À l’issue de la mission de contrôle budgétaire portant sur l’implantation des services de l’État dans les territoires qu’il a conduite, et de sa présentation en commission des finances, le sénateur Jacques Genest (Les Républicains – Ardèche) appelle à agir en faveur de l’efficacité de l’action publique et du retour de la confiance dans les territoires.
En premier lieu, il observe qu’il n’existe pas de contrepartie crédible à l’importante réduction des emplois publics et des implantations des services de l’État dans les territoires.
Ainsi, la multiplication des procédures dématérialisées (déclarations fiscales et demandes de cartes grises, par exemple) participe à accroitre fortement les inégalités et favorise, dans certains cas, le développement d’un marché privé parallèle inacceptable.
De même, les dispositifs censés accompagner et compenser les restructurations des services publics souffrent de multiples défauts. Par exemple, le fonctionnement des Maisons de services au public (MSAP) ou des futures Maisons France Services (MFS) repose sur un financement trop largement pris en charge par les collectivités territoriales.
En deuxième lieu, il alerte sur le caractère insoutenable de l’évolution de l’offre de soins publique et libérale.
Ainsi, sous l’effet des restructurations hospitalières, la distance entre la structure obstétrique la plus proche et le domicile des usagers a augmenté deux fois plus rapidement entre 2003 et 2018 en zone rurale qu’en zone urbaine. Or, les résultats financiers des hôpitaux publics se dégradent de manière continue, illustrant l’inefficacité des restructurations.
De plus, dans les zones rurales, le nombre de médecins généralistes âgés de moins de 40 ans est bien trop faible, ce que confirment les observations récentes de la DREES sur le même sujet. Dans ces conditions – si rien n’est fait – il faut s’attendre à une très forte dégradation de l’offre de soins libérale dans les territoires ruraux.
En troisième lieu, il constate que le lien de confiance entre l’État et les élus locaux s’est fortement dégradé, de même que les capacités d’action de l’État dans les territoires.
Ce phénomène résulte, d’abord, de l’éloignement des missions de conception et de pilotage des politiques publiques qui sont aujourd’hui exercées par les préfectures de région au détriment des préfets de départements et des sous-préfets.
Il s’explique, ensuite, par l’abandon progressif d’une véritable politique d’aménagement du territoire, par la suppression de l’offre d’ingénierie territoriale et par la diminution très forte des moyens accordés au contrôle de légalité ou comptable des actes des collectivités territoriales qui a réduit les moyens du dialogue sécurisant que ces procédures permettent d’entretenir entre l’État et les élus locaux.
En dernier lieu, le rapport du sénateur Jacques Genest observe que l’État a fourni un véritable effort pour maintenir le nombre des effectifs de policiers et de gendarmes les plus au contact des Français. Pour autant, ce soutien s’est fait au détriment des moyens d’intervention des forces de l’ordre qu’il convient aujourd’hui de renforcer.
Synthèse des recommandations :
Recommandation n°1 : Encadrer le développement des procédures dématérialisées en imposant le maintien d’une méthode alternative (papier, par exemple) et la possibilité de disposer d’un interlocuteur physique. Recommandation n°2 : Soutenir et étendre les actions conduites par la direction interministérielle à la transformation publique en faveur d’une réflexion mettant l’usager au centre de la réorganisation des services de l’État. Recommandation n°3 : Accompagner financièrement les collectivités territoriales pour l’obtention du label "Maison France Services" au profit des maisons de services au public qu’elles exploitent aujourd’hui. Recommandation n°4 : Élargir le périmètre des acteurs concertés dans le cadre de l’élaboration des schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services publics à l’ensemble des services publics, notamment ceux relevant de la DGFiP. Recommandation n°5 : Tirer un bilan précis et localisé de l’effet des restructurations des établissements publics hospitaliers sur leurs résultats financiers. Recommandation n°6 : Réguler l’installation des professionnels de santé libéraux en tenant compte des besoins identifiés à moyen terme sur le territoire. À défaut, prévoir la mise en œuvre d’un conventionnement sélectif cohérent avec les besoins en santé identifiés sur le territoire. Recommandation n°7 : Renforcer le niveau et la qualité des équipements des forces de l’ordre. Recommandation n°8 : Accroitre le niveau des effectifs alloués à l’exercice du contrôle de légalité en développant les solutions de conseil aux élus locaux. Recommandation n°9 : Tout en conservant le maillage actuel, redéfinir le rôle des sous-préfectures dans l’organisation territoriale de l’État en renforçant leurs missions et les moyens dont elles disposent. Recommandation n°10 : Consacrer le rôle des sous-préfets dans la représentation de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) dans les territoires et l’animation de ses actions. Recommandation n°11 : Assurer le maintien d’un contact privilégié et d’une proximité géographique entre les élus et le comptable public. Recommandation n°12 : Surseoir à toute fermeture de trésorerie lorsqu’aucune solution alternative pour l’encaissement des recettes en liquide des régies n’a été dégagée |
Le rapport est disponible sur le site du Sénat.
Le rapporteur spécial des crédits de la mission "Administration générale et territoriale de l’État" est La commission des finances est présidée par M. Vincent ÉBLÉ (Socialiste et républicain – Seine-et-Marne). Son rapporteur général est M. Albéric de MONTGOLFIER (Les Républicains – Eure-et-Loir). |
Clothilde LABATIE
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