De récentes décisions jurisprudentielles ayant fragilisé les interdits structurants édictés par le droit français en matière d’assistance médicale à la procréation (AMP) et de gestation pour autrui (GPA), la commission des lois avait confié à M. Yves Détraigne (UDI-UC – Marne) et à Mme Catherine Tasca (Socialiste et républicain – Yvelines) la responsabilité d’une mission d’information destinée à prendre la mesure des conséquences de ces décisions. Les rapporteurs ont présenté leurs conclusions à la commission réunie le 17 février 2016, sous la présidence de M. Philippe Bas (Les Républicains – Manche).
Quelles conséquences tirer du contournement de la loi française auquel se livrent certains couples pour faire naître un enfant, en recourant, à l’étranger, à des moyens interdits en France (AMP avec donneur pour les femmes célibataires ou vivant en couple avec une autre femme, GPA pour les couples formés d’une femme et d’un homme victimes d’une infertilité ou les couples d’hommes), avant de revendiquer ensuite, en France, la reconnaissance de la filiation établie à l’étranger ?
En matière d’AMP avec donneur, la mission d’information prend acte de la voie tracée par la Cour de cassation dans ses deux avis du 22 septembre 2014. L’épouse de la mère biologique de l’enfant peut adopter ce dernier, sans que son mode de conception entre en ligne de compte. Cette solution pragmatique rend compte de la difficulté pratique de prouver que l’enfant est issu d’un recours à l’AMP avec donneur, ainsi que de l’intérêt qui s’attache, pour l’enfant, à ce que sa filiation puisse être établie par la voie de l’adoption à l’égard de celle qui s’occupe, avec sa mère, de lui. Elle évite, aussi, tout bouleversement du droit de l’AMP et du droit de la filiation.
En matière de GPA, la mission d’information constate tout d’abord qu’il est faux d’assimiler les enfants nés de GPA à des « fantômes de la République ». Elle prend acte, sans aller au-delà, de la jurisprudence récente de la Cour européenne des droits de l’homme qui impose à la France de reconnaître la filiation biologique paternelle des enfants nés de GPA. Soucieux de concilier à la fois le respect des principes humanistes qui fondent la prohibition de la GPA et la protection due à ces enfants, qui ne sont pas responsables des actes de leurs parents, les rapporteurs préconisent d’agir dans trois directions différentes :
- en engageant des négociations internationales afin d’obtenir des pays pratiquant la GPA qu’ils interdisent aux ressortissants français d’y recourir. Il s’agit d’éviter la multiplication des situations contraires au droit français ;
- en permettant à l’enfant ou à ses administrateurs légaux agissant en son nom, de faire établir sa filiation conformément au droit français. Ceci lui permettrait de faire reconnaître sa filiation biologique paternelle, mais interdirait en revanche la reconnaissance de sa filiation avec sa mère ou son père d’intention ;
- en prévoyant, dans l’intérêt supérieur de l’enfant, que le parent d’intention puisse recevoir une délégation d’autorité parentale pérenne.
Consultez la synthèse (PDF - 312 Ko) du rapport.
Mathilde Dubourg
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