Le résumé
Depuis une dizaine d'années, l'État de droit est devenu une priorité européenne. Bien que cette notion ne soit pas définie dans les traités, l'Union européenne a développé une véritable politique publique en faveur de l'État de droit, reposant sur des institutions, des mécanismes de suivi et de sanction, une jurisprudence, une coopération avec d'autres organisations internationales, le Conseil de l'Europe notamment, et une dimension extérieure. Le respect de l'État de droit est d'ailleurs une condition d'adhésion pour les pays candidats.
Or, cette valeur européenne est aujourd'hui en partie remise en cause par certains États membres. Les principales atteintes à l'État de droit prennent la forme de l'affaiblissement des contre-pouvoirs, à commencer par le système judiciaire, mais aussi les médias et la société civile.
L'Union européenne a semblé démunie face à ces dérives. Privilégiant d'abord le dialogue, elle a progressivement développé de nouveaux instruments combinant promotion de l'État de droit, prévention et réaction. Toutefois, devant la mauvaise volonté manifeste de certains États membres, la Commission européenne a haussé le ton : en décembre 2017, elle a déclenché la procédure de l'article 7, paragraphe 1, du traité sur l'Union européenne, invitant le Conseil à constater l'existence d'un risque clair de violation grave de l'État de droit en Pologne. Le Parlement européen a fait de même pour ce qui concerne la Hongrie, en septembre 2018. Mais le Conseil ne s'est toujours pas prononcé, et la procédure est dans l'impasse. Des atteintes à l'État de droit, plus ponctuelles, sont aussi relevées dans d'autres États membres.
Les - maigres - résultats obtenus l'ont été sur le terrain du droit. En effet, la Commission a mobilisé la procédure d'infraction et, dans plusieurs cas, a saisi la Cour de justice de l'Union européenne de recours en manquement. La Cour a plusieurs fois condamné la Pologne et la Hongrie par cette voie.
L'Union européenne s'est récemment dotée d'un nouveau mécanisme, de nature financière, liant le versement des fonds européens aux États membres au respect par ceux-ci de l'État de droit. Cette « conditionnalité État de droit », pour être vraiment opérationnelle, requiert toutefois la réunion de nombreuses conditions. Aussi, des interrogations subsistent sur son efficacité. La commission des affaires européennes du Sénat appelle à les lever.