PROJET DE LOI adopté le 30 mai 1996 |
N° 136 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996 |
PROJET DE LOI
ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE
relatif à la détention provisoire.
Le Sénat a adopté, en première lecture, après déclaration d'urgence, le projet de loi dont la teneur suit :
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Voir les numéros :
Sénat : 330 et 374 (1995-1996).
Article premier A (nouveau).
Dans le premier alinéa de l'article 144 du code de procédure pénale, le mot : « encourue » est remplacé par le mot : « prévue ».
Article premier.
I (nouveau). - Dans le premier alinéa de l'article 144 du code de procédure pénale, après les mots : « la détention provisoire peut », sont insérés les mots : « , à titre exceptionnel, ».
II. - Le 2° de l'article 144 du code de procédure pénale est remplacé par un 2° et un 3° ainsi rédigés :
« 2° Lorsque cette détention est l'unique moyen de protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement ;
« 3° Lorsque l'infraction, en raison de sa gravité, des circonstances de sa commission ou de l'importance du préjudice qu'elle a causé, a provoqué un trouble exceptionnel à l'ordre public, auquel la détention est l'unique moyen de mettre fin. »
Art. 2.
Il est inséré, après l'article 144 du code de procédure pénale, un article 144-1 ainsi rédigé :
« Art. 144-1. - La détention provisoire ne peut excéder une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité.
« Le juge d'instruction doit ordonner la mise en liberté immédiate de la personne placée en détention provisoire, selon les modalités prévues par l'article 147, dès que les conditions prévues à l'article 144 ne sont plus remplies. »
Art. 2 bis (nouveau).
La première phrase du premier alinéa de l'article 145 du code de procédure pénale est ainsi rédigée :
« En toute matière, le placement en détention provisoire est prescrit par une ordonnance qui doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait sur le caractère insuffisant des obligations du contrôle judiciaire et le motif de la détention par référence aux seules dispositions de l'article 144. »
Art. 3.
L'article 145-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
I. - À la fin de la première phrase du troisième alinéa, les mots :
« d'un an » sont remplacés par les mots : « de huit mois ».
II. - Dans la deuxième phrase du troisième alinéa, après le mot :
« exceptionnel », sont insérés les mots : « et sous réserve des dispositions de l'article 145-3 ».
III. - Les deux dernières phrases du troisième alinéa sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
« Cette décision ne peut être renouvelée lorsque la peine encourue est inférieure à dix ans d'emprisonnement. »
Art. 4.
La deuxième phrase de l'article 145-2 du code de procédure pénale est ainsi modifiée :
I. - Après le mot : « Toutefois », sont insérés les mots : « , sous réserve des dispositions de l'article 145-3 ».
II. - Les mots : « un an » sont remplacés par les mots : « six mois ».
Art. 5.
L'article 145-3 du code de procédure pénale devient l'article 145-4 et l'article 145-3 est ainsi rédigé :
« Art. 145-3. - Lorsque la durée de la détention provisoire excède un an en matière criminelle ou huit mois en matière délictuelle, les décisions ordonnant sa prolongation ou rejetant les demandes de mise en liberté doivent aussi comporter les indications qui justifient la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure.
« Le juge d'instruction n'est toutefois pas tenu d'indiquer la nature des investigations auxquelles il a l'intention de procéder lorsque cette indication risquerait d'entraver l'accomplissement de ces investigations. »
Art. 5 bis (nouveau).
A l'article 149 du code de procédure pénale, les mots : « préjudice manifestement anormal et d'une particulière gravité » sont remplacés par les mots : « préjudice anormal ».
Art. 6.
L'article 179 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
I. - Au deuxième alinéa, après les mots : « à la détention provisoire », sont insérés les mots : « , au placement sous surveillance électronique ».
II. - Dans la première phrase du troisième alinéa, après les mots :
« en détention », sont insérés les mots : « , sous placement sous surveillance électronique ».
III. - La seconde phrase du troisième alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« En cas de maintien en détention provisoire, ou sous placement sous surveillance électronique, les éléments de l'espèce expressément énoncés dans l'ordonnance doivent justifier cette mesure particulière par la nécessité d'empêcher une pression sur les témoins ou les victimes, de prévenir le renouvellement de l'infraction, de protéger le prévenu ou de garantir son maintien à la disposition de la justice. La même ordonnance peut également être prise lorsque l'infraction, en raison de sa gravité, des circonstances de sa commission ou de l'importance du préjudice qu'elle a causé, a provoqué un trouble exceptionnel à l'ordre public auquel le maintien en détention provisoire demeure l'unique moyen de mettre fin. »
IV. - Au quatrième alinéa, après les mots : « détention provisoire », sont insérés les mots : « ou sous placement sous surveillance électronique ».
Art. 7.
L'article 187-1 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Art. 187-1. - Dans les vingt-quatre heures suivant une ordonnance de placement en détention provisoire, la personne mise en examen peut demander sa mise en liberté au président du tribunal de grande instance ou, en cas d'empêchement, au magistrat qui le remplace.
« Le président du tribunal ou le magistrat qui le remplace statue dans les trois jours ouvrables suivant la demande par une ordonnance qui n'est pas susceptible de recours, après avoir entendu les réquisitions du ministère public, les observations de la personne mise en examen et, le cas échéant, celles de son avocat.
« Le président du tribunal ou le magistrat qui le remplace, s'il estime que les conditions prévues par l'article 144 ne sont pas remplies, ordonne la mise en liberté de la personne mise en examen, le placement sous contrôle judiciaire ou, avec le consentement de celle-ci, sous surveillance électronique. Le consentement de la personne mise en examen peut résulter des déclarations faites devant le juge d'instruction.
« Lorsque la demande est formée avant l'exécution du mandat de dépôt, la personne est remise à un officier de police judiciaire qui la garde à sa disposition dans un local désigné selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État jusqu'à la comparution devant le président du tribunal ou le magistrat qui le remplace ; celui-ci doit statuer dans les vingt-quatre heures de la demande. »
Art. 8.
Au troisième alinéa de l'article 396 et au deuxième alinéa de l'article 397-3 du code de procédure pénale, les mots : « par référence aux dispositions des 1° et 2° de l'article 144 » sont remplacés par les mots : « par référence aux dispositions des 1°, 2° et 3° de l'article 144 ».
Art. 8 bis (nouveau).
L'intitulé de la section VII du chapitre premier du titre III du livre premier du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Section VII. -Du contrôle judiciaire, de la détention provisoire et du placement sous surveillance électronique. »
Art. 8 ter (nouveau).
Il est inséré, après l'article 150 du code de procédure pénale, une sous-section 4 ainsi rédigée :
« Sous-section 4. - Du placement sous surveillance électronique.
« Art. 150-1. - Lorsque la détention provisoire a été ordonnée, le placement sous surveillance électronique peut être substitué à l'incarcération par le juge d'instruction, après avoir recueilli le consentement de la personne mise en examen, donné en présence de son avocat.
« Le placement sous surveillance électronique emporte, pour la personne mise en examen, interdiction de s'absenter de son domicile ou de tout autre lieu désigné par le juge d'instruction en dehors des périodes fixées par celui-ci. Les périodes sont fixées en tenant compte des nécessités de l'information ainsi que des nécessités liées à la vie familiale de la personne mise en examen, à l'organisation de sa défense, à son activité professionnelle ou au suivi d'un traitement médical, d'une formation ou d'un enseignement.
« Le contrôle de l'exécution de la mesure est assuré au moyen d'un procédé permettant de détecter à distance l'absence ou la présence de la personne mise en examen dans le lieu désigné par le juge d'instruction pour chaque période fixée. La mise en oeuvre de ce procédé peut conduire à imposer à la personne assignée le port, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, d'un dispositif intégrant un émetteur.
« Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre de la justice dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. La mise en oeuvre doit garantir le respect de la dignité, de l'intégrité et de la vie privée de la personne.
« Avant de recueillir le consentement de la personne mise en examen, le juge d'instruction lui donne connaissance des dispositions du présent article et des articles 150-3 à 150-6. Mention de cette formalité et du consentement est portée au procès-verbal à peine de nullité.
« Art. 150-2. - Le contrôle à distance du placement sous surveillance électronique est assuré par un service de l'État désigné par décret ou par une personne habilitée à cet effet dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État. Ce décret détermine également les personnes ou services pouvant être requis par le juge d'instruction pour procéder à l'installation du dispositif technique permettant le contrôle à distance.
« Lorsqu'il décide de recourir au placement sous surveillance électronique, le juge d'instruction désigne la personne ou le service chargé de contrôler sur place la présence de la personne mise en examen au lieu du placement. Lorsque la personne ou l'agent du service désigné constatent l'absence irrégulière de l'intéressé, le cas échéant après s'être rendus sur place, ils en font aussitôt rapport au juge d'instruction.
« Les services de police ou de gendarmerie peuvent toujours constater l'absence irrégulière de la personne mise en examen et en faire rapport au juge d'instruction.
« Art. 150-3. - Le ou les lieux d'exécution du placement sous surveillance électronique, ainsi que les périodes d'absence fixées par le juge d'instruction, peuvent à tout moment être modifiés par ce magistrat, après avoir recueilli le consentement de la personne mise en examen.
« Le juge d'instruction peut à tout moment suspendre l'application du placement sous surveillance électronique.
« Art. 150-4. - Le juge d'instruction peut à tout moment désigner un médecin afin que celui-ci vérifie que la mise en oeuvre du procédé mentionné à l'article 150-1 ne présente pas d'inconvénient pour la santé de la personne mise en examen. Cette désignation est de droit à la demande de la personne mise en examen. Le certificat médical est versé au dossier.
« Art. 150-5. - Si la personne mise en examen se soustrait volontairement aux obligations du placement sous surveillance électronique, le juge d'instruction peut, sous réserve des dispositions du présent article, décerner à son encontre un mandat d'amener, d'arrêt ou de dépôt en vue de sa détention provisoire.
« La détection, au moyen du procédé de surveillance à distance mentionné à l'article 150-1, de la violation du placement sous surveillance électronique ne peut autoriser le placement en détention provisoire que si la personne ou l'agent du service chargés de contrôler la présence de la personne mise en examen sur les lieux d'assignation ont été avertis, se sont rendus sur les lieux et ont constaté l'absence de l'intéressé.
« Art. 150-6. - La personne mise en examen peut à tout moment et par tout moyen demander la mainlevée du placement sous surveillance électronique.
« Les dispositions des articles 147 à 148-2, 148-4, 148-7 et 148-8 relatives à la mise en liberté d'une personne placée en détention provisoire sont applicables à la mainlevée du placement sous surveillance électronique. »
Art. 8 quater (nouveau).
L'article 137 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
I. - Au premier alinéa, après les mots : « détention provisoire », sont insérés les mots : « ou sous surveillance électronique ».
II. - Dans la première phrase du second alinéa, après les mots :
« détention provisoire », sont insérés les mots : « ou sous surveillance électronique ».
III. - Dans la deuxième phrase du second alinéa, après les mots :
« détention provisoire », sont insérés les mots : « ou du placement sous surveillance électronique ».
Art. 8 quinquies (nouveau).
Le premier alinéa de l'article 141-2 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il peut également décerner à son encontre mandat d'amener en vue de lui notifier son placement sous surveillance électronique. »
Art. 8 sexies (nouveau).
À la fin de la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article 177 du code de procédure pénale, après les mots : « au contrôle judiciaire », sont ajoutés les mots : « et au placement sous surveillance électronique ».
Art. 8 septies (nouveau).
L'article 186 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
I. - Le premier alinéa est complété par les mots : « ainsi que contre les ordonnances et décisions relatives au placement sous surveillance électronique ».
II. - Dans la seconde phrase du deuxième alinéa, après les mots :
III. « mise en examen », sont insérés les mots : « , au placement sous surveillance électronique ».
Art. 8 octies (nouveau).
Après l'article 221-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 221-2 ainsi rédigé :
« Art. 221-2. - Lorsqu'un délai de quatre mois s'est écoulé depuis la date du dernier acte d'instruction, les parties peuvent saisir la chambre d'accusation dans les conditions prévues par le troisième alinéa de l'article 173. Ce délai est ramené à deux mois au profit de la personne mise en examen lorsque celle-ci est placée en détention provisoire.
« Dans les huit jours de la réception du dossier par le greffe de la chambre d'accusation, le président peut, par ordonnance motivée non susceptible de recours, décider qu'il n'y a pas lieu de saisir la chambre d'accusation.
« La chambre d'accusation, lorsqu'elle est saisie, peut soit évoquer et procéder dans les conditions prévues par les articles 201, 202, 204 et 205, soit renvoyer le dossier au juge d'instruction ou à tel autre afin de poursuivre l'information. »
Art. 9.
La présente loi sera étendue dans les territoires d'outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte par une loi ultérieure, après consultation des assemblées territoriales concernées.
Art. 10.
La présente loi entrera en vigueur le 1er octobre 1996.
Délibéré, en séance publique, à Paris, le 30 mai 1996.
Le Président,
Signé : René MONORY.