N° 434
SÉNAT
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2006-2007
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 2 août 2007 Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 août 2007 |
PROJET DE LOI
autorisant l'approbation du protocole sur la modification de l'accord instituant une Commission internationale pour le Service international de recherches ,
PRÉSENTÉ
au nom de M. FRANÇOIS FILLON,
Premier ministre,
par M. BERNARD KOUCHNER,
ministre des affaires étrangères et européennes.
(Renvoyé à la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
I. - Présentation du service
Lors de l'effondrement de l'Allemagne nazie en 1945, les troupes alliées sont entrées en possession de nombreuses archives et documents témoignant des persécutions subies par les peuples de l'Europe. Il est alors apparu opportun de les regrouper en un seul endroit afin d'en faciliter l'exploitation au profit des personnes concernées ainsi que des puissances occupantes. À cet effet, le Service international de recherches (SIR) a été installé en Allemagne, à Bad-Arolsen (Hesse), lors de sa création le 1 er janvier 1948. Après avoir été administré par l'Organisation internationale des réfugiés (OIR) puis par la Haute commission alliée pour l'Allemagne, le SIR a été placé, en vertu des accords de Bonn du 6 juin 1955, pris pour l'application des dispositions de la convention sur le règlement des questions issues de la guerre et de l'occupation, sous l'autorité d'une Commission internationale pour le Service international de recherches (CISIR). Cette commission comprend à l'heure actuelle onze États membres (Allemagne, Belgique, France, Grèce, Israël, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne, Royaume-Uni, États-Unis) * ( * ) ainsi que deux observateurs permanents (Comité international de la Croix rouge et Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés).
Les accords de Bonn ont également confié, à l'initiative du chancelier ADENAUER, la direction et l'administration du Service au Comité international de la Croix rouge (CICR). Dirigé par un agent de nationalité suisse mis à disposition par le CICR, le SIR emploie quatre cent quarante agents. À l'exception du traitement du directeur assuré par le CICR, le budget du SIR est entièrement financé par la République fédérale d'Allemagne.
Le SIR a reçu pour mission de rassembler, classer et exploiter les documents relatifs aux personnes civiles de toutes nationalités détenues dans les camps de concentration ou de travail nazis et aux personnes déplacées (à l'exclusion des Allemands) du fait de la Seconde Guerre mondiale. Son activité essentielle revêt un caractère humanitaire aux termes des accords précités qui lui ont assigné pour objectif de faire en sorte que les renseignements contenus dans ses archives soient « librement accessibles aux personnes, organisations et autorités intéressées ». Ses collections comprennent 47 millions de cartes individuelles concernant 17 millions de personnes, 23 km linéaires de dossiers, 181 km linéaires de microfilms et 104 000 microfiches.
Ce fonds documentaire présente un caractère très composite : documents originaux provenant des archives des camps de concentration et des services employeurs de travailleurs forcés, copies de documents de même provenance dont les originaux sont conservés par d'autres institutions, archives (sous forme d'originaux ou de copies) provenant des services alliés d'occupation en charge des personnes déplacées et réfugiées.
II. - L'ouverture des fonds à la recherche historique
La question de l'ouverture des archives du SIR au public, pour la recherche historique et le devoir de mémoire, se pose avec acuité depuis 1990. Les chercheurs, les survivants de la Seconde Guerre mondiale et les ayants droit de ceux-ci - notamment la Fédération nationale des déportés et internés résistants et patriotes (FNDIRP) en France - réclament l'ouverture des fonds conservés par le SIR. Un symposium s'est tenu les 5 et 6 février 1998 à Strasbourg sur le thème « Conservation et ouverture aux chercheurs des archives des camps de concentration et du génocide : étude particulière du SIR d'Arolsen ». Le groupe d'action internationale pour la mémoire de la Shoah (GAIS), dont la France est membre, oeuvre également pour l'ouverture de ces fonds.
III. - Principales dispositions du protocole
Le nouvel objectif d'ouverture à la recherche historique que les États membres souhaitent assigner au SIR, en plus de l'objectif initial de caractère humanitaire, nécessite que soit amendé l'accord de 1955 créant la CISIR.
Les amendements, préparés par un groupe d'experts juridiques durant l'année 2005, ont été paraphés par les représentants des États membres de la CISIR lors de la réunion plénière de Luxembourg, le 16 mai 2006. Les onze États ont signé le protocole d'amendement de l'accord de 1955 le 26 juillet 2006 à Berlin.
La démarche d'ouverture des archives à la recherche historique s'effectuera selon deux modalités éventuellement complémentaires. À cet effet, les articles II et III de l'accord prévoient d'assurer l'accès aux archives et documents conservés par le SIR, d'une part sur le site même de Bad-Arolsen, ainsi que, d'autre part, au moyen de copies des archives et des documents qui seront remises sur demande aux États membres. Ceux-ci pourront alors donner accès aux copies numérisées dans un dépôt d'archives approprié situé sur leur territoire, conformément au droit national pertinent, à la réglementation et aux usages de leurs archives nationales.
Les modalités d'accès aux archives et documents à Arolsen même seront définies dans un règlement qui devra être adopté à l'unanimité par la CISIR. Celui-ci devra permettre en particulier que l'ouverture des archives à la recherche historique n'entrave pas de façon significative le travail humanitaire du SIR.
L' article IV prévoit que le protocole entrera en vigueur à la date de réception de la dernière notification reçue par le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne en sa qualité de dépositaire des accords de Bonn.
Les accords de Bonn n'ayant jamais été publiés au Journal officiel de la République française bien qu'ils produisent leurs effets depuis 1955, le Conseil d'État a estimé que ce projet de loi devait également être l'occasion d'en autoriser la ratification.
Telles sont les principales observations qu'appelle le protocole sur la modification de l'accord de Bonn instituant une Commission internationale pour le service international de recherches qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumis au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.
PROJET DE LOI
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre des affaires étrangères et européennes,
Vu l'article 39 de la Constitution,
Décrète :
Le présent projet de loi autorisant l'approbation du protocole sur la modification de l'accord instituant une Commission internationale pour le Service international de recherches, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'État, sera présenté au Sénat par le ministre des affaires étrangères et européennes, qui sera chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.
Article unique
Est autorisée l'approbation du protocole sur la modification de l'accord de Bonn instituant une Commission internationale pour le Service international de recherches, conclu le 6 juin 1955, entre les Gouvernements du Royaume de Belgique, de la République Française, de la République Fédérale d'Allemagne, de la République hellénique, de l'État d'Israël, de la République Italienne, du Grand-Duché de Luxembourg, du Royaume des Pays-Bas, de la République de Pologne, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et des États-Unis d'Amérique, adopté à Berlin le 26 juillet 2006, ensemble l'accord du 6 juin 1955 et le protocole subséquent du 23 août 1960, et dont les textes sont annexés à la présente loi.
Fait à Paris, le 24 août 2007
Signé : FRANÇOIS FILLON
Par le Premier ministre :
Le ministre des affaires étrangères et européennes,
Signé : BERNARD KOUCHNER
P R O T O C O L E
sur la modification de l'Accord instituant une Commission Internationale
pour le Service International de Recherches,
adopté le 26 juillet 2006
P R O T O C O L E
sur la modification de l'Accord instituant une Commission Internationale
pour le Service International de Recherches
Les Gouvernements
Du Royaume de Belgique,
De la République française,
De la République fédérale d'Allemagne,
De la République hellénique,
De l'État d'Israël,
De la République italienne,
Du Grand-Duché de Luxembourg,
Du Royaume des Pays-Bas,
De la République de Pologne,
Du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord
Des Etats-Unis d'Amérique,
désireux de modifier l'Accord instituant une Commission Internationale pour le Service International de Recherches, à l'origine conclu à Bonn le 6 juin 1955, et ses amendements successifs,
sont convenus de ce qui suit :
Article I
Les paragraphes suivants seront ajoutés au Préambule avant le dernier considérant :
« Considérant que les Gouvernements de la République hellénique et de la République de Pologne sont subséquemment devenus Parties à l'Accord instituant une Commission Internationale pour le Service International de Recherches, et qu'ils sont donc membres de la Commission Internationale pour le Service International de Recherches ;
« Désirant assurer l'accès, à des fins de recherche, aux archives et documents conservés par le Service International de Recherches, tant sur le site même qu'au moyen de copies d'archives et de documents ;
« Considérant que les Gouvernements estiment que le droit national de chacun d'entre eux garantit une protection adéquate en matière de données personnelles et qu'ils escomptent que chaque Gouvernement, en accordant l'accès aux copies mentionnées ci-dessus, prendra en considération le caractère sensible de certaines des informations qu'elles pourraient contenir. »
Article II
La phrase suivante sera ajoutée à la fin de l'article 2, paragraphe a) :
« , y compris l'accès des chercheurs aux archives et documents conservés par ce service à Bad Arolsen. »
Article III
Un article 8 bis sera ajouté :
« Art. 8 bis. - a. Chaque Gouvernement recevra sur demande une copie unique des archives et documents du Service International de Recherches.
Chaque Gouvernement pourra rendre ces archives et documents accessibles à la recherche dans les locaux d'un dépôt d'archives approprié situé sur son territoire, où l'accès sera accordé conformément au droit national pertinent et à la réglementation et aux usages nationaux concernant les archives. »
Article IV
Ce protocole entrera en vigueur à la date à laquelle tous les Gouvernements contractants auront fait savoir au Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne que les procédures nécessaires sur le plan national à l'entrée en vigueur sont achevées. La date pertinente sera la date à laquelle la dernière notification aura été reçue par le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne.
Le présent Protocole est conclu en langues française, allemande et anglaise, les trois textes faisant également foi.
Il sera ouvert du ler juin 2006 au 1er novembre 2006 au Ministère des affaires étrangères de la République fédérale d'Allemagne, à Berlin, en un seul exemplaire à la signature de tous les Gouvernements, membres de la Commission internationale pour le Service International de Recherches.
Le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne en transmettra une copie certifiée conforme à tous les Gouvernements signataires, ainsi qu'au Secrétaire général des Nations Unies pour enregistrement, conformément à l'article 102 de la charte des Nations Unies.
Pour le Gouvernement du Royaume de Belgique :
Pour le Gouvernement de la République française :
Pour le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne :
Pour le Gouvernement de la République hellénique :
Pour le Gouvernement de l'Etat d'Israël :
Pour le Gouvernement de la République italienne :
Pour le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg :
Pour le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas :
Pour le Gouvernement de la République de Pologne :
Pour le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord :
Pour le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique :
Activer ce lien pour consulter l'accord instituant une Commission internationale pour le service international de recherches, signé à Bonn le 6 juin 1955 ,
* * La Pologne et la République hellénique ont accédé au statut de Parties par la suite.