Ccréation d'une dotation jeune entrepreneur
N°
141
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès-verbal de la séance du 13 décembre 2001
PROPOSITION DE LOI
tendant à
créer
une
dotation
jeune entrepreneur
,
PRÉSENTÉE
Par MM. Georges GRUILLOT, Gérard BAILLY, Roger BESSE, Paul BLANC, Gérard BRAUN, Dominique BRAYE, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Robert CALMEJANE, Auguste CAZALET, Charles CECCALDI-RAYNAUD, Gérard CÉSAR, Jacques CHAUMONT, Christian COINTAT, Gérard CORNU, Xavier DARCOS, Robert DEL PICCHIA, Christian DEMUYNCK, Michel DOUBLET, Louis DUVERNOIS, Daniel ECKENSPIELLER, Hilaire FLANDRE, Bernard FOURNIER, Patrice GÉLARD, Alain GÉRARD, François GERBAUD, Charles GINÉSY, Alain GOURNAC, Charles GUENÉ, Michel GUERRY, Hubert HAENEL, Emmanuel HAMEL, Alain JOYANDET, Roger KAROUTCHI, Lucien LANIER, Gérard LARCHER, André LARDEUX, Patrick LASSOURD, Dominique LECLERC, Jean-François LE GRAND, Philippe LEROY, Max MAREST, Jean-Luc MIRAUX, Paul NATALI, Mme Nelly OLIN, MM. Joseph OSTERMANN, Jacques OUDIN, Jacques PEYRAT, Mme Janine ROZIER, MM. Bruno SIDO, Louis SOUVET, René TRÉGOUËT, André TRILLARD, Alain VASSELLE et Serge VINÇON,
Sénateurs.
(Renvoyée à la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement ).
Entreprises. |
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La
spécificité du chômage qui sévit en France, du fait
qu'il atteint plus qu'ailleurs les jeunes, nécessite la mise en place
d'une politique d'encouragement et non d'assistance.
Ce n'est pas en augmentant continuellement les charges sociales et fiscales qui
pèsent sur les ménages et les entreprises que l'on favorisera
dans notre pays un développement économique à long terme
et une croissance réelle. La réduction du chômage par une
politique économique volontariste adaptée à la
création d'entreprises est un des principaux objectifs à
atteindre.
Nous devons donner les moyens aux jeunes de réaliser leurs ambitions en
facilitant la concrétisation de projets individuels, notamment par la
création d'entreprises unipersonnelles ou de petites entreprises.
Nul ne peut contester le rôle prépondérant des petites et
moyennes entreprises dans la vie économique et sociale actuelle :
- par leur nombre : sur les 2 352 730 entreprises recensées,
1 138 500 sont des entreprises unipersonnelles et 1 049 l10
entreprises ont moins de neuf salariés ;
- par l'emploi créé : entre 1985 et 1992, la part des
salariés employés par les entreprises de moins de vingt
salariés est passée de 24,5% à 27,1% de l'emploi total ;
dans le même temps, la part des salariés employés dans des
entreprises de plus de 500 salariés diminuait de 37,1% à
33,2% ;
- par leur part dans la valeur ajoutée nationale : les entreprises de
moins de 500 salariés réalisent 83% de la valeur ajoutée
produite en 1993, leur présence est particulièrement importante
dans le secteur marchand.
Ce constat ne doit cependant pas masquer un facteur important : celui de la
baisse du nombre de créations d'entreprise. En effet, si 309 430
entreprises ont été créées en 1986, seules 275 331
l'ont été en 1996, soit une baisse de 11%, malgré des
efforts substantiels engagés au cours de ces dernières
années.
Pour concilier les trois objectifs incontournables que sont la lutte contre le
chômage, le développement économique et l'encouragement des
jeunes pour la réalisation de leurs projets, il est proposé de
mettre en place une «dotation jeune entrepreneur», à l'instar
de celle existant dans l'agriculture avec la «dotation jeune
agriculteur».
La volonté de faciliter l'installation de jeunes entrepreneurs, soit par
la création d'une entreprise nouvelle, soit par la reprise d'une
entreprise existante, nécessite une simplification des dispositions
actuelles, un accroissement de l'effort financier, un accompagnement de
l'entrepreneur tout au long de la période la plus délicate,
à savoir les cinq premières années, et une adaptation des
aides aux spécificités de leur environnement.
Cet ensemble de mesures n'a vocation à s'appliquer qu'à la
création ou la reprise d'une entreprise de moins de dix salariés.
Les aides ou mesures actuelles d'accompagnement au créateur d'entreprise
répondent à un besoin réel. Cependant, leur
multiplicité a créé un véritable maquis juridique,
desservant l'objectif initial de faciliter l'installation de jeunes
créateurs d'entreprise. De plus, le montant total de ces aides est
souvent trop faible et l'attribution insuffisamment souple pour répondre
aux besoins réels rencontrés. Enfin, ces mêmes dispositifs
n'empêchent pas la disparition de la moitié des entreprises dans
les cinq ans qui suivent leur création.
L'objectif de la dotation jeune entrepreneur (DJE), objet de la présente
proposition de loi, est donc d'assurer toutes les chances de succès
à la création ou à la reprise d'une entreprise, afin
d'éviter qu'un jeune entrepreneur ne débute sa carrière
par un échec. Pour cela, il est nécessaire d'allier la souplesse
dans le dispositif, pour tenir compte des spécificités de chaque
secteur économique, et le suivi de l'évolution de l'entreprise,
pour corriger les éventuelles difficultés rencontrées aux
différents stades du projet de création ou de reprise.
La proposition qui vous est soumise répond aux impératifs
exprimés tant par les créateurs d'entreprise que par les
partenaires sociaux et les chambres consulaires :
- la simplicité : cette dotation se substitue à l'ensemble des
aides versées par l'État actuellement en vigueur. Elle est
destinée à financer partiellement ou totalement suivant les cas,
certaines charges incombant au seul entrepreneur ;
- la souplesse : cette dotation permet de tenir compte des
spécificités de chaque entreprise, des besoins propres de chaque
candidat à la création ou à la reprise d'une entreprise,
besoins qui pourront être financés, à son choix, dans la
limite du montant alloué ;
- l'efficacité : cette dotation n'est octroyée qu'aux jeunes
entrepreneurs détenteurs d'un certain niveau de formation, brevet
d'aptitude à la gestion d'une entreprise ou diplôme
équivalent, les conditions de formation requises étant
précisées par décret.
Elle s'accompagne d'un suivi particulier de chaque entreprise
créée ou reprise. Une commission régionale à
laquelle participent acteurs politiques et économiques est
chargée de donner son appréciation sur le projet et sur son
financement. Elle a également une mission d'assistance conseil en
suivant l'évolution des entreprises et en conseillant le jeune
entrepreneur ;
- la crédibilité : la dotation globale, utilisable sur une
période de cinq années, pourrait être fixée par
décret à 184 000 F, soit le budget que représente pour
l'État un «contrat jeune» pour le secteur public ou parapublic
pendant deux ans.
Afin de permettre le financement de la dotation jeune entrepreneur, il est
créé, dans le cadre du budget du ministère de l'emploi et
de la solidarité, un fonds spécifique appelé «Fonds
de développement pour les jeunes entrepreneurs». Il est
abondé par :
- un redéploiement des aides versées par les ministères de
l'emploi et des finances, dans le cadre de la création
d'entreprise ;
- un remboursement partiel des aides versées par les entreprises au
titre du Fonds national pour l'emploi.
Les collectivités locales ainsi que les entreprises mettant en place des
mesures d'essaimage dans le cadre d'une restructuration industrielle peuvent
apporter leur soutien financier complémentaire au budget de la DJE.
La dotation jeune entrepreneur donne ainsi une nouvelle impulsion
économique en favorisant les initiatives de création
d'entreprise, et, par voie de conséquence, d'emplois nouveaux. En outre,
son coût budgétaire n'est que de 184 000 F sur cinq ans,
contre 460 000 F sur cinq ans pour les emplois-jeunes. Ainsi, plutôt que
de rechercher la création d'emplois dans le secteur public ou
parapublic, déjà hypertrophié, il convient de
redéployer les moyens financiers de l'État vers le
développement de l'initiative par le biais de la création
d'entreprise, voie essentielle à la lutte contre le chômage,
principalement des jeunes, et d'assurer l'avenir économique de la France.
Telles sont les raisons pour lesquelles il vous est demandé de bien
vouloir adopter la présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
Article 1
er
Il est créé un fonds de développement destiné à financer, par le biais d'une dotation jeune entrepreneur, les projets de création ou de reprise d'une entreprise artisanale, commerciale, industrielle ou de services de moins de dix salariés par de jeunes entrepreneurs.
Article 2
La
dotation jeune entrepreneur est accordée, sur l'avis d'une commission
régionale d'aide aux jeunes entrepreneurs, aux jeunes entrepreneurs qui
satisfont aux conditions suivantes :
a)
être âgé de trente-cinq ans au plus l'année
de présentation du projet de création ou de reprise d'une
entreprise ;
b)
être titulaire d'un brevet d'aptitude à l'administration
de l'entreprise attestant de capacités en matière de gestion, ou
d'un diplôme équivalent.
Le brevet d'aptitude précité est délivré,
après avis de la commission régionale d'aide aux jeunes
entrepreneurs, par des établissements agréés par le
ministère chargé de l'emploi et de la formation professionnelle.
Les conditions de formation conduisant à la délivrance de ce
brevet, ou son équivalent, sont définies par décret ;
c)
consacrer plus de 50% des heures légales de travail à
l'entreprise créée ou reprise.
Article 3
La
dotation jeune entrepreneur est versée sur cinq ans. Son montant et les
modalités de son versement sont fixés par décret.
Elle est majorée de 5% par emploi créé ou repris la
première année. Ne sont pas considérés comme
créés ou repris les emplois occupés dans l'entreprise par
le jeune entrepreneur ou ses associés.
Une entreprise ne peut faire l'objet que d'une seule dotation jeune
entrepreneur et un jeune entrepreneur ne peut bénéficier que
d'une seule dotation. La dotation jeune entrepreneur n'est pas cumulable avec
la dotation jeune agriculteur.
La dotation est réduite à due proportion en cas d'emploi partiel
du jeune entrepreneur en dehors de la structure de l'entreprise
créée ou reprise.
Article 4
Peuvent
faire l'objet d'une subvention dans le cadre de la dotation jeune entrepreneur :
- les études prévisionnelles sur l'environnement
économique ou juridique du projet ;
- les emprunts en capital, la bonification de leurs intérêts et
les garanties qui les accompagnent ;
- les charges sociales, dans la limite de 50% pour des sommes dues à ce
titre par le jeune entrepreneur ;
- les charges fiscales, hormis les contributions dues au titre des impôts
sur le revenu ou sur les sociétés et dans la limite
précitée ;
- la cotisation d'assurance chômage du jeune entrepreneur.
Article 5
Une
commission régionale d'aide aux jeunes entrepreneurs, dont les
modalités de fonctionnement sont définies par décret, est
chargée d'examiner les projets de création ou de reprise
d'entreprises et d'en suivre l'évolution. Elle donne son accord pour le
versement de la dotation jeune entrepreneur.
Elle est présidée par le préfet de région. Y
participent en outre :
- le trésorier-payeur général du département
siège de la région, qui assure la coordination de l'ensemble des
services fiscaux de la région pour le suivi de la dotation jeune
entrepreneur ;
- le directeur régional de l'industrie, de la recherche et de
l'environnement ;
- le directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation
professionnelle ;
- les représentants des collectivités territoriales participant
financièrement à l'installation du jeune entrepreneur ou à
la reprise, par lui, d'une entreprise existante ;
- les représentants des chambres consulaires ;
- les organismes financiers participant au financement des projets.
Article 6
Les pertes de recettes pour les régions résultant de l'application des dispositions précédentes sont compensées, à due concurrence, par une taxe additionnelle aux droits de consommation sur les tabacs, visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.