Lors de sa séance du jeudi 19 février 2015, le Sénat a achevé l’examen des articles du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Au cours de près de deux semaines de débats en séance publique, le texte adopté par la commission des affaires économiques, présidée par Jean Claude LENOIR (UMP – Orne) et dont le rapporteur est Ladislas PONIATOWSKI (UMP-ratt. – Eure), a été très largement conforté et enrichi de plusieurs dispositions :
En matière d’objectifs de la politique énergétique (titre Ier), le Sénat a validé l’équilibre trouvé par la commission. Ainsi, l’objectif d’une diversification progressive du mix électrique, visant à terme une réduction de la part du nucléaire à 50 %, est maintenu mais sera mis en œuvre de façon pragmatique et raisonnée, à mesure de la fin de vie des installations. De même, le plafonnement de la capacité de production d’électricité d’origine nucléaire a été relevé à 63,85 GW afin que la mise en service de l’EPR de Flamanville, attendue pour 2017, n’oblige pas mécaniquement à fermer d’autres installations pour une puissance équivalente.
Concernant la rénovation des bâtiments (titre II), le Sénat a confirmé le choix de la commission des affaires économiques de donner aux maires la possibilité d’accorder une dérogation à certaines règles d’urbanisme pour permettre la réalisation d’une isolation par l’extérieur. De nouveaux objectifs ont été ajoutés ou renforcés au cours des débats : rénovation d’ici à 2020 des logements locatifs du parc privé dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kWh par mètre carré et par an, et rénovation, à partir de 2030, des bâtiments privés résidentiels à l’occasion d’une mutation selon leur niveau de performance énergétique.
En matière d’énergies renouvelables (titre V), le Sénat a suivi les propositions de la commission et adhéré aux principales dispositions du texte tout en les complétant, qu’il s’agisse du complément de rémunération – en prévoyant une phase d’expérimentation pour les petits et moyens projets et les filières non matures – ou du nouveau cadre de gestion des concessions hydroélectriques – en articulant mieux regroupement par vallée et prolongation pour travaux afin d’accélérer l’engagement de ces travaux.
En matière de sûreté nucléaire (titre VI), les apports de la commission ont là aussi été validés en prévoyant l’information obligatoire de l’acquéreur d’un terrain ayant accueilli une installation nucléaire de base qui aurait fait l’objet d’un déclassement, et en portant de deux à quatre ans le délai laissé à un exploitant pour déposer un dossier de démantèlement pour les installations particulièrement complexes. Lors des débats en séance, l’information de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a été améliorée et le champ des ordonnances a notamment été étendu à la protection des matières nucléaires et des sources de rayonnement ionisant les plus dangereuses.
Concernant la régulation des marchés et des réseaux (chapitre II du titre VII), le Sénat, sur les propositions de la commission et du Gouvernement, a considérablement renforcé le soutien aux industries électro-intensives afin de rétablir leur compétitivité : outre la modulation de la redevance hydraulique pour favoriser leur approvisionnement, ces entreprises exposées à la concurrence internationale bénéficieront de conditions particulières d’approvisionnement, d’une réduction du tarif d’utilisation des réseaux qui pourra atteindre jusqu’à 90 %, d’une compensation accrue au titre de leur adhésion au mécanisme de l’interruptibilité tandis qu’une réflexion sur la prise en compte des coûts indirects du carbone a été engagée.
À l’initiative de la commission, l’effacement de consommation électrique a été favorisé sans léser ni surrémunérer aucun des acteurs concernés : en particulier, le régime de versement aux fournisseurs effacés est différencié suivant les catégories d’effacement et le niveau des économies d’énergie et la prime aux opérateurs d’effacement est remplacée par des appels d’offres qui permettront de piloter la montée en puissance des effacements.
En matière de gouvernance (titre VIII), le Sénat a maintenu l’exclusion des émissions de méthane entérique naturellement produites par les ruminants de la stratégie bas-carbone, introduite par la commission pour tenir compte de leur faible potentiel d’atténuation, et réaffirmé le rôle essentiel des sols comme puits de carbone.
Sur la proposition des commissions des finances et des affaires économiques, le Sénat a posé les bases d’une réforme de la contribution au service public de l’électricité (CSPE) assise sur deux principes : un vote annuel du Parlement en loi de finances et une contribution recentrée sur le soutien aux énergies renouvelables. Les tarifs sociaux et la péréquation tarifaire sont préservés et le Gouvernement présentera une réforme de leur financement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016. De même, le soutien aux énergies renouvelables est assuré puisque le plafond retenu pour l’année 2016 majore de 20 % les prévisions de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) en la matière.
Enfin, en matière de lutte contre la précarité énergétique, le Sénat a suivi la commission pour interdire les frais liés au rejet de paiement pour les bénéficiaires du chèque énergie et rendre effective l’interdiction des rattrapages de consommation sur une longue période. Le débat en séance publique aura aussi permis de recentrer l’interdiction des coupures d’eau sur les consommateurs en situation de précarité.
Dans le prolongement de la démarche constructive initiée par la commission des affaires économiques, le texte issu de ces travaux, à la fois ambitieux et équilibré, marque l’engagement du Sénat pour la transition énergétique.
Le vote solennel sur l’ensemble du texte interviendra le mardi 3 mars 2015.
Ali SI MOHAMED
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