Service des Commissions
L’absorption de la coopération par les affaires étrangères permet au Quai d’Orsay de financer ses priorités au détriment de l’aide aux pays en développement
A la veille de l’examen en séance publique du budget des affaires étrangères et de la coopération (jeudi 9 décembre), Jacques CHAUMONT (RPR - Sarthe), rapporteur spécial des crédits des affaires étrangères, et Michel CHARASSE (Soc - Puy-de-Dôme), rapporteur spécial des crédits de la coopération, rappellent les observations formulées par la Commission des Finances, présidée par Alain Lambert (UC - Orne), sur ce budget.
S’agissant de la coopération, le projet de loi de finances pour 2000 marque la première année d’entrée en vigueur pleine et entière de la réforme de la politique française de coopération. Les rapporteurs spéciaux formulent ainsi quatre observations.
1) La réforme de la coopération ne se traduit ni par des moyens supplémentaires destinés aux pays admis dans la zone de solidarité prioritaire (ZSP), ni par la mise en place, dans ces pays, des services et moyens du ministère des affaires étrangères, à la différence de l’Agence française de développement. La réforme de la coopération se traduit donc par une diminution des moyens accordés aux anciens pays du champ, qui ne profite guère aux nouveaux Etats de la ZSP.
2) Les crédits consacrés à la coopération sont en baisse par rapport à 1999. Ces réductions de crédits sont d’autant plus difficiles à déceler que, restant au sein d’un même ministère - les affaires étrangères - elles permettent à celui-ci d’afficher une hausse globale modeste de ses dotations. Pour 2000, le budget du ministère des affaires étrangères apparaîtra certainement comme un bon budget alors que celui de la coopération serait apparu comme un mauvais budget. Il s’agit d’un habile paradoxe qui tient au fait que le Quai d’Orsay se nourrit sur la coopération.
3) Les économies et synergies réalisées par la réforme ainsi que les réductions de moyens d’intervention permettent au budget des affaires étrangères de financer ses priorités (l’audiovisuel extérieur et la culture pour les interventions ; les moyens en personnel des services consulaires et de l’administration centrale pour le fonctionnement) sans que cela ne se traduise par des gains pour les nouveaux pays admis dans la ZSP.
4) Le budget pour 2000 est l’occasion de deux réformes de nomenclature qui ont pour conséquence un recul inacceptable du contrôle parlementaire sur les sommes engagées par l’AFD et l’ancien Fonds d’aide et de coopération (FAC) devenu Fonds de solidarité prioritaire (FSP). L’utilisation des crédits s’effectuerait, en l’état actuel des choses, dans des conditions d’opacité quasi absolue constituant un véritable recul par rapport aux procédures existantes et une atteinte presque provocatrice portée au pouvoir constitutionnel de contrôle du Parlement. La commission des finances n’accepte pas cette évolution qui ne peut que nuire à la clarté, à la transparence et au caractère irréprochable de notre coopération. M. Charasse proposera donc au Sénat, au nom de la commission des finances, d’adopter un amendement visant à maintenir et à renforcer le contrôle parlementaire sur les crédits mis en œuvre par l’AFD et le FSP.
MM. Chaumont et Charasse estiment donc que le " budget de la coopération " n’aurait pas été exempt de vives critiques s’il s’était encore agi d’un " vrai " budget.
Mais comme les crédits de la coopération sont désormais fondus au sein de ceux des affaires étrangères, que le montant de ceux-ci résulte d’un choix commun des deux responsables de l’exécutif, et qu’il marque pour la première fois un coup d’arrêt à la baisse des dotations en francs courants (ce que réclamait le Sénat de longue date), les rapporteurs spéciaux ne remettent pas en cause la proposition de leur adoption faite par la commission des finances.