N° 447
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 26 mai 1998
PROJET DE LOI ORGANIQUE
relatif au régime communal applicable dans le territoire de la Polynésie française,
PRÉSENTÉ
au nom de M. LIONEL JOSPIN
Premier ministre,
par
M. JEAN-PIERRE CHEVÈNEMENT
ministre de l'intérieur,
et par M. JEAN-JACK QUEYRANNE
secrétaire d'Etat à l'outre-mer
(Renvoyé à la commission des Lots constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
Décentralisation. Territoires d'outre-mer.
EXPOSÉ DES MOTIFS
MESDAMES, MESSIEURS,
A l'exception de Papeete, Uturoa, Faa'a et Pirae, les quarante-huit communes de la Polynésie française sont des institutions jeunes, créées le 28 juin 1972 par décret en Conseil d f Etat pris en application de la loi communale n° 71 -1028 du 24 décembre 1971.
Le dispositif juridique existant ne permet pas aux communes de la Polynésie française de jouer pleinement leur rôle d'institutions de proximité. Or, elles doivent, avec le Territoire, participer à l'administration de la Polynésie française et à son développement économique et social.
Après la loi d'orientation pour le développement économique, social et culturel du 5 février 1994, la loi organique du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, les lois du 20 février 1995 et du 5 juillet 1996 portant diverses dispositions relatives à I 1 outre-mer et la convention du 25 juillet 1996 pour le renforcement de l'autonomie économique de la Polynésie française, il est indispensable de donner un nouvel élan à l'institution communale à laquelle les Polynésiens sont très attachés.
Ce nouvel élan sera assuré par la clarification des compétences entre le Territoire et les communes, et par la consolidation de leur financement.
I - La clarification et l'extension des compétences des communes
Les compétences des communes de la Polynésie française résultent des lois n° 71-1028 du 24 décembre 1971, n° 77-1460 du 29 décembre 1977 et n° 96-609 du 5 juillet 1996 qui leur ont partiellement étendu le code des communes.
Les transferts se sont opérés progressivement, selon une logique de proximité et d'intérêt local.
Cependant, quelques unes des compétences actuelles sont définies de façon incomplète. Ainsi, l'article L.233-78 du code des communes applicable en Polynésie française prévoit la possibilité d'instituer des redevances pour l'enlèvement des ordures ménagères : il n'impose pas d'obligation d'organiser le service, et n'aborde pas la gestion du traitement.
En outre, les communes doivent pouvoir intervenir dans des matières qui présentent d'évidence un intérêt local.
Cela suppose de compléter et d'étendre leurs compétences. Tel est l'objet du Titre 1er du projet de loi organique.
L'enlèvement des déchets ménagers, l'élimination et le traitement des déchets végétaux sont une compétence obligatoire des communes.
D'autres compétences sont attribuées aux communes, dans certains cas par délégation du territoire : cimetières, distribution d'eau potable grâce à la création d'une redevance, assainissement des eaux usées, délivrance des permis de construire, attribution de logements sociaux. Les modalités d'exercice de ces compétences font l'objet du titre II du projet de loi relatif au régime communal applicable dans le territoire de la Polynésie française.
Le principe de délégations de compétences du Territoire aux communes est prévu pour la réalisation d'équipements collectifs relevant de la compétence du Territoire (article 2 ). Une convention entre le Territoire et la commune précisera la nature du projet confié et les concours financiers correspondants.
II - La consolidation du financement
Les ressources des communes sont insuffisantes pour financer les équipements prioritaires et services de proximité qui accusent un retard important.
Le Fonds intercommunal de péréquation a été créé en Polynésie française par la loi n° 71-1028 du 24 décembre 1971 ; alimenté par une quote-part des recettes du Territoire, il a pour but d'assurer aux communes le financement de leurs compétences.
L'assiette du F.I.P. s'est réduite notamment sous l'effet des débudgétisations de certaines recettes territoriales. L'article 3 du projet de loi précise cette assiette et fixe le taux du prélèvement.
L'article 4 prévoit l'institution par le Territoire de recettes fiscales propres aux communes, en sus des centimes additionnels. Ces recettes fiscales accompagneront l'exercice des compétences dévolues aux communes.
A ces recettes fiscales s'ajoute la prolongation au-delà de 1998 de l'aide de l'Etat versée en application de la loi d'orientation du 5 février 1994 (article 12 du projet de loi relatif au régime communal applicable dans le territoire de la Polynésie française).
PROJET DE LOI
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de l'intérieur et du secrétaire d'Etat à l'outre-mer,
Vu l'article 39 de la Constitution, Décrète :
Le présent projet de loi organique relatif au régime communal applicable dans le territoire de la Polynésie française, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat, sera présenté au Sénat par le ministre de l'intérieur et le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, qui seront chargés, d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.
TITRE 1er
DISPOSITIONS RELATIVES AUX COMPÉTENCES DES COMMUNES
Article 1 er
La loi n° 77-1460 du 29 décembre 1977 modifiant le régime communal dans le territoire de la Polynésie française dans sa rédaction issue de la loi n° 96-609 du 5 juillet 1996 est ainsi modifiée :
I. - A l'article 3 :
1° à la fin du « II - Chapitre II - Maires et adjoints », est ajouté : « l'article L. O. 122-30 ainsi rédigé :
« Art. L. O. 122-30. - Dans les communes dotées d'un document d'urbanisme approuvé, le territoire de la Polynésie française peut donner, par délibération prise sur la demande ou après accord du conseil municipal, compétence au maire, agissant au nom de la commune, soit pour l'instruction et la délivrance des autorisations individuelles et des certificats d'urbanisme, soit pour la seule délivrance de ces autorisations et certificats dans les conditions prévues par la réglementation territoriale. »
2° après le « V - Chapitre V - Participation des habitants à la vie locale », sont ajoutées les dispositions suivantes :
« VI. - Chapitre VI - Réservation et attribution de logements sociaux.
« Art. L O. 126. - Les programmes de logements sociaux construits, acquis ou améliorés avec le concours financier de l'Etat font l'objet de conventions passées entre l'Etat et le territoire. Ces conventions prévoient l'information du maire de la commune intéressée sur les principes régissant les attributions de ces logements et les décisions d'attribution.
« Art. L. O. 127. - En contrepartie d'un apport en terrain, d'un financement ou d'une garantie financière de l'Etat ou des communes à la réalisation des programmes de logements sociaux mentionnés à l'article L. O. 126, les maires de ces communes signent des conventions particulières avec le représentant de l'Etat et celui du territoire. Ces conventions prévoient notamment les modalités de réservation de ces logements. Dans ce cas, le maire ou son représentant participe avec voix délibérative aux séances de la commission d'attribution. »
II - Après l'article 12-1, il est inséré un article 12-2 ainsi rédigé :
« Art. 72-2. - Au livre III « Administration et services communaux », est applicable le titre VI « Cimetières » ainsi rédigé :
« TITRE VI »
CIMETIÈRES
« Art. L.O. 360. - Les communes sont compétentes en matière de cimetières. »
III - Après l'article 12-2, il est inséré un article 12-3 ainsi rédigé :
« Art. 12-3. - Au livre III « Administration et services communaux »,
TITRE VII
« DISPOSITIONS PARTICULIÈRES À CERTAINS SERVICES « INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX
«CHAPITRE 1 er » Eau
«Art. L O. 371. - Les communes sont compétentes en matière de distribution de l'eau potable.
«CHAPITRE II » Assainissement et eaux usées
«Art. L. O. 372. - Dans les communes où n'existe pas de service d'assainissement assuré par le territoire, celui-ci peut donner, par délibération prise sur la demande ou après accord du conseil municipal, compétence à la commune pour créer un service d'assainissement municipal.
«Art. LO. 372-1. - Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale peuvent être autorisés par le territoire de la Polynésie française à prescrire ou être tenus d'admettre le raccordement des effluents privés qui ne satisfont pas aux caractéristiques du cours d'eau récepteur, aux réseaux d'assainissement ou aux installations d'épuration qu'ils construisent ou exploitent.
«CHAPITRE III » Ordures ménagères et autres déchets
« Art. L.O. 373-2. - Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale assurent l'enlèvement des ordures ménagères ainsi que l'enlèvement et l'élimination des déchets végétaux.
« Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale peuvent exercer, par délégation du territoire, sur la demande ou après accord du conseil municipal, les compétences en matière d'élimination et de traitement des ordures ménagères et d'enlèvement, de traitement et d'élimination des déchets autres que végétaux. Dans ce cas, le territoire de la Polynésie française leur accorde un concours technique et financier.
« Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale peuvent également s'associer au territoire pour assurer l'ensemble des services mentionnés aux premier et deuxième alinéas. »
Article 2
Il est inséré après l'article 91 de la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française un article 91-1 ainsi rédigé :
« Art. 91-L Lorsque le territoire de la Polynésie française confie par convention aux communes ou aux établissements communaux ou de coopération intercommunale, au vu d'une demande ou d'un accord de leurs organes délibérants, la réalisation d'équipements collectifs relevant de sa compétence, la convention doit prévoir le concours financier du territoire. »
TITRE II
DISPOSITIONS D'ORDRE FINANCIER
Article 3
La loi n° 71- 1028 du 24 décembre 1971 relative à la création et à l'organisation des communes dans le territoire de la Polynésie française est ainsi modifiée :
I - II est inséré un article 9-1 ainsi rédigé :
« Art. 9-1. - Un fonds intercommunal de péréquation reçoit une quote-part de la totalité des impôts, droits et taxes perçus ou à percevoir au profit du territoire et des montants versés par l'Etat au titre de la compensation fiscale et douanière consécutive à la fermeture du centre d'expérimentation du Pacifique.
« Cette quote-part est calculée avant toute remise gracieuse et affectation de recettes fiscales et hors contribution de solidarité territoriale. Elle est égale à 15 % desdites ressources. »
II - Les alinéas 1 et 2 de l'article 10 sont abrogés.
Article 4
Il est inséré après l'article 91-1 de la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française un article 91-2 ainsi rédigé :
« Art. 97-2. - Le territoire de la Polynésie française institue des impôts ou taxes spécifiques aux communes.
« Le taux de ces recettes fiscales et les modalités de leur perception sont décidés par délibération du conseil municipal dans le respect de la réglementation territoriale. »
Fait à Paris, le 20 mai 1998
Signé : LIONEL JOSPIN
Par le Premier ministre :
Le ministre de l'intérieur
Signé : JEAN-PIERRE CHEVÈNEMENT
et le secrétaire d'Etat à l'outre-mer
Signé: JEAN-JACK QUEYRANNE