Présomption d'innocence :La commission des lois du Sénat corrige et complète la proposition de loi adoptée par l'assemblée nationale
Réunie le mercredi 6 février 2002, sous la présidence de M. René Garrec (RI, Calvados), président, la commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Pierre Schosteck (RPR, Hauts-de-Seine), la proposition de loi n° 194 (2001-2002) adoptée par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, complétant la loi n° 2000‑516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes et la proposition de loi n° 101 (2001-2002) de M. Hubert Haenel aménageant la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes.
Le rapporteur a souligné que la loi sur la présomption d'innocence était une réforme utile et nécessaire mais qu'elle connaissait des difficultés d'application. Il a regretté que le Gouvernement ait tenté d'ignorer ces difficultés -pourtant largement dues à l'insuffisance des moyens qu'il aurait dû prévoir‑ en se contentant de souligner que la loi avait été adoptée sans opposition. Il a constaté qu'après bien des hésitations et deux évaluations contradictoires, une proposition de loi avait finalement été déposée et discutée en toute hâte par l'Assemblée nationale. Il a souligné que M. Hubert Haenel (RPR, Haut-Rhin) avait au contraire déposé, dès le 28 novembre 2001, une proposition de loi contenant des mesures précises et ciblées pour renforcer l'efficacité de la procédure pénale.
Le rapporteur a rappelé que la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale prévoyait en particulier :
- une modification des critères de placement en garde à vue, les indices devenant des « raisons plausibles » ;
- un avis au parquet « aussi rapidement que possible » et non plus « dès le début » de la garde à vue ;
- une possibilité de placer en détention provisoire un « réitérant » qui encourt deux ans d'emprisonnement pour une infraction contre les biens ;
- une possibilité d'appel du parquet en cas d'acquittement.
Le rapporteur a constaté que certaines des dispositions étaient de pur affichage tandis que d'autres posaient des problèmes de principe.
La commission a décidé de corriger la proposition de loi et de la compléter par des mesures issues de la proposition de loi de M. Hubert Haenel, destinées à assurer l'équilibre entre droits de la personne et efficacité de la procédure pénale.
Elle a adopté des amendements tendant notamment à :
- maintenir la nécessité d'indices pour le placement en garde à vue ;
- maintenir un avis au parquet « dès le début » de la garde à vue ; la commission des Lois rappelle en effet que l'autorité judiciaire est gardienne des libertés individuelles ;
- prévoir un seuil de peine encourue de trois ans -et non de deux‑ pour le placement en détention provisoire des « réitérants » afin d'éviter qu'une personne poursuivie mais pas condamnée soit traitée plus sévèrement qu'une personne déjà condamnée ;
- confier la décision d'appel des arrêts d'acquittement au procureur général ;
- permettre un enregistrement des débats en cour d'assises pour éviter aux victimes -notamment en matière d'infractions sexuelles‑ de répéter intégralement en appel leurs déclarations de première instance ;
- clarifier les conditions d'audition des témoins au cours des enquêtes de flagrance ;
- prévoir une possibilité de prolongation exceptionnelle de la durée de la détention provisoire par la chambre de l'instruction ;
- permettre une prolongation de la durée des enquêtes de flagrance ;
- autoriser les perquisitions, sur autorisation écrite du juge des libertés et de la détention, pendant une enquête préliminaire ;
- prévoir une « purge » régulière des nullités au cours d'une information judiciaire.
La proposition de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance publique du jeudi 7 février 2002.