
•
Le
plan de relance du français dans les organisations
internationales,
également lancé en 1997 au sommet de
Hanoï est géré par l'Agence de la francophonie. La France en
est le principal contributeur, et y a consacré 24 millions de
francs (3,66 millions d'euros) en 2000 et 2001.
Il est destiné à renforcer la présence des francophones et
de la langue française dans les enceintes internationales et comprend
quatre volets principaux :
(1) Le programme des jeunes experts associés
Le programme des jeunes experts associés qui absorbe à lui seul 15 millions de francs a pour objet de placer, chaque année, au sein des organisations internationales, pour une durée de deux ans, une vingtaine de jeunes experts ressortissants des pays francophones, à des postes jugés stratégiques pour la francophonie, avec l'espoir de les voir ensuite recrutés directement par les organisations internationales. Le placement des jeunes experts n'a véritablement pu commencer qu'en 1999, et à ce jour seuls une quarantaine d'experts ont été mis à disposition. Majoritairement issus du continent africain, ils occupent principalement des postes à l'Organisation des Nations Unies, et dans ses agences spécialisées.
(2) La formation à la fonction publique internationale
Cette
formation est un programme destiné à apporter à ses
auditeurs une bonne connaissance du fonctionnement des organisations
internationales afin de faciliter leur accès à des emplois dans
la fonction publique internationale. Il est ouvert chaque année à
une quinzaine de jeunes cadres des secteurs publics et privés des pays
francophones, en particulier à des ressortissants francophones des pays
d'Europe Centrale et orientale. Les auditeurs dont la formation est
validée viennent alimenter le vivier des jeunes experts francophones.
Ce programme arrive à sa quatrième édition en 2001-2002 et
donne apparemment d'excellentes résultats.
(3) Le fonds d'aide à la traduction et à l'interprétation simultanée (FATI)
Ce fonds est ouvert en priorité aux organisations non gouvernementales qui organisent des réunions sur des thèmes d'intérêt général, en leur apportant une aide au financement des frais d'interprétation ou de traduction. Lors du dernier biennum, les soutiens se sont principalement portés sur des réunions relatives au déminage, à la traçabilité des armes légères, et à des colloques juridiques.
(4) Le soutien à la concertation francophone
Le soutien à la concertation francophone permet, en assurant la prise en charge des délégués francophones des pays du Sud, d'assurer une présence des membres de la francophonie dans des réunions internationales où il importe que celle-ci soit représentée.
b) L'Agence universitaire de la francophonie
L'Agence
universitaire de la francophonie est issue de l'ancienne association des
universités partiellement ou entièrement de langue
française (AUPELF-UREF) fondée à Montréal en 1961
en vue de développer les échanges et la solidarité entre
les universités de langue française. D'une quarantaine de membres
en 1961, elle est passée à
403 membres en 2000
répartis sur le territoire des différents pays de l'organisation
internationale de la francophonie. Il convient d'y ajouter encore les 353
départements d'études françaises d'établissements
universitaires du monde entier.
D'abord simple association de recteurs et de présidents
d'universités, elle a été érigée en 1989, au
sommet de Dakar, en opérateur direct de l'organisation de la
francophonie, statut qui a ensuite été confirmé dans la
charte de la francophonie adoptée au sommet de Hanoï en 1997.
Son siège est établi à Montréal, et elle dispose de
services centraux à Paris, et de 13 bureaux régionaux. Elle
emploie 380 personnes, dont une cinquantaine à Paris et une trentaine
à Montréal.
L'Agence universitaire de la francophonie est la première des
institutions de la francophonie à avoir fait l'objet d'une
évaluation externe
, prélude à sa réforme et
à son recentrage sur ses missions essentielles. Cette évaluation
a été décidée dès le sommet de Hanoï,
puis lancée par le secrétaire général de la
francophonie à l'occasion de la conférence ministérielle
de Bucarest, en décembre 1998. Les résultats en ont
été communiqués aux membres de l'organisation
internationale de la francophonie en juillet 1999.
L'évaluation de l'Agence a rapidement débouché sur une
réforme en profondeur
inscrite dans le plan d'action de Moncton.
La nomination d'un nouveau recteur, Mme Michèle Gendreau-Massaloux, le
30 octobre 1999 a permis d'engager une première série de
restructurations de fonctionnement de l'opérateur.
Le conseil d'administration qui s'est tenu à Montréal en
février 2000 a décidé une première
réorientation de l'agence vers ses champs d'action prioritaires.
Pilotée par une commission consultative, celle-ci s'est traduite par une
réforme des statuts, des programmes et de la gestion de l'Agence
.
* Les
nouveaux statuts
ont reçu l'accord du conseil permanent et
de la conférence ministérielle de la francophonie (CMF) de
N'Djamena en février 2001 et ont été ensuite
adoptés par l'Assemblée générale extraordinaire de
l'Agence universitaire de la francophonie qui s'est réunie les 18 et 19
mai 2001 à Québec.
Ils confortent l'identité universitaire de l'Agence universitaire de la
francophonie en clarifiant ses principes de fonctionnement et ses missions
académiques, en confirmant le caractère universitaire de ses
adhérents, et en renforçant le rôle de son conseil
scientifique.
Ils clarifient par ailleurs le rôle d'opérateur de l'Agence
universitaire de la francophonie et ses rapports avec l'Organisation
internationale de la Francophonie et avec les Etats et gouvernements
contributeurs. Ce nouveau partenariat se traduit par une représentation
mieux équilibrée des Etats et gouvernements au sein d'un conseil
d'administration restreint où ils disposent de 11 sièges sur 26,
les 15 autres étant attribués aux universitaires. Au sein des
organes de gestion, commission des finances et comité de gestion du
nouveau fonds universitaire unique, ces deux groupes sont à parité
* La
réforme des programmes
a pour objet de recentrer l'Agence
universitaire de la francophonie autour de quelques grandes orientations :
le partage des savoirs, des savoir-faire et des technologies, le
développement d'une philosophie des réseaux et le pari fait sur
les nouvelles technologies. Depuis 2001, il a, en outre, été
possible d'élaborer la programmation à partir des demandes
universitaires locales.
* La
réforme de la gestion
de l'Agence universitaire de la
francophonie s'est appuyée sur les conclusions d'un rapport d'audit
réalisé au printemps 2000, et s'est traduite à la fois par
une remise en ordre des services centraux assurant un meilleur équilibre
entre le siège de l'association à Montréal et le rectorat
de l'Agence à Paris, et par une déconcentration plus
poussée au bénéfice des dix bureaux
régionaux : ceux-ci assurent dorénavant 75 % des
actions de programme.
L'ensemble des moyens budgétaires gérés par l'Agence
universitaire de la francophonie et consacrés aux programmes sont
dorénavant regroupés sur un fonds unique, intitulé
Fonds universitaire de coopération et de développement.
Le
déficit de trésorerie, qui a considérablement
diminué cette année, serait en voie de résorption.
Le financement accordé à l'Agence universitaire de la
francophonie par la France, pour la mise en oeuvre de ses programmes, s'est
élevé en 2001 à 137,5 millions de francs et
représente 79 % des contributions gouvernementales et 73 % de
l'ensemble de ses ressources.
c) L'Université Senghor d'Alexandrie
L'Université francophone d'Alexandrie est un
établissement d'enseignement supérieur, créé en
1989, dont la vocation est la
formation de spécialistes de haut
niveau dans quatre disciplines-clefs
du développement
africain : administration-gestion, nutrition-santé, gestion de
l'environnement et gestion du patrimoine culturel. L'enseignement se
déroule
sur deux ans
, avec un stage en situation de trois mois.
Les candidats sont sélectionnés sur dossier, puis par voie de
concours. A l'issue de deux années de formation, ils obtiennent un
diplôme de troisième cycle, le diplôme d'études
professionnelles approfondies, reconnu par le conseil africain et malgache pour
l'enseignement supérieur.
Une
évaluation externe
de l'Université a été
lancée par le secrétaire général de la
francophonie, le 16 novembre 2000 et ses conclusions en ont été
communiquées au conseil permanent de la francophonie de mars 2001.
Les quatre experts, un Camerounais, une Québécoise, un Ivoirien
et un Français, ont considéré que l'Université est
un établissement d'enseignement supérieur de qualité, qui
remplit convenablement sa mission de formation, et répond à un
besoin réel. Ils ont plus particulièrement apprécié
la neutralité de sa procédure de sélection, sa
capacité à développer chez ses auditeurs le sens de
l'initiative individuelle et de l'intérêt général,
ainsi qu'un sentiment d'appartenance à l'institution.
Ils ont toutefois formulé des critiques sévères sur les
insuffisances de la gestion et de l'administration, déjà
dénoncées par le commissaire aux comptes du Fonds
multilatéral unique en avril 2000 ; sur le caractère
inapplicable des statuts ; sur des déséquilibres de
fonctionnement qui tiennent à une concentration excessive du pouvoir de
décisions entre les mains du seul recteur ; et enfin à une
dérive des coûts d'autant plus choquante que depuis 1992, le
nombre d'étudiants a été ramené à 40 par
an.
Ces critiques rejoignent les observations formulées par votre rapporteur
dans son précédent rapport pour avis.
Il tient à rappeler que la France, dont les contributions
s'élèvent à 11,5 millions de francs (1,75 million
d'euros), regroupés depuis 2001 sur le Fonds multilatéral unique,
reste de loin le principal contributeur de l'université. Le Canada prend
en charge la mise à disposition d'un directeur de département, et
le Québec, le coût de quelques sessions de conférence, pour
un montant total de 2,3 millions de francs (0,35 million d'euros).
Au regard de ce budget plutôt conséquent, le nombre des auditeurs
paraît assez réduit, particulièrement depuis la
décision prise par le recteur en 1994 de ne plus assurer la formation
que d'une seule promotion tous les deux ans.
EFFECTIFS DES DEUX DERNIÈRES PROMOTIONS DE L'UNIVERSITÉ SENGHOR
|
Section
administration
|
Section
|
Section
|
Section
|
Total |
6è promotion 1997-1999 |
32 |
26 |
16 |
12 |
86 |
7è promotion 1999-2001 |
26 |
25 |
11 |
17 |
79 |
Si, dans
une approche très globale on rapproche le budget de fonctionnement de
l'université et l'effectif des promotions d'étudiants qu'il
forme, on obtient une dépense par étudiant de plus de
186 000 francs pour l'année universitaire 1999-2000.
A titre de comparaison, le ministère de l'éducation nationale
évalue, en France, la dépense globale financée par l'Etat,
les collectivités territoriales, les entreprises et les ménages
à 41 200 francs en moyenne par étudiant universitaire (IUT
et écoles d'ingénieurs universitaires non compris) :
55 900 francs en moyenne par étudiant des IUT ; et
à 77 800 francs en moyenne, par élève des
écoles d'ingénieurs universitaires.
La dépense moyenne occasionnée par un auditeur de
l'université Senghor représente quatre fois et demi la
dépense moyenne occasionnée par un étudiant universitaire,
et deux fois et demi la dépense moyenne occasionnée par un
élève des écoles d'ingénieurs.
Le taux d'encadrement est d'ailleurs exceptionnel, puisque les 80 auditeurs de
la dernière promotion bénéficient d'un corps professoral
constitué de 8 professeurs résidant à l'université,
d'une vingtaine de professeurs associés, et d'une quarantaine d'experts.
Ces constatations avaient conduit votre rapporteur à souhaiter, en
particulier,
le retour à un recrutement annuel
, de façon
à augmenter l'offre de formation.
Le gouvernement indique qu'un comité de suivi de cette évaluation
est en cours de constitution et devra élaborer des propositions de
réforme qui seront soumises au conseil permanent de la francophonie
avant transmission au conseil d'administration de l'université
Senghor.
d) L'Association internationale des maires et responsables de capitales et métropoles francophones (AIMF)
L'Association internationale des maires et responsables des
capitales et métropoles francophones (AIMF) a été
créée le 1
er
mai 1979 à Québec afin de
promouvoir entre ses membres, grâce à l'usage commun de la langue
française, une coopération dans tous les domaines de
l'activité municipale.
Opérateur associé de la francophonie depuis le sommet de Maurice
en 1993, elle est devenue opérateur de plein exercice lors du sommet de
Cotonou en 1995.
Elle rassemble aujourd'hui les responsables de 99 capitales ou
métropoles francophones provenant de 44 Etats, et a accueilli quatre
nouveaux membres lors de sa dernière assemblée
générale : Zahlé, Mopti, Sikasso et Siem Réap.
L'AIMF intervient dans les villes partenaires en mettant à leur
disposition les experts dont disposent, le cas échéant, les
autres membres, de façon à contenir autant que possible son
coût d'intervention. Ses réalisations les plus significatives
portent sur la modernisation de la gestion des collectivités locales
dans déjà plus de trente villes, grâce à
l'élaboration de programmes d'informatisation et à la formation
du personnel appelé à les mettre en oeuvre. Ces actions touchent,
par exemple, à la tenue de l'état civil, au service de la paie et
de la comptabilité, à la gestion en personnel, à la
perception des taxes municipales, ou à la gestion des stocks et du parc
roulant. Elle intervient également en matière d'alimentation en
eau potable, de voirie, d'élimination des déchets, de
construction de marchés ou de centres de santé.
Le budget de l'AIMF est présenté en deux sections :
- la première, consacrée au fonctionnement de l'association,
s'est élevée à 9,275 millions de francs (1,4 million
d'euros). Elle est financée pour l'essentiel par les cotisations des
membres de l'association (1,5 million de francs - 0,23 million d'euros) et
par une subvention d'équilibre de la mairie de Paris (7,4 millions
de francs - 1,13 million d'euros).
- la seconde, consacrée au financement des actions de
coopération, s'est élevé à 20,5 millions de francs
(3,13 millions d'euros). Elle est financée à hauteur de
15 millions de francs par la contribution que l'AIMF perçoit en sa
qualité d'opérateur de la francophonie, et à hauteur de
8,3 millions de francs (1,27 million d'euros), par des contributions
spécifiques versées par des villes membres ou des organismes
publics. La contribution que s'est engagée à lui verser la
France, par l'intermédiaire du Fonds multilatéral unique,
s'élève à 12 millions de francs.
e) TV5
La
chaîne francophone par satellite a été créée
en janvier 1984 par l'association des trois chaînes publiques
françaises, de la Radio-Télévision belge de la
communauté française et de la société de
radiodiffusion et de télévision, et complétée par
le lancement en 1988 de TV5 Québec-Canada. Elle jouit d'un statut
réellement international par sa diffusion et la participation de cinq
gouvernements et de deux chaînes à sa gestion, à son
financement et à ses programmes.
Votre rapporteur s'était alarmé, l'année dernière,
du bilan très décevant que l'on pouvait tirer de la diffusion de
TV5 sur le continent américain. Il considérait en effet comme un
échec inacceptable le fait que TV5 Amérique ne touche que
6 000 foyers en réception directe aux Etats-Unis.
Il avait pris note que la Conférence ministérielle de Vevey, en
octobre 2000, avait décidé le principe d'une réforme
globale du dispositif de TV5. Relevant que celle-ci ne s'était cependant
pas prononcée sur l'avenir de TV5 Amérique, il avait
adressé au Gouvernement français une ferme invitation à
accentuer sa pression auprès de ses partenaires pour sortir de cette
impasse.
Il se félicite donc des conséquences de l'accord intervenu en
juin 2001 qui a permis la reprise en main, par le pôle parisien, de tous
les signaux TV5 -à l'exception du signal TV5 Québec-Canada dont
la gestion est maintenue à Montréal.
Cette réforme entraîne une modification de la clef de
répartition des financements entre les différents partenaires. La
part financée par la France passe de 67 % à 71 %
du budget consolidé qui s'établit ainsi :
- 60,48 millions d'euros (396,7 millions de francs) à la
charge de la France (71 %) ;
- 16,51 millions d'euros (108,3 millions de francs) à la
charge des pays partenaires (19,4 %) ;
- 8,16 millions d'euros (53,5 millions de francs) assurés par
les ressources propres (9,6 %).
Si la réforme des structures s'était appliquée en
année pleine, le budget consolidé de TV5 Monde aurait
été de 80,01 millions d'euros (524,8 millions de
francs) et la France en aurait assuré les trois quarts (75,6 %).
Votre rapporteur considère que ce nouvel effort que consent notre pays
doit rendre le gouvernement français particulièrement vigilant
aux moyens qui seront mis en oeuvre pour réussir la
pénétration du marché télévisuel des
Etats-Unis, tout en améliorant la présence de TV5 en
Amérique Latine.
3. L'Assemblée parlementaire de la francophonie
L'Assemblée parlementaire de la francophonie constitue
un des
éléments fondamentaux de l'architecture institutionnelle de la
francophonie multilatérale.
Créée à Luxembourg en 1967, sous la forme d'une
Association internationale des parlementaires de langue française, elle
réunissait, alors, les délégués de 23 sections
issues de Parlements d'Afrique, d'Amérique, d'Asie, d'Europe et
d'Océanie.
Elle a préconisé, dès sa création, la mise en place
d'une institution gouvernementale de la francophonie, et cette suggestion a
donné naissance, en 1970, à l'Agence de coopération
culturelle et technique (ACCT), devenue depuis l'Agence intergouvernementale de
la francophonie (APF).
C'est lors de la XVIIe Assemblée générale de Paris, en
juillet 1989, que l'Association est devenue l'Assemblée internationale
des Parlements de langue française, affirmant ainsi sa vocation à
être l'organisation interparlementaire des pays de la francophonie, comme
l'avait reconnu le sommet de Dakar en mai 1989.
Lors du
sommet de Maurice en octobre 1993
, les chefs d'Etat et de
gouvernement, après avoir réaffirmé la place
éminente de l'institution parlementaire au coeur de la démocratie
représentative et de l'Etat de droit, ont considéré que
l'AIPLF, seule
organisation interparlementaire de la francophonie
constituait le lien démocratique entre les gouvernements et les peuples
de la francophonie.
En conséquence, ils ont décidé de reconnaître
l'AIPLF, comme
l'assemblée consultative de la francophonie,
ce
qu'a confirmé la charte de la francophonie adoptée à
Hanoï en novembre 1997.
Pour se mettre en conformité avec la charte, l'assemblée a
décidé lors de sa
session ordinaire d'Abidjan en juillet
1998
d'adopter le nom
d'assemblée parlementaire de la
francophonie (APF).
Elle développe une
coopération interparlementaire
qui est
articulée autour de plusieurs programmes réalisés en
partenariat avec l'Agence de la francophonie, et qui ont pour objet
l'organisation de :
- missions d'observation d'élections ;
- séminaires parlementaires ;
- missions d'information et de bons offices ;
- stages destinés à des fonctionnaires d'Europe du Sud et
d'Europe centrale ; ceux-ci sont organisés chaque année dans
le cadre de formations dispensées par l'Institut international
d'administration publique de Paris.
L'Assemblée est également le maître d'oeuvre du
programme d'appui aux services documentaires des Parlements du Sud
(PARDOC)
décidé en 1991, sur sa proposition, par le sommet
des chefs d'Etat et de gouvernement de Chaillot.
Depuis son lancement ce programme a bénéficié au
Bénin, au Burkina Faso, au Gabon, au Mali, au Sénégal, au
Congo, au Liban, au Centre-afrique, à l'Égypte, à
Madagascar, à la Mauritanie, à la Roumanie, au Vietnam, à
la Guinée, à Tahiti, au Togo, à la Bulgarie, à
l'Albanie, au Burundi, au Cameroun, au Cambodge, aux Comores, à la
Côte-d'Ivoire, à Djibouti, au Laos, à la Moldavie, au
Niger, au Tchad et à Vanuatu.
En outre, dans le cadre du
fonds francophone des inforoutes
créé après le sommet de Hanoï, l'Assemblée
parlementaire de la francophonie a confié au programme PARDOC la mise en
oeuvre d'un programme visant à doter les parlementaires du Sud de leur
site et a facilité leur connexion à internet. Ce projet a
bénéficié à huit parlements francophones
désignés par le bureau de l'Assemblée parlementaire de la
francophonie.
4. Les jeux de la francophonie
Les jeux
de la francophonie ont vu le jour à Québec en 1987 à
l'instigation des ministres francophones de la jeunesse et des sports. Ils sont
organisés tous les 4 ans dans un pays différent. Leur
originalité est d'allier le sport et la culture.
Succédant aux Jeux de Madagascar, en 1997, les quatrièmes jeux de
la francophonie se sont déroulés du 14 au 21 juillet 2001
à Ottawa Hall, au Canada.
Ils ont accueilli 51 délégations et plus de 3000 participants, ce
qui constitue un succès sans précédent. La France avait
envoyé 250 représentants dont 180 sportifs et 21 artistes.
Le budget des Jeux de la Francophonie, préparé et mis en oeuvre
par le comité international des jeux de la francophonie, fait l'objet
d'un financement spécifique alimenté exclusivement par le
pays-hôte quand il s'agit d'un pays du Nord et pris en charge pour
moitié par les pays bailleurs de fonds, lorsqu'il s'agit d'un pays du
Sud, ce qui sera le cas des prochaines jeux de Niamey en 2005.
Le budget prévisionnel est d'environ 54 millions de francs
(8,23 millions d'euros) , dont 27 millions de francs (4,12 millions
d'euros) seront à la charge des bailleurs de fonds suivant la clé
de répartition en usage depuis les Jeux de Madagascar. La France, en
complément de son aide bilatérale au Niger, a ainsi prévu
un financement de 15,7 millions de francs (2,4 millions d'euros).
II. LA DÉFENSE DE LA FRANCOPHONIE EN FRANCE ET DANS LES INSTITUTIONS EUROPÉENNES
Dans une
allocution qu'il a prononcée devant le Sénat, le 3 mai 2000,
M. Boutros Boutros-Ghali, secrétaire général de la
francophonie, a rappelé que la langue française serait d'autant
plus respectée qu'elle jouirait, en France d'un statut respectable, et a
invité nos concitoyens à faire preuve de « civisme
francophone ».
On ne saurait exprimer mieux le caractère indissociable de la
défense de la francophonie extérieur et du combat pour la langue
française en France, dans la vie quotidienne, dans le monde des
affaires, et dans les différents aspects de la culture et de la science.
Or, beaucoup de nos compatriotes ne donnent malheureusement pas l'impression
d'avoir compris le sens de ce combat pour la francophonie.
L'application inégale de la « loi Toubon » donne
trop d'exemples d'une certaine indifférence à l'égard de
la défense du français et de l'usage de notre langue, d'autant
plus grave qu'elle est souvent le fait des
« élites » économiques, financières,
administratives, scientifiques, voire culturelles.
La défense de la place de notre langue dans les institutions
internationales, et particulièrement dans les institutions
européennes, requiert aussi une attention vigilante et des
réactions vigoureuses, car le plurilinguisme et, à travers lui,
le pluralisme du monde, font l'objet d'un travail de sape régulier,
jusque dans des domaines où il semblait le mieux et le plus
traditionnellement implanté.
A. LA POLITIQUE EN FAVEUR DE LA LANGUE FRANÇAISE EN FRANCE
La politique en faveur de la langue française doit poursuivre le double objectif d'assurer l'emploi de la langue française en France et de conserver au français son rôle de langue de communication internationale. Sa mise en oeuvre et son suivi sont assurés par la Délégation générale à la langue française.
1. La regrettable dispersion des missions de la DGLF
La
délégation générale à la langue
française est traditionnellement chargée de la défense de
la langue française en France, et de celle de son statut de langue
internationale dans les organisations internationales. Ces deux missions
paraissent à votre rapporteur suffisamment stratégiques et
absorbantes pour qu'on ne charge pas en outre la DGLF de la préservation
des langues régionales, qui est, au demeurant, un objectif parfaitement
légitime, mais qui ne se saurait en aucun cas se situer sur le
même plan.
A cet égard, il ne peut que s'opposer vigoureusement à cette
dispersion des missions de la DGLF, commencée il y a quatre ans, et
qu'est venue consacrer la modification de sa dénomination par le
décret n° 2001-950 du 16 octobre 2001. Dorénavant
intitulée « délégation générale
à la langue française et aux langues de France »
-DGLFLF-, celle-ci se voit assigner comme mission supplémentaire, de
contribuer « à préserver et valoriser les langues de
France ».
a) Le caractère stratégique des missions traditionnelles de la délégation
La DGLF
assure traditionnellement le secrétariat du conseil supérieur de
la langue française, placé auprès du Premier ministre.
Elle est en outre chargée :
-
du suivi de l'application de la loi du 4 août 1994 dite
« loi Toubon »
sur l'emploi de la langue
française ; à ce titre, elle rédige un rapport annuel
au gouvernement et au Parlement sur l'application de la loi ;
-
de la promotion du plurilinguisme dans les services publics
, et du
contrôle de l'usage du français par les agents publics ;
-
de l'enrichissement de la langue française
, par le
contrôle qu'elle exerce sur les dix-huit commissions
spécialisées de terminologie, placées chacune sous la
tutelle d'un ministère ; elle assure en outre le secrétariat
de la commission générale de terminologie et de néologie
qui examine les propositions des commissions spécialisées et
transmet les termes retenus au Journal officiel, après accord de
l'Académie française et du ministre
intéressé ;
-
de la défense de la place du français
dans les domaines
scientifique, technique et économique ; à ce titre, elle a
mis en place, en 1996, un dispositif de soutien à
l'interprétation simultanée dans les colloques internationaux qui
se tiennent en France, et apporte son soutien pour la création ou le
développement de revues de synthèse dans les sciences
exactes ;
-
des actions de sensibilisation à la défense de la langue
française
orientées vers des milieux spécifiques, mais
aussi vers le grand public à travers une manifestation comme
« le français on l'aime ».
Depuis quatre ans, elle participe en outre au programme d'action gouvernemental
pour l'entrée de la France dans la société de
l'information, en veillant à ce qu'aucun obstacle technique ne freine la
présence du français sur les nouveaux supports. Elle veille
également à la bonne application de la circulaire du Premier
ministre du 7 octobre 1999 qui rappelle que la traduction éventuelle des
sites de l'internet des administrations et des établissements publics de
l'Etat doit se faire dans au moins deux langues autres que le français.
Sa seconde priorité porte sur la défense du français et du
plurilinguisme dans les organisations internationales, et tout
spécialement dans l'Union européenne.
Ces missions revêtent un caractère stratégique pour notre
pays.
b) La confusion des enjeux
Votre
rapporteur s'était déjà alarmé, l'an dernier, des
conséquences d'une extension des missions de la délégation
qui la conduit à s'occuper, de plus en plus, de la sauvegarde et de la
valorisation des langues de France.
Alors que la défense de la place du français sur notre territoire
comme dans les institutions européennes et internationales demande de
notre part une vigilance et une vigueur accrues, cette dispersion des objectifs
et des énergies lui paraît particulièrement
préoccupante.
Enfin, quelque légitime que soit l'attention que l'on doit porter
à nos langues régionales, qui appartiennent en effet à
notre patrimoine, il ne lui paraît pas opportun de placer leur
défense sur le même plan que la défense du français,
dont le statut international et le caractère universel ne peuvent qu'en
sortir affaiblis.
L'analyse des effectifs et des crédits de la DGLF semble devoir
confirmer ses craintes.
Les
effectifs
de la DGLF, qui compte 23 agents permanents et
7 vacataires à temps complet, n'ont pas été
renforcés, et ne semblent pas devoir l'être dans un proche avenir.
Pour réaliser ses missions, la DGLF dispose de trois enveloppes de
crédits
:
- des crédits de fonctionnement (imputés sur les chapitres
34-97-67 et 34-97-66) qui se sont élevés à
248 273 euros (1 628 567 francs) en 2001 ;
- des crédits d'intervention (chapitre 42-20-80) qui se sont
élevés à 1 432 669 euros
(9 397 692 francs) en 2001 ;
- des crédits déconcentrés (chapitre 43-30-20) qui se sont
élevés à 304 898 euros (2 millions de
francs) en 2001.
Le ministère de la culture a indiqué à votre rapporteur
que les enveloppes de crédits d'intervention et de crédits de
fonctionnement pour 2002 ne lui avaient, à ce jour, pas encore
été notifiées, mais qu'il espérait, toutefois, une
reconduction de ces dotations.
En revanche, le projet de budget pour 2002 prévoit une
mesure
nouvelle de 106 706 euros
(700 000 francs) de
crédits déconcentrés, au titre de
« l'enveloppe pour les langues régionales
notifiée aux directions régionales d'action culturelle sous forme
globalisée ».
Ce même chapitre budgétaire avait déjà
bénéficié, en 2001, d'une mesure nouvelle de deux millions
de francs.
Votre rapporteur ne saurait approuver cette évolution des attributions
de la DGLF, dans laquelle il voit une inquiétante dérive, car
celle-ci ne dispose pas des moyens supplémentaires lui permettant de
mener à bien de nouvelles missions, tout en poursuivant sa
nécessaire action en faveur de la langue française.
2. Le bilan de la loi Toubon
Six ans
après son entrée en vigueur, la loi du 4 août 1994 permet
en particulier d'assurer la protection du consommateur dans des conditions
satisfaisantes en apparence.
Deux circulaires sont venues rappeler le contenu des obligations qu'elle
crées :
- une circulaire du Premier ministre du 7 octobre 1999 relative aux sites
internet des services des établissements publics de l'Etat rappelle que
l'usage du français pour la rédaction des pages internet
constitue une obligation légale, et que le recours à des
traductions en langues étrangères doit se faire en au moins deux
langues autres que le français ;
- deux circulaires signées le 28 septembre 1999 par le ministre de
l'équipement, des transports et du logement, et la ministre de la
culture concernent les transports et le tourisme. La première rappelle
que l'obligation d'emploi du français s'applique sur tout le territoire
français aux transporteurs et gestionnaires d'infrastructures de
transport qu'ils soient publics ou privés. La seconde concerne l'emploi
du français par les agents publics, en particulier dans leurs relations
avec l'Union européenne.
a) L'information des consommateurs
Les
dispositions relatives à la protection du consommateur sont dans
l'ensemble bien appliquées, grâce à l'action des services
de la direction générale de la concurrence, de la consommation et
de la répression des fraudes (DGCCRF), de la direction des douanes et
des droits indirects (DG-DDI) et à la vigilance des associations
agréées de défense et de promotion de la langue
française.
L'année 2000 est toutefois marquée par un recul du nombre de
contrôles effectués par les services de la DGCCRF. Le nombre de
ses interventions, passé de 7 824 en 1998 à 9 573 en
1999, est retombé à 6 584 en 2000. Cette évolution
s'explique par les différentes crises en matière de
sécurité alimentaire qui ont fortement mobilisé ses
agents. La progression de la proportion des infractions à la loi
connaît en parallèle une légère progression qui
montre que la vigilance ne doit pas se relâcher.
Le rapport de la DGLF insiste particulièrement sur les
interactions
de plus en plus fortes entre les dispositions de la
loi
Toubon
relatives à la protection des consommateurs d'une part, et la
jurisprudence de la Cour de
Justice
des communautés
européennes
et les articles du traité de l'Union sur la libre
circulation, de l'autre.
En effet, alors que la réglementation française impose
explicitement un étiquetage en langue française des produits
vendus en France, le droit communautaire et en particulier l'article 14 de
la directive 79/112 modifiée par la directive 97/4 n'impose que
l'étiquetage « dans une langue facilement comprise par le
consommateur ».
Or, saisie d'une question préjudicielle par la Cour d'appel de Lyon, sur
la compatibilité de ces dispositions respectives, la Cour de Justice des
communautés européennes, s'appuyant sur une jurisprudence
récente, a répondu que les articles 30 du Traité et
14 de la directive 79/112 s'opposent à ce qu'une réglementation
nationale impose l'utilisation d'une langue déterminée pour
l'étiquetage des denrées alimentaires, sans retenir la
possibilité qu'une autre langue facilement comprise par les acheteurs
soit utilisée ou que l'information de l'acheteur soit assurée par
d'autres mesures ».
Votre rapporteur tient à exprimer ici sa très vive
préoccupation, et souhaite qu'une réflexion soit entamée
pour
éviter que la jurisprudence européenne ne permette de
contourner le respect des dispositions de la loi Toubon,
et en particulier
de son article 2 qui résulte de la volonté expresse de la
représentation nationale.
Loi
n° 94-665 du 4 août 1994 relative
à l'emploi de la
langue française
Article
2 « Dans la désignation, l'offre, la présentation, le
mode d'emploi ou d'utilisation, la description de l'étendue et des
conditions de garanties d'un bien, d'un produit ou d'un service, ainsi que dans
les factures et quittances l'emploi de la langue française est
obligatoire ».
Il regrette que les autorités françaises ne fassent pas preuve de
toute la détermination nécessaire dans la défense de notre
langue en ce domaine comme elle en ont fourni une nouvelle preuve à
l'occasion de la discussion du
projet de loi relatif aux « mesures
urgentes de réformes à caractère économique et
financier
».
L'article 14 du projet de loi initial comporte une disposition autorisant les
émetteurs de titres de capital et de titres de créances à
établir leur note d'information au titre de l'appel public à
l'épargne dans une
langue usuelle en matière
financière
, ajoutant que si cette langue n'était pas le
français, le prospectus doit être accompagné d'un
résumé en français.
Ce dispositif était particulièrement choquant puisqu'il revenait
à présenter en quelque sorte, le recours à la
« langue usuelle en matière financière »
-l'anglais pour ne pas le nommer- comme la règle, le recours au
français n'étant que l'exception.
l'Assemblée nationale, par une rédaction astucieuse, a
corrigé le caractère trop flagrant de cet abandon. La
rédaction qu'elle a adoptée prévoit en effet que ce
document est rédigé en français, mais assortit
aussitôt ce principe d'une exception autorisant précisément
ce recours à cette fameuse langue usuelle. Il ne s'agit là que
d'un ajustement cosmétique qui ne saurait aucunement satisfaire votre
rapporteur.
Aussi celui-ci avait-il cosigné un amendement prévoyant que ces
notices d'information devaient être rédigées en
français, tout en acceptant qu'elles puissent être
accompagnées d'un résumé dans une langue usuelle en
matière financière.
Il avait cependant accepté de se rallier au dispositif proposé
par la commission des finances du Sénat. Celui-ci pose le principe d'un
recours à la langue française et n'autorise de dérogation
à cette règle que pour des produits très techniques, qui
ne peuvent s'adresser qu'à des investisseurs professionnels.
Il avait cependant tenu à indiquer que cette position se situait
à l'extrême limite des concessions possibles et que, si
l'Assemblée nationale revenait sur ce texte, il saisirait le Conseil
constitutionnel.
Ce recours va être déposé.
b) La protection des salariés et les pratiques linguistiques des entreprises
Les
informations dont dispose la DGLF sur l'application de l'obligation d'emploi de
la langue française dans les contrats de travail, le règlement
intérieur, les conventions et accords collectifs de travail sont
très partielles. Elles ne permettent pas de connaître
l'état réel de la situation, notamment pour ce qui concerne les
documents comportant des dispositions dont la connaissance est
nécessaire au salarié pour l'exécution de son travail.
Le suivi des offres d'emploi dans la presse est plus aisé. Si les
manquements sont rares, de
nombreuses annonces rédigées en
langue étrangère contournent en réalité la loi
,
par exemple en ne faisant pas figurer explicitement le pays dans lequel
l'emploi est à pourvoir. En outre, quelques annonces, bien que
rédigées en français, portent mention de l'exigence de
l'anglais comme langue maternelle, ce qui pourrait constituer, selon les
services du ministère de l'emploi et de la solidarité, une
discrimination en raison de l'origine.
De façon plus choquante encore, il apparaît que de plus en plus de
grandes sociétés françaises ou ayant un
établissement en France font de l'anglais leur langue de travail, dans
leurs relations commerciales avec leurs clients ou fournisseurs
étrangers, mais aussi parfois dans leur fonctionnement interne. La
dimension culturelle de ce choix linguistique est rarement prise en compte, ce
qui risque de susciter des dysfonctionnements dans l'entreprise, mais aussi une
démotivation des salariés.
Il s'agit certainement d'un domaine dans lequel il conviendrait que la DGLF
renforçât sa vigilance, en développant sa collaboration
avec les services de l'inspection du travail.
c) Les domaines scientifiques et techniques
Les
revues et les publications publiées par des personnes publiques
respectent en règle générale l'obligation consistant
à disposer au moins d'un résumé en français des
contributions rédigées en langue étrangère.
En ce qui concerne les manifestations et colloques internationaux
organisés en France par des personnes françaises, des
difficultés persistent pour assurer la présence minimale du
français qu'impose la loi. Les associations agréées de
promotion de la langue française se mobilisent de plus en plus sur cette
question et, pour la première fois, une condamnation a été
prononcée à l'encontre d'un établissement d'enseignement
supérieur qui n'avait pas mis à la disposition des participants
à une manifestation qu'il organisait une version française des
documents de présentation des programmes et des bulletins
d'inscription.
B. LA DÉFENSE DU FRANÇAIS DANS LES ORGANISATIONS INTERNATIONALES
1. Le français doit conserver son rang au sein de l'Union européenne
Votre rapporteur tient à insister sur l'absolue nécessité de ne pas se résigner au recul du français dans les institutions européennes : la consolidation de son rôle comme langue officielle et plus encore comme langue de travail de l'Union est en effet la condition impérative du maintien d'une vision pluraliste de l'Europe. Ajoutons que si son usage au sein de l'Union venait à s'estomper, le français perdrait un des fondements importants de son influence dans les autres organisations internationales et sur la scène mondiale.
a) L'érosion de l'usage du français comme langue
Or le
rapport présenté par la DGLF montre que si le statut et la place
du français restent solides dans les réunions formelles et les
textes officiels de l'Union, son rôle comme langue de travail tend
à s'éroder : on déplore en particulier une diminution
de son usage comme langue de première rédaction des documents de
travail. Les administrations françaises relèvent d'ailleurs que
les documents de travail que leur envoient la commission ou le conseil sont
souvent rédigés en langue anglaise ; que les documents que
les institutions communautaires remettent avant ou pendant les réunions
ne sont pas toujours disponibles en français ou le sont plus tardivement
que la version anglaise.
Ces retards qui s'expliquent en partie par une saturation des services de
traduction, ont, semble-t-il, commencé de se réduire, grâce
à une réorganisation des services et à une augmentation
des postes de la division française. Il convient de ne pas
relâcher notre vigilance en ce domaine, car des retards trop
fréquents dans la parution des documents en français ne
pourraient qu'ancrer davantage l'habitude chez leurs utilisateurs de recourir
systématiquement à la version anglaise disponible
immédiatement.
La perspective d'élargissement de l'Union aux pays d'Europe centrale et
orientale constitue un des enjeux majeurs pour le statut de notre langue.
Même si deux de ces Etats, la Roumanie et la Bulgarie, sont membres de la
francophonie multilatérale, et si quatre (la Pologne, la Lituanie, la
République tchèque et la Slovénie) ont un statut
d'observateur, l'élargissement risque de se traduire par un nouveau
recul du français.
b) La nécessité d'un rééquilibrage dans les négociations relatives à l'élargissement
Le fait
que les négociations relatives à l'élargissement se
déroulent, pour l'essentiel, en anglais, à l'image des programmes
PHARE et TACIS, n'est pas étranger à cette situation.
Votre rapporteur souhaite que le gouvernement incite la commission à
rééquilibrer sa politique linguistique, en ce domaine, de
façon à éviter que les pays candidats à
l'élargissement ne perçoivent l'Europe comme anglophone. Il est
inadmissible que des pays de tradition francophone, comme la Roumanie et la
Bulgarie, soient contraints de travailler en anglais avec les services de la
commission.
c) Un exemple choquant : le monopole de l'anglais dans les procédures d'EuropeAid
Les
modalités d'organisation du Service EuropeAid
, chargé de
centraliser la mise en oeuvre de l'aide extérieure de la commission
viennent fournir une nouvelle illustration de la facilité avec laquelle
certains services de la commission sont tentés de
céder au
« tout anglais »,
en violation des principes même
de la construction européenne. Créé le 1
er
janvier 2001, par décision de la commission dans le cadre de la
réforme de la gestion de l'aide extérieure, l'Office de
coopération EuropeAid est
chargé de la mise en oeuvre de
l'ensemble des instruments d'aide extérieure de la commission
financés à partir du budget communautaire et des Fonds
européens de développement
, à l'exception toutefois
des instruments de pré-adhésion, des activités
humanitaires, et de la politique étrangère et de
sécurité commune (PESC).
Or, non seulement le document qui décrit la procédure
d'établissement du contrat d'aide passé entre l'autorité
européenne et le consultant est rédigé exclusivement en
anglais, mais il précise en outre à l'article 9 que :
« The language of the contract and of all written communications
between the consultant and the Contracting Authority and/or the project Manager
shall be
English
».
Ce qui signifie en bon français que l'anglais est la
langue dans
laquelle devront être rédigés non seulement le contrat mais
tous les échanges écrits
entre l'autorité
européenne et le consultant.
Autrement dit, nul n'est censé ignorer l'anglais s'il souhaite
obtenir une aide financière de l'Union européenne.
Votre rapporteur attend du Gouvernement français qu'il intervienne
rapidement auprès de la commission européenne pour rectifier ce
dispositif qu'il juge choquant et qui constitue un signe alarmant d'une
volonté rampante d'imposer l'anglais comme langue des relations
internationales de l'Europe
.
2. La réforme du brevet européen
Créée par la Convention de Munich du 5 octobre
1973,
le « brevet européen » n'est pas un instrument de
protection communautaire. Contrairement au projet de « brevet
communautaire » actuellement en discussion, et qui viendrait se
greffer en quelque sorte sur le brevet européen, il relève du
droit conventionnel classique entre Etats et réunit des pays qui ne sont
d'ailleurs pas tous membres de l'Union européenne.
La convention de Munich a institué une organisation européenne
des brevets, un office européen des brevets, et une procédure
unique de délivrance à l'issue de laquelle le brevet
européen prend la valeur d'un brevet national dans chacun des pays
contractants, et est soumis aux règles nationales en vigueur sur le
territoire de ces derniers.
Ses langues officielles sont l'allemand, l'anglais et le français
(article 4). Celles-ci sont dotées d'un statut
privilégié : les demandes de brevet doivent être
déposées dans une de ces trois langues, qui devient par la suite
la langue de procédure et la langue dans laquelle est publié le
fascicule du brevet.
Ces fascicules comportent obligatoirement une traduction des revendications
dans les deux autres langues officielles de l'Office européen des
brevets (article 14 alinéa 7) sachant que ces revendications constituent
le coeur du dispositif de protection, puisque ce sont elles qui
déterminent l'étendue de la protection (article 69), la
description et les dessins ne servant qu'à interpréter les
revendications.
L'organisation européenne des brevets permet :
- aux demandeurs ou aux titulaires de brevets français francophones de
déposer leur demande en français sans être obligé
d'y joindre une traduction ;
- aux entreprises françaises ou francophones de disposer soit de
fascicules complets en français pour les brevets délivrés
en français, soit de la traduction en français des revendications
des brevets délivrés en allemand ou en anglais.
Une disposition de la Convention, l'article 65, ouvre la possibilité
pour les Etats de renforcer leurs exigences en matière de traduction. Il
les autorise en effet à prescrire que le texte des brevets qui ne sont
pas rédigés dans leur langue officielle est réputé
sans effet sur leur territoire si une traduction n'est pas produite dans un
délai de trois mois. Cette faculté est ouverte aux Etat dont les
langues ont le statut de langues officielles de l'Office comme aux autres.
La plupart des Etats ont fait jouer cette clause, et la France également
(article L. 614-7 du code de la propriété intellectuelle).
Toutefois, la volonté de réduire le coût du brevet
européen, sensiblement supérieur au coût des brevets
octroyés par les principaux partenaires commerciaux de l'Europe a
conduit à la rédaction d'un accord consistant dans une
renonciation aux exigences de traduction prévues à l'article 65
précité.
Cet accord a été proposé à la signature des Etats
membres à la conférence intergouvernementale de Londres les 15 et
16 octobre 2000.
CONTENU DE L'ACCORD SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 65 DE LA CONVENTION SUR LA DÉLIVRANCE DE BREVETS EUROPÉEN
Les
Etats parties à l'accord sont convenus des dispositions suivantes :
1. Les Etats ayant une langue officielle en commun avec les trois langues
officielles de l'Office européen des brevets renoncent aux exigences de
traduction de l'article 65 ; les autres Etats y renoncent si le
brevet est délivré ou traduit dans une de ces trois langues
à leur choix, mais conservent la possibilité d'exiger une
traduction des revendications.
2. En cas de litige, le titulaire du brevet fournit à ses frais une
traduction complète du brevet au contrefacteur présumé et
au juge.
3. La signature de l'accord est ouverte jusqu'au 30 juin 2001.
4. L'accord ne peut entrer en vigueur que si huit Etats parties y ont
adhéré, dont l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni.
Le projet d'accord a suscité une vive inquiétude et votre
rapporteur avait tenu à rappeler
les inconvénients d'un texte
qui prévoit que des titres juridiques, partiellement
rédigés dans une langue étrangère, pourront
créer, en France, des droits et des obligations.
Confronté à cette préoccupation largement partagée,
le secrétaire d'Etat à l'industrie a confié une mission de
concertation à M. Georges Vianes qui a conclu à l'adoption de cet
accord, estimant en outre que celui-ci, « loin de représenter
un abandon de la position de la France et de la langue française dans le
système du brevet européen, la renforce ». Votre
rapporteur ne partage évidemment pas cette vision optimiste.
Il relève que notre collègue, M. Francis Grignon
1(
*
)
, dans un rapport d'information de la commission des
affaires économiques du Sénat, a également conclu à
la nécessité de signer cet accord, mais en insistant sur un
certain nombre de mesures d'accompagnement nécessaires.
MESURES D'ACCOMPAGNEMENT JUGÉES NÉCESSAIRES PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES EN VUE DE LA SIGNATURE PAR LA FRANCE DE L'ACCORD DE LONDRES
Veille technologique
: traduire en français, sur le budget
de l'INPI
2(
*
)
, comme cela est envisagé,
les revendications et un résumé
« signifiant » des demandes, à la publication. Les
traductions seraient disponibles sur le site internet de l'Institut national de
la propriété industrielle, dont la base de données peut
être interrogée en langage naturel ;
Sécurité juridique
: prévoir, comme c'est le
cas dans le projet de règlement sur le brevet communautaire, qu'un
contrefacteur présumé qui n'a pu avoir à sa disposition le
texte du brevet traduit en français est présumé ne pas
porter atteinte au brevet et que les dommages et intérêts (ou la
confiscation éventuelle des profits) ne pourraient intervenir
qu'après cette mise à disposition d'un texte en
français ;
Traducteurs et conseils
: le changement de régime
n'entrerait pas en vigueur avant, au bas mot, deux ans. L'Etat doit
impérativement utiliser ce délai pour :
- orienter les traductions visées au sur des
professionnels
français
: traducteurs pour les traductions, conseils pour
l'élaboration du résumé. Ceci implique un effort
considérable d'organisation de ces professions (possible, peut
être, via un groupement d'intérêt économique de
chacune d'entre elles et la mise en place, à l'Institut national de la
propriété industrielle, de procédures d'octroi de ces
marchés à la fois transparentes et accessibles à d'autres
prestataires que les grands cabinets étrangers qui risquent de
« capter » ce marché si les professionnels
français ne font pas cet effort d'organisation. Cette solution est plus
difficile à mettre en oeuvre, notamment pour l'élaboration du
résumé, que la simple sous-traitance à une
société étrangère
3(
*
)
, mais elle est, de loin, préférable.
Elle implique toutefois que les professionnels jouent le jeu de la mise en
oeuvre d'un accord qu'ils ont radicalement défendu ;
- prévoir des
aides spécifiques pour les traducteurs en
brevets
dans le cas probable où la mesure ci-dessus et
l'accroissement du nombre de dépôts ne suffiraient pas à
maintenir leur volume actuel d'activité.
Votre rapporteur ne peut cependant se féliciter de la signature par la
France de l'accord de Londres, le 29 juin 2001, mais souhaite que, à
tout le moins, le Gouvernement prête toute l'attention nécessaire
aux mesures d'accompagnement préconisées par la commission des
affaires économiques du Sénat.
Il relève que la signature de cet accord a été
accompagnée d'une déclaration précisant que la France
avait l'intention d'accompagner la mise en oeuvre de l'accord de dispositions
nationales lui permettant de prendre à sa charge la traduction
intégrale des brevets qui ne seront pas rédigés en
français.
3. L'année européenne des langues
Etablie
par décision conjointe du Parlement européen et du Conseil de
l'Europe, l'année européenne des langues a été
officiellement lancée à Lund, sous présidence
suédoise les 18-20 février 2001. Son but est de
célébrer la diversité linguistique européenne et de
promouvoir l'apprentissage des langues.
Organisée à des fins d'encouragement et d'information,
destinée au grand public, elle couvre les onze langues officielles de la
Communauté, l'irlandais et le luxembourgeois ainsi que les langues
régionales désignées par les Etats membres.
Les principaux objectifs sont :
- de mieux sensibiliser la population à l'importance de la richesse
linguistique et culturelle et d'encourager le multilinguisme ;
- de mettre en évidence les avantages que procurent, à des fins
personnelles ou professionnelles, des compétences dans plusieurs
langues ;
- d'encourager l'apprentissage des langues tout au long de la vie, la
diversité des méthodes et outils qui viennent en soutien à
cet enseignement.
Les actions communes ont porté essentiellement sur le lancement d'une
campagne d'information par les services de la communication. Le reste des
actions a fait l'objet d'un appel à proposition au niveau de chaque Etat
membre et d'une sélection. Dans chaque pays, un service national de
coordination a assuré la mise en oeuvre des manifestations et
activités. L'enveloppe financière prévue pour le
financement communautaire des projets a été fixée à
8 millions d'euros pour la période qui s'étend jusqu'au
31 décembre 2001.
Plusieurs manifestations ont été organisées en
France :
- Le salon Expolangues (31 janvier/4 février 2001) lors duquel des
rencontres, débats et conférences ont été
organisés pour sensibiliser le public au plurilinguisme ;
- la manifestation nationale de lancement (4 avril 2001), le « bal
des langues », à laquelle étaient invités quatre
cents personnes dont quatre vingt dix jeunes lycéens en provenance de
toute l'Union européenne ;
- les états généraux du multilinguisme (26 septembre 2001)
qui ont réuni au Collège de France des responsables de politique
éducative en provenance de 41 pays du Conseil de l'Europe ainsi que des
acteurs des sphères économique, culturelle et médiatique.
La France, qui a fait de la promotion du plurilinguisme un des axes
prioritaires de sa politique linguistique, ne peut que tirer profit de ces
actions, qui encouragent la généralisation de l'apprentissage de
deux langues vivantes au sein des systèmes éducatifs.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
d'une séance tenue le
mercredi 14 novembre 2001
, sous la
présidence de M. Jacques Valade, président, la commission a
procédé à l'examen du rapport pour avis
de
M.
Jacques Legendre sur les crédits de la francophonie inscrits au projet
de loi de finances pour 2002
.
Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.
M. Louis Duvernois
a déclaré partager l'analyse du
rapporteur pour avis et a indiqué qu'il s'associait à sa
proposition de refuser de voter les crédits de la francophonie. Il a
estimé que le Gouvernement n'avait pas su arrêter une position
claire, qu'il s'agisse de la rectification des missions de la
délégation générale à la langue
française et des langues de France, ou de l'action en faveur de
l'audiovisuel extérieur.
Même si la francophonie ne rencontre officiellement que des soutiens, il
a cependant douté que sa défense, pourtant vitale, soit
réellement prise en considération. Jugeant substantiel l'effort
financier consenti par la France, à travers le fonds multilatéral
unique, il a cependant déploré que la définition des
programmes et l'utilisation de ces crédits restent dans un certain flou.
Il a également regretté la fréquence des discordances de
vues dans la définition des orientations de la francophonie, et la
difficulté que rencontre celle-ci à articuler ses actions
nationales et son action multilatérale.
Il a déploré enfin que, malgré la volonté,
exprimée au sommet de Moncton, de procéder à la
rénovation du fonctionnement des opérateurs de la francophonie,
et malgré les efforts accomplis par le service des affaires
francophones, l'utilisation des crédits soit toujours aussi mal
appréhendée et a jugé urgent d'adresser un rappel à
l'ordre.
M. Bernard Fournier
a déclaré s'associer aux conclusions
du rapporteur pour avis, et a déploré qu'à
l'aéroport Charles-de-Gaulle certaines compagnies aériennes ne
diffusent pas d'annonces en français.
M. Serge Lagauche
a regretté la proposition formulée par
le rapporteur pour avis de rejeter les crédits de la francophonie, qu'il
a attribuée à une réaction d'humeur. Il a estimé
que les difficultés rencontrées par la langue française
pour défendre sa place s'expliquaient essentiellement par la
primauté économique d'une autre sphère linguistique et ne
pouvaient être imputées au Gouvernement, que l'on ne peut tenir
responsable que de crédits qu'il affecte à la défense du
cinéma ou au réseau des écoles françaises à
l'étranger. Refusant de croire que la proposition du rapporteur pour
avis pouvait se rattacher au prochain contexte électoral, il l'a
appelé à renoncer à cette attitude de rejet.
M. René-Pierre Signé
a jugé excessives et
contradictoires les critiques formulées par le rapporteur pour avis,
s'étonnant de ce qu'il puisse se féliciter des discours positifs
tenus par le Gouvernement et du caractère non négligeable des
crédits consacrés à la francophonie, et, dans le
même temps dénoncer un abandon de la défense de la langue
française.
Il a estimé qu'un rejet des crédits de la francophonie
traduirait, plus qu'une réaction d'humeur, une prise de position
politique et polémique à laquelle le groupe socialiste ne
s'associerait pas. Il s'est en outre étonné de ce que les
libéraux, qui sont les plus prompts à se rallier à la
mondialisation, s'étonnent du recul de la francophonie et de la langue
française.
En réponse aux différents intervenants,
M. Jacques
Legendre, rapporteur pour
avis
, après avoir indiqué
qu'il rejoignait les analyses de M. Louis Duvernois, a apporté
les précisions suivantes :
- l'usage du français n'est en effet pas toujours respecté
dans les aéroports français, et il a d'ailleurs fallu,
récemment, une démarche vigoureuse, pour mettre fin à une
règle qui imposait l'usage de l'anglais aux contrôleurs
aériens, même dans leurs échanges avec des pilotes d'avions
français ou francophones ; cet exemple, parmi d'autres, illustre
les contradictions qui existent dans l'attitude des pouvoirs publics ;
- il présente depuis neuf ans le rapport sur les crédits de
la francophonie, et, sensible à l'effort financier non
négligeable dont ceux-ci témoignent, il a toujours proposé
un avis favorable à leur adoption ; l'an dernier toutefois,
l'inquiétude que lui inspiraient certaines dérives l'ont conduit
à ne recommander qu'un avis de sagesse ; cette année,
l'aggravation d'un certain nombre de tendances, auxquelles, hélas,
n'échappe aucun gouvernement, l'incite à lancer un avertissement
plus ferme ;
- l'action menée par le ministre délégué
à la coopération et à la francophonie est digne de
respect, et la sympathie de la ministre de la culture pour la défense de
la langue française est bien connue ; il est cependant regrettable
que, dans les arbitrages gouvernementaux, le poids des arguments techniques et
économiques l'emporte trop souvent ;
- par delà le budget, c'est la contradiction, qui traverse
d'ailleurs l'ensemble du monde politique, entre l'action en faveur de la
francophonie et les abandons en matière d'utilisation de la langue
française, qui doit être sanctionnée ;
- la défense par les flamands de la langue flamande, et par les
catalans de la langue catalane, montre les résultats que peut obtenir
une volonté politique ferme ;
- une politique économique libérale n'implique pas pour
autant l'abandon de la défense de sa langue, comme le montre par exemple
le souci des Etats-Unis d'Amérique de se prémunir contre les
avancées de l'espagnol dans leurs états du sud.
Mme Danièle Pourtaud
a relevé les propos tenus par le
rapporteur pour avis sur la défense de la langue catalane et de la
langue flamande, estimant qu'ils contrastaient avec les positions
défendues au Sénat à propos de la langue corse.
Suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a
émis ensuite un
avis défavorable
à l'adoption
des crédits de la francophonie
inscrits au projet de budget pour
2002 du ministère des affaires étrangères.
CONCLUSION
*
* *
1
« Stratégie du brevet
d'invention » : rapport d'information n° 377
(2000-2001) de M. Francis Grignon au nom de la commission des affaires
économiques.
2
Alimenté notamment par les taxes de maintien en vigueur des
brevets valables en France.
3
Du type de Derwaent, pour l'élaboration du
résumé.