La commission d'enquête sur le bilan et le contrôle de la création, de l'organisation, de l'activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes a adopté, à l’unanimité, son rapport le 28 octobre 2015. Elle avait constaté l’existence, dans tous les domaines, d’une quarantaine d’autorités administratives indépendantes – d’importance inégale –, faisant peser un risque d’éclatement de l’action de l’État et d’illisibilité des institutions. La commission d’enquête avait également appelé à un meilleur contrôle parlementaire de l’action de ces autorités pour éviter un transfert de responsabilité sans contrôle démocratique.
Sur la base de ces travaux, Mme Marie-Hélène DES ESGAULX, présidente de la commission d’enquête, M. Jean-Léonce DUPONT, vice-président et M. Jacques MEZARD, rapporteur ont déposé le 7 décembre 2015 une proposition de loi et une proposition de loi organique qui reprennent les onze recommandations formulées par la commission d’enquête (PDF - 137 Ko).
Ces deux textes ont vocation à fixer le statut général des autorités administratives indépendantes (AAI) et des autorités publiques indépendantes (API). La compétence exclusive du législateur serait affirmée : la création d’une AAI ou d’une API, la fixation de sa composition et de ses attributions ainsi que de ses principes d’organisation et de fonctionnement relèveraient uniquement de la loi.
Ces deux textes reprennent les orientations de la commission d’enquête en rationalisant le paysage de ces autorités. Ainsi, la qualité d’AAI ou API serait maintenue à vingt autorités, les autres relevant de l’administration traditionnelle. Cette sélection constitue une première étape, avant d’envisager, au terme d’une seconde réflexion, des fusions, dont certaines sont déjà évoquées dans le débat public.
Ces textes ont vocation à devenir le statut unique de ces autorités en harmonisant les règles communes qui leur sont applicables. Se concentrant sur leur organisation et leur fonctionnement, ils ne modifient pas les règles relatives aux compétences ou aux pouvoirs de ces autorités.
D’une part, les membres disposeraient d’un statut contribuant à asseoir leur indépendance fonctionnelle. Les membres exerceraient ainsi un mandat d’une durée de six ans, en principe non révocable mais non renouvelable. Pour assurer la continuité, les membres seraient remplacés au gré de renouvellements partiels et échelonnés dans le temps. Un membre ne pourrait exercer concomitamment qu’un seul mandat au sein d’une AAI ou API, à l’exclusion de toutes autres fonctions, même administratives, au sein d’une de ces autorités.
Suivant la même logique, la déontologie des membres des AAI et des API serait consolidée sur un socle commun : devoir de réserve, incompatibilités professionnelles (notamment avec des fonctions juridictionnelles), disponibilité à temps plein des présidents, consultation par les pairs des déclarations d’intérêts, règles de déport et d’abstention en cas de conflit d’intérêts, contrôle par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique des reconversions professionnelles à l’issue du mandat. Dans le prolongement, chaque collège fixerait les règles déontologiques qui s’imposent aux agents, collaborateurs ou experts auxquels il est recouru.
D’autre part, la loi fixerait les principes d’organisation et de fonctionnement des AAI et des API, les autres règles étant renvoyées au règlement intérieur de ces autorités, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État. Seraient ainsi consacrées au niveau de la loi les garanties d’indépendance de ces autorités, notamment l’autonomie budgétaire et la liberté de recrutement.
Enfin, les modalités du contrôle parlementaire des AAI et des API seraient précisées et complétées pour rendre effectifs les mécanismes de ce contrôle démocratique. Un rapport annuel d’activité serait déposé, chaque année, avant le 1er juin, par chaque AAI ou API dans la perspective de l’organisation d’un débat en séance publique à l’Assemblée nationale ou au Sénat sur l’activité et la gestion de l’une ou plusieurs d’entre elles. Cet exercice n’exclurait pas le contrôle des commissions parlementaires, consacré notamment à travers l’audition régulière de ces AAI et API. De même, la nomination de chaque président d’AAI ou API serait soumise au Parlement à travers l’audition et le vote préalables des commissions permanentes compétentes, selon la procédure du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution. L’information financière des assemblées serait également renforcée avec un document budgétaire annuel (un "jaune") consolidant et analysant les données financières de ces autorités, aujourd’hui dispersées ou lacunaires.
Concluant plusieurs rapports parlementaires sur le sujet, cette initiative législative, volontairement transpartisane, résulte directement des travaux de contrôle du Sénat. Ses auteurs souhaitent poursuivre, dans l’esprit du vote unanime du rapport de la commission d’enquête, un travail consensuel et constructif vers une adoption rapide de ces textes. Ces derniers seraient inscrits à l’ordre du jour du Sénat début 2016.
En savoir plus sur la commission d’enquête et consulter son rapport :
http://www.senat.fr/commission/enquete/autorites_administratives_independantes.html
Maria PIGHINI
presse@senat.fr