LA DÉLÉGATION DU SÉNAT POUR LA PLANIFICATION S'INQUIÈTE DES ORIENTATIONS DE LA POLITIQUE MONÉTAIRE DE LA BANQUE CENTRALE EUROPÉENNE
Au cours de sa réunion du mercredi 23 novembre 2005, la délégation du Sénat pour la planification, présidée par M. Joël BOURDIN (UMP - Eure), a procédé à l'examen du rapport établi par M. Joël BOURDIN (UMP - Eure) sur les perspectives de l'économie française et des finances publiques à l'horizon 2010[1].
Élaboré à partir de projections macroéconomiques et des finances publiques réalisées avec le support technique de l'OFCE, il est consacré, comme chaque année, à présenter les perspectives de moyen terme de l'économie française et de nos finances publiques et à préciser les termes des grandes options de politique économique.
Au cours de la discussion du rapport, M. Joël Bourdin, ayant souligné les enjeux pour la croissance d'une politique monétaire accommodante, a exprimé la vive inquiétude que lui inspire les récentes déclarations des responsables monétaires européens d'où ressort la double perspective d'un resserrement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE), et d'une politique de « discrimination négative » envers les dettes publiques de certains États de la zone euro.
S'agissant de l'augmentation des taux de la BCE, M. Joël Bourdin a souligné que malgré les tensions sur le prix des matières premières, du pétrole notamment, le risque le plus sérieux encouru dans la zone euro était celui d'une déflation, et non d'une résurgence de l'inflation. Il a observé que les effets de « second tour » liés à une augmentation du prix du pétrole avaient peu de chances de s'enclencher dans un contexte de désindexation des salaires marqué par une intense concurrence internationale et par une position cyclique de l'économie de la zone euro très inférieure à son potentiel.
Estimant que la hausse des taux de la BCE assombrirait les perspectives de reprise en Europe, si elle était efficace, il a rappelé que les marchés avaient désavoué la FED américaine dans les premiers « pas » du resserrement graduel de sa politique monétaire puisque les taux longs avaient réagi au relèvement des taux de la FED par une baisse prolongée. Il a appelé la BCE non seulement à agir dans un esprit de responsabilité, mais encore avec le souci de sa crédibilité.
S'agissant des intentions prêtées à la BCE d'exercer une discrimination négative à l'encontre des États dont la gestion financière publique ne lui semblerait pas « orthodoxe », M. Joël Bourdin a indiqué que, techniquement, la BCE entendait rétablir les primes de risques sur les dettes publiques nationales disparues depuis l'adoption de l'euro.
Il a estimé qu'il s'agissait d'une réaction de la BCE aux soi-disant assouplissements du Pacte de stabilité et de croissance décidés en cours d'année. Remarquant que le Trésor Public américain trouvait à financer une part importante de son déficit auprès des Banques Centrales dans le Monde, il a observé que les États de la zone euro ne bénéficiaient pas de la même bienveillance de leur part. S'il est normal que la BCE ne « monétise » pas les dettes publiques, comme le Traité le lui interdit, nulle disposition de ce même Traité ne l'autorise à se substituer aux États dans la surveillance et la sanction des positions budgétaires des États.
La discrimination envisagée par la BCE, que les marchés eux-mêmes ne jugent pas fondée, est donc condamnable par principe. Elle irait au-delà du mandat de la BCE à qui il n'appartient pas de sanctionner les États, et, à travers eux les contribuables, ce qui ne manquerait pas d'advenir en cas de hausse du coût des dettes publiques.
Contact presse : Stéphanie Garnier 01 42 34 25 12 ou 25 13 s.garnier@senat.fr
[1] Ce rapport d'information qui s'intitule « Retrouver les bénéfices de la croissance » sera prochainement en ligne sur le site du Sénat et fera l'objet d'une présentation à la presse le jeudi 1er décembre 2005.