PROJET DE LOI adopté le 21 juin 2000 |
|
N°142
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000 |
PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR LE SÉNAT autorisant la ratification de la convention relative à l' entraide judiciaire en matière civile entre la République française et la République socialiste du Vietnam . |
||
Le Sénat a adopté, en première lecture, le projet de loi, dont la teneur suit : |
||
Voir les numéros : Sénat : 218 (1999-2000) et 282 (1999-2000). |
Article unique
Est
autorisée la ratification de la convention relative à l'entraide
judiciaire en matière civile entre la République française
et la République socialiste du Vietnam, signée à Paris le
24 février 1999, et dont le texte est annexé à
la présente
loi.
Délibéré,
en séance publique, à Paris, le 21 juin 2000.
Le
Président,
Signé :
Christian Poncelet
ANNEXE
CONVENTION
relative à l'entraide judiciaire en
matière civile
entre la République française
et la
République socialiste du Vietnam,
La République française et
la République socialiste du
Vietnam,
Désireuses de développer et
renforcer leur coopération dans le domaine des relations judiciaires,
ont résolu de conclure la présente
Convention.
A cette fin ont désigné
comme plénipotentiaires :
Le
Président de la République française : Mme Elisabeth
Guigou, garde des sceaux, ministre de la
justice ;
Le Président de la
République socialiste du Vietnam : M. Nguyen Dinh Loc,
ministre de la justice,
lesquels, après s'être mutuellement
communiqué leurs pleins pouvoirs, reconnus en bonne et due forme, sont
convenus des dispositions suivantes :
Chapitre I
er
Dispositions
générales
Article 1
er
Champ
d'application
1. Chacun des deux Etats contractants s'engage à accorder à l'autre une entraide judiciaire en matière civile. Aux fins de la présente Convention, la matière civile comprend le droit civil, le droit de la famille, le droit commercial et le droit du travail.
Article 2
Autorités centrales
1. Les ministères de la
justice des deux Etats sont désignés comme autorités
centrales chargées de satisfaire aux obligations définies dans la
présente Convention.
2. Les
autorités centrales correspondent directement entre elles ; elles
envoient leurs demandes accompagnées d'une traduction dans la langue de
l'Etat requis ; leur intervention est gratuite.
Article 3
Refus d'entraide
L'exécution des demandes d'entraide peut être refusée si elle va à l'encontre de la souveraineté, de la sécurité ou de l'ordre public de l'Etat requis.
Article 4
Echange d'informations
Les autorités centrales se communiquent, sur demande, toute information sur le droit de leur Etat, ainsi que des expéditions des décisions judiciaires rendues par les tribunaux.
Chapitre II
Accès à la
justice
Article 5
Protection judiciaire
1. Pour la défense de
leurs droits et intérêts, les ressortissants de chacun des deux
Etats contractants ont, sur le territoire de l'autre Etat, aux mêmes
conditions que les ressortissants de cet Etat, libre accès aux tribunaux
et, dans les procédures judiciaires, ils ont les mêmes droits et
obligations.
2. Les dispositions du
paragraphe précédant s'appliquent aux personnes morales
constituées selon les lois de l'un ou l'autre des deux Etats.
Article 6
Dispense de caution
« judicatum solvi »
Les ressortissants de chacun des deux Etats ne peuvent, sur le territoire de l'autre Etat, se voir imposer ni caution ni dépôt sous quelque dénomination que ce soit, à raison soit de leur qualité d'étranger, soit du défaut de domicile ou de résidence dans le pays.
Article 7
Assistance judiciaire
1. Les ressortissants de
chacun des deux Etats jouissent sur le territoire de l'autre Etat du
bénéfice de l'assistance judiciaire comme les nationaux
eux-mêmes, conformément à la législation en la
matière de l'Etat sur le territoire duquel l'assistance est
demandée.
2. Aux fins de la
présente Convention, l'assistance judiciaire inclut l'exonération
totale ou partielle des frais et dépens du procès ainsi que de la
rémunération des auxiliaires de justice.
Article 8
Reconduction de l'assistance
judiciaire
Lorsqu'une personne a été admise au bénéfice de l'assistance judiciaire sur le territoire de l'un des deux Etats à l'occasion d'une procédure ayant donné lieu à une décision, elle bénéficie, sans nouvel examen, de l'assistance judiciaire sur le territoire de l'autre Etat pour obtenir la reconnaissance et l'exécution de cette décision.
Article 9
Présentation de la demande
d'assistance judiciaire
1. La demande d'assistance
judiciaire est adressée à l'autorité compétente de
l'Etat requis par l'intermédiaire des autorités
centrales.
2. La demande doit être
accompagnée d'un document officiel attestant des ressources du
requérant, sous réserve de l'application de l'article 8. Les
documents qui sont produits à l'appui de la demande sont traduits dans
la langue de l'Etat requis.
Article 10
Exequatur des frais et
dépens
Les condamnations aux frais et dépens du procès, prononcées dans l'un des deux Etats contre le demandeur ou l'intervenant dispensé de la caution ou du dépôt sous quelque dénomination que ce soit, seront, sur demande de l'autorité centrale de cet Etat adressée à celle de l'autre Etat, rendues gratuitement exécutoires dans ce dernier.
Chapitre III
Transmission et remise des
actes
Article 11
Transmission de l'acte
Lorsqu'un acte judiciaire ou
extrajudiciaire est destiné à une personne résidant sur le
territoire de l'autre Etat, l'autorité compétente selon les lois
de l'Etat d'origine adresse la demande de notification à
l'autorité centrale de l'Etat requis.
La
demande est accompagnée de l'acte en double exemplaire, traduit dans la
langue de l'Etat requis.
Article 12
Remise de l'acte
1. L'autorité centrale
de l'Etat requis procède ou fait procéder à la remise de
l'acte par la voie qu'elle estime la plus appropriée, dans le cadre de
sa législation.
2. La preuve de la
remise ou de la tentative de remise se fait au moyen d'un
récépissé, d'une attestation ou d'un procès-verbal.
Ces documents, accompagnés d'un exemplaire de l'acte, sont
retournés directement à l'autorité
requérante.
3. Les services de
l'Etat requis ne peuvent donner lieu au paiement ou au remboursement de taxes
ou de frais.
Article 13
Remise par la voie diplomatique ou
consulaire
Chaque Etat a la faculté de faire remettre directement et sans contrainte par les soins de ses agents diplomatiques ou consulaires les actes destinés à ses propres ressortissants se trouvant sur le territoire de l'autre Etat.
Article 14
Autres voies de remise
Les dispositions du présent
chapitre ne font pas
obstacle :
– à la
faculté d'adresser directement un double de l'acte à son
destinataire par la voie postale par lettre recommandée avec
accusé de
réception ;
– à
la faculté pour toute Partie intéressée de faire
procéder à ses frais à la signification ou à la
notification d'un acte selon les modes en vigueur dans l'Etat de
destination.
Chapitre IV
Obtention de
preuves
Article 15
Commissions rogatoires
1. L'autorité
judiciaire de l'un des deux Etats peut demander à l'autorité
judiciaire de l'autre Etat de procéder par voie de commission rogatoire
aux mesures d'instruction qu'elle estime nécessaires dans le cadre de la
procédure dont elle est
saisie.
2. La commission rogatoire
contient les indications
suivantes :
a)
L'autorité
requérante et, si possible, l'autorité
requise ;
b)
L'identité
et l'adresse des Parties, le cas échéant de leurs
représentants ;
c)
La
nature et l'objet de l'instance et un exposé sommaire des
faits ;
d)
Les actes
d'instruction à accomplir.
La commission
rogatoire doit être signée et revêtue du sceau de
l'autorité
requérante.
3. Elle doit
être accompagnée d'une traduction dans la langue de l'Etat
requis.
Article 16
Mode de transmission des commissions
rogatoires
Les commissions rogatoires sont transmises par l'intermédiaire des autorités centrales. Les pièces d'exécution sont retournées à l'autorité judiciaire requérante par la même voie.
Article 17
Modalités d'exécution des
commissions rogatoires
1. L'autorité
judiciaire qui procède à l'exécution d'une commission
rogatoire applique sa loi interne en ce qui concerne les formes à
suivre.
2. Toutefois, il est
déféré à la demande de l'autorité
requérante tendant à ce qu'il soit procédé suivant
une forme spéciale, à moins que celle-ci ne soit incompatible
avec la loi de l'Etat requis, ou que son application ne soit pas possible en
raison, soit des usages de l'Etat requis, soit de difficultés
pratiques.
3. La commission rogatoire
doit être exécutée dans les meilleurs délais
possibles.
Article 18
Frais d'exécution des commissions
rogatoires
L'exécution des commissions rogatoires ne peut donner lieu au remboursement de taxes ou de frais, de quelque nature que ce soit. Toutefois, l'Etat requis a le droit d'exiger de l'Etat requérant le remboursement des indemnités payées aux experts et des frais résultant de l'application d'une forme spéciale demandée par la Partie requérante.
Article 19
Exécution par des agents
diplomatiques ou consulaires
Chacun des deux Etats a la faculté de faire exécuter, sans contrainte, les commissions rogatoires par ses agents diplomatiques ou consulaires lorsqu'elles concernent ses propres ressortissants.
Chapitre V
Reconnaissance et
exécution des décisions
judiciaires
Article 20
Décisions susceptibles de
reconnaissance et d'exécution
Le présent chapitre est applicable, en matière civile, aux décisions rendues par les tribunaux des deux Etats, y compris les décisions des juridictions pénales statuant sur l'action civile en réparation de dommages.
Article 21
Conditions de reconnaissance et
d'exécution
Les décisions rendues par les
juridictions de l'un des deux Etats sont reconnues et peuvent être
déclarées exécutoires sur le territoire de l'autre Etat si
elles réunissent les conditions
suivantes :
1. La décision
émane d'une juridiction compétente selon le droit de l'Etat
requis ;
2. La loi appliquée
au litige est celle désignée par les règles de conflit de
lois admises sur le territoire de l'Etat requis. Toutefois, la loi peut
être différente de la loi désignée par les
règles de conflit de l'Etat requis si l'application de l'une ou l'autre
loi aboutit au même
résultat ;
3. La
décision est passée en force de chose jugée et est
exécutoire. Toutefois, en matière d'obligations alimentaires, de
droit de garde d'un mineur ou de droit de visite, la décision peut
être simplement exécutoire sur le territoire de l'Etat où
elle a été
rendue ;
4. Les Parties ont
été régulièrement citées à
comparaître, représentées ou, si elles ont
été déclarées défaillantes, l'acte
introductif d'instance leur a été notifié
régulièrement et en temps utile pour qu'elles puissent se
défendre ;
5. La
décision ne contient rien de contraire aux principes et valeurs
fondamentaux de l'Etat
requis ;
6. Un litige entre les
mêmes parties, fondé sur les mêmes faits et ayant le
même objet que dans l'Etat
d'origine :
– n'est pas
pendant devant un tribunal de l'Etat requis premier saisi,
ou
– n'a pas donné lieu
à une décision rendue dans l'Etat requis, à une date
antérieure à celle de la décision présentée
à l'exequatur, ou
– n'a
pas donné lieu à une décision rendue dans un Etat tiers,
à une date antérieure à celle de la décision
présentée à l'exequatur, et reconnue dans l'Etat
requis.
Article 22
Procédure de reconnaissance et
d'exécution
1. La procédure de
reconnaissance et d'exécution de la décision est régie par
le droit de l'Etat
requis.
2. L'autorité judiciaire
requise ne procède à aucun examen au fond de la
décision.
3. Si la décision
statue sur plusieurs chefs de décisions, l'exécution peut
être accordée partiellement.
Article 23
Documents à produire
La personne qui invoque la reconnaissance
ou qui demande l'exécution doit
produire :
1. Une copie dûment
certifiée de la
décision ;
2. Tout document
de nature à établir que la décision a été
signifiée ou
notifiée ;
3. Le cas
échéant, une copie certifiée de la citation de la partie
qui a fait défaut à l'instance et toutes pièces de nature
à établir que cette citation l'a atteinte en temps
utile ;
4. Toutes pièces de
nature à établir que la décision est exécutoire sur
le territoire de l'Etat où elle a été rendue et ne peut
plus, à l'exception d'une décision relative à une
obligation alimentaire, à la garde d'un mineur ou au droit de visite,
faire l'objet de voie de recours ordinaire.
Ces
documents doivent être accompagnés d'une traduction
certifiée conforme, soit par un agent diplomatique ou consulaire, soit
par toute personne autorisée à cet effet sur le territoire de
l'un des deux Etats.
Chapitre VI
Sentences
arbitrales
Article 24
Reconnaissance et
exécution des sentences arbitrales
Chacun des deux Etats reconnaît et exécute les sentences arbitrales rendues sur le territoire de l'autre Etat selon les dispositions de la Convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères.
Chapitre VII
Etat civil et dispense de
légalisation
Article 25
Communication de
documents d'état civil
1. Chaque Etat communique
à l'autre qui le demande dans un intérêt administratif
dûment spécifié, les actes et les expéditions des
décisions judiciaires qui concernent l'état civil des
ressortissants de l'Etat
requérant.
2. Les demandes et les
actes de l'état civil sont transmis par la voie diplomatique ou
consulaire. Les demandes et les expéditions de décisions
judiciaires, par l'intermédiaire des autorités centrales.
Article 26
Dispense de légalisation
Les actes mentionnés dans la
présente Convention sont dispensés de
légalisation.
Toutefois, si les
autorités de l'Etat sur le territoire duquel l'acte est produit ont des
doutes sérieux sur la véracité de la signature, sur la
qualité dans laquelle le signataire de l'acte a agi, ou sur
l'identité du sceau ou du timbre, elles peuvent demander à
l'autorité centrale de l'Etat duquel provient l'acte ou le document d'en
vérifier l'authenticité. Une telle démarche doit se
limiter aux cas exceptionnels et être toujours motivée.
Chapitre VIII
Dispositions
finales
Article 27
Suivi de l'application de la
convention
Des représentants des deux Etats se rencontrent en tant que de besoin, afin d'examiner le fonctionnement pratique de la Convention.
Article 28
Règlement des difficultés
d'application
Les difficultés qui s'élèveraient à l'occasion de l'application de la présente Convention seront réglées par la voie diplomatique.
Article 29
Entrée en vigueur
Chacun des deux Etats contractants s'engage à notifier à l'autre l'accomplissement des procédures requises par son droit interne pour la mise en vigueur de la présente Convention, qui prendra effet le premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la dernière des notifications.
Article 30
Durée, modification et
dénonciation
1. La présente
Convention est conclue pour une durée
illimitée.
2. Toute modification
à la présente Convention fera l'objet d'une consultation entre
les deux Etats.
3. Chacun des deux
Etats pourra à tout moment la dénoncer et cette
dénonciation prendra effet six mois après la date de
réception de sa notification par l'autre
Etat.
En foi de quoi, les plénipotentiaires
respectifs ont signé la présente Convention et y ont
apposé leur sceau.
Fait en double exemplaire,
à Paris le 24 février 1999, en langue française et en
langue vietnamienne, les deux textes faisant également foi.
Pour la République
française :
Elisabeth Guigou,
Garde des
sceaux,
Ministre de la justice
Pour la République
socialiste
du Vietnam :
Loc Nguyen Dinh,
Ministre
de la justice