LES PERSPECTIVES D'ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE ET DES FINANCES PUBLIQUES À L'HORIZON 2010 "RETROUVER LES BIENFAITS DE LA CROISSANCE"
Le rapport de M. Joël BOURDIN (UMP, Eure), Président de la Délégation du Sénat pour la Planification, présente comme chaque année au moment de la discussion budgétaire les perspectives macroéconomiques et des finances publiques à moyen terme (2006-2010).
Ce rapport s'appuie sur les travaux de modélisation macroéconomique réalisés avec la collaboration de l'Observatoire Français de Conjonctures Économiques (OFCE).
Il permet notamment d'illustrer les relations entre croissance et finances publiques et d'analyser la cohérence d'ensemble de la programmation pluriannuelle des finances publiques présentée par le Gouvernement à la Commission européenne dans le cadre du Pacte de stabilité.
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Le premier chapitre consacré aux perspectives de court terme, illustre principalement les hypothèques d'environnement international qui pèse sur les perspectives de la croissance.
- La prévision de croissance du Gouvernement est réaliste moyennant quelques incertitudes sur le niveau du déficit public en 2006 et sous la réserve des hypothèses d'environnement international.
- Ces dernières années, la dépréciation du dollar et l'envolée du prix du pétrole se sont conjuguées pour freiner la croissance. En 2005, ces deux facteurs sont responsables d'un déficit de croissance de 0,8 point de PIB. Il faut y ajouter les effets de l'atonie de l'activité dans la zone euro.
- En Italie, la croissance est presque nulle et le rapport estime que l'abandon de l'euro par l'Italie aggraverait considérablement la situation de ce pays. En Allemagne, la croissance est très faible. Si l'Allemagne n'est pas devenue une « économie de bazar », la politique de désinflation compétitive qu'elle conduit s'exerce au détriment de sa population et de ses partenaires. Elle ferait perdre 0,3 point de PIB de croissance à la France en 2005.
Les pays européens doivent impérativement retrouver le chemin de politiques plus coopératives visant à retrouver un rythme élevé de croissance.
- Parmi les risques qui entourent la prévision du Gouvernement, le rapport met l'accent sur les perspectives d'inflation liées à l'augmentation du prix du pétrole.
Les variantes réalisées par l'OFCE montrent qu'un choc inflationniste résultant de la mise en œuvre d'une boucle prix-salaire aurait dans tous les cas un impact défavorable sur la croissance. Celui-ci serait aggravé par une réaction de politique monétaire.
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Le deuxième chapitre explore les voies d'une « croissance autonome » de l'économie française à l'horizon 2010 dans le cadre des orientations de la politique budgétaire retracées dans le programme de stabilité 2007-2009 du Gouvernement.
Celles-ci visent une réduction du déficit structurel à hauteur de 0,4 point de PIB chaque année à partir de 2007 et une croissance de 2,25 % par an. Quatre conclusions principales s'en dégagent :
- Un scénario de croissance de 2,25 % par an, légèrement supérieure à la croissance tendancielle de l'économie française apparaît souhaitable et réaliste si l'on tient compte du retard de croissance (« output gap ») accumulé par la France (il est de l'ordre de 2,5 points de PIB). Il permettrait de combler une partie du déficit de croissance.
- Il suppose néanmoins, même si cette croissance ne devait pas être tirée par l'extérieur, un environnement international favorable et une croissance mondiale également supérieure à sa tendance.
Dans cette perspective, il apparaît notamment qu'un resserrement de la politique monétaire européenne serait dommageable pour les perspectives de reprise et totalement injustifiée au vu de la faiblesse de l'inflation sous-jacente et de la position de l'économie de la zone euro dans son cycle.
- La modération salariale, c'est-à-dire une situation dans laquelle le salaire par tête n'augmente pas plus vite que la productivité, est une autre condition forte du succès de ce scénario.
En effet, compte tenu de la croissance de 2,25 % par an, de l'évolution de l'emploi, du ralentissement de l'augmentation de la population active, le taux de chômage baisserait de 0,6 point par an (100.000 chômeurs de moins chaque année) pour atteindre 7,2 % en 2010. Pour être compatible avec la stabilité de l'inflation, cette évolution suppose modération salariale et renforcement des dispositifs de formation initiale et continue.
- Compte tenu de cette dernière condition et de l'impact mécanique sur l'activité de la réduction du déficit structurel[1], il faut des comportements de dépenses des agents privés particulièrement dynamiques pour parvenir à 2,25 % de croissance par an.
Cela suppose notamment en une forte augmentation de la consommation des ménages avec une baisse du taux d'épargne de 2,4 points sur la période, ou un investissement des entreprises exceptionnellement bien orienté. Une contribution positive du commerce extérieur ne ferait que détendre légèrement ces conditions.
Il faut donc rechercher les moyens de rendre plus dynamique la consommation des ménages. La perspective de réduction du chômage pourrait y contribuer. Des réformes structurelles en matière d'accès des ménages au crédit pourraient augmenter la consommation des ménages en assurant une meilleure efficacité de la politique monétaire. Les réductions des prélèvements obligatoires qui devraient intervenir après 2007 devraient s'attacher à profiter davantage aux ménages dont la propension à consommer est la plus forte.
Enfin, le rapport insiste sur l'importance d'un bon calendrier des politiques économiques. La priorité devrait être donnée à la résorption du déficit de croissance accumulé ce qui implique de retrouver un rythme de croissance élevée. L'augmentation du rythme de croissance potentielle est un objectif à terme moins immédiat.
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Le troisième chapitre est consacré à l'évolution des finances publiques :
- Les résultats des projections sont en ligne avec le programme de stabilité du Gouvernement : le déficit public serait ramené à 1,7 % du PIB en 2010, sous l'hypothèse d'une croissance de 2,25 % par an.
- Ces résultats sont subordonnés à des hypothèses techniques qui constituent parfois des facteurs d'incertitude. Ainsi en va-t-il, par exemple, pour le coût de la dette publique et pour les dépenses de santé. Une progression de ces dernières de 2,25 % l'an, parallèle à la croissance obligerait à augmenter les prélèvements obligatoires de 0,5 point sur la période.
- Les engagements en matière de finances publiques sont également dépendants d'un reformatage du champ de l'intervention publique. Le programme de stabilité inclut un engagement de replacer en quatre ans le poids des dépenses publiques dans le PIB au niveau atteint il y a 14 ans. Il y faudra plus que des gains de productivité. Il est par conséquent urgent d'institutionnaliser l'évaluation des politiques publiques dans notre pays comme la Délégation du Sénat pour la planification l'a proposé dans un rapport récent[2].
- Enfin, le rapport discute une série d'orientations de la politique des finances publiques. Dans une situation de déficit de croissance, la réduction à marche forcée du déficit structurel n'est pas une priorité économique. Mais la France est liée par un Pacte de stabilité et de croissance européen dont il faudrait approfondir la réforme. Un autre dosage entre dépenses publiques et prélèvements obligatoires faciliterait l'objectif de réduction du déficit public.
Contact presse : Stéphanie Garnier 01 42 34 25 12 ou 25 13 s.garnier@senat.fr
[1] C'est-à-dire indépendamment de tout effet multiplicateur de type keynésien : une réduction du déficit, structurel à hauteur de 0,4 point de PIB se traduit directement par une diminution équivalente de la demande publique et une impulsion budgétaire négative équivalente.
[2] « Évaluation des politiques publiques », juin 2004, de MM. Joël Bourdin, Pierre André et Jean-Pierre Plancade. Rapport n° 392 de la Délégation de la planification.