La commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, présidée par Mme Catherine Morin Desailly (UDI UC -Seine Maritime), déplore la décision de la Cour de justice de l’Union européenne, enjoignant à la France de porter à 20 % le taux de TVA applicable au livre numérique, au lieu du taux réduit dont il bénéficie depuis le 1er janvier 2012.

A l’initiative du Sénat, le législateur avait alors considéré que l’harmonisation du taux de TVA réduit à l’ensemble des livres, quel que soit leur support de lecture, œuvrait en faveur de la diffusion des œuvres et respectait le principe de neutralité fiscale entre produits de même nature. Tel n’a pas été le sentiment de la Commission européenne, qui a introduit un recours en manquement contre la France dès le mois de juillet 2012, ni celui de la Cour de justice, qui lui a donné aujourd’hui raison en estimant que l’absence de support physique lié au livre numérique en fait un service électronique inéligible au taux réduit de TVA.

Pourtant, la majorité des États membres s’était déclarée favorable à ce parallélisme fiscal. On rappellera en particulier le ralliement de l’Allemagne à la position française lors de la rencontre « Avenir du livre, avenir de l’Europe » du 9 juillet 2013 à Berlin. L’espoir d’une modification de la directive « TVA » du 28 novembre 2006 était alors permis, d’autant que parallèlement à son recours, la Commission européenne avait lancé une consultation sur les taux réduits de TVA.

À rebours de ces signes encourageants et malgré les efforts continus de la France en faveur d’une réforme européenne de la TVA permettant l’application d’un taux réduit à l’ensemble des biens et services culturels, tous supports confondus, la justice européenne a tranché. La commission de la culture du Sénat regrette une décision défavorable au développement et à la diffusion des contenus culturels européens, déjà fort minoritaires, sur Internet. En juillet 2014, dans son rapport « L’Europe au secours de l’Internet : démocratiser la gouvernance de l’Internet en s’appuyant sur une ambition politique et industrielle européenne », Mme Catherine Morin-Desailly appelait pourtant l’Europe à « prendre en main son destin numérique ». Elle y prônait notamment l’installation d’un cadre légal et fiscal protecteur des créateurs et des industries culturelles européennes sur Internet.

Avec cette décision, l’Europe s’éloigne aujourd’hui un peu plus de cet objectif, comme la filière du livre numérique de la perspective d’un équilibre économique. La commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat s’inquiète, par ailleurs, de l’avenir de la presse en ligne, qui devrait prochainement, en toute logique, pâtir d’une décision similaire, alors que le Parlement français avait, à l’unanimité, il y a un an, approuvé l’application d’un taux de TVA identique pour l’ensemble de la presse.

Juliette ELIE
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