Devant la commission des affaires sociales du Sénat, M. Jean-François MATTEI prône
"un nouveau regard" sur le monde de la santé
Mardi 9 juillet 2002, au cours d'une audition exceptionnellement dense qui a duré trois heures, la commission des Affaires sociales, présidée par M. Nicolas About (RI - Yvelines), a passé en revue, avec M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille et Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées, les différents aspects de la politique du Gouvernement dans ces trois domaines.
Qualifiant la situation actuelle de notre système de santé d'« extrêmement tendue » voire d'« explosive » tant dans le secteur libéral qu'à l'hôpital mais se refusant à céder pour autant à la « sinistrose », M. Jean‑François Mattei a souligné la nécessité d'inventer et de conduire une nouvelle stratégie de santé reposant sur la patience, sur la confiance et sur la responsabilité partagée.
Dans ce cadre, il a défini cinq orientations :
- bâtir une véritable politique de prévention autour d'une loi de programmation de santé publique ;
- instaurer une nouvelle gouvernance du système de santé et d'assurance maladie dont la teneur dépend pour partie du retour ou non de l'ensemble des partenaires sociaux au sein du conseil d'administration de la CNAMTS ;
- promouvoir l'excellence de notre système de soins à travers notamment la rénovation de l'hôpital public grâce au projet « hôpital 2007 » ;
- améliorer la sécurité sanitaire ;
- clarifier et sécuriser le financement de l'assurance maladie.
Sur ce dernier point, M. Jean-François Mattei a rapproché, de façon significative, le déficit prévu pour le régime général en 2002, soit 2,5 milliards d'euros, avec la contribution de la sécurité sociale au fonds de financement des trente-cinq heures (2,8 milliards d'euros) ; il a rappelé son attachement au principe de la compensation intégrale des allégements de charges sociales posé par la loi de 1994 et souhaité que la loi de financement de la sécurité sociale ne soit pas une « variable d'ajustement de la loi de finances ».
Abordant la politique familiale, MM. Jean-François Mattei et Christian Jacob ont souligné leur attachement à trois principes -l'universalité, la liberté de choix et la simplicité- sur lesquels reposera la future allocation unique de libre-choix pour l'accueil du jeune enfant.
Le ministre délégué a fait état par ailleurs de son souhait que la question du mode de garde de la petite enfance mobilise également l'entreprise ; il a estimé que la politique familiale passe par la revalorisation de la fonction parentale et une réflexion sur la situation des jeunes adultes. Il a fait part de son souhait que les excédents de la branche famille ne soient pas utilisés pour le financement de politiques étrangères à la famille.
S'agissant de la politique envers les personnes handicapées, qui constitue l'actualité immédiate de la commission des Affaires sociales qui rendra public un important rapport sur cette question le 24 juillet prochain, M. Jean-François Mattei et Mme Marie-Thérèse Boisseau ont souligné la nécessité d'adapter notre système d'aide pour le « tourner vers la personne » et insisté sur le droit à compensation pour les personnes handicapées.
Rappelant l'engagement du Premier ministre portant sur la réforme de la loi d'orientation du 30 juin 1975, la secrétaire d'Etat a indiqué son souci, à l'issue d'une très large consultation, d'établir un constat rigoureux et d'avancer des solutions en fonction d'un double objectif : la possibilité pour la personne handicapée de choisir son mode de vie et de participer du mieux possible à la vie sociale.
Répondant aux questions des sénateurs, M. Jean-François Mattei a apporté notamment les précisions suivantes :
- la commission des comptes de la sécurité sociale s'apparente aujourd'hui à une « chambre d'enregistrement » : son rôle doit évoluer et, dans l'immédiat, les membres qui la composent, d'origines très diverses, doivent pouvoir s'exprimer davantage ;
- l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) ne sera naturellement pas supprimé ; il convient en revanche de substituer au « mode de calcul budgétaire » qui a prévalu au cours des cinq dernières années, un mode de fixation qui soit fonction des besoins sanitaires ;
- le Gouvernement entend supprimer « les derniers vestiges de la maîtrise comptable » des dépenses de santé, en abrogeant les lettres-clés flottantes et les comités médicaux régionaux qui n'ont d'ailleurs jamais fonctionné ; il entend, au contraire, privilégier la régulation par les bonnes pratiques à l'image de ce que prévoit l'accord « fondateur » du 5 juin avec les généralistes ;
- l'application des trente-cinq heures à l'hôpital relève « de la quadrature du cercle » puisqu'il faut tout à la fois appliquer la « loi de la République » et assurer la continuité et la sécurité des soins ;
- s'agissant de la jurisprudence « Perruche », le Parlement n'a encore fait que la moitié du chemin ; la logique assurantielle n'est pas la bonne solution mais il appartient aujourd'hui à l'Etat de faire son devoir ;
- le ministre est prêt à travailler avec le Sénat dès la rentrée d'octobre sur le projet de loi révisant les lois bioéthiques de sorte que le texte puisse être définitivement adopté dans le courant du printemps.
M. Christian Jacob a, par ailleurs, indiqué que son objectif était de procéder à une large concertation tout au long de l'automne afin d'être à même, lors de la conférence de la famille qui se tiendra au printemps 2003, de débattre de la nouvelle allocation unique de libre-choix.