Réforme des conditions d'exercice des compétences locales et des procédures applicables devant les chambres régionales des comptes
N° 84
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 18 novembre 1999
PROPOSITION DE LOI
tendant à réformer les conditions d'exercice des compétences locales et les procédures applicables devant les chambres régionales des comptes ,
PRÉSENTÉE
Par MM. Jacques OUDIN, Jean-Paul AMOUDRY, Philippe MARINI, Patrice GÉLARD, Joël BOURDIN, Paul GIROD et Yann GAILLARD,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Juridictions administratives. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En créant les chambres régionales des comptes, le
législateur a souhaité que, dans le nouveau cadre issu de la
décentralisation, le contrôle budgétaire, financier et
comptable des collectivités territoriales et de leurs
établissements publics soit exercé par des institutions
indépendantes, constituées de magistrats
spécialisés et géographiquement proches des
collectivités contrôlées.
Le contrôle exercé par les chambres régionales des comptes
constitue le corollaire indispensable de la décentralisation.
La préservation de l'indispensable dialogue entre
« contrôleurs » et
« contrôlés » passe cependant par le respect
des
principes généraux et intangibles de notre droit.
Or
les missions des chambres régionales des comptes se sont progressivement
affirmées dans un cadre juridique qui ne permet pas que ces grands
principes soient systématiquement garantis.
Qu'il s'agisse du respect des droits de la défense et du principe d'une
procédure contradictoire, de la pratique du contre-rapport, de la
collégialité ou de l'absence de voies de recours à
l'encontre d'actes faisant objectivement grief (les lettres d'observations
définitives sur la gestion des collectivités locales), l'ensemble
de ce dispositif souffre, à l'évidence, d'importantes lacunes.
La présente proposition de loi a donc pour objet de combler ces lacunes
afin que les missions que le législateur a entendu confier aux chambres
régionales des comptes puissent s'exercer dans un cadre juridique
répondant pleinement aux
exigences de l'Etat de droit.
Formant avec la Cour des comptes les juridictions financières, les
chambres régionales des comptes ont été dotées par
la loi du 2 mars 1982 de trois grandes attributions : le
jugement des
comptes
-susceptible d'appel devant la Cour des comptes et seule
catégorie de leurs attributions qui relève d'une fonction
juridictionnelle- ; le
contrôle des actes budgétaires
, qui
les conduit à émettre des avis non susceptibles de recours (sauf
dans le cas d'une décision déclarant une dépense non
obligatoire) ;
l'examen de la gestion
des collectivités locales,
lequel donne lieu à des observations qui, en l'état actuel du
droit, sont réputées ne pas faire grief.
Force est de constater que, depuis leur création par la loi du 2 mars
1982, la mise en place de ces nouvelles institutions s'est faite par
tâtonnements successifs.
Ainsi, le corps des magistrats de
chambres régionales des comptes a été très
largement constitué par des procédures de recrutement
exceptionnel
dictées par la nécessité de donner
rapidement une consistance à ces nouvelles juridictions. La
« montée en puissance » de ces dernières
s'est faite progressivement entre 1984 et 1990, leur budget passant au cours de
cette période de 113,13 à 269,38 millions de francs pour
atteindre 325,39 millions de francs en 1998.
Signe de la jeunesse de ces institutions, plusieurs textes législatifs
sont venus préciser ou adapter les textes fondateurs (les lois
n°82-213 du 2 mars 1982 et 82-594 du 10 juillet 1982). Si ces
modifications législatives ont renforcé les
garanties de
procédure
pour les collectivités locales, elles ont dans
l'ensemble abouti à
accroître
les pouvoirs des chambres
régionales des comptes, leurs « moyens de pression »
sur les collectivités ainsi que leur capacité d'investigation, en
créant un déséquilibre au détriment des droits de
la défense.
Première grande étape de ce processus d'adaptation
législative, la
loi n° 88-13 du 5 janvier 1988
d'amélioration de la décentralisation
a cherché
à lever une confusion des genres qui résultait de la loi du 2
mars 1982, laquelle pour définir le jugement des comptes incluait la
vérification du «
bon emploi
» des
crédits, en substituant à cette notion celle
d'«
emploi régulier
» des crédits et
en instituant une procédure spécifique d'examen de la gestion.
Fixant un nouvel équilibre, la loi du 5 janvier 1988 a néanmoins
été rapidement suivie par d'autres textes qui ont eu pour effet
principal de
renforcer
et
d'étendre
les compétences
des chambres régionales des comptes.
La
loi n° 90-55 du 15 janvier 1990 relative au financement des partis
et des campagnes électorales
a posé le principe de la
communication à l'assemblée délibérante des
observations définitives formulées par les chambres
régionales des comptes dans le cadre de l'examen de la gestion des
collectivités locales. Cette innovation majeure a eu pour effet de
transformer ce qui devait être essentiellement conçu comme une
aide à la bonne gestion en un instrument de régulation
politico-médiatique.
La
loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la
prévention de la corruption et à la transparence de la vie
économique et des procédures publiques
a renforcé et
précisé certaines règles de procédure applicables
devant les chambres régionales des comptes, notamment en posant
l'obligation de joindre le texte des lettres d'observations définitives
à la convocation de la séance de l'assemblée
délibérante au cours de laquelle celles-ci doivent être
communiquées.
Enfin, la
loi n° 95-127 du 8 février 1995
relative aux
marchés publics et aux délégations de service public
a
renforcé les pouvoirs de contrôle des juridictions
financières sur les services publics délégués.
Ce lent cheminement vers la maturité des chambres régionales des
comptes, qui s'est accompagné d'un renforcement de leurs pouvoirs, n'a
été qu'imparfaitement compensé par un développement
des garanties de procédure dont disposent les collectivités
locales.
Force est d'observer aujourd'hui qu'un
certain malaise
issu d'un
indiscutable déséquilibre semble affecter le climat dans lequel
s'inscrivent les relations entre les élus locaux et les chambres
régionales des comptes.
Trois types de griefs
sont formulés à l'encontre, sinon
des missions des chambres régionales des comptes, du moins de leurs
pratiques dans la mise en oeuvre des contrôles dont elles sont
chargées.
En premier lieu, nombre d'élus locaux déplorent la
médiatisation excessive
des observations provisoires que les
chambres régionales des comptes peuvent être amenées
à formuler sur la gestion des collectivités locales.
En deuxième lieu, l'absence d'articulation entre le contrôle de
légalité mis en oeuvre par les préfets et le
contrôle opéré par les chambres régionales des
comptes constitue un facteur
d'insécurité juridique
pour
les élus locaux.
Enfin, les exécutifs territoriaux sont sans cesse plus nombreux à
contester les
modalités d'exercice de l'examen de la gestion
des
collectivités locales comme en témoignent les réponses
à l'« enquête » conduite par l'Association des
Maires de France auprès des présidents d'associations
départementales des maires.
C'est dans un tel climat de suspicion qu'a été
déposée au Sénat une proposition de loi (n° 229,
1997-1998) ayant pour objet de modifier le code des juridictions
financières afin de préciser les compétences des chambres
régionales des comptes.
Soucieux qu'un débat serein et ouvert puisse se dérouler sur une
question aussi importante, le président du Sénat M. Christian
Poncelet, alors président de la commission des Finances, et M. Jacques
Larché, président de la commission des Lois, ont
décidé de proposer à leurs commissions respectives, qui
les ont suivis, de créer un
groupe de travail commun.
Au cours des huit derniers mois de l'année 1997, le groupe de travail a
procédé à l'audition des principaux
« acteurs » du contrôle financier : les
représentants des associations d'élus, les représentants
des juridictions financières, le ministère de l'intérieur,
les comptables publics, des avocats spécialisés dans le conseil
aux collectivités locales et des fonctionnaires territoriaux.
A l'issue de ce programme d'auditions, qui s'est achevé à la fin
du mois de février 1998, le groupe de travail a décidé de
« surseoir à statuer » afin de ne pas
interférer avec la campagne en vue des élections cantonales et
régionales. Cette hypothèque étant levée, il a
présenté ses observations et propositions dans un rapport rendu
public à la fin du mois de juin 1998, après que cette publication
eut été approuvée à l'unanimité par les
commissions des Finances et des Lois («
Chambres régionales
des comptes et élus locaux, un dialogue indispensable au service de la
démocratie locale
», Les rapports du Sénat,
n°520, 1997-1998).
Tel qu'il ressort de ce rapport, l'état d'esprit qui a
présidé aux réflexions du groupe de travail peut
être ainsi résumé : la nécessité d'un
contrôle a posteriori des collectivités locales
n'est pas
contestable
; l'existence d'un contrôle financier est la
contrepartie naturelle
du renforcement de l'autonomie et des
responsabilités de ces dernières ; ce contrôle participe
d'une
mission de régulation
de la décentralisation et
constitue un indéniable facteur de transparence de la gestion publique
locale ; mais au-delà de son principe qui n'est pas contesté, le
contrôle financier des collectivités locales peut faire l'objet
de
critiques dans sa mise en oeuvre ou ses pratiques
.
S'attachant à dresser un bilan complet et objectif du contrôle
opéré par les chambres régionales des comptes, le groupe
de travail a mis en évidence que ce bilan était
contrasté,
qu'il était affecté par un
déficit de dialogue
et qu'il ne répondait
qu'imparfaitement à certains grands principes de notre droit
.
Si le jugement des comptes semble désormais s'opérer dans des
conditions assez satisfaisantes après les ajustements
opportunément opérés par la loi du 5 janvier 1988 et si le
contrôle budgétaire apparaît comme une fonction
stabilisée et bien acceptée, en revanche,
la procédure
d'examen de la gestion reste très largement imparfaite.
On relèvera en particulier le très grand décalage entre
les conditions dans lesquelles l'action locale doit être mise en oeuvre
et la perception que peut en avoir un contrôle opéré
souvent plusieurs années après les décisions prises, la
crainte légitime d'une dérive du contrôle vers un
contrôle d'opportunité, l'absence de critères fiables et
communs, les limites de la procédure contradictoire, l'absence de
procédure de recours contre les lettres d'observations
définitives.
Face à l'examen de la gestion, la situation des collectivités
locales apparaît
fragilisée
. Des actes préparatoires
et des lettres d'observations provisoires font trop souvent l'objet d'une
divulgation abusive.
Les lettres d'observations présentent des
lacunes qui affectent leur capacité à constituer un instrument
d'aide à une bonne gestion, notamment parce que les observations ne sont
pas hiérarchisées.
Enfin, les conditions de mise en oeuvre de l'examen de la gestion concourent
à
l'insécurité juridique
des actes des
collectivités locales : compte tenu des délais inévitables
dans lesquelles interviennent les lettres d'observations définitives,
elles sont plus par nature une « photographie » d'une
situation passée
qu'un reflet d'une situation présente ; les
divergences d'analyse entre le contrôle de légalité et les
chambres régionales des comptes sont une source indéniable
d'insécurité juridique et ne peuvent donc qu'être
préjudiciables à la bonne gestion locale.
Les propositions formulées par le groupe de travail ont
été dictées par le double souci de
« normaliser »
les relations entre les chambres
régionales des comptes et les élus locaux et de
moderniser
les conditions d'exercice du contrôle financier. Il s'agit bien, en
effet, de sortir de l'«
ère du
soupçon
» et de créer les conditions d'un
véritable dialogue
entre contrôleurs et
contrôlés, fondé sur un
respect mutuel
et sur
l'application des principes fondamentaux de notre droit.
A cette fin, elles ont été articulées autour de
deux
idées majeures
: rénover les conditions d'exercice de
l'examen de la gestion et renforcer la sécurité juridique des
actes des collectivités locales.
La traduction de ces propositions équilibrées ne relève
pas nécessairement de la voie législative. Certaines propositions
justifieraient la
modification de textes réglementaires
applicables aux chambres régionales des comptes, notamment pour
systématiser la collégialité et le contre-rapport ou
encore pour améliorer certains aspects du statut des magistrats des
chambres régionales des comptes.
Dans le même esprit, il appartient au Gouvernement d'examiner, dans
quelle mesure, les services déconcentrés de l'Etat pourraient
davantage concourir à l'information juridique et financière des
collectivités locales.
Plus profondément, l'émergence d'une
doctrine commune
aux
juridictions financières permettant une harmonisation des pratiques des
chambres implique l'approfondissement de la réflexion d'ores et
déjà engagée au sein de la Cour des comptes.
La présente proposition de loi, pour sa part, tend à traduire sur
le plan législatif, les propositions du groupe de travail.
Conformément à l'esprit des réflexions du groupe de
travail, elle cherche tout d'abord à
renforcer l'efficacité de
la gestion locale
, à
assurer la sécurité juridique
des actes
des collectivités locales et le
respect des grands
principes du droit.
Tel est l'objet de son
titre 1er
qui institue un
groupement
d'intérêt public d'aide à la gestion
des
collectivités locales
(article 1er).
Composé de
représentants du Parlement et des collectivités locales, du
comité des finances locales et de personnalités
qualifiées, ce groupement serait chargé de renforcer
l'information juridique et financière des collectivités locales
et de répondre aux différentes interrogations des élus
locaux sur la gestion de leurs collectivités. Pour l'exercice de ses
missions, il lui reviendrait de mettre en place, dans chaque
département, des missions juridiques. Ces missions juridiques pourraient
être consultées par le maire
(article 2)
, le
président du conseil général
(article 3)
ou
régional
(article 4),
à la demande de l'organe
délibérant ou
pour l'exercice de leurs attributions.
Remédiant à une lacune législative, relevée
à bon droit par un grand nombre de magistrats entendus par le groupe de
travail, le
contenu de l'examen de la gestion
serait défini dans
la loi. Cette définition tend à préciser que les lettres
d'observations doivent faire obligatoirement référence aux textes
qui auraient été méconnus et que l'examen de
l'économie des moyens mis en oeuvre par rapport aux objectifs ne peut
aboutir à ce que les choix effectués, qui relèvent de la
responsabilité exclusive des élus, puissent eux-mêmes
être critiqués. Elle prévoit également que les
lettres d'observations définitives sont tenues de prendre explicitement
en compte les résultats de la procédure contradictoire et que,
par leur structure même, elles doivent tenir compte de l'importance
relative des observations formulées dans la gestion globale de la
collectivité
(article 5).
Un
« droit d'alerte »
serait expressément
reconnu aux chambres régionales des comptes sur les insuffisances du
cadre législatif et réglementaire en vigueur. Il leur
reviendrait, en conséquence, de recenser dans le cadre de l'examen de la
gestion, les difficultés d'application des dispositions
législatives et réglementaires. Leurs constatations seraient
insérées dans le rapport public de la Cour des comptes
(article 6).
Le
titre II
de la présente proposition de loi tend à
améliorer les procédures
applicables devant les chambres
régionales des comptes, afin notamment de renforcer leur
caractère contradictoire.
En premier lieu, la
mission d'inspection,
d'ores et déjà
reconnue à la Cour des comptes, doit être renforcée. Ainsi,
dans le cadre d'une procédure d'examen de la gestion, la Cour des
comptes pourrait être saisie des difficultés rencontrées,
soit par le président d'une chambre régionale des comptes, soit
par les dirigeants des personnes morales contrôlées ou par toute
personne mise en cause dans les observations provisoires. Il lui reviendrait de
formuler des recommandations destinées à assurer le bon
déroulement de la procédure
(article 7).
En deuxième lieu, la sérénité de la
procédure impose d'étendre aux chambres régionales des
comptes le régime de
non communication des documents provisoires
,
d'ores et déjà en vigueur, pour les documents
préparatoires d'instruction de la Cour des comptes
(article 9).
Par ailleurs, le
rôle du ministère public
, garant de la
cohérence des procédures, serait renforcé au stade des
observations définitives
(article 10).
De même, afin de mieux affirmer le caractère contradictoire de la
procédure, un délai d'un mois serait donné aux dirigeants
de la personne morale contrôlée afin d'apporter une
réponse écrite aux observations définitives
de la
chambre régionale des comptes sur la gestion de cette personne morale.
Cette réponse écrite serait annexée à la lettre
d'observations définitives
(article 11).
Il paraît, en outre, souhaitable de codifier la pratique actuelle des
chambres régionales des comptes tendant à éviter que des
lettres d'observations sur la gestion ne puissent
interférer
avec
une campagne électorale. Leur publication serait suspendue dans les six
mois précédant l'élection
(article 11).
Les dirigeants des personnes morales contrôlées doivent
également pouvoir demander à la chambre régionale des
comptes la rectification d'observations définitives sur la gestion
émises par cette dernière. Cette faculté a d'ailleurs
déjà reconnue par le juge administratif sans que celui-ci se
prononce sur le contenu même des observations en question (
Tribunal
administratif de Marseille, 29 avril 1997, Commune de Fos-sur-Mer
). Le
refus opposé à une telle demande est susceptible d'être
porté devant le juge de l'excès de pouvoir. Il paraît
nécessaire de codifier cette faculté qui constitue une garantie
essentielle pour les personnes morales contrôlées
(article
12).
Dans le même esprit, il convient désormais de reconnaître
aux observations définitives des chambres régionales des comptes
le caractère
d'actes faisant grief
et donc susceptibles
d'être déférés au juge de l'excès de pouvoir.
Quand bien même ces actes n'ont pas pour objet de modifier
l'ordonnancement juridique, ils n'en ont pas moins -notamment en raison de la
publicité qui leur est donnée- des effets incontestables sur les
conditions d'exercice de leur mandat par les ordonnateurs, sur le
déroulement des travaux de l'assemblée délibérante
ou encore sur la situation personnelle de tiers. Il n'est donc pas acceptable
qu'ils restent « sans appel ». Le principe selon lequel
toutes décisions administratives sont susceptibles de faire l'objet d'un
recours pour excès de pouvoir est un principe général du
droit consacré par la jurisprudence (
Conseil d'Etat,
Assemblée, 17 février 1950, Dame Lamotte
). Le droit de
recours doit pouvoir s'exercer en ce qui concerne les observations sur la
gestion
(article 13).
Enfin, pour éviter que, d'un exercice à l'autre, les comptes
d'une même collectivité soient alternativement soumis au
contrôle d'une chambre régionale des comptes ou au simple
apurement administratif, le seuil de 2 000 000 F prévu
par la loi du 5 janvier 1988 serait
indexé
sur la dotation
globale de fonctionnement. En cas d'évolution des recettes ordinaires
inférieure à 20% par rapport à ce seuil, les
modalités de contrôle des comptes applicables au cours de
l'exercice précédent seraient maintenues
(article 8).
Le
titre III
de la proposition de loi tend à
préciser
certaines règles d'inéligibilité
prévues par le
code électoral.
Comme les réflexions du groupe de travail l'ont mis en évidence,
en particulier les auditions de magistrats des chambres régionales des
comptes, l'application automatique des règles
d'inéligibilité prévues par le code électoral en
cas de gestion de fait, ne répond pas à l'objet même de
cette procédure qui est de
rétablir la règle
fondamentale de séparation des ordonnateurs et des comptables.
Le
caractère automatique de l'inéligibilité conduit ainsi la
chambre régionale des comptes à être également le
juge du mandat.
Afin de rendre aux sanctions de la gestion de fait leur véritable objet,
il est donc proposé de prévoir la
suspension
de
l'ordonnateur jusqu'à ce que la gestion de fait soit entièrement
apurée. Tel est l'objet des
articles 14 à 18
de la
proposition de loi.
Pour l'ensemble des motifs énoncés ci-dessus, il vous est
demandé d'adopter la présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
TITRE PREMIER
DISPOSITIONS TENDANT A AMELIORER
LES CONDITIONS D'EXERCICE DES COMPETENCES
LOCALES ET A ASSURER UNE PLUS GRANDE SECURITE JURIDIQUE AUX ACTES DES
COLLECTIVITES LOCALES
Article 1er
Le livre II de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un titre V ainsi rédigé :
« TITRE V LE GROUPEMENT POUR L'AIDE
A LA GESTION
DES
COLLECTIVITES TERRITORIALES
« CHAPITRE UNIQUE
« Art. L. 1251-1.- Il est créé un
groupement d'intérêt public dénommé
« Groupement pour l'aide à la gestion des collectivités
territoriales » chargé de renforcer l'information juridique et
financière des collectivités territoriales et de leurs
groupements et de leur apporter, sur leur demande, une aide à la gestion.
« Il comprend, dans des conditions fixées par décret en
Conseil d'Etat, des représentants du Parlement, des collectivités
territoriales, des groupements de communes, des associations nationales
d'élus locaux, du comité des finances locales et des
personnalités qualifiées.
« Art. L. 1251-2.- Pour l'exercice de ses missions, le
Groupement pour l'aide à la gestion des collectivités
territoriales crée, dans chaque département, une mission
juridique chargée de répondre aux demandes d'avis des
autorités territoriales et des responsables des organismes de
coopération sur les conditions d'application des dispositions
législatives et réglementaires ou sur des projets d'actes soumis
à l'organe délibérant. »
Article 2
La
section 3 du chapitre 2 du titre II du livre premier de la deuxième
partie du code général des collectivités territoriales est
complétée comme suit :
« sous-section 4 : Dispositions communes
« Art. L. 2122-34-1.- A la demande du conseil municipal ou pour
l'exercice des attributions qui lui sont confiées par la présente
section, le maire peut saisir la mission juridique instituée par
l'article L. 1251-2, aux fins de recueillir un avis sur les conditions
d'application d'une disposition législative ou réglementaire ou
sur un projet d'acte soumis à la délibération du conseil
municipal. »
Article 3
Le
chapitre unique du titre II du livre II de la troisième partie du code
général des collectivités territoriales est
complété par un article L. 3221-11 ainsi rédigé :
«
Art. L. 3221-11
.- A la demande du conseil
général ou pour l'exercice des attributions qui lui sont
confiées par le présent chapitre, le président du conseil
général peut saisir la mission juridique instituée par
l'article L. 1251-2, aux fins de recueillir un avis sur les conditions
d'application d'une disposition législative ou réglementaire ou
sur un projet d'acte soumis à la délibération du conseil
général. »
Article 4
Le
chapitre unique du titre III du livre II de la quatrième partie du code
général des collectivités territoriales est
complété par un article L. 4231-8 ainsi rédigé :
«
Art. L. 4231-8
.- A la demande du conseil
régional ou pour l'exercice des attributions qui lui sont
confiées par le présent chapitre, le président du conseil
régional peut saisir la mission juridique instituée par
l'article L. 1251-2, aux fins de recueillir un avis sur les conditions
d'application d'une disposition législative ou réglementaire ou
sur un projet d'acte soumis à la délibération du conseil
régional. »
Article 5
I.
Après le premier alinéa de l'article L. 211-8 du code des
juridictions financières, il est inséré deux
alinéas ainsi rédigés :
« L'examen de la gestion porte sur la régularité des
actes de gestion et sur l'économie des moyens mis en oeuvre par rapport
aux objectifs fixés par l'assemblée délibérante ou
par l'organe délibérant sans que ces objectifs, dont la
définition relève de la responsabilité exclusive des
élus ou des délégués intercommunaux, puissent
eux-mêmes faire l'objet d'observations.
« Les observations que la chambre régionale des comptes
formule à cette occasion mentionnent les dispositions
législatives ou réglementaires dont elle constate la
méconnaissance. Elles prennent en compte expressément les
résultats de la procédure contradictoire avec l'ordonnateur et
celui qui était en fonctions au cours de l'exercice examiné ou le
dirigeant ou tout autre personne nominativement ou explicitement mise en cause.
L'importance relative de ces observations dans l'ensemble de la gestion de la
collectivité ou de l'établissement public est
évaluée. »
II. En conséquence, le début du dernier alinéa du
même article est ainsi rédigé :
« La chambre régionale des comptes peut également...
Article 6
Le
chapitre premier du titre premier de la première partie du Livre II du
code des juridictions financières est complété par un
article L. 211-9 ainsi rédigé :
«
Article L. 211-9
.- Dans le cadre de la mission qui lui est
confiée par l'article L. 211-8, la chambre régionale des comptes
recense les difficultés auxquelles les collectivités locales ou
établissements publics ont été confrontés dans
l'application des dispositions législatives et réglementaires.
Les constatations des chambres régionales des comptes sont
insérées dans le rapport public annuel de la Cour des comptes
dans les conditions fixées par les articles L. 136-2 et
suivants. »
TITRE
II
DISPOSITIONS TENDANT A AMELIORER
LES PROCEDURES APPLICABLES DEVANT
LES
CHAMBRES REGIONALES DES COMPTES
Article 7
L'article L. 111-10 du code des juridictions
financières est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre de cette mission permanente, la Cour des Comptes peut
être saisie des difficultés rencontrées dans la mise en
oeuvre de la procédure d'examen de la gestion prévue par
l'article L. 211-8, avant l'adoption des observations définitives, soit
par le président de la chambre régionale des comptes, soit par
les dirigeants des personnes morales contrôlées ou par tout autre
personne mise en cause nominativement ou explicitement dans les observations
provisoires de la chambre. Elle formule des recommandations destinées
à assurer le bon déroulement de la procédure. La
saisine de la Cour ne suspend pas la procédure d'examen de la
gestion.»
Article 8
L'article L. 211-2 du code des juridictions financières
est
complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« A compter de l'exercice 2000, le seuil de 2 000 000 F pris en
compte pour l'application de l'alinéa précédent
évolue chaque année comme la dotation globale de
fonctionnement.
« Lorsque, d'un exercice à l'autre, l'évolution du
montant des recettes ordinaires figurant au dernier compte administratif par
rapport au seuil défini à l'alinéa précédent
est inférieure ou égale à 20%, les comptes visés au
premier alinéa continuent à être examinés selon les
modalités applicables au cours de l'exercice
précédent. »
Article 9
L'article L. 241-6 du code des juridictions financières
est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du titre premier de la loi n° 78-753 du 17
juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre
l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif,
social et fiscal ne sont pas applicables aux mesures d'instruction, rapports et
diverses communications provisoires de la chambre régionale des
comptes. »
Article 10
L'article L. 241-14 du code des juridictions
financières est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Avant que la chambre régionale des comptes arrête
lesdites observations et après le cas échéant l'audition
des personnes mentionnées à l'alinéa
précédent, le ministère public lui présente ses
conclusions qui apprécient notamment la légalité de la
procédure suivie au cours de l'examen de la gestion. Ces conclusions
peuvent être communiquées à leur demande aux personnes
visées au premier alinéa de l'article L. 241-11. »
Article 11
Après l'article L. 241-14 du code des juridictions
financières, sont insérés les articles L. 241-14-1 et L.
241-14-2 ainsi rédigés :
«
Art. L. 241-14-1
.- Les observations définitives sur
la gestion prévues par l'article L. 241-11 ne peuvent être
publiées ni communiquées à des tiers avant que
l'ordonnateur et celui qui était en fonctions au cours de l'exercice
examiné ou le dirigeant ou tout autre personne nominativement ou
explicitement mise en cause aient été en mesure de leur apporter
une réponse écrite dans un délai d'un mois. Cette
réponse est annexée aux observations définitives de la
chambre régionale des comptes.»
«
Art. L. 241-14-2
.- Les observations définitives sur
la gestion prévues par l'article L. 241-11 ne peuvent être
publiées ni communiquées à des tiers à compter du
premier jour du sixième mois précédant le mois au cours
duquel il doit être procédé à des élections
générales et jusqu'à la date du tour de scrutin où
l'élection est acquise. »
Article 12
Le
chapitre III du titre IV de la première partie du Livre II du code des
juridictions financières est complété par un article L.
243-4 ainsi rédigé :
«
Art. L. 243-4
.- La chambre régionale des comptes
statue dans les formes prévues aux articles L. 241-13 et L. 241-14 sur
toute demande en rectification d'observations définitives sur la gestion
qui peut lui être présentée par les dirigeants des
personnes morales contrôlées ou tout autre personne nominativement
ou explicitement mise en cause. »
Article 13
Le
chapitre III du titre IV de la première partie du Livre II du code des
juridictions financières est complété par un article L.
243-5 ainsi rédigé :
«
Art. L. 243-5
.- Les observations définitives
formulées par la chambre régionale des comptes sur la gestion
d'une collectivité territoriale, d'un établissement public local
ou de l'un des organismes mentionnés au premier alinéa de
l'article L. 241-11 sont des actes faisant grief susceptibles d'être
déférés à la juridiction administrative. »
TITRE
III
DISPOSITIONS TENDANT A PRECISER
CERTAINES REGLES D'INELIGIBILITE
PREVUES PAR LE CODE ELECTORAL
Article 14
Au
début du 11° de l'article L. 195 du code électoral, sont
insérés les mots :
« Sous réserve des dispositions du second alinéa de
l'article L. 205, »
Article 15
Le
second alinéa de l'article L. 205 du code électoral est ainsi
rédigé :
« Toutefois, par dérogation à l'alinéa
précédent, lorsqu'un jugement du juge des comptes statuant
définitivement a déclaré comptable de fait un conseiller
général, celui-ci est suspendu de ses fonctions d'ordonnateur
jusqu'à ce que quitus lui soit délivré de sa
gestion. »
Article 16
Au
début du 6° de l'article L. 231 du code électoral, sont
insérés les mots :
« Sous réserve des dispositions du dernier alinéa de
l'article L. 236, »
Article 17
Le
dernier alinéa de l'article L. 236 du code électoral est ainsi
rédigé :
« Toutefois, par dérogation à l'alinéa
précédent, lorsqu'un jugement du juge des comptes statuant
définitivement a déclaré comptable de fait un conseiller
municipal, celui-ci est suspendu de ses fonctions d'ordonnateur jusqu'à
ce que quitus lui soit délivré de sa gestion. »
Article 18
Le
dernier alinéa de l'article L. 341 du code électoral est ainsi
rédigé :
« Toutefois, par dérogation à l'alinéa
précédent, lorsqu'un jugement du juge des comptes statuant
définitivement a déclaré comptable de fait un conseiller
régional, celui-ci est suspendu de ses fonctions d'ordonnateur
jusqu'à ce que quitus lui soit délivré de sa
gestion. »