État civil :
Né le 20 juillet 1774
Décédé le 2 mars 1852
Liens externes :
Lettres patentes (institution d'un titre de Pairie) extraites du "Livre de la Pairie" [Archives nationales CC//960]
Pairs de France

Pair de France

    Nommé lors de la première Restauration, il redevient membre de la Chambre de la seconde Restauration après la période des Cent-jours.
    Refuse de prêter serment à Louis-Philippe, en conséquence il ne fait plus partie de la Chambre des pairs (loi du 31 août 1830).

Pair de France  (Extrait du Dictionnaire des Parlementaires français « Robert et Cougny » (1889-1891))

Pair de France

MARMONT (AUGUSTE FRÉDÉRIC LOUIS, VIESSE), DUC DE RAGUSE, pair de France, né à Châtillon-sur-Seine (Côte-d'Or) le 20 juillet 1774, mort à Venise (Italie) le 2 mars 1852, fils d'un capitaine au régiment de Hainaut, fut destiné par sa famille à la magistrature. Il préféra la carrière des armes, entra au service a quinze ans, dans l'infanterie, puis, après un brillant examen, fut reçu, en janvier 1792, sous-lieutenant élève à l'Ecole d'artillerie de Châlons. Son père l'avait élevé dans les principes de la monarchie constitutionnelle; mais ayant fait la connaissance à Châlons d'une jeune femme dont le mari avait émigré, il fut bien près d'être converti à l'intransigeance royaliste. Il affirme du reste, dans ses Mémoires, que, dès cette époque, il éprouvait pour la personne du roi « une espèce de respect religieux ». Envoyé à l'armée des Alpes à sa sortie de l'Ecole, il prit part, en qualité de lieutenant d'artillerie, au siège de Toulon, où il connut Bonaparte. Ils se lièrent étroitement et, quand le nouveau général revint à Paris, Marmont l'y suivit et partagea même un moment sa disgrâce. L'année suivante, il reprit du service à l'armée du Rhin et, après le déblocus de Mayenne, exerça, quoique simple capitaine, le commandement de l'artillerie d'avant-garde. Il quitta cette situation pour devenir aide de camp de Bonaparte, d'abord à l'armée de l'intérieur, après le 3 vendémiaire, puis à l'armée d'Italie. Sa brillante conduite à Lodi (10 mai 1796) lui valut un sabre d'honneur; il se distingua aussi à Castiglione (5 août), puis à Saint-Georges, devant Mantoue. Bonaparte le chargea de porter au Directoire les 22 drapeaux pris à l'ennemi. Il revint de Paris avec le grade de chef de brigade, tout en restant attaché à l'état-major du général en chef. En 1797, il prit part à l'expédition des Romagnes. Envoyé, l'année suivante, à l'armée d'Egypte, il s'empara à Malte du drapeau de l'Ordre; des auteurs affirment qu'il l'acheta à un sergent pour cinq pièces d'or. Général d'artillerie le 16 juillet 1798, il assista à la prise d'Alexandrie et à la bataille des Pyramides, et, quand Bonaparte dirigea une expédition sur la Syrie, il reçut le commandement d'Alexandrie. Malgré la peste et la famine qui décimaient les troupes, il défendit la ville avec vigueur contre les entreprises des Anglo-Turcs. Il revint en France en même temps que Bonaparte et contribua par ses relations mondaines à faire accepter le 18 brumaire dans les salons de Paris : il commandait alors l'artillerie de l'Ecole militaire; il passa ensuite conseiller d'Etat, section de la guerre. Lors de la création de la nouvelle armée d'Italie, il fut chargé de réunir à Auxonne, dans le plus grand secret, le matériel nécessaire à la traversée des Alpes et à la future campagne. Il s'acquitta de cette tâche avec zèle, et se vanta même, dans ses Mémoires, d'avoir indiqué au premier Consul un passage ignoré, praticable aux voitures. A Marengo, il canonna vigoureusement, à la reprise de la bataille, les colonnes de Zoch, en marche sur Plaisance; après la convention d'Alexandrie, il fut nommé général de division. A la reprise des hostilités, il passa sous les ordres de Brune, en qualité de commandant de l'artillerie, assista aux passages du Mincio, de l'Adige et de la Brenta et, au moment de l'armistice de Trévise, fut chargé d'en négocier les conditions avec le prince de Hohenzollern. Nommé, à la paix de Lunéville, inspecteur général de l'artillerie, c'est à son initiative que l'on dut l'organisation militaire du train. Envoyé en Hollande en 1803, il fit élever à Zeist, à la gloire des armées françaises, une haute pyramide qui fut solennellement inaugurée deux ans plus tard. Grand-officier de la Légion d'honneur (9 vendémiaire an XII), colonel-général des chasseurs à cheval, il reçut l'ordre, au moment de la rupture de la paix d'Amiens, de rejoindre la grande armée sur le Mein, avec ses 21,000 hommes destinés à former le 2e corps. Il contribua, en se portant rapidement sur la rive droite de l'Iller, à enfermer Mack dans Ulm, puis se mit à la poursuite de l'armée autrichienne, occupa Munich et Oberndorf, et se signala dans différents combats en Styrie et à Gratz. Au moment du traité de Presbourg, il fut appelé au commandement supérieur de la Dalmatie, fit sommer (en septembre 1806) l'amiral russe Symavine d'abandonner le siège de Raguse et les autres positions qu'il occupait avec des contingents monténégrins, et, ne recevant aucune réponse satisfaisante, marcha, avec quelques bataillons seulement, contre l'ennemi, le battit à Castelnuovo le 30 octobre, et le força de se rembarquer. Il fit construire des routes et transforma si bien le pays, que les Dalmates disaient : « Les Autrichiens pendant huit ans ont discuté des plans de route sans les exécuter; Marmont est monté à cheval et, quand il en est descendu, elles étaient terminées ». Lorsqu'en 1818 l'empereur d'Autriche visita la Dalmatie avec le prince de Metternich, il dit à ce dernier : « Il est bien fâcheux que le maréchal Marmont ne soit pas resté en Dalmatie deux ou trois ans de plus. » Nommé duc de Raguse le 29 juin 1808, avec des dotations considérables eu Illyrie, Marmont, qui vivait sur un pied royal, ne sut pas se concilier les sympathies des habitants. Il était trop hautain, trop infatué de lui-même, et Napoléon l'a peint d'un mot eu rappelant : Marmont premier. Occupé eu Illyrie, le duc de Raguse ne prit aucune part aux campagnes de Prusse et de Pologne. En 1809, il reçut l'ordre de joindre ses troupes à l'armée d'Italie pour la nouvelle campagne sur le Danube. Il annonça ce rappel à ses soldats dans un ordre du jour énergique où il leur disait : « Napoléon le Grand vous regarde ! » En Croatie, la lenteur de ses mouvements faillit amener un échec; il opéra enfin sa jonction avec le prince Eugène, et participa à la prise de Gratz. Le 9 juillet 1809, après Wagram, il rencontra une arrière-garde ennemie qui voulut s'opposer à son passage; il la battit et continua sa marche. Arrivé sur les hauteurs de Znaïm, il chassa encore l'ennemi de cette position. Le 12 juillet, l'empereur nomma Marmont maréchal de France et lui accorda, le 1er août, une dotation de 25,000 francs de rente en Hanovre. Ainsi qu'il le déclare lui-même dans ses Mémoires, il ne fut point autrement flatté de cette haute distinction, en voyant Berthier, Masséna, Davoust devenir princes, alors que lui-même ne l'était pas encore. A la paix de Vienne, il devint gouverneur général de l'Illyrie où, après une rapide et heureuse expédition contre les Croates, il mena une vie de faste et de plaisir. Il s'en excusa du reste en disant : « J'ai toujours eu une manière de magnificence. » Venu à Paris pour les fêtes données à l'occasion de la naissance du roi de Rome, il ne' retourna pas à son gouvernement. Napoléon lui confia le commandement de l'armée de Portugal le 7 mai 1811, en remplacement de Masséna qui venait de subir une série d'échecs. Le 18 juin, Marmont était sur la Guadiana à proximité du duc de Dalmatie, que Napoléon lui avait enjoint de rallier; le 14 septembre, il força l'armée anglo-portugaise à lui abandonner le siège de Ciudad Rodrigo et peu après de Badajoz. Mais ses succès s'arrêtèrent là. Ayant reçu d'importants renforts, Wellington prit l'offensive dans les premiers jours de 1812 contre l'armée trop disséminée du duc de Raguse, et s'empara de Ciudad-Rodrigo (18 janvier) et de Badajoz (6 avril). Sans attendre Joseph qui accourait à son secours, Marmont attaqua Wellington aux Arapiles, près de Salamanque, le 22 juillet; mais, blessé au bras dès le début de 1 action, il ne put conserver la direction du combat; son armée fut battue, et dut se replier sur l'Ebre. Quelques jours plus tard, les Anglais entraient à Madrid. Napoléon jugea sévèrement la conduite du maréchal : « On est fondé à penser, écrivit-il à Clarke, que le duc de Raguse a craint que le roi ne participe au succès et qu'il a sacrifié à la vanité la gloire de la patrie. » Les explications, qu'il lui fit demander par le duc de Feltre, furent assez vagues. L'empereur d'ailleurs lui pardonna, parce qu'il avait pour lui une affection particulière, et, dès qu'il fut guéri, lui confia (en 1813) le commandement du 6e corps. Marmont se distingua à Lutzen, à Bautzen, à Wurtzschen. A Dresde, il repoussa, avec Saint-Cyr, les efforts du centre de Schwartzemberg; à Leipzig, dans la journée du 16 octobre, il tint tête, avec 20,000 hommes seulement, aux 60,000 hommes de l'armée de Silésie ; à Schoenfeld, le 18, il résista aux tentatives répétées de Bernadotte et de Blücher, grâce aux secours que Ney lui amena. Il fut blessé de voir Napoléon attribuer le mérite de l'affaire au prince de la Moskowa, et il écrivit le lendemain à l'empereur: « Sire, après l'humiliation et le danger plus grand encore d'être sous les ordres d'un homme tel que le prince de la Moskowa, je ne vois rien de pire que de se voir aussi complètement oublié en pareille circonstance. » Placé, lors de la retraite sur le Rhin, à la tête d'un corps de 25,000 hommes chargé de défendre les frontières de Coblentz à Mannheim, il voulut retirer des redoutes élevées à l'embouchure de la Lahn les canonniers et l'artillerie, et il se replia assez vivement sur Metz où il laissa une faible garnison, puis sur Saint-Dizier. Or, ce fut précisément au point abandonné que l'armée russe franchit la frontière. Marmont se battit à Brienne, à la Rothière, à Champaubert et à Vauchamps ; puis, lorsque l'empereur se porta sur Montereau, il dut, de concert avec le duc de Trévise, contenir l'armée de Blücher; en plusieurs rencontres, il fit éprouver des pertes considérables aux alliés et s'empara même d'Athis; mais, ayant négligé de se couvrir, il fut attaqué de nuit et mis en déroute. « Vous m'envoyez des lettres de Marmont qui ne signifient rien, écrivait Napoléon à Clarke. Il est toujours méconnu de tout le monde; il a tout fait, tout conseillé. Il est fâcheux qu'avec quelque talent, il ne puisse pas se débarrasser de cette sottise ou du moins se contenir de manière que cela ne lui échappe que rarement. » Les faibles corps de Marmont et de Mortier, peu à peu repoussés sous Paris, ne reculèrent qu'en disputant pied à pied le terrain. Le 29 mars 1814, ils arrivaient à Paris par la rive gauche de la Marne, et occupaient immédiatement les hauteurs des Buttes-Chaumont et de Belleville, de la Villette et de Saint-Ouen. Dans Paris, Moncey commandait la garde nationale et quelques bataillons de ligne. C'est avec ces faibles ressources, 20,000 hommes au plus, que les trois maréchaux allaient avoir à lutter contre 180,000 alliés. La bataille commença le 30 mars, à 4 heures du matin. Marmont d'abord repoussa Barclay-de-Tolly au plateau de Romainville sur Pantin et Noisy. Les gardes russe et prussienne, troupes d'élite aguerries dans cent combats, vinrent se briser contre l'héroïque résistance de nos soldats de dix-huit ans. A midi, les coalisés épuisés firent quelques instants trêve. Mais Marmont avait déjà prévenu le roi Joseph qu' « il était impossible de prolonger la résistance au delà de quelques heures et qu'on devait préserver Paris des malheurs irréparables d'une occupation de vivo force ». Le roi Joseph lui envoya alors l'autorisation de conclure la capitulation, qui fut signée à 5 heures du soir, chez un marchand de vin, à l'enseigne du Petit Jardinet, dans le faubourg de la Villette. Aussitôt, les soldats crièrent a la trahison ; les dragons d'Ordener, brandissant leur sabre, demandaient à se battre encore. Dejean pleurait, devant les officiers russes, et disait en face à Marmont : « Capituler, c'est trahir! » Lavalette survenait à son tour, annonçant l'arrivée de l'empereur, suppliant qu'on attendît quelques heures encore; les soldats ne voulaient pas partir. Marmont fut inflexible, et rédigea une convention qui fut signée en son nom par les colonels Denys et Fabvier, ses aides de camp. Puis, il envoya un aide de camp à l'empereur pour le prévenir de la capitulation et lui annoncer « que les étrangers étaient reçus avec enthousiasme à Paris, et que s'il voulait rentrer de vive force dans la capitale, il devait s'attendre à la voir tout entière s'armer contre lui ». Le lendemain, 1er avril, il fut reçu par Napoléon qui le complimenta sur sa défense de Paris et ne lui fit aucun reproche relativement à la capitulation; son petit corps d'armée eut pour mission d'occuper Essonne, position d'avant-garde. En confiant ce poste au duc de Raguse, Napoléon dit, non sans une pointe d'ironie : « Essonne, c'est là que viendront s'adresser toutes les intrigues, toutes les trahisons; aussi y ai-je placé Marmont, mon enfant élevé sous ma tente. » Et, en effet, après la nomination d'un gouvernement provisoire et la déchéance de Napoléon, « ou vit affluer à Essonne, dit Savary, une foule d'hommes qui, tout couverts des bienfaits de l'empereur, n'insistaient pas moins vivement auprès du maréchal pour s en détacher... Ils firent agir ceux des magistrats qui pouvaient exercer quelque influence sur lui, et lui dépêchèrent quelques-uns de ses amis. » Enfin, vivement sollicite par les généraux Beurnonville et Dessoles, le duc de Raguse engagea, le 2 avril, des pourparlers avec Schwartzenberg à Chevilly, mais ne se décida que dans la nuit du 3 au 4 avril à lui écrire ce qui suit:« Je suis prêt à quitter avec mes troupes l'armée de l'empereur aux conditions suivantes dont je vous demande la garantie par écrit : 1° Toutes les troupes françaises qui quitteront les drapeaux de Napoléon Bonaparte pourront se retirer librement en Normandie avec armes, bagages et munitions, et avec les mêmes égards et honneurs militaires que se doivent des troupes alliées; 2° si, par suite de ce mouvement, les événements de la guerre faisaient tomber entre les mains des puissances alliées la personne de Napoléon Bonaparte, sa vie et sa liberté lui seraient garanties, dans un espace de terrain et dans un pays circonscrit, au choix des puissances alliées et du gouvernement français ». Schwartzenberg se hâta d'accepter ces conditions, car au même moment, Ney, Macdonald et Caulaincourt, chargés par l'empereur de plaider auprès du Tzar la cause du roi de Rome, avaient parlé avec tant de chaleur, qu'Alexandre était ébranlé et allait céder. Mais le bruit se répandit tout à coup que le 6e corps, celui du duc de Raguse, venait de passer à l'ennemi. L'expression était inexacte : les troupes restèrent fidèles, et, lorsqu'on voulut les conduire au milieu des alliés, elles se mutinèrent. Marmont dut accourir précipitamment à Versailles; il était beau parleur, il flatta les hommes, insulta les officiers, promit dans un ordre du jour (5 avril) de bons cantonnements et des soins paternels, et parvint à faire prendre aux troupes impuissantes la route de Normandie. Ce ne fut pourtant pas sans résistance de la part de ses officiers qu'il obtint ce résultat; il eut notamment à essuyer les reproches sanglants d'Ordener. Marmont, dans ses Mémoires, prétend cependant qu'il avertit de sa résolution les officiers sous ses ordres; mais, dans la Réponse qu'il publia en 1815, il avoue qu'il en avait eu seulement l'intention. Pour lui, il revint à Paris où il fut fêté chez Talleyrand et « à l'enthousiasme des ennemis de son maître, dit M. de Lamartine, il dut reconnaître la triste réalité de sa défection ». A la nouvelle du départ du 6e corps, Napoléon resta atterré : « Marmont m'a porté le dernier coup, » dit-il. Le lendemain, dans la proclamation qu'il adressa à ses troupes, il dit : « L'empereur remercie l'armée pour l'attachement qu'elle lui témoigne... Le soldat suit la fortune et l'infortune de son général ; son honneur est sa religion... Le duc de Raguse n'a point inspiré ce sentiment à ses compagnons d'armes; il a passé aux alliés. L'empereur ne peut accepter la condition sous laquelle il a tait cette démarche; il ne peut accepter la vie et la liberté de la main d un sujet. » Quand les Bourbons rentrèrent à Paris, Marmont affecta de garder la cocarde tricolore, et conseilla au nouveau gouvernement de maintenir les institutions impériales. Cet avis ne fut pas suivi, mais Louis XVIII nomma Marmont commandant de la 6° compagnie des gardes du corps, créée exprès pour lui, puis chevalier de Saint-Louis et pair de France, le 4 juin 1814. « Les royalistes purs, dit Rapetti, eussent rougi de devoir de la reconnaissance à une trahison... Les hommes de l'empire les mieux réconciliés avec le nouvel ordre de choses tenaient à éloigner toute comparaison entre une trahison et leur ralliement, et ils affichaient leurs soins à se préserver du voisinage de M. de Raguse. Quant à l'opinion populaire, elle demeurait implacable. Dans les rues, on disait raguser pour tromper. Marmont, qui avait rêvé un grand rôle politique, se trouva réduit à l'isolement, à l'impuissance. » Sa compagnie des gardes du corps ne put jamais arriver à être complète, malgré la devise que le roi avait composée pour le maréchal : Patrioe totus et ubique. Lorsque Louis XVIII partit pour Gand, Marmont reçut 450,000 francs de l'intendant de la maison royale, le duc de Blacas, et suivit le roi en qualité de commandant de la maison militaire. Dans l'une des proclamations que Napoléon adressa au peuple à son retour de l'île d'Elbe, il dit : «Soldats, nous n'avons pas été vaincus. Deux hommes sortis de nos rangs (Marmont et Auge l'eau) ont trahi nos lauriers, leur pays, leur prince, leur bienfaiteur.» Il excepta Marmont du décret d'amnistie signé à Lyon le 12 mars. Le duc de Raguse publia une Réponse à la proclamation datée du golfe Juan le 1ermars 1815. Après Waterloo, il revint à Paris où il reprit sa place à la Chambre des pairs. Il s'y prononça, en 1816, pour le maintien du chiffre de 300 francs pour l'électorat et de l'âge de 40 ans pour l'éligibilité. L'année précédente, en sa qualité de président du collège électoral de la Côte-d'Or, il avait présenté une adresse au roi. Sa compagnie de gardes du corps ayant été supprimée, il devint l'un des majors généraux de la garde royale, commandeur de Saint-Louis (3 mai 1816), et membre libre de l'Académie des sciences. Après s'être interposé inutilement en faveur de Lavalette, il fut envoyé, en 1817, comme lieutenant du roi à Lyon où sévissait la terreur blanche. Il y l'établit l'ordre, fit mettre en liberté les détenus pour cause politique, et, à soit retour, fut nommé, en témoignage de satisfaction, ministre d'Etat par le roi, le 4 novembre. Dans l'affaire du colonel Fabvier, qui avait été l'année précédente son chef d'état-major à Lyon, il prit parti pour le colonel, et écrivit en sa faveur au duc de Richelieu, président du conseil des ministres. Cette démarche le fit tomber eu disgrâce. Une lettre du ministre de la Guerre, du 14 juillet 1818, l'avisa de s'abstenir de paraître à la cour jusqu'à nouvel ordre. Il rentra en grâce en 1820, fut nommé conseiller général de la Côte-d'Or le 17 juillet, membre de la commission chargée de la mise en accusation des conspirateurs du 19 août, grand-croix de Saint-Louis le 24 août, chevalier-commandeur du Saint-Esprit le 30 septembre, et gouverneur de la 1re division militaire le 29 août 1821. Aimant le luxe et les plaisirs, il dépensait des sommes considérables; des entreprises industrielles compromirent la fortune de sa femme, mademoiselle Perregaux, qui réclama la séparation de biens devant les tribunaux. Bonaparte, alors premier consul, avait fait faire ce mariage et n'avait obtenu le consentement de M. Perregaux qu'en donnant, sur sa fortune personnelle qui n'excédait guère un million, 500,000 francs de dot à son ami Marmont. Le duc de Raguse était en outre en butte aux persécutions de ses créanciers; il devait à la munificence de Napoléon près de 500,000 francs de rentes en dotations, en Illyrie, en Hanovre, en Westphalie, ainsi qu'en font foi les mémoires d'avocats publiés au moment de son procès avec la maréchale; mais ces dotations avaient pris fin à la chute de l'empire. Il se trouvait alors aux abois, bien qu'il eût emprunté 200,000 francs à Louis XVIII, et que 1 empereur d'Autriche, en considération des services qu'il avait rendus aux alliés, lui eût spontanément garanti la restitution de sa dotation et le paiement des arrérages échus. Ce fut en 1819 qu'il obtint à Vienne le règlement de ces comptes et de sa pension. En 1826, il fut chargé de représenter Charles X au couronnement du nouveau czar, Nicolas. Remplacé en 1828 par M. de La Ferronnays, il rentra en France et prit part aux travaux de la Chambre des pairs; le 14 août 1829, il dénia aux Chambres le droit de fixer les dépenses et l'emploi des revenus publics, il ne leur accordait que le droit de voter l'impôt. Ses affaires privées lui donnèrent encore beaucoup de soucis; il dut déléguer une partie considérable de ses traitements et de ses pensions à la caisse hypothécaire ; cette même année, sa femme obtint contre lui une séparation de biens; l'année suivante, 1829, ses immeubles à Châtillon-sur-Seine furent saisis et vendus judiciairement. « C'est à cette époque, dit un de ses biographes, qu'il commença d'écrire ses Mémoires. » Au moment de la publication des Ordonnances, le 25 juillet 1830, Marmont était major général de la garde royale et gouverneur de la 1re division militaire (Paris). Il fut averti, le 26, par une lettre du prince de Polignac, de prendre les mesures nécessaires à leur exécution. Le 27, il reçût ses lettres de service du roi et se rendit à l'état-major, place du Carrousel. Le mouvement insurrectionnel était déjà commencé, les boutiques des armuriers avaient été pillées, le peuple avait envahi l'arsenal et les corps de garde, désarmé les fusiliers sédentaires, arboré le chapeau tricolore au haut des tours de Notre-Dame, élevé des barricades. Le combat s'engagea dans la matinée du 28. La gendarmerie et la garde royale se battaient bravement; mais des gardes nationaux se montraient dans les rangs des insurgés et la ligne faiblissait manifestement. Puis les soldats étaient trop peu nombreux; ceux du général de Saint-Chamans ne purent enlever les barricades de la rue Saint-Antoine ceux du général de Quinsonnas furent cernés au marché des Innocents; en vain le duc de Raguse faisait supplier Charles X de retirer les Ordonnances et M. de Polignac de faire entendre des paroles de paix. Un vieux royaliste vint dire à ce moment au duc de Raguse: « Maréchal, voulez-vous sauver le roi, le peuple de Paris et votre nom?... Arrêtez les ministres, tous les signataires, tous les conseillers des Ordonnances; faites-les porter à Vincennes, liés, garrottés comme des criminels, comme les seuls coupables. Le peuple, satisfait, apaisé par vous, posera les armes; le roi, qui ne se trouvera plus en présence d'une révolte, pourra faire des concessions... Vous, vous serez exilé; mais on pardonne aisément à qui nous tire d'un mauvais pas; vous nous reviendrez bientôt le sauveur, le pacificateur, l'homme de la royauté, de la liberté». Marmont répondit: «Vous avez raison peut-être, mais je ne puis pas. » Cependant les députés réunis chez Audry de Puyravault envoyèrent auprès de Marmont, aux Tuileries, Casimir Périer, Laffitte, Mauguin, Lobau et Gérard. Arago était déjà chez le duc de Raguse; il lui représentait Paris en feu, le sang coulant de toutes parts et la terrible responsabilité qu'il encourait dans cette lutte cruelle. « Faut-il tout vous dire, s'écria Arago, j'ai recueilli dans la foule, sur mon passage, des paroles sinistres: On mitraille le peuple, c'est Marmont qui paie ses dettes! » Le maréchal sauta sur son épée, puis ferma les yeux et laissa échapper son arme. On vint annoncer la députation sortie de chez Audry de Puyravault. Sur l'ordre de M. de Polignac, Marmont avait remis à M. de Foucault, colonel de gendarmerie, l'ordre d'arrestation de Lafayette, Laffitte, Mauguin, Gérard, Audry de Puyravault, etc. Il s'émut à la pensée de faire arrêter ceux qui venaient se confier à lui, fit courir après M. de Foucault, reprit l'ordre d'arrestation et le déchira. Laffitte lui parla au nom du peuple, le somma au nom de l'honneur de faire cesser le carnage: « L'honneur militaire est l'obéissance », répliqua triste-mont Marmout. - « Et l'honneur civil, répondit Laffitte, ne vous ordonne-t-il pas de respecter le sang des citoyens?» Mais le maréchal ne consentit qu'à entendre leurs propositions. Elles furent du reste repoussées par M. de Polignac. Le lendemain 29, le Louvre et les Tuileries furent attaqués, et Marmont dut battre en retraite par le jardin des Tuileries, les Champs-Elysées et le Bois de Boulogne. A la barrière, le dauphin vint se mettre à la tête des troupes. Offense de se voir dépouiller de son commandement, dit M. Véron, le duc de Raguse crut devoir conserver, comme major général, le commandement supérieur des régiments de la garde et continua de prendre directement les ordres dit roi. Ayant obtenu de Charles X une gratification de 2 mois de solde pour les soldats qu'il dirigeait, il l'annonça dans un ordre du jour et ordonna aux officiers-payeurs de se présenter chez l'intendant de la liste civile. L'intendant, qui n'avait pas d'argent, vint se plaindre au dauphin d'un ordre du jour qui le mettait dans l'embarras. Déjà irrité contre Marmont, le dauphin s'indigna qu'on ne l'eût pas consulté; il fit mander le maréchal: « Vous oubliez, lui dit-il, que je commande! Vous méconnaissez donc l'ordonnance qui m'a nommé généralissime? - Non monseigneur, j'ai pris les ordres du roi. - Ah! vous me bravez. Pour vous prouver que je vous commande, je vous envoie aux arrêts.» Surpris et irrité, Marmont haussa les épaules. Le dauphin ajouta: « Est-ce que vous voulez faire avec nous comme avec l'autre? » C'est alors que le duc de Raguse, s'accusant lui-même, répondit : « Prince, sans les traîtres, vous n'auriez jamais régné, » Le dauphin fit arrêter Marmont, mais le roi envoya le duc de Luxembourg rendre son épée au maréchal. Celui-ci refusa et demanda à être jugé par un conseil de guerre; sur les instances du duc, il consentit à se rendre auprès du roi et à se réconcilier avec le dauphin. Il suivit ensuite à Rambouillet, puis en Angleterre, Charles X qui lui remit à Spithead, le 18 août, «l'épée qu'il portait toujours lorsqu'il était avec les troupes françaises. » Depuis cette époque, Marmont fut étranger à la France. D'Amsterdam, le 22 août 1830, il écrivit un Mémoire pour justifier sa conduite aux yeux de l'Europe. En 1830, il envoya son serment de fidélité à Louis-Philippe, mais ne figura plus sur la liste officielle des maréchaux de France. Il voyagea ensuite en Orient, puis se fixa Vienne et enfin à Venise où il mourut. On a de lui : Mémoire à l'empereur Napoléon sur les régiments frontières, dans la Revue rétrospective de 1835; Rapport sur l'ouvrage de M. Charles Dupin ayant pour titre Voyage en Angleterre; Voyage en Hongrie, en Transylvanie, dans la Russie méridionale, en Crimée et sur les bords de la mer d'Azoff, à Constantinople, dans quelques parties de l'Asie Mineure, en Syrie, en Palestine et en Egypte (Paris, 1837, 4 volumes) ; Esprit des institutions militaires (1845). En mourant et par testament, il ordonna que ses Mémoires fussent publiés « sans y apporter aucun changement, même sous prétexte de correction de style; sans souffrir ni augmentation dans le texte, ni diminution, ni suppression quelconque. » Ces Mémoires du duc de Raguse, de 1792 à 1832, parurent à Paris, chez Perrotin, en 1856 (8 volumes). Ils donnèrent lieu à de nombreuses réclamations, sanctionnées par les tribunaux. Un autour impartial les a appréciés ainsi : « Les Mémoires du duc de Raguse, dit M. Cuvillier-Fleury, ne sont pas seulement le monument de l'orgueil, c'en est le triomphe; et je ne sais rien de plus déconcertant pour la sagesse humaine, de plus décourageant pour la modestie, de plus corrupteur qu'un pareil livre. »

Extrait de la table nominative

Résumé de l'ensemble des travaux parlementaire
de Auguste-Frédéric-Louis Viesse MARMONT

Avertissement : les extraits de tables nominatives et biographies sont issus d'une reconnaissance automatisée des caractères ; merci de nous signaler toute erreur ou coquille.

Page mise à jour le

Pour toute remarque relative à cette page, veuillez contacter : anciens-senateurs@senat.fr