À l’initiative de Mmes Annick Billon, Maryvonne Blondin et Marta de Cidrac, membres de la délégation aux droits des femmes, le Sénat a adopté à l’unanimité, le jeudi 14 mars 2019, une Proposition de résolution pour soutenir la lutte contre le mariage des enfants, les grossesses précoces et les mutilations sexuelles féminines.
Ce texte, co-signé par près de 130 sénateurs et sénatrices, de sensibilités politiques diverses, fait suite à des travaux entrepris par la délégation depuis 2018 sur l’excision, les mariages forcés et les grossesses précoces [1].
La résolution du Sénat met l’accent sur des statistiques effroyables, dont l’ampleur ne saurait laisser indifférent :
- toutes les 7 secondes dans le monde, une jeune fille de moins de 15 ans est mariée ;
- toutes les 15 secondes, une fillette ou une femme est excisée ;
- une fille sur 5 met au monde son premier enfant avant l’âge de 18 ans ;
- 70 000 décès sont causés chaque année par les grossesses et accouchements précoces ;
- les complications liées à la grossesse et à l’accouchement sont la deuxième cause de décès dans le monde pour les jeunes filles de 15 à 19 ans.
Selon Mme Annick Billon, présidente de la délégation aux droits des femmes, le fait que cette proposition de résolution soit inscrite à l’ordre du jour du Sénat quelques jours après le 8 mars est un "heureux symbole" : "ainsi se font écho dans notre hémicycle", a-t-elle relevé, "la Journée internationale des droits des femmes du 8 mars, la Journée onusienne de Tolérance zéro contre les mutilations sexuelles féminines, célébrée le 6 février, et la Journée internationale des filles, inscrite à l’agenda de l’ONU depuis 2012".
Elle s’est par ailleurs réjouie de l’annonce très récente, par la secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, d’un "plan pour éradiquer l’excision". Dans cette perspective, Annick Billon, présidente, a invité le Gouvernement à s’appuyer sur les propositions de la délégation pour définir les contours des mesures à venir.
Mme Marta de Cidrac a pour sa part souhaité que le Sénat, par l’adoption de cette résolution, affirme son "soutien aux associations qui agissent au quotidien contre les mutilations sexuelles féminines, dans un contexte financier trop souvent difficile" et appelle "au renforcement [de leurs] moyens". Elle a également tenu à rendre hommage à l’implication de tous les acteurs - professionnels et bénévoles - de la lutte contre ces fléaux qui font chaque année de trop nombreuses victimes dans le monde. Mme de Cidrac s’est référée au triste constat dressé par l’un des médecins auditionnés : "Dans ma pratique, j’ai été conduite à soigner de très jeunes filles, enceintes et mutilées : il n’y a pas d’histoire d’amour dans ce contexte, je vous le garantis ! On y trouve en revanche la litanie du mariage forcé et du viol conjugal, sans oublier les mutilations".
Mme Maryvonne Blondin a quant à elle souligné "l’ampleur des conséquences effroyables, tant physiques que psychiques, pour [les victimes]" : "ce constat est sans appel", a-t-elle relevé : "l’excision est bien une torture exercée à l’encontre des femmes, visant à nier l’existence même de leur corps, de leur sexualité et de leur être tout entier". Citant les mots d’une victime entendue par la délégation pendant ce travail d’enquête de plusieurs mois, "C’est être vivante et morte à la fois", Mme Maryvonne Blondin s’est émue de pratiques qui menacent des élèves des établissements scolaires français, plus particulièrement lors de congés dans le pays d’origine de leur famille où elles risquent d’être excisées puis mariées de force.
La délégation aux droits des femmes se félicite que le Sénat, par le nombre des co‑signataires de ce texte et par son vote à l’unanimité lors de la séance du 14 mars, manifeste un signal fort de sa mobilisation contre des pratiques que ne saurait justifier aucune tradition.
[1] Rapports d’information faits au nom de la délégation : Mutilations sexuelles féminines : une menace toujours présente, une mobilisation à renforcer (Maryvonne Blondin et Marta de Cidrac, n° 479, 2017‑2018) ; Dénoncer, pour y mettre fin, le mariage des enfants et les grossesses précoces (Annick Billon, n° 262, 2018-2019).
Juliette ELIE
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