M. Alain Vasselle analyse le rapport d'évaluation sur l'application de la couverture maladie universelle
Lors de la réunion du 20 février 2002 de la commission des Affaires sociales, que préside M. Nicolas About (RI - Yvelines), M. Alain Vasselle (RPR - Oise), représentant du Sénat au fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie, a fait part de ses observations à la lecture du rapport de l'Inspection générale des Affaires sociales (IGAS), remis par le Gouvernement au Parlement en application de l'article 34 de la loi portant création de la couverture maladie universelle.
Même si ce document fait preuve d'une grande prudence, il s'apparente, par certains côtés, à un véritable « livre noir de la CMU » tant les critiques explicites portées sur l'application du dispositif, et les critiques implicites sur sa conception même, sont nombreuses :
- premièrement, l'objectif quantitatif de la CMU complémentaire, qui était censé toucher 6 millions de personnes, est loin d'être atteint : on en serait à 4,6 millions de « CMUistes », alors que l'aide médicale départementale bénéficiait à 3,4 millions de personnes ;
- deuxièmement, les trois reports successifs du réexamen de la situation des bénéficiaires de l'aide médicale départementale, basculés automatiquement dans le nouveau régime le 1er janvier 2000, sont sévèrement critiqués ; ces reports auraient représenté un coût de 1,5 milliard de francs ;
- troisièmement, le rapport décrit sans complaisance la question insoluble de l'effet de seuil créé par la couverture maladie universelle complémentaire, générateur d'injustices et d'un contentieux important ; les différents mécanismes proposés par le Gouvernement pour pouvoir y remédier apparaissent bien complexes, et risquent de recréer des inégalités que la CMU avait pour ambition de faire disparaître ;
- quatrièmement, le rapport décrit avec précision la complexité inutile des règles de droit différentes entre la CMU de base et la CMU complémentaire ;
- cinquièmement, le dévoiement du « scénario partenarial » apparaît patent : 88 % des ressortissants de la CMU complémentaire sont gérés par les CPAM, la part des organismes complémentaires étant cependant en progression ;
- sixièmement, si le rapport passe un peu rapidement sur les nombreux griefs des professionnels de santé (contenu du panier de soins, longueur des délais de remboursement, nombreuses erreurs de remboursement...), il conclut cependant par un « aveu » terrible : « La réforme a instauré un système rigide, moins souple que l'aide médicale départementale qui, malgré ses défauts, permettait une prise en charge correcte des patients grâce aux conventions particulières passées dans de nombreux départements entre le conseil général, les caisses et les professionnels de santé et aux autres aides locales ».
Enfin, le rapport est particulièrement bref sur les conséquences de l'instauration de la CMU pour les finances de l'Etat, les finances sociales et les finances locales. Le surcoût engendré par la CMU pour la CNAMTS représente pourtant 1,4 milliard d'euros (9,1 milliards de francs), puisque les recettes qui lui avaient été initialement affectées ont été détournées pour financer le FOREC. En revanche, l'Etat -compte tenu des moindres dépenses de la CMU complémentaire- n'a pas constaté le surcoût attendu : reportant une fois de plus sur la sécurité sociale le soin de financer les générosités de sa politique, l'Etat est en quelque sorte « le gagnant » de la CMU.