Sciences du vivant et société : la loi bioéthique de demain

L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a organisé le jeudi 29 novembre à l'Assemblée nationale, une audition publique sur « Sciences du vivant et société : la loi bioéthique de demain » afin d'initier le processus d'évaluation de la loi du 6 août 2004 relative à la bioéthique, et d'en préparer  les futures adaptations législatives. Animés par MM. Alain Claeys et Jean-Sébastien Vialatte, Députés, co-rapporteurs de l'Office, les débats ont réuni des professeurs de médecine, des professeurs de sciences du vivant et de droit, des chercheurs, des responsables des ministères concernés, d'instances nationales et internationales d'éthique (Agence de la biomédecine, Comités de bioéthique de l'UNESCO et du Conseil de l'Europe, Groupe européen d'éthique de la Commission européenne).

Dans un contexte mondialisé et fortement médiatisé, suscitant espérance, déception, voire méfiance dans l'opinion publique, les principaux défis scientifiques et sociétaux que le législateur devra prendre en considération soulèvent de nombreuses questions éthiques et juridiques :
- la procréation médicalement assistée  face à la pénurie de donneuses d'ovocytes en France : accès des personnes seules, des homosexuels, gestation post mortem, gestation pour autrui, ainsi que le problème de l'accès aux origines biologiques, et donc de l'anonymat des donneurs de gamètes et d'ovocytes ;
- le recours à des tests génétiques, à des fins autres que thérapeutiques par des compagnies d'assurances, des employeurs ainsi que les risques de leur utilisation à l'insu des personnes, l'accès libre et payant des tests sur Internet ;
- les greffes par des donneurs vivants : la prise en charge des donneurs, leur suivi et leur indemnisation quand ils subissent des préjudices. 
- la levée du moratoire sur la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines,
sujet amplement débattu à la lumière des découvertes récentes sur les potentialités des cellules souches adultes. La rédaction de l'article 25 de la loi de 2004 a été critiquée : la notion des recherches « permettant un progrès thérapeutique majeur » étant inopérante devra être réexaminée, ces recherches relevant en réalité de la recherche fondamentale dont les applications sont incertaines et rarement immédiates, même si les attentes sont grandes.
- la brevetabilité et la vente de produits issus du corps humain 
- l'impact des découvertes récentes sur le fonctionnement du cerveau humain et leurs applications grâce à imagerie à résonance magnétique et aux implants cérébraux susceptibles de modifier les comportements, de porter atteinte à l'intimité de la vie privée et aux libertés individuelles.

Des doutes quant aux possibilités thérapeutiques offertes à court terme par la génétique ainsi que par la recherche sur les cellules souches ont été émis.

Cette audition a fait apparaître l'exigence d'une plus grande cohérence de la législation nationale sur la bioéthique et d'une meilleure articulation avec les engagements internationaux de la France qui n'a toujours pas ratifié la Convention d'Oviedo. La loi ne doit pas devenir un mode d'emploi de bonnes pratiques dont la validité pourrait être examinée par l'Agence de la biomédecine, mais a contrario elle doit être le reflet des principes et valeurs fondatrices de notre droit : indisponibilité du corps humain, non commercialisation, principe de gratuité du don fondé sur la réciprocité et la solidarité. L'importance du rôle d'instances de régulation comme l'Agence de la biomédecine ou le Comité national consultatif d'éthique a d'ailleurs été soulignée.

Des interrogations sur la notion de consentement éclairé, sur la confrontation entre les droits de l'enfant et la revendication d'un droit à l'enfant, ainsi que sur l'opportunité d'une révision périodique de la loi de bioéthique, sont apparues.

L'exigence d'une information précise du public, et d'un débat très en amont et sans a priori sur la révision de la loi de bioéthique a été maintes fois rappelée. L'année 2008 qui verra la France prendre la présidence de l'Union européenne ne doit en aucun cas être « une année blanche » pour la bioéthique, ce que la tenue annoncée en 2009 des états généraux de la bioéthique a fait craindre aux intervenants. Au contraire, l'occasion doit être saisie de faire prévaloir les principes et valeurs qui fondent l'originalité de notre droit de la bioéthique dans un domaine particulièrement sensible dans l'opinion publique. La France se doit d'utiliser la présidence de l'Union européenne pour promouvoir les valeurs qui sont les siennes.  

Pour tout renseignement, contacter :
Mme Elyette LEVY-HEISBOURG à l'Assemblée nationale : 01 40 63 88 18/15 elevyheisbourg@assemblee-nationale.fr