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N° 220
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 8 février 2008 Enregistré à la Présidence du Sénat le 27 février 2008 |
PROJET DE LOI
autorisant l'approbation du protocole facultatif se rapportant à la convention contre la torture et autres peines ou traitements inhumains ou dégradants ,
PRÉSENTÉ
au nom de M. FRANÇOIS FILLON,
Premier ministre,
par M. BERNARD KOUCHNER,
ministre des affaires étrangères et européennes.
(Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Plusieurs textes internationaux adoptés sous l'égide des Nations unies proclament l'interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants. Il en est ainsi de la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 ( article 5 ), du pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 ( article 7 ), et de la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels du 10 décembre 1984.
La persistance de cas de recours à la torture et aux mauvais traitements, notamment à l'encontre des personnes privées de liberté, a conduit la communauté internationale à élaborer un instrument supplémentaire destiné à rendre effective l'interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Le protocole facultatif à la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après dénommé « le protocole) constitue le premier instrument, à vocation universelle, instituant un mécanisme de visites préventives des lieux de privation de liberté.
Le protocole a été adopté par l'assemblée générale des Nations unies le 18 décembre 2002 et est entré en vigueur le 23 juin 2006 1 ( * ) . La France l'a signé le 16 septembre 2005.
Conformément aux 6 et 7 du protocole, le sous-comité de la prévention a été institué à l'issue de la réunion des États parties qui s'est tenue le 18 décembre 2006
Pour procéder à des visites préventives des lieux où des personnes sont privées de liberté par décision d'une autorité publique, le protocole prévoit deux mécanismes indépendants, le premier au plan international, le second au plan national :
- au plan international, l'article 2 du protocole crée un sous-comité pour la prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il s'agit du sous-comité au comité contre la torture des Nations unies, créé par l'article 17 de la convention du 10 décembre 1984 dite « convention de New York ». Le sous-comité peut visiter les lieux de privation de liberté dans les États Parties et fournit aux États Parties ainsi qu'aux mécanismes nationaux de prévention, créés au niveau national, toute aide et assistance « afin de renforcer la protection des personnes privées de liberté » ( article 11 ) ;
- au plan national, le protocole, dans son article 17, met à la charge des États Parties l'obligation de mettre en place, au plus tard un an après l'entrée en vigueur du protocole, un ou plusieurs mécanismes nationaux indépendants de prévention de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Le champ d'application, au niveau national, des visites préventives des lieux où des personnes se trouvent privées de liberté recouvre les établissements pénitentiaires, les locaux de garde à vue de la police et de la gendarmerie, les hôpitaux psychiatriques accueillant des personnes hospitalisées sans leur consentement, les centres éducatifs fermés, les zones d'attente et centres de rétention administrative, les locaux disciplinaires situés dans les enceintes militaires ainsi que les locaux de rétention douanière.
Le mécanisme national de prévention doit être indépendant ( article 18 ), pouvoir effectuer des visites dans tout lieu de privation de liberté qu'il choisit librement ( article 20, e ), rencontrer sans témoin les personnes privées de liberté ainsi que toute personne qu'il estime pouvoir lui fournir des informations utiles à la réalisation de sa mission ( article 21, d ). De même, il doit être en mesure de formuler des avis et recommandations à l'attention des autorités compétentes dans le but d'améliorer le traitement et la situation des personnes privées de liberté ( article 19, b ).
La France a joué un rôle actif dans la négociation du protocole. Elle s'est, en outre, engagée à le ratifier au cours du mandat qu'elle occupe au Conseil des droits de l'homme, mandat qui expire en mai 2008 et au renouvellement duquel elle est candidate.
La ratification par la France du protocole sera accompagnée du dépôt d'une déclaration interprétative, portant sur les articles 15 et 21, premier alinéa, précisant que les renseignements « vrais ou faux », visés par ces articles, doivent s'entendre comme les renseignements communiqués de bonne foi, seuls, par conséquent, à bénéficier de l'immunité prévue pour les déclarations faites aux membres du mécanisme, à l'exclusion du faux intentionnel.
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Telles sont les principales observations qu'appelle le protocole facultatif à la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements inhumains ou dégradants qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.
PROJET DE LOI
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi autorisant l'approbation du protocole facultatif se rapportant à la convention contre la torture et autres peines ou traitements inhumains ou dégradants, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.
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Article unique
Est autorisée l'approbation du protocole facultatif se rapportant à la convention contre la torture et autres peines ou traitements inhumains ou dégradants , adopté le 18 décembre 2002 à New York, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Fait à Paris, le 27 février 2008
Signé : FRANÇOIS FILLON
Par le Premier ministre :
le ministre des affaires étrangères et européennes,
Signé : BERNARD KOUCHNER
* 1 Au 1 er janvier 2008, 53 États l'ont signé, 27 l'ont ratifié et 7 y ont adhéré.