M. Dominique de Villepin présente aux sénateurs le budget 2004 de son ministère et évoque les principaux sujets de l'actualité internationale
Réunie le mardi 7 octobre 2003 sous la présidence de M. André Dulait, président, la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat a procédé à l'audition de M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères.
M. Dominique de Villepin a tout d'abord présenté le projet de budget de son ministère pour 2004.
Il a en premier lieu indiqué que ce projet de budget participait pleinement au nécessaire effort de réduction de la dépense publique. Après un exercice 2003 marqué par des gels et annulations de l'ordre de 247 millions d'euros, soit près de 15 % des crédits hors rémunérations et engagements internationaux, le projet de budget pour 2004, doté de 2,4 milliards d'euros, marque une progression de 2,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2003 mais traduit en réalité, hors crédits dédiés à l'aide publique au développement, une baisse de 1,26 %. Cette diminution entraînera les mesures suivantes :
- 116 emplois seront supprimés, 46 % des départs à la retraite n'étant pas remplacés ;
- le régime des indemnités de résidence sera revu, ce qui permettra une économie de 26 millions d'euros ;
- les crédits de fonctionnement de l'administration centrale et du réseau à l'étranger diminueront de 2 % ;
- les crédits immobiliers seront réduits de 10,3 % en crédits de paiement et de 23,5 % en autorisations de programmes.
En revanche, la réduction des crédits n'affectera pas les contributions volontaires aux organismes internationaux (hors francophonie), les subventions aux opérateurs de l'audiovisuel, la coopération militaire et de défense, l'aide alimentaire et l'enseignement français à l'étranger.
Le ministre a ensuite estimé que le projet de budget pour 2004 comportait plusieurs innovations préfigurant la réforme de l'action extérieure de l'Etat, en cohérence avec le plan d'action stratégique « affaires étrangères 2007 » en cours de validation. Ce plan vise à mieux affirmer le rôle interministériel du ministère des affaires étrangères, notamment par l'instauration, dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances, d'une mission interministérielle « action extérieure de l'Etat » et la création d'un conseil d'orientation stratégique ouvert à des personnalités extérieures. Il préconise une meilleure responsabilisation des agents par un travail en réseau des postes et la création d'une direction collégiale, composée du secrétaire général et de trois ou quatre secrétaires généraux adjoints, qui sera responsable des programmes et exercera les arbitrages internes. Le plan d'action propose enfin d'accentuer la déconcentration de la gestion des crédits, de développer la culture de l'évaluation, de renforcer la formation et la transparence des nominations, et d'améliorer la qualité du service rendu aux Français de l'étranger, notamment en étendant les attributions des élus pour certaines missions consulaires telles que l'aide sociale, l'accès à l'enseignement, la formation professionnelle et l'emploi.
Le ministre des affaires étrangères a annoncé que les réseaux diplomatique, consulaire et culturel seront réaménagés d'ici 2007 dans le but de dégager les marges de financement de la réforme. Il s'agira de renforcer la polyvalence des sites et des hommes, de transférer certaines attributions à des postes voisins mieux dotés, d'améliorer le positionnement auprès de structures locales comme les Länder en Allemagne ou les Autonomies en Espagne, de coopérer davantage avec nos partenaires européens. Il faudra également conduire une véritable analyse coût-efficacité des paramètres de notre présence en matière d'immobilier ou de personnel. D'ores et déjà, plusieurs actions sont engagées en vue de la modernisation de la gestion du ministère. Le budget pour 2004 innove en créant un mécanisme d'intéressement à la productivité, avec restitution partielle des gains obtenus dans le traitement des dossiers consulaires. De même, l'économie réalisée sur les indemnités de résidence permettra la revalorisation des rémunérations des recrutés locaux et l'abondement des primes de l'administration centrale. Une expérimentation de la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances sera conduite dès 2004 dans cinq pays (Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, Italie et Chine), ce qui permettra aux ambassadeurs concernés d'appliquer la fongibilité des crédits du titre III.
M. Dominique de Villepin a considéré que le budget de son département ministériel pour 2004 permettait de mettre en œuvre les grandes priorités du Président de la République et du Gouvernement.
L'objectif de progression de notre aide publique au développement, assigné par le Président de la République, sera tenu. Elle atteindra 0,42 % du PIB en 2004, l'objectif étant de parvenir à 0,5 en 2007. Les crédits correspondant progresseront de près de 10 % en 2004. Cette aide se décomposera en 14 % du total pour la contribution au Fonds européen de développement, 25 % pour les crédits du Fonds de solidarité prioritaire, 15,3 % pour les crédits de l'Agence française de développement et 29 % pour les concours financiers qui comprennent notamment les contrats désendettement-développement.
Les actions multilatérales de la francophonie bénéficieront d'une augmentation de 10 millions d'euros.
Les moyens consacrés aux services rendus aux expatriés seront renforcés, en particulier en ce qui concerne les actions de prévention au service des communautés françaises.
Enfin, dans le cadre de la réforme du droit d'asile, les crédits destinés à l'OFPRA et à la Commission de recours des réfugiés augmenteront de près de 10 millions d'euros.
A la suite de l'exposé du ministre, Mme Monique Cerisier-ben-Guiga s'est félicitée des initiatives innovantes prises par certains de nos postes à l'étranger. Elle a notamment cité l'utilisation d'internet par nos services en Côte d'Ivoire. Elle a par ailleurs souhaité que le Parlement, et notamment la Commission des affaires étrangères, ait communication du plan d'action stratégique « affaires étrangères 2007 », et des différents scénarios de mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances. Soulignant que les crédits d'intervention étaient les premiers touchés en période de restriction budgétaire, elle s'est inquiétée de l'avenir de notre aide publique au développement. Elle a notamment estimé que les gels ou annulations en cours d'année entravaient considérablement la mise en place, sur le terrain, des projets d'aide au développement.
M. Guy Penne a interrogé le ministre des affaires étrangères sur le projet de chaîne francophone internationale d'information et plus précisément sur les financements disponibles pour sa mise en place. Il s'est par ailleurs déclaré très attaché à la tutelle du ministère des affaires étrangères sur l'OFPRA et s'est inquiété de certains signes traduisant, à ses yeux, un rôle croissant du ministère de l'intérieur.
Soulignant que la force du ministère des affaires étrangères et de son action reposait sur la qualité et le nombre des hommes qu'il emploie à l'étranger, Mme Danièle Bidard-Reydet a vivement déploré que près d'un départ à la retraite sur deux ne soit pas remplacé. Elle a estimé que la réduction du nombre de postes prévu pour 2004 n'était pas compatible avec la force que le ministre entendait donner à la politique étrangère de la France.
En réponse à ces interventions, M. Dominique de Villepin a apporté les précisions suivantes :
- l'efficacité des politiques publiques ne se mesure pas exclusivement à l'aune des dotations budgétaires ; les contraintes financières ont le mérite d'activer une réflexion en tout état de cause indispensable sur l'organisation de l'Etat, les missions de l'administration et l'optimisation de ses moyens ;
- le plan d'action stratégique du ministère fait actuellement l'objet d'une consultation interne qui n'est pas achevée ; ce projet sera néanmoins transmis dans les meilleurs délais à la commission pour son information ;
- en l'état actuel des réflexions, la nouvelle nomenclature budgétaire du ministère des affaires étrangères pourrait s'organiser autour de trois programmes représentant chacun un volume de crédit de l'ordre de 1,3 milliard d'euros : l'action diplomatique au service du rayonnement et de l'influence de la France, la coopération et l'action culturelle, le réseau des services publics à l'étranger ;
- l'effort d'aide publique au développement poursuit son augmentation régulière en vue d'atteindre l'objectif de 0,5 % du PIB en 2007 ; il importe dans cette perspective de préserver, sur le terrain, les moyens capables de mettre en œuvre cette action et d'en garantir l'efficacité ;
- le premier rapport remis par M. Bernard Brochand sur la chaîne internationale d'information a défini les principales caractéristiques de cette dernière ; il s'agira d'une chaîne indépendante, issue d'un partenariat public-privé entre TF1 et France télévision, qui diffusera des informations en français, en arabe et en anglais ; la mission de M. Brochand a été prolongée de trois mois en vue d'élaborer un rapport complémentaire qui définira le cahier des charges de la future chaîne, évaluera l'impact de sa création sur notre dispositif actuel en matière d'audiovisuel extérieur, étudiera les relations entre la chaîne et l'Etat ainsi que la problématique de son financement ; le montant de 70 millions d'euros évoqué dans le rapport ne couvre pas la totalité des besoins pour un développement complet de la chaîne et par ailleurs, le ministère des affaires étrangères ne dispose évidemment pas à lui seul des moyens nécessaires ;
- la réforme du droit d'asile ne remet absolument pas en cause le principe de la tutelle du ministère des affaires étrangères sur l'OFPRA ; les responsabilités du quai d'Orsay vont au contraire s'élargir puisqu'elles couvriront désormais l'asile territorial qui relève actuellement du ministère de l'intérieur ;
- le nombre d'emplois budgétaires du ministère des affaires étrangères passera de 9.409 en 2003 à 9.293 en 2004, soit une réduction de 116 emplois représentant 1,23 % des postes ; l'objectif du ministère est d'absorber cette diminution en limitant les périodes de latence parfois importantes entre deux affectations.
M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères, a ensuite exposé les derniers développements de la situation en Iraq. Il a rappelé les termes du projet de résolution présenté au Conseil de sécurité par les Etats-Unis le 3 septembre dernier. Ce texte vise, pour l'essentiel, à recueillir de nouvelles contributions à l'effort d'occupation tant sur le plan militaire que sur le plan financier.
Il a fait état des préoccupations américaines pour obtenir un partage du fardeau, qui serait de nature à faciliter le débat de politique intérieure. Le vote au Conseil n'est cependant pas intervenu, même si une majorité pour le projet américain était envisageable.
Le ministre a ensuite exposé la position française qui vise à redonner aux Irakiens une perspective politique en prévoyant une restauration de leur souveraineté dans un délai de deux à trois mois suivi, durant six à neuf mois, d'un transfert graduel des responsabilités, ce processus étant engagé sous l'égide des Nations unies.
Cette proposition a recueilli le soutien de nombreux membres du Conseil de sécurité. Les discussions se sont poursuivies au cours de la semaine ministérielle de l'Assemblée générale des Nations unies. A la tribune, le président américain n'a pas laissé présager un changement d'approche. De son côté, la France a clairement indiqué qu'un projet qui permettrait un retour rapide à la souveraineté irakienne recueillerait un vote favorable de la France et pourrait être accompagné d'une contribution française à la formation des forces de sécurité. C'est l'utilité même d'une nouvelle résolution qui est en cause pour permettre une amélioration réelle de la situation sur le terrain. Le ministre a indiqué que la version révisée du texte américain présentée le 2 octobre dernier contenait peu de changements, notamment sur le rôle des Nations unies. Le secrétaire général des Nations unies, qui a d'ailleurs très fortement réduit le dispositif onusien sur place, a fait part de sa déception, indiquant que les Nations unies ne pourraient pas remplir la mission que le projet américain prévoyait de leur confier compte tenu de l'absence de changement du cadre juridique en Irak. Les discussions se poursuivent, l'accueil réservé au nouveau projet n'ayant pas été favorable. Les Américains, pour leur part, s'en tiennent à leur texte, comptant sur l'évolution des positions. La France se situe sur une ligne qui a reçu le soutien de plusieurs autres membres du Conseil de sécurité, ce qui a d'ores et déjà permis quelques avancées sur la question du calendrier de transition. Cette position est également perçue de façon positive par le Conseil de gouvernement irakien qui la voit comme un facteur d'accélération du processus politique.
M. Dominique de Villepin a ensuite évoqué la situation au Proche-Orient. Il a dépeint une situation extrêmement dégradée, dans un contexte où des opérations de l'armée israélienne, cette fois également en territoire syrien, ont répondu à un attentat suicide, perpétré par une jeune Palestinienne à Haïfa. Des options un temps envisagées, comme l'expulsion de Yasser Arafat ou une réoccupation totale de Gaza, ont été écartées mais sont susceptibles d'être à nouveau évoquées en cas de nouvel attentat. La France a condamné tant l'action terroriste de Haïfa que la violation, par l'aviation israélienne, de la souveraineté syrienne. Elle a mis en garde les parties contre les risques d'escalade mais la situation reste tendue. Au Conseil de sécurité, la France souhaite qu'un texte équilibré puisse être adopté. Dans ce contexte, le processus de paix est plus que jamais enlisé. Le préalable sécuritaire reste entier et, dans le même temps, le gouvernement israélien poursuit sa politique de fait accompli dans les territoires palestiniens, notamment par l'assassinat d'activistes, la poursuite de la colonisation et la construction du mur de séparation. Sur le terrain, l'instauration d'un Etat palestinien viable dans les frontières de 1967 devient concrètement de plus en plus difficile. L'autorité palestinienne peine à éviter la marginalisation malgré l'annonce de la formation d'un gouvernement d'urgence resserré. Pour la levée des objections israéliennes, les titulaires des portefeuilles de l'intérieur et de la sécurité seront déterminants. Le 5 octobre dernier, l'état d'urgence a été déclaré dans les territoires palestiniens.
Face à cette situation, il convient de reprendre l'initiative. La communauté internationale doit se montrer plus active.
M. Dominique de Villepin a précisé les termes de la position française. L'attachement à la feuille de route reste une référence. Il convient d'accélérer son application en organisant la conférence internationale qu'elle prévoit et qui doit marquer le refus collectif d'une spirale de violence. Il faut également promouvoir l'idée d'une présence internationale dans la région qui permettrait le retrait israélien des territoires occupés tout en assurant aux Israéliens une sécurité légitime. Elle permettrait également la reconstitution d'une Autorité palestinienne dont la faiblesse profite aujourd'hui en premier lieu aux organisations radicales. Le ministre a constaté une évolution des esprits sur ce dossier et a affirmé sa conviction que ces propositions apparaîtraient à terme comme une solution raisonnable pour mettre fin à la souffrance des deux peuples.
Un débat a suivi l'exposé du ministre.
Mme Danièle Bidard-Reydet a évoqué l'escalade dramatique que constitue la poursuite de la construction du mur qui se fait sur des terres cultivables, met à l'écart des réserves d'eau et coupe des villages entiers. Tout en condamnant les attentats, elle s'est déclarée choquée par l'appel à l'élimination physique de Yasser Arafat. Elle a affirmé sa conviction que la réponse sécuritaire aux attentats ne contribuait pas à une diminution de la violence. Evoquant une déclaration de Colin Powell sur le gel éventuel des financements en direction d'Israël, elle s'est interrogée sur la mise en œuvre d'un tel scénario au niveau européen. Elle a enfin souhaité la mise en place d'une force d'interposition.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga s'est interrogée sur les moyens d'action de la France face à la construction du mur de séparation ainsi que sur les marges de manœuvre envisageables dans le cas d'un assassinat du président Arafat. Elle a évoqué le procès de Marwan Barghouti et les conséquences d'une lourde condamnation dont il pourrait être l'objet.
Mme Hélène Luc a exprimé son inquiétude à l'approche d'une période électorale aux Etats-Unis qui contribuerait à paralyser toute évolution dans la région. Elle a souhaité une initiative française pour la tenue d'une conférence internationale, dans le cadre de l'ONU, qui pourrait déboucher sur la mise en place d'une force d'interposition indispensable pour mettre fin à un engrenage de violence.
En réponse aux questions des commissaires, M. Dominique de Villepin a apporté les précisions suivantes :
- s'agissant du mur de séparation, on constate une unanimité internationale pour le contester. La politique de sécurité, si elle ne s'accompagne pas d'une solution politique qui puisse apporter un espoir aux peuples, est loin de constituer une réponse suffisante. Cette évidence est désormais largement partagée mais le Quartet se trouve privé de sa capacité d'action en l'absence d'initiative de la part des Etats-Unis. La France a plaidé pour une mise en place du Comité de supervision de la feuille de route. Face aux positions très dures des protagonistes, il faut continuer à avancer des idées et les faire progresser, s'agissant notamment de la tenue d'une conférence internationale. La situation au Proche-Orient se caractérise par une complexité croissante et des imbrications nombreuses avec un risque de jonction des différents conflits. A la faveur de la situation irakienne, des groupes terroristes pourraient trouver un terrain propice à leur action. Il ne faut pas céder à une nouvelle logique des blocs qui opposerait l'Orient et l'Occident mais montrer que certains Etats occidentaux croient à la possibilité d'autres types de solutions. Certaines diplomaties commencent ainsi à reconsidérer les situations sous un angle plus européen. A posteriori, la position française, comme force de proposition et d'exemple, se trouve validée. Ainsi, l'intervention en Ituri a montré la possibilité de la mise en œuvre de politiques de prévention. S'agissant du procès de Marwan Barghouti, les marges de manœuvre pour l'intervention dans un processus judiciaire sont très limitées.
Le ministre des affaires étrangères, a ensuite fait un point sur la situation en Côte d'Ivoire. Il a indiqué qu'après des avancées significatives, le processus de réconciliation marquait actuellement le pas. Les ministres des « forces nouvelles » ont suspendu leur participation au Conseil des ministres tout en restant à Abidjan, à l'exception de Guillaume Soro, retiré à Bouaké.
Le Président Gbagbo, sans chercher à envenimer la situation, attend pour faire les gestes qui pourraient la débloquer. Une table ronde réunissant, sous sa présidence, les différents protagonistes est toutefois annoncée pour le 8 octobre, qui pourrait permettre des avancées. Le processus défini par les accords de Marcoussis reste la seule voie pour éviter la guerre civile et conduire aux échéances politiques prévues, qui devront être respectées : la préparation des élections, la mise en œuvre de la loi foncière, la restructuration des forces armées et la mise en place de programmes de réinsertion, parallèlement au processus de désarmement et de démobilisation ainsi que le retour de l'administration et des services publics sur l'ensemble du territoire. Aujourd'hui, les conditions de mise en oeuvre du programme Marcoussis ne sont pas remplies pour un déblocage de crédits internationaux à l'appui de la reconstruction. Des messages en ce sens ont été adressés aux parties ivoiriennes alors que le dispositif militaire français, avec les forces de la CEDEAO, est désormais prêt à appuyer le programme de désarmement. Les différents programmes de coopération civile sont également prêts. Le processus mis en place impose une sortie de crise rapide, qui implique l'engagement de l'ensemble des acteurs ivoiriens afin d'éviter l'enlisement. La Côte d'Ivoire, qui fut longtemps un exemple, doit relever ce défi.
Le ministre a ensuite répondu aux questions des commissaires.
A M. Guy Penne, qui l'interrogeait sur les possibilités d'influer sur les résultats de la table ronde, le ministre a indiqué que les messages relatifs à la position française avaient été tout récemment rappelés par le conseiller aux affaires africaines du Président de la République. Les autorités ivoiriennes, à l'occasion de la table ronde, doivent passer un cap pour faire évoluer la situation.
A M. André Dulait, président, qui évoquait la situation des Français sur place, le ministre a confirmé que la situation restait instable.
Les questions européennes ainsi que les négociations commerciales multilatérales ont ensuite été évoquées.
M. Robert Del Picchia a rappelé que le Sénat se prononcerait le 10 décembre 2003 sur le traité d'élargissement de l'Union européenne. Alors que le climat qui entoure l'ouverture de la Conférence intergouvernementale ne semble pas laisser présager une conclusion rapide de ses travaux, l'élargissement de l'Union risque de se faire sans que les questions institutionnelles soient encore arrêtées. Il a relevé que ce calendrier ne serait pas conforme à ce que le Parlement avait souhaité lors de la ratification du traité d'Amsterdam qui plaçait l'approfondissement de l'Union comme préalable à son élargissement.
M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères, a indiqué que la capacité européenne à avancer ne devait pas être sous-estimée, notamment sous l'effet de la dynamique du couple franco-allemand à laquelle s'adjoint actuellement le gouvernement britannique. Il a souligné le poids que représente la légitimité du processus qui a conduit à l'élaboration du texte constitutionnel par la Convention. La capacité de la présidence italienne à mettre l'accent sur les points pouvant faire l'objet d'un consensus sera déterminante. Il convient également de prendre en compte la pression exercée par l'accélération du calendrier européen au cours de l'année 2004, notamment les dossiers de la candidature turque ou des perspectives financières. L'Europe sera alors au cœur de l'actualité des pays membres et candidats, ce qui constitue une incitation très forte à trouver une solution.
M. Louis Le Pensec a évoqué l'échec de la réunion de Cancun, qui est aussi celui du multilatéralisme. Il a souhaité savoir s'il restait un espace pour une initiative française, dans le cadre de l'Union européenne.
M. Dominique de Villepin a souligné que l'échec de la négociation de Cancun avait néanmoins mis en évidence un début de mobilisation de certains pays du Sud pour mieux s'affirmer sur la scène internationale. Ce mouvement de solidarité et de responsabilité dessine une nouvelle architecture mondiale dans laquelle une réforme des Nations unies laisserait plus de place à ces pays. Sur le long terme, Cancun sera peut-être considéré comme la première étape d'une restructuration de la gouvernance mondiale.