" De la démocratie budgétaire en Amérique "
Un rapport du Sénat décrit, pour la première fois en français, le fonctionnement des " offices " du Congrès des États-Unis, et souligne par contraste le manque de transparence de l’information économique et sociale en France.
Les États-Unis sont souvent cités en exemple en matière d’information économique. En particulier, on présente souvent comme des modèles les " offices " du Congrès comme le General Accounting Office (GAO), qui effectue des contrôles et des audits d’administrations publiques à la demande des parlementaires et le Congressional budget Office (CBO), qui réalise des évaluations du coût de toutes les dispositions législatives en discussion.
Pourtant, ces institutions étaient en fait très mal connues en France.
Cette lacune vient d’être comblée par le rapport de M. Joël Bourdin (R.I., Eure), qui propose un panorama complet des institutions économiques américaines et des organes d’expertise du Congrès. Intitulé " De la démocratie budgétaire en Amérique ", ce rapport rappelle que les États-Unis ont aussi connu des " surprises budgétaires ", mais que " l’affaire de la cagnotte " y serait inconcevable. En effet, les États-Unis se caractérisent par la volonté des administrations de rendre des comptes, par la sincérité des données budgétaires, par une grande transparence de l’information, par le pluralisme des analyses dans tous les domaines et par l’importance de la contre-expertise indépendante.
Ces performances s’expliquent par un ensemble d’institutions et de bonnes pratiques qui se renforcent mutuellement, parmi lesquelles le rapport souligne :
- les garanties apportées à l’exercice de la liberté d’accès aux documents administratifs, (information du public sur ses droits, délais de réponse resserrés pour les administrations, sanctions disciplinaires et pénales contre les fonctionnaires récalcitrants) ;
- l’accessibilité des économistes publics, dont les numéros de téléphone sont largement diffusés, et à qui il est demandé de répondre systématiquement aux questions méthodologiques émanant d’experts indépendants ou de journalistes ;
- les modalités de publication des principales statistiques économiques et sociales, diffusées sous la seule autorité des services statistiques compétents, et qui ne peuvent être commentés par des responsables politiques dans l’heure qui suit leur publication.
Rédigé dans une perspective comparatiste, le rapport pointe par contraste le manque de transparence des ministères français et l’absence de contre-expertise indépendante des administrations dans des domaines aussi essentiels que l’éducation, la fiscalité ou l’évaluation des politiques publiques, ce qui nuit à la qualité des débats économiques et sociaux.
La conclusion du rapport développe ainsi plus de trente propositions, qui complètent celles du rapport de la commission des finances du Sénat sur " les lacunes de l’information statistique relatives aux administrations publiques " et qui seront discutées lors d’un colloque au Sénat le 27 juin 2001, parmi lesquelles :
- compléter la loi du 17 juillet 1978 relative à l’accès aux documents administratifs par des dispositions prévoyant l’accès aux documents administratifs via le réseau Internet ;
- diffuser aux chercheurs indépendants les fichiers de données fiscales et sociales anonymes nécessaires à l’évaluation des politiques publiques, qui sont actuellement monopolisés par Bercy ;
- assigner pour objectif aux corps d’inspection et de contrôle de l’État d’être eux-mêmes des administrations exemplaires, cette idée, qui peut paraître iconoclaste en France, constituant pour les Américains une mesure de bon sens ;
- sanctionner effectivement les attitudes désinvoltes ou l’obstruction de certains ministères à l’encontre des questions ou des demandes de documents émanant des assemblées parlementaires.