Réunie le 18 avril 2018, la commission des finances du Sénat a organisé une audition pour "suite à donner" à l’enquête de la Cour des comptes sur le soutien aux énergies renouvelables.

Dans le prolongement du rapport de la Cour des comptes,Jean-François Husson (Les Républicains – Meurthe-et-Moselle), rapporteur spécial des crédits consacrés à l’énergie au sein de la mission "Écologie, développement et mobilité durables", formule les observations suivantes :

1/ Alors que notre pays vise un objectif de 23 % d’énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie en 2020 et 32 % en 2030, nous sommes aujourd’hui loin du compte, et les objectifs pour 2020 seront très difficiles à atteindre en l’absence de mesures supplémentaires :

- une refonte de nos procédures de recours contre certaines installations, victimes d’une opposition systématique, qui apparaît indispensable afin de raccourcir les délais entre la conception d’un projet et sa mise en service ;

- la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), actuellement en cours d’élaboration, qui devra préciser clairement comment le Gouvernement entend à la fois accélérer la montée en puissance des énergies renouvelables et réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 %.

2/ Le développement des énergies renouvelables constitue un enjeu environnemental, industriel et budgétaire, de première importance, avec un soutien public de 5,3 milliards d’euros en 2016. Cependant, le Parlementdemeure exclu des grands choix qui engagent les finances du pays en matière de soutien aux énergies renouvelables, puisqu’il n’est pas associé à la définition des objectifs en la matière, qui sont décidés dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Afin de corriger cette anomalie démocratique, il importe d’associer réellement le Parlement : la programmation pluriannuelle de l’énergie pourrait ainsi faire l’objet d’une loi de programmation, qui lui confèrerait une autorité bien plus grande que celle d’un simple décret, et permettrait une validation démocratique de la stratégie énergétique de notre pays.

3/ Le bilan industriel du secteur des énergies renouvelables est décevant. Face à la difficulté des entreprises françaises à fournir des matériels et équipements aux filières de production des énergies renouvelables, il est essentiel de soutenir nos industriels qui parviennent à se développer dans les énergies renouvelables et de les aider à se positionner sur des technologies innovantes.

4/ La décarbonation de notre mix énergétique appelle un soutien public plus important aux énergies renouvelables thermiques. À ce titre, comme le recommande la Cour des comptes, il est nécessaire d’augmenter les moyens alloués au fonds chaleur, afin d’atteindre les objectifs de développement fixés aux énergies renouvelables thermiques. En revanche, le renforcement du caractère incitatif de la "taxe carbone", comme le recommande la Cour des comptes, ne paraît pas souhaitable. La nouvelle trajectoire d’évolution de la "taxe carbone", votée dans le cadre de la loi de finances pour 2018 et que le Sénat avait refusé d’entériner, constitue en effet, en l’absence de mesures d’accompagnement suffisantes, davantage un impôt de rendement qu’un instrument visant à accélérer la transition énergétique.

5/ Alors que les mécanismes de soutien aux énergies renouvelables tels que les obligations d’achat ou les compléments de rémunération engagent nos finances publiques pour de longues périodes, il est capital que le Gouvernement et le Parlement disposent d’outils précis pour mesurer l’impact financier de long terme de ces mécanismes de soutien, grâce à une meilleure connaissance des coûts de production et des prix des différentes filières.

6/ Concernant la gouvernance de la politique énergétique, la création d’un comité chargé d’éclairer les choix du Gouvernement en la matière et d’une instance de pilotage interministériel que préconise la Cour des comptes ne paraît pas souhaitable. La piste d’une mobilisation plus importante de l’expertise de la Commission de régulation de l’énergie pourrait par exemple être privilégiée.

L’enquête de la Cour des comptes est consultable sur le site de la Cour des comptes :
https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-soutien-aux-energies-renouvelables


La commission des finances est présidée par M. Vincent ÉBLÉ (Socialiste et républicain – Seine-et-Marne).
Son rapporteur général est M. Albéric de MONTGOLFIER (Les Républicains – Eure-et-Loir).

Mathilde DUBOURG
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