COLLOQUE "L'ÉLU LOCAL AU COEUR DE LA DÉCENTRALISATION"

A l'initiative de l'Observatoire de la décentralisation, présidé par M. Jean PUECH (UMP - Aveyron), s'est tenu au Sénat un colloque intitulé « l'élu local au cœur de la décentralisation », le jeudi 3 novembre 2005.

Le Président du Sénat, Christian PONCELET, a affirmé que l'élu local était « le dépositaire véritable d'une décentralisation réussie » et qu'il convenait de reconnaître les mérites de « ceux qui donnent leur cœur, leur générosité, leur intelligence, à la vie publique. Il a formé l'espoir que l'Observatoire de la décentralisation, où ne siège actuellement aucun sénateur de gauche, « soit bientôt au complet ».  

Le Président Jean PUECH a rappelé que la décentralisation était, selon les mots de l'initiateur de l'acte II Jean-Pierre RAFFARIN (UMP - Vienne), la « mère des réformes ». Mais il en a dénoncé les obstacles, liés selon lui à un défaut de respect de « l'esprit de la loi », les administrations de l'Etat opposant trop de résistances au mouvement. Il a dénoncé un Etat qui, de partenaire, s'est mué en contrôleur, d'abord de la légalité, puis de l'opportunité.

La première table ronde portait sur l'élu local à l'épreuve des résistances à la décentralisation. M. Louis de BROISSIA (UMP - Côte d'Or) y a demandé une « pause » de trois ans dans la décentralisation pour que les collectivités puissent digérer les actuels transferts de compétences. Cette pause devrait s'accompagner d'une profonde réforme de l'Etat et d'un « pacte de gestion ». M. Jean-Luc BŒUF, directeur général des services de la région Franche-Comté a rappelé que la décentralisation était un mouvement ancien, remontant à la Révolution, mais qu'il se heurtait à un Etat aux structures inchangées depuis deux siècles. Mme Mireille CELLIER, maire de Beaucaire, a déploré que les maires, bien souvent placés en apparence au centre des politiques publiques, soient en réalité mis sous tutelle par les contrats multiples passés avec l'Etat. Elle a parlé de « décentralisation avortée ». Plusieurs maires assistant au colloque ont fait part de leur désarroi face à une exposition et à une complexité croissante de leur mandat, transformant celui-ci en mission à plein temps, et « sacrificielle ».

Le thème de la deuxième table ronde portait sur le rôle économique de l'élu local, moteur de la décentralisation. Mme Jacqueline GOURAULT (UC - Loir et Cher) a constaté que les territoires souffraient bien souvent d'un cloisonnement excessif non seulement entre collectivités territoriales et services de l'Etat, mais aussi avec le monde des entreprises et leurs représentants consulaires. Les différents intervenants ont considéré que l'élu pouvait être le lien entre les acteurs du territoire. Mais M. Jean-Pierre GUILLON, président d'Entreprises et Cité, a considéré que les différents niveaux de collectivités manquaient bien souvent d'une stratégie commune. Mme Jacqueline GOURAULT a relevé qu'il y avait une certaine logique à confier le développement économique aux intercommunalités à taxe professionnelle unique, celle-ci étant le principal impôt local économique. Elle a récusé que l'intercommunalité forme un niveau à part entière de collectivités territoriales, les communes et leurs groupements devant former un tout unitaire.

La troisième table ronde était consacrée à l'élu local, animateur de la démocratie locale. M. Dominique REYNIÉ, directeur de l'Observatoire international du Politique y a exposé que si les Français n'identifiaient pas bien les différents niveaux de compétences, ils avaient bien compris que la décentralisation avait donné davantage de pouvoirs aux élus et qu'ils se tournaient dès lors volontiers vers eux pour résoudre leurs problèmes. La question de la charge de travail des élus face à la demande citoyenne s'est alors posée. M. Philippe LAUVAUX, professeur de droit à l'Université Paris II a préconisé que soit mis fin au cumul des mandats. Mme Valérie LÉTARD (UC - Nord) a estimé qu'il fallait éviter un cumul excessif, mais qu'il était nécessaire que les élus nationaux conservent des responsabilités de terrain, pour éviter que ne se creuse « un fossé entre la réalité quotidienne et ce qui sort de l'hémicycle ».

En concluant la journée, M. Jean PUECH a demandé que soit mis un « coup d'arrêt » à l'inflation des normes de toutes sortes concernant les collectivités locales. Il a compté que, depuis 1982, 92 lois avaient porté sur la décentralisation. Il a estimé que la question du cumul des mandats devait être sérieusement posée, compte tenu de la charge que représente aujourd'hui une fonction exécutive locale. Il a appelé de ses vœux une profonde réforme de l'Etat, pour que la décentralisation trouve la « voie d'une modernité et d'un humanisme retrouvés dans les affaires publiques ».

Intervenant en clôture du colloque, M. Brice HORTEFEUX, ministre délégué aux collectivités territoriales a salué le travail de l'Observatoire de la décentralisation et son triple rôle de « surveillance, d'évaluation et de proposition ». Il a rappelé qu'il allait bientôt défendre un projet de loi sur la fonction publique territoriale destiné à rendre celle-ci plus attractive, alors qu'elle s'apprête à faire face à des départs en retraite massifs. A propos de l'intercommunalité, il a considéré qu'il ne fallait pas se dissimuler « le vent mauvais » soufflant actuellement, mais qu'au prix de quelques corrections (sur les périmètres, le contenu des statuts, et  les coûts), l'intercommunalité serait « la structuration de la France de demain ». Il a estimé que s'il devait se produire un acte III de la décentralisation, ce devrait être celui de « la lisibilité et de la simplification ».

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