Dans une communication publiée aujourd’hui, des sénateurs de la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat jugent que la crise sanitaire fait plus que jamais apparaître l’impératif pour l’Europe de renforcer son autonomie stratégique. Si la pandémie mobilise les esprits, elle ne fait pas disparaître les autres crises, qu’elle risque même d’aggraver. La PESC/PSDC doit répondre à l’ensemble de ces défis.
Les sénateurs qui ont participé, début mars, à la réunion des Parlements des 27 États membres de l’Union européenne sur la politique étrangère et de sécurité commune jugent que la crise sanitaire nécessite une réponse unie, solidaire et massive des États européens.
Le bilan de la coopération européenne est pour le moment nuancé : des coopérations bilatérales ont permis des transferts de patients du Grand Est vers des pays frontaliers ; des mesures fortes pour l’économie et la recherche ont été annoncées par la Commission et par la Banque centrale européenne (BCE). Mais le Conseil européen du 26 mars a donné le spectacle d’États membres divisés, incapables de répondre rapidement à l’urgence de la situation, alors que le bilan humain de la pandémie s’aggrave partout de façon alarmante. Et ce, alors même que l’article 222 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne impose aux États membres un principe de solidarité.
C’est la crédibilité de l’Europe aux yeux de ses citoyens qui est en jeu avec le risque d’alimenter des forces centrifuges dont on a déjà vu avec le Brexit qu’elles pouvaient avoir des effets concrets non seulement sur les plans humain et économique, mais aussi d’un point de vue géopolitique.
La crise risque en effet d’accentuer les évolutions stratégiques en cours : l’effritement de l’Europe, le désengagement américain et l’affirmation de puissance de certains États qui ne manqueront pas de s’emparer de la faiblesse de l’Europe pour faire avancer leurs propres intérêts. L’Europe doit non seulement agir, mais aussi mieux faire connaître son action et renforcer son autonomie stratégique, en prenant en compte les multiples dimensions de cette notion. Elle ne doit pas se détourner du reste du monde car la pandémie, si elle mobilise les esprits, ne fait pas disparaître les autres crises, et risque même de les aggraver. La situation en Afrique, continent déjà fragile sur les plans sanitaire, économique et sécuritaire, est particulièrement préoccupante.
En définitive, la crise liée à la pandémie de coronavirus devra conduire l’Europe à une réflexion de fond sur la notion d’autonomie stratégique, qui doit devenir notre boussole collective. Cette notion est plus que jamais pertinente dans le domaine de la politique étrangère et de la défense. Mais elle devra aussi probablement être étendue à d’autres domaines, ce qui nécessite une réflexion sur la notion de production stratégique : que ce soit dans le domaine sanitaire (médicaments, matériel médical…) ou dans d’autres secteurs d’importance vitale (alimentation, énergie, télécommunications…), notre continent ne peut se permettre d’être dépendant, notamment lors de crises majeures.
Pendant le confinement lié à la crise sanitaire, les rapporteurs de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées poursuivent leurs travaux en télétravail. Cette communication des rapporteurs sera soumise à l’approbation de la commission des affaires étrangères et de la défense lors de la reprise des travaux en réunion plénière.
La communication est consultable sur le site Internet du Sénat.
M. Christian Cambon (Les Républicains – Val-de-Marne) est président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
M. Joël Guerriau (Les Indépendants – Loire Atlantique) est chef de la délégation de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées à la 16ème conférence interparlementaire pour la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et la politique de sécurité et de défense commune (PSDC).
Mme Hélène Conway-Mouret (Socialiste et Républicain – Français établis hors de France), vice-présidente du Sénat, et M. Ronan Le Gleut (Les Républicains – Français établis hors de France), sénateur, sont membres de cette délégation.
Jean-Christian LABIALLE
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