PROPOSITION DE RESOLUTION

[N° 447]



tendant à créer une commission d'enquête sur la sécurité sanitaire et alimentaire des produits destinés à la consommation animale et humaine en France et dans l'Union européennes,


PRESENTEE



Par Mme Odette TERRADE, M. Gérard LE CAM, Mme Marie-Claude BEAUDEAU, M. Jean-Luc BECART, Mmes Danielle BIDARD-REYDET, Nicole BORVO, MM. Robert BRET, Michel DUFFOUR, Guy FISCHER, Thierry FOUCAUD, Pierre LEFEBVRE, Paul LORIDANT, Mme Hélène LUC, MM. Jack RALITE et Ivan RENAR,


Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)



Santé publique. - Agro-alimentaire - Animaux - Commission d'enquête - Consommation - Produits alimentaires.

Article unique




EXPOSE DES MOTIFS



MESDAMES, MESSIEURS,

L'apparition soudaine sur le devant de l'actualité de l'affaire dite du " poulet à la dioxine ", trois années seulement après la révélation des premiers cas d'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) ou " maladie de la vache folle ", témoigne une nouvelle fois de la perversité d'un modèle d'agriculture productiviste qui représente une menace pour l'équilibre social, écologique et territorial de notre pays mais aussi, chacun peut le constater, un facteur de danger pour la santé des consommateurs.

A l'origine de cette affaire, l'incorporation dans la fabrication des farines destinées à l'alimentation du bétail de graisses animales contaminées par la dioxine.

Cette molécule - selon les experts - peut avoir des effets néfastes chez l'homme, au-delà d'une dose journalière de 1 à 4 picogrammes par kilogramme du poids corporel et par jour, dans l'hypothèse d'une exposition régulière dans la vie d'un individu.

En vérité, l'évaluation des dangers pour la santé humaine par l'intoxication à la dioxine repose sur des études expérimentales effectuées sur l'animal et impose donc la plus grande prudence.

En vertu du principe de précaution, le repérage de produits présentant un taux de dioxine anormalement élevé nécessite la mise en place immédiate de mesures conservatoires de nature à préserver la santé des consommateurs.

A cet égard, les délais écoulés entre la livraison par la firme belge Verkest à une entreprise française de fabrication de farine animale, le 19 janvier 1999, d'un lot de graisses animales contaminées et les analyses révélant avec certitude une contamination par la dioxine le 26 avril 1999, puis le 28 mai 1999, date de l'activation du réseau d'alerte communautaire, amènent à nous interroger tant sur l'efficacité des contrôles sanitaires et alimentaires aux différents stades de la chaîne alimentaire que sur la réalité de la transmission des informations entre les autorités belges et les pays de l'Union européenne concernés, en particulier la France.

[retour au début]

Notre pays consomme à lui seul 440 000 tonnes de farines animales chaque année. L'intérêt grandissant des éleveurs pour ce type d'alimentation, fabriqué à partir de déchets d'abattoirs, répond au souci d'accélérer la croissance du bétail afin de satisfaire aux exigences des firmes de l'industrie agro-alimentaire.

Aujourd'hui, la question de l'interdiction de ces farines est clairement posée, au niveau national et communautaire.

Si une telle mesure peut s'avérer, le cas échéant, nécessaire, elle ne semble toutefois pas suffisante pour rassurer les consommateurs sur la qualité des produits d'élevage.

En effet, l'incinération des déchets animaux produira de la dioxine polluant nos pâturages ; en outre, la substitution des protéines animales par des protéines végétales nécessitera l'importation supplémentaire des oléagineux et protéagineux des Etats-Unis, avec une forte probabilité d'entrée de produits transgéniques. Il est à craindre sur ce point que l'accord sur la réforme de la politique agricole commune conclu à Berlin le 26 mars dernier ne contribue à accroître notre dépendance sur les marchés extérieurs.

D'où l'urgente nécessité de renforcer les contrôles et le suivi des produits destinés à la consommation animale et humaine.

Il est notamment souhaitable d'harmoniser au plus vite les différentes réglementations nationales au niveau européen, mais aussi, entre pays membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), en imposant l'application de normes strictes de qualité, de sécurité, d'hygiène et le respect du principe de précaution.

La commission d'enquête devra, en prenant appui sur l'exemple de la contamination à la dioxine, formuler des propositions en vue de renforcer la sécurité sanitaire et alimentaire en France et dans l'Union européenne.

Elle devra notamment indiquer les moyens nécessaires pour prévenir en amont des risques pour la santé avant la commercialisation au public. Une traçabilité rigoureuse devrait être établie dès la fabrication de l'alimentation pour bétail jusqu'à la distribution des produits issus des activités agricoles.

Une implication plus forte des acteurs de la filière, en particulier les industries de l'agro-alimentaire, dans la mise en place et le financement des analyses sur les produits destinés à la consommation semble inévitable.

La commission d'enquête devra ensuite indiquer les moyens de renforcer les contrôles dans la fabrication des farines animales et, en cas d'interdiction totale de celles-ci, les dispositions à mettre en place pour garantir la sécurité des produits destinés à la consommation animale et humaine, tout en limitant notre dépendance alimentaire sur la production d'oléoprotéagineux.

Il conviendra d'étudier les possibilités nouvelles de débouchés pour les déchets et tous produits animaux les mieux à même de garantir la qualité de l'environnement.

Enfin, la commission d'enquête proposera des pistes de réflexion devant permettre de remédier aux défaillances dans la maîtrise des évolutions technologiques, industrielles et commerciales, le plus souvent orientées vers la recherche du profit maximum, au mépris de la qualité des produits et de la santé des consommateurs.

[retour au début]


PROPOSITION DE RéSOLUTION

Article unique



En application de l'article 11 du Règlement du Sénat, il est créé une commission d'enquête de vingt et un membres sur la sécurité sanitaire et alimentaire des produits destinés à la consommation animale et humaine en France et dans l'Union européenne.