EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le 11 juillet 2023, la Commission européenne a présenté, dans le cadre du paquet sur l'écologisation des transports de marchandises, une proposition de directive tendant à réviser les dimensions maximales autorisées en trafic national et les poids maximaux autorisés en trafic international pour les véhicules utilitaires lourds1(*).
Outre cette révision, le paquet législatif comprend deux autres textes : une proposition de règlement sur l'utilisation des capacités de l'infrastructure ferroviaire dans l'espace ferroviaire européen2(*), et une proposition de règlement concernant la comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre des services de transport3(*). Cette nouvelle réglementation doit contribuer à améliorer l'efficacité et la durabilité du transport de marchandises, en optimisant la gestion de l'infrastructure ferroviaire, en proposant des incitations plus attractives pour les camions à faibles émissions et en renforçant l'information sur les émissions de gaz à effet de serre du transport de marchandises.
La proposition de directive, examinée par le Sénat, vise à réviser la directive 95/63/CE du 25 juillet 1996 qui fixe les poids et dimensions maximaux autorisés pour les véhicules utilitaires lourds circulant sur les routes de l'Union européenne, tout en offrant des flexibilités au niveau national.
Au cours des dernières décennies, les mesures adoptées dans le cadre de la politique européenne des transports ont largement contribué au développement du transport routier de marchandises au sein de l'Union européenne.
Toutefois, selon la Commission européenne, l'application insuffisamment coordonnée au niveau des États membres de cette directive n'a pas permis d'atteindre pleinement ses objectifs. Elle a conduit à une fragmentation du marché intérieur et a été source d'insécurité juridique pour le transport transfrontalier, notamment en raison de la disparité des réglementations nationales. En outre, la législation européenne n'a eu qu'un impact limité sur la décarbonation du secteur des transports et sur le développement du transport combiné. Afin de remédier à ces insuffisances et à ces difficultés, la Commission européenne propose d'harmoniser les règles de circulation des véhicules utilitaires lourds entre les États membres pour les opérations de transport international, tout en intégrant les spécificités des technologies à émission nulle.
Les dispositions adoptées en 1996 au niveau européen, à une époque où le transport routier était moins internationalisé qu'aujourd'hui, puis modifiées en 2002, 2015 et 2019, visaient principalement à protéger les infrastructures routières des différents pays de l'Union européenne, en particulier les ponts et les tunnels, et à renforcer la sécurité routière. Elles devaient également permettre de garantir la libre circulation des poids lourds ainsi que des conditions de concurrence équitables au sein du marché unique. Ainsi, la directive 96/53/CE a interdit aux États membres de restreindre l'entrée ou le passage sur leur territoire des véhicules respectant les normes standards européennes en matière de poids et de dimensions.
La révision de cette directive, proposée par la Commission européenne, s'inscrit dans le cadre de l'objectif de neutralité climatique du continent européen à l'horizon 2050 et de réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports. Elle vise à accélérer les efforts de décarbonation du transport routier, en encourageant l'acquisition de véhicules lourds zéro émission, en promouvant le transport intermodal et en renforçant le marché intérieur. Ces leviers ne sont cependant pas suffisants pour atteindre les objectifs climatiques de l'Union ; ils doivent également s'accompagner d'une approche plus globale de verdissement du fret, s'inscrivant dans une complémentarité entre la route et le rail.
Les discussions, lors du Conseil transport du 18 juin 2024, n'ont pas permis d'aboutir à une orientation générale, en raison des désaccords profonds qui subsistent entre États membres. Les travaux sur ce texte n'ont pas été poursuivis au deuxième semestre 2024 par la présidence hongroise du Conseil. Le programme de la présidence polonaise prévoit de les reprendre au cours du premier semestre 2025. Le Parlement européen a adopté sa position le 12 mars 2024.
Un certain nombre d'États membres, au premier rang desquels la France et l'Allemagne, certes pour des raisons différentes, ont exprimé de fortes réserves sur cette proposition de directive. Ils considèrent, en particulier, que les nouvelles règles proposées par la Commission européenne sont susceptibles de faire peser des risques sur l'intégrité des infrastructures routières et de favoriser un report du trafic vers des modes de transport moins durables. En revanche, les pays du nord de l'Europe, qui utilisent depuis longtemps des ensembles routiers plus longs et plus lourds, sont favorables à l'adoption de ce texte.
A. Le verdissement du transport de marchandises : le double défi de la décarbonation du transport routier et du développement du transport intermodal pour atteindre les objectifs climatiques de l'Union européenne
1. La prédominance accrue du mode routier dans le fret européen
Au sein de l'Union européenne, la route occupe une position dominante dans le transport de marchandises. Au cours de la dernière décennie, le volume du fret routier en Europe a progressé de 19 %, tandis que la part cumulée du rail et du fleuve a reculé de près de quatre points. La part modale du transport routier s'établit à 77,8 % des tonnes-kilomètres transportées4(*). En moyenne, 85 % des marchandises sont transportées sur des distances inférieures à 150 kilomètres, et pour lesquelles il n'existe pas d'alternative. Il est ainsi difficile d'imaginer un futur du fret européen sans poids lourds. Ils demeureront un élément structurant incontournable du secteur.
Néanmoins il existe des disparités importantes entre États membres en matière de répartition modale, qui reflètent les spécificités géographiques, les infrastructures disponibles et les pratiques de transport propres à chaque pays. La France est l'un des pays où le poids de la route est particulièrement élevé, hors pays insulaire, avec l'Espagne (95,6 %), la Grèce (97,7 %), le Danemark (90,4 %), le Portugal (87,7 %) et l'Italie (87,6 %)5(*).
En France, en 2023, sur un marché intérieur de 331 milliards de tonnes-kilomètres, cette part s'élevait à 89,3 %, celle du fret ferroviaire à 8,9 % et celle du transport fluvial à 1,8 %6(*). La part de la route n'a cessé de progresser au niveau national : de 50 % du trafic de marchandises au début des années 1970, elle a franchi le cap des 85 % dans les années 2000. Cette progression s'est réalisée, comme à l'échelle européenne, au détriment du ferroviaire qui n'a cessé de décliner, dans le sillage de la désindustrialisation qu'a connue notre pays.
Comme l'a indiqué M. Michel Savy, professeur émérite à l'Université Paris-Est, aux rapporteurs de la commission des affaires européennes, s'agissant de l'exemple français, il est difficile de concurrencer la route, qui couvre l'ensemble du territoire national, d'autant plus que la reconfiguration du réseau ferroviaire de notre pays, qui s'est traduite par la fermeture de nombreuses gares dans les petites villes, s'est recentrée sur la desserte des axes principaux. Les critères de rapidité d'acheminement et de fiabilité jouent ainsi un rôle déterminant dans le choix des clients d'opter pour le transport routier.
En 2022, le transport routier de marchandises international entre la France et le reste de l'Europe représentait 145 milliards de tonnes-kilomètres, assuré à 91,7 % par des pavillons étrangers6. La Belgique, l'Espagne et l'Allemagne sont des partenaires commerciaux importants pour la France. Comme l'a fait observer les représentants de l'Organisation des transporteurs routiers européens (OTRE) lors de leur audition par les rapporteurs, l'activité transfrontalière constitue « une activité forte et essentielle pour les entreprises françaises, notamment celles implantées proches des frontières »7(*).
Selon une étude publiée par le Comité national routier, en France, l'activité internationale du transport routier de marchandises a fortement progressé au cours des dix dernières années tandis que l'activité nationale a diminué. Dans l'ensemble des pays européens, elle représente plus du tiers de l'activité de transport routier de marchandises. Les trois premiers pavillons routiers en Europe sont la Pologne, l'Allemagne et l'Espagne, la France se situant en quatrième position. Depuis les années 1990, les parts de marché du pavillon français ont enregistré des pertes importantes face à une concurrence accrue.
2. Le transport routier, principal responsable des émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports
Les transports sont responsables de plus d'un quart des émissions totales de CO2 dans l'Union européenne et d'environ 30 % en France. En 2022, ils constituaient le premier secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre en Europe, suivi par l'industrie de l'énergie. Malgré les efforts de décarbonation réalisés par les différentes filières du secteur, les émissions de gaz à effet de serre (GES) se sont accrues en Europe d'un quart depuis 1990 ; cette augmentation s'explique principalement par le développement du transport routier et aérien.
Le transport routier est un contributeur majeur aux émissions de gaz à effet de serre dans l'Union européenne. Il représente plus de 71 % des émissions de CO2 de l'ensemble des transports, tandis que le rail ne représente que 0,4 %8(*). Les voitures particulières et les véhicules utilitaires légers sont responsables des deux tiers de ces émissions tandis que les véhicules utilitaires lourds (camions, bus, et cars) y contribuent à hauteur de 27 %8. Ces derniers représentent plus de 6 % des émissions globales de GES dans l'Union européenne.
La Commission européenne a ainsi identifié le secteur des transports comme prioritaire pour s'engager dans la transition climatique. Dès 2011, elle a proposé un objectif ambitieux de réduction de 60 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au niveau de 19909(*).
La stratégie européenne de mobilité durable et intelligente10(*), présentée le 9 décembre 2020, par la Commission européenne, vise ainsi à transformer le système des transports de l'UE pour permettre d'atteindre les objectifs climatiques du Pacte vert pour l'Europe. L'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports d'ici 2050, par rapport au niveau de 1990, a été revu à la hausse, passant à 90 %. La Commission européenne prévoit aussi la mise en circulation d'au moins 30 millions de véhicules zéro émission d'ici 2030.
Dans le cadre du paquet « Ajustement à l'objectif 55 », un nouveau règlement a été adopté, le 10 avril 2024, actualisant les objectifs de réduction des émissions des véhicules routiers lourds neufs11(*). Ce règlement établit des objectifs de réduction plus stricts pour les camions de plus de 7,5 tonnes, les bus et les remorques. Les émissions devront être réduites de 45 % pour la période 2030-2034, puis de 65 % pour la période 2035-2039 et de 90 % à partir de 2040, par rapport aux émissions moyennes de l'année 2019. Ces objectifs visent à favoriser la décarbonation des poids lourds et à encourager la mise sur le marché européen de véhicules propres.
En France, le projet de stratégie nationale bas-carbone (SNBC), soumis actuellement à consultation, traduit les engagements pris par l'Union européenne dans le cadre de ce nouveau règlement. Il fixe ainsi un objectif de 50 % de part de marché pour les poids lourds neufs à motorisation électrique ou hydrogène en 2030.
L'utilisation de véhicules utilitaires lourds à émission nulle reste encore très limitée dans l'Union européenne. Ils ne représentent actuellement qu'environ 2 % des ventes de véhicules neufs en Europe. Selon les informations communiquées par la Commission européenne, 96,3 % de l'ensemble des camions de l'Union européenne fonctionnent encore au diesel. La part des camions électriques rechargeables est encore très faible puisqu'elle ne dépasse pas 0,2 %. Toutefois l'utilisation d'énergies alternatives au gazole fossile se développent, avec des niveaux de maturité technologique et d'adoption qui varient selon les solutions. Les immatriculations de camions à émission nulle progressent dans l'Union européenne. En France, les immatriculations de poids lourds électriques sont passées de seulement 61 unités en 2021 à 596 en 202312(*). Elles pourraient représenter 14 % de parts de marché en 2025, selon la Fédération nationale des transports routiers.
Dans son étude d'impact, la Commission européenne prévoit une augmentation des immatriculations annuelles de véhicules utilitaires lourds à émission nulle de l'ordre de 1 300 véhicules en 2030, 2 400 en 2040 et 2 500 en 2050. Leur part dans la flotte de poids lourds de l'UE resterait néanmoins très faible : 0,7 % d'ici à 2030, 1,6 % d'ici à 2035, 3,6 % d'ici à 2040 et 7,7 % d'ici à 2050.
3. Le report modal : un levier essentiel pour la transition écologique du transport de marchandises
L'Union européenne s'est fixée des objectifs ambitieux pour accroître la part du ferroviaire et du fluvial dans le transport de marchandises. Il est prévu de transférer 30 % du fret routier vers des modes de transport plus écologiques d'ici 2030 et 50 % d'ici 2050. Il s'agit aussi de renforcer les corridors de transport multimodaux, combinant routes, rails et voies navigables, afin de faciliter et de rendre plus efficace le transport de marchandises.
- Les atouts écologiques et économiques du rail
Le fret ferroviaire dispose d'atouts spécifiques capables de combiner écologisation et compétitivité. Il permet de réduire les coûts liés au carburant et offre ainsi une meilleure efficacité sur le plan énergétique. Par ailleurs, il est le mode de transport le moins émetteur de CO2. Pour une même masse transportée de marchandises, le rail émet en moyenne neuf fois moins de CO2 par kilomètre qu'un poids lourd.
En 2023, le fret ferroviaire en Europe représentait 378 milliards de tonnes-kilomètres13(*) ; ce volume demeure globalement stable dans la durée. Sa part modale dans le transport de marchandises au sein de l'UE est évaluée à environ 17 %. Néanmoins, elle varie considérablement en fonction des pays.
La France est un des pays européens, avec l'Espagne (4 %), où la part modale du ferroviaire dans le transport intérieur de marchandises est la plus faible. Elle s'établit à 8,9 % en 2023, contre 10,4 % en 2022. Elle est deux fois plus élevée en Allemagne (18 %), et encore plus en Suède (30 %). L'année 2023 a, en effet, été marquée, en France, par des difficultés conjoncturelles (grèves, fermeture du tunnel de la Maurienne) qui ont fortement pénalisé cette activité. Les premiers signes pour l'année 2024 montrent une reprise des trafics notamment pour le transport combiné.
Comme l'a rappelé M. Michel Savy, lors de son audition par les rapporteurs, le déclin du fret ferroviaire en France débute en 1974, sous l'effet de la transformation profonde du système de production nationale, caractérisée par l'affaiblissement de certaines industries lourdes qui étaient auparavant les principaux clients du chemin de fer, au profit d'une logistique de distribution plus souple et plus variable. D'autres raisons peuvent aussi être évoquées, comme l'état du réseau ferroviaire, l'absence de mise en oeuvre de certaines technologies ou les conflits sociaux. L'ouverture à la concurrence du marché du fret ferroviaire14(*) en Europe a toutefois permis d'enrayer ce déclin, sans réellement contribuer à son développement. Afin de développer les alternatives au transport routier, la France vise, dans sa stratégie nationale pour le développement du fret ferré, un doublement de la part modale du fret ferroviaire à l'horizon 2030.
Or, selon l'Association des utilisateurs de transport de fret (AUTF), « l'objectif, extrêmement ambitieux au départ, d'une part modale du fret ferroviaire portée à 18 % en 2030, semble déjà hors d'atteinte du fait de l'état actuel du réseau ainsi que des contraintes pesant sur les moyens financiers et humains de SNCF Réseau »15(*). Cette analyse est également partagée par M. Michel Savy qui a qualifié, lors de son audition par les rapporteurs, cet objectif de « déraisonnable », compte tenu de l'état actuel du réseau et des investissements nécessaires à sa modernisation, lors de son audition par les rapporteurs de la commission des affaires européennes. L'objectif de 18 % de part modale du fret ferroviaire en 2030 doit, en effet, se traduire par un triplement des trafics du transport combiné et une augmentation de 50 % du trafic conventionnel.
L'Allemagne est le premier marché européen du fret ferroviaire, avec un trafic total de 125 milliards de tonnes-kilomètres en 2023, soit environ 31 % du total de l'Union européenne. Ce pays est suivi par la Pologne et la France, avec respectivement un volume d'activité de 60 et 29 milliards de tonnes-kilomètres.
Pour l'ensemble de l'Union, la part du transport national dans le fret ferroviaire, en 2023, est estimée à 51,5 %, celle des déchargements internationaux à 18,3 %, celle des chargements internationaux à 18,1 % et celle du transport de marchandises en transit à 12,1 %.
La part du transport international dans le fret ferroviaire varie significativement en fonction des États membres et dépend en grande partie de leur position géographique au sein de l'Europe. Les pays qui enregistrent les parts les plus élevées de transport international sont généralement situés le long des principaux corridors européens de fret ferroviaire. C'est notamment le cas de la Grèce (95 %), de la Lettonie (88,9 %), des Pays-Bas (85,9 %) et du Luxembourg (80,6 %). Il faut noter que l'activité du fret ferroviaire en Europe est très liée aux services portuaires et au commerce hors Union.
- La place marginale du fret fluvial
En 2022, la part modale du transport fluvial dans l'UE représentait 5,1 % du transport de marchandises. Elle est quasi inexistante dans quinze États membres tandis qu'elle est très significative dans trois autres, les Pays-Bas (41 %), la Roumanie (20 %) et la Bulgarie (16 %)16(*). En France, elle oscille autour de 2 %.
- Le transport combiné en plein essor
Le transport combiné en France et en Europe connaît une dynamique de croissance et devrait jouer un rôle important dans la transition écologique du transport de marchandises. Entre 2011 et 2021, le transport combiné rail-route en Europe a connu une croissance de près de 50 %, avec une augmentation significative des volumes transportés sur les longues distances. La Commission européenne a présenté, le 7 novembre 2023, une nouvelle proposition pour actualiser la directive sur la combinaison des modes de transport17(*).
En France, il se compose à 74 % de trafic rail-route et à 26 % de trafic fleuve-route. Il représentait, en 2022, environ 40 % du fret ferroviaire, soit environ 4 % du transport de marchandises tous modes confondus18(*). Lors de leur audition par les rapporteurs de la commission des affaires européennes, les transporteurs routiers se sont déclarés très favorables à ce mode de transport, arguant de la complémentarité entre la route et le rail.
B. Une évolution des règles européennes en matière de poids et dimensions des poids lourds qui concerne principalement les opérations de transport de marchandises international
La directive 96/53/CE du 25 juillet 1996, modifiée en 200219(*), 201520(*) et 201921(*), a fixé les dimensions maximales autorisées en trafic national et international, ainsi que les poids maximaux autorisés en trafic international et certaines autres caractéristiques des véhicules définies dans les annexes de la directive. Elle s'applique aux véhicules de transport de marchandises et de leurs remorques dépassant 3,5 tonnes, ainsi qu'aux véhicules affectés au transport de personnes transportant plus de neuf passagers.
Les modifications successives ont apporté plusieurs dérogations aux poids et dimensions maximaux autorisés des véhicules et des ensembles de véhicules afin de faciliter l'utilisation de groupes motopropulseurs à carburant alternatif (y compris à émissions nulles), d'améliorer l'aérodynamisme des véhicules, de soutenir les essais de systèmes modulaires et d'encourager les opérations de transport intermodal. La législation actuelle accorde une certaine flexibilité aux États membres dans la mise en oeuvre de certaines dispositions, les autorisant à fixer des limites de poids supérieures aux standards européens pour la circulation des véhicules utilitaires lourds sur leur territoire.
Suite à l'évaluation de la directive réalisée en 2022 par la Commission européenne, celle-ci a considéré que son application n'était pas suffisamment coordonnée au sein de l'Union européenne, et que par conséquent, elle conduisait à une fragmentation du marché intérieur, ce qui l'a conduit à présenter une révision de ce texte.
La Commission européenne a donc présenté, en juillet 2023, plusieurs mesures qui doivent contribuer à la décarbonation du transport de marchandises, en particulier en éliminant les principaux obstacles aux opérations de transport de marchandises transfrontières.
1. Une incitation à l'usage de véhicules utilitaires à énergies alternatives
Afin de favoriser l'adoption de technologies plus respectueuses de l'environnement, la Commission européenne propose de promouvoir l'utilisation et la commercialisation des véhicules lourds à émission nulle, dont le taux de pénétration sur le marché reste actuellement très faible. Elle considère ainsi que la décarbonation du secteur peut être soutenue par des mesures visant à adapter les limites de poids des véhicules utilitaires lourds afin de compenser le poids supplémentaire des systèmes de propulsion à émission nulle, tout en préservant la capacité de charge utile par rapport aux camions conventionnels.
La proposition de directive prévoit ainsi la possibilité, pour les véhicules utilitaires lourds à émission nulle, de bénéficier d'un bonus de longueur supplémentaire, avec un maximum de 90 cm, ainsi que de poids supplémentaire de 2 tonnes, portant la dérogation totale à 4 tonnes par rapport au poids maximal autorisé pour les véhicules conventionnels équivalents. Cette mesure vise à compenser le poids supplémentaire des batteries électriques, tout en prenant en compte également l'intégration des nouvelles technologies, notamment celles liées aux carburants de synthèse et à l'hydrogène. Par ailleurs, un bonus de poids supplémentaire à l'essieu serait introduit, autorisant un poids de 11,5 à 12,5 tonnes pour l'essieu portant la cabine du conducteur.
2. Une volonté d'harmonisation des règles de circulation pour les opérations de transport transfrontalières
Partant du constat que les véhicules à moteur thermique représenteront encore, dans les dix prochaines années, une part importante du parc de poids lourds, la proposition prévoit des mesures d'harmonisation, sur la base des règles nationales communes aux États membres voisins, afin de faciliter le franchissement des frontières et d'éviter les entraves à la circulation transfrontière des poids lourds au sein de l'UE. Les mesures proposées par la Commission européenne visent ainsi à optimiser le transport de marchandises en permettant d'augmenter le volume de fret transporté, tout en réduisant potentiellement le nombre de trajets. Elles pourraient contribuer à la réduction de l'empreinte carbone du secteur, notamment en autorisant la circulation transfrontalière de poids lourds de 44 tonnes et d'ensembles plus longs et plus lourds.
- une autorisation temporaire de circulation transfrontalière entre États membres pour les véhicules de 44 tonnes
La Commission européenne propose d'autoriser, jusqu'en 2035, pour les opérations internationales exclusivement routières, la circulation de véhicules utilitaires lourds de 44 tonnes, fonctionnant avec des combustibles fossiles, au lieu de 40 tonnes, entre les États membres les acceptant sur leur territoire, cette limite pouvant être dépassée pour les véhicules effectuant des opérations de transport intermodal si l'État membre autorise des poids plus élevés. Cette nouvelle disposition ne remet toutefois pas en question le droit des États membres de définir leurs propres limites de poids pour le trafic national, conformément au cadre européen existant22(*). En revanche, elle affecterait les transports internationaux entre les onze États membres qui autorisent déjà la circulation de poids lourds de plus de 40 tonnes sur leur réseau routier23(*), à l'exclusion des pays du Benelux qui bénéficient déjà de cette possibilité grâce au traité instituant l'Union économique Benelux, ce qui représenterait moins de 10 % des tonnes-kilomètres transportés par route dans l'UE, selon la direction générale mobilité et transports de la Commission européenne.
Cette autorisation avait déjà été ouverte par la directive de 1996 pour le transport combiné de conteneurs ; le franchissement de frontières est permis à 44 tonnes avec six essieux et à 42 tonnes à cinq essieux. Il est ainsi prévu de l'étendre à l'ensemble des opérations internationales routières.
Toutefois, cette autorisation, ouverte aux camions diesel de 44 tonnes et au-delà, dans le transport transfrontière serait limitée dans le temps ; il est prévu qu'elle ne s'applique que jusqu'au 31 décembre 2034. Cette approche vise à accorder aux opérateurs le temps nécessaire pour renouveler leur flotte, tout en permettant au marché de développer une offre étendue de véhicules utilitaires lourds zéro émission. À partir de 2035, seuls les véhicules utilitaires lourds à émissions nulles seraient autorisés à 44 tonnes en trafic international.
- un cadre juridique simplifié pour la circulation des systèmes modulaires européens
La Commission européenne propose d'harmoniser les conditions d'utilisation des systèmes modulaires européens (SME/EMS)24(*), dans le trafic transfrontalier, entre les États membres qui les autorisent sur leur territoire, en supprimant la nécessité de recourir à des accords bilatéraux, comme c'est le cas aujourd'hui. Cette disposition ne s'appliquerait donc qu'entre les États membres qui acceptent déjà ce type d'ensemble en trafic national. L'article premier point 3) c) de la proposition de directive stipule ainsi que « lorsqu'un État membre autorise [...] la circulation de systèmes modulaires européens en trafic national, il ne peut refuser ou interdire la circulation, sur son territoire, de systèmes modulaires européens en trafic international, pour autant que ces derniers ne dépassent pas les poids et dimensions maximaux fixés pour les systèmes modulaires européens en trafic national ». Le poids maximal autorisé applicable en trafic international est le moins élevé des deux États membres concernés.
Ainsi si un pays autorise, ou décide d'autoriser, les méga-camions sur son territoire, il devra alors l'accepter en trafic international avec les pays voisins qui les autorisent également dans des conditions harmonisées.
Il convient de souligner que le texte de la Commission européenne ne modifie pas le droit des États membres d'autoriser, ou non, la circulation de systèmes modulaires européens sur leur territoire, en fonction de considérations nationales, économiques et/ou opérationnelles. Comme cela a été rappelé par les autorités françaises, « en l'absence d'autorisation de circulation d'EMS sur le territoire national, l'adoption du projet de révision de directive sur cette base ne produirait pas d'effet utile en France »25(*).
La proposition de directive introduit aussi certaines conditions opérationnelles et de surveillance qui doivent être remplies pour permettre une utilisation sûre et équitable par les États membres des SME. En particulier, les États membres doivent mettre en place un système de surveillance et évaluer les incidences de ces méga-camions sur la sécurité routière, sur l'infrastructure routière, sur la répartition modale et sur l'environnement. Le Parlement européen a adopté une position favorable à leur libéralisation dans l'UE, tout en conditionnant leur autorisation à une évaluation préalable par les États membres, « pour les nouveaux itinéraires, de l'incidence possible des EMS sur la sécurité routière, sur les infrastructures routières, sur la coopération modale, sur le transfert modal et sur l'environnement ». Par ailleurs, la proposition de directive définit l'EMS comme un ensemble de véhicules composé d'unités embarquées standard, ce qui garantit la compatibilité avec le transport ferroviaire.
Actuellement, la circulation des systèmes modulaires européens sur le réseau routier européen est régie par des accords bilatéraux signés entre États membres26(*). Ils ne peuvent franchir qu'une seule frontière. Toutefois, depuis 2012, sur le fondement d'une dérogation accordée par le commissaire européen aux transports, M. Siim Kallas, deux États membres peuvent autoriser le transport transfrontalier de véhicules mesurant jusqu'à 25,25 mètres de long et pesant jusqu'à 60 tonnes, à condition que ces véhicules soient déjà autorisés à circuler sur leurs territoires respectifs.
Ces ensembles sont, pour l'instant, autorisés dans neuf pays européens, l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, les Pays-Bas, le Portugal, la République tchèque et la Suède, en circulation générale ou dans le cadre d'une expérimentation. La France n'a pas usé de cette possibilité offerte par la directive d'autoriser leur circulation en trafic national. En raison de fortes oppositions, aucune expérimentation n'a ainsi été lancée.
3. Une simplification des procédures administratives et un renforcement des contrôles
La Commission européenne propose d'harmoniser davantage les procédures administratives relatives à la circulation transfrontalière des véhicules de grande dimension. Elle prévoit notamment la mise en place d'un « guichet unique » pour les autorisations de transports exceptionnels et la circulation des systèmes modulaires européens, ainsi que des exigences linguistiques allégées pour les conducteurs de convois exceptionnels.
La proposition de directive vise à établir un cadre plus strict pour faire respecter les réglementations existantes sur le poids des véhicules. Elle prévoit d'instaurer un seuil minimal commun de contrôle du respect des limites de poids autorisées pour les poids lourds, ainsi qu'une obligation d'équiper les infrastructures routières de mécanismes de pesage dynamique permettant de détecter les véhicules en surcharge pendant leur déplacement et d'effectuer des contrôles sans nécessiter leur arrêt.
C. La nécessité pour les États membres de conserver la totale maîtrise des conditions de circulation des poids lourds sur leur territoire
La révision de la proposition de directive relative aux poids et dimensions des véhicules utilitaires lourds, et ses éventuelles implications nationales, suscitent de nombreux débats et controverses tant en France que dans d'autres États membres. Plusieurs pays européens, en particulier ceux de transit, ont exprimé de fortes réticences à l'introduction de nouvelles dispositions. C'est, en particulier, le cas de la France et de l'Allemagne qui ont manifesté leurs préoccupations concernant la préservation des infrastructures routières et les enjeux de sécurité routière.
Les parlementaires français ont également fait part, à plusieurs reprises, de leurs inquiétudes sur les évolutions proposées par la Commission européenne, notamment lors de la table ronde sur la « Politique européenne des transports : enjeux et défis de la prochaine mandature », organisée au Sénat, le 22 mai 2024, par la commission des affaires étrangères et la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable27(*). Plusieurs questions écrites ont aussi été posées au ministre en charge des transports concernant l'impact de la proposition de directive sur le plan national, entre autres par l'ancien sénateur Philippe Tabarot, actuel ministre délégué chargé des transports28(*).
Tout en partageant les objectifs de verdissement du fret et de décarbonation du transport routier, les rapporteurs de la commission des affaires européennes s'interrogent néanmoins sur l'opportunité de réviser la directive 96/53/CE relative aux poids et dimensions des véhicules utilitaires lourds, dans la mesure où les évolutions proposées par la Commission européenne visent principalement à uniformiser les conditions de circulation des poids lourds en trafic international et, en conséquence, à faciliter le passage des véhicules de grand gabarit. La présente proposition de résolution européenne fait part des réserves de la commission des affaires européennes quant à l'adoption de mesures qui tendraient à affaiblir la maîtrise par les États membres des règles de circulation des véhicules dépassant les normes européennes sur leur territoire.
Les rapporteurs tiennent aussi à souligner que les dispositions proposées par la Commission européenne doivent s'inscrire dans une stratégie à moyen et long terme visant à rendre le transport de marchandises plus durable et efficace. Ils considèrent que la priorité doit être donnée aux reports modaux vers le fret ferroviaire ou le fluvial, en phase avec les objectifs définis à l'échelle européenne et nationale.
Les auditions réalisées par les rapporteurs ont montré que le texte proposé par la Commission européenne soulève un certain nombre d'interrogations concernant son impact environnemental, la dégradation potentielle des infrastructures routières et les enjeux de sécurité routière.
1. Une réduction incertaine de l'empreinte carbone du transport de marchandises et une possible compétitivité accrue de la route
Selon la Commission européenne, les mesures proposées visant à optimiser et à massifier le transport de marchandises devraient contribuer à réduire le nombre de poids lourds sur les routes européennes, tout en favorisant des modes de transport plus respectueux de l'environnement. La préservation des dynamiques de report modal du transport de marchandises de la route vers le rail ou le fluvial est au coeur des stratégies en faveur du développement du fret ferroviaire et fluvial, et surtout du transport combiné.
Or, selon plusieurs interlocuteurs auditionnés par les rapporteurs, le texte n'envoie pas les signaux appropriés en matière de décarbonation du transport de marchandises.
- Des économies de consommation d'énergie qui ne sont pas proportionnelles à l'augmentation de la capacité de chargement des poids lourds
Selon la Commission européenne et les transporteurs routiers, l'utilisation des méga-camions permettrait de diminuer la consommation de carburant de 25 % et de réduire ainsi les émissions de gaz à effet de serre s'ils circulent en pleine capacité. Un véhicule de 60 tonnes peut, en effet, transporter 51 palettes, contre 33 pour une semi-remorque classique, soit une augmentation significative de la capacité d'environ 50 %. Lors de leur audition, les représentants de l'Union TLF ont estimé que les nouvelles dispositions devraient permettre une baisse très significative de l'empreinte carbone par produit transporté d'environ 30 %.
Au regard des données disponibles et communiquées aux rapporteurs, cette affirmation doit être nuancée. Certes, l'augmentation de la capacité de chargement des poids lourds présente des gains potentiels en matière d'économies de carburant et de diminution des émissions de CO2, à condition toutefois d'être chargés à leur capacité maximale. Par ailleurs, les économies générées ne sont pas directement proportionnées en raison de la puissance de motorisation accrue nécessaire. Diverses études29(*) montrent que la fourchette de gain d'énergie se situe entre 6 % et 28 % par tonne-kilomètre transportée. Enfin, il convient de rappeler que le potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre apparaît marginal comparé à la faible intensité carbone du transport ferroviaire et fluvial.
En effet, si les camions à plus grande capacité se développent sur des axes parallèles aux lignes ferroviaires et aux voies fluviales, le bilan carbone sera, de toute façon, négatif malgré leur efficacité accrue. Des effets collatéraux pourraient aussi se poser à moyen terme, notamment un report modal inversé, où le transport routier gagnerait en attractivité au détriment des modes de transport plus écologiques comme le rail ou le fluvial.
- Un risque plus important de report modal inversé
Ainsi que le fait remarquer le Conseil économique et social européen, dans son avis sur la proposition de directive30(*), une baisse des coûts du fret routier, liée au développement des poids lourds de grand gabarit, pourrait stimuler la demande, particulièrement pour les trajets longue distance, et ainsi favoriser le transport routier au détriment de solutions alternatives moins émettrices de gaz à effet de serre, ce qui entrerait en contradiction avec les politiques visant à favoriser le report modal de la route vers le rail ou le fluvial.
Plusieurs études mettent en évidence les effets collatéraux à moyen terme de la massification du transport routier, en particulier un report modal inversé.
Selon une étude menée par le cabinet allemand D-Fine, pour le compte de la Communauté européenne du rail, le déploiement massif des SME dans l'Union européenne pourrait augmenter le nombre de trajets supplémentaires de 10,5 millions par an, ce qui se traduirait par une augmentation de 6,6 millions de tonnes des émissions de CO2, en contradiction avec les efforts demandés dans le cadre du Pacte vert pour l'Europe. Le report modal inversé pourrait concerner 10 à 30 % du volume, et même jusqu'à 80 % sur certains marchés très sensibles, comme les conteneurs. Cela pourrait ainsi avoir un impact significatif sur le fret ferroviaire et le transport combiné dont l'activité pourrait diminuer respectivement de 21 % et 16 %, ce qui ne serait pas en phase avec les objectifs fixés par l'UE.
En outre, en autorisant le franchissement des frontières pour les véhicules thermiques de 44 tonnes, pour des opérations strictement routières, cette mesure mettrait fin aux avantages dont bénéficient actuellement le transport intermodal et pourrait contribuer à déstabiliser les marchés.
Selon la DGITM, cette mesure pourrait également provoquer un doublement du trafic sur le territoire national, en particulier sur les autoroutes françaises des couloirs alsacien, rhodanien, et sur l'axe France-Espagne. Lors de leur audition, les représentants du Cerema ont indiqué qu'environ 50 % des poids lourds effectuant des trajets internationaux seraient des modèles d'une capacité de 44 tonnes.
Ainsi les rapporteurs ne partagent pas l'affirmation selon laquelle l'augmentation de la capacité de charge maximale des véhicules routiers conduirait nécessairement à diminuer le volume global de véhicules sur les routes, ce qui contribuerait à améliorer la fluidité du trafic et à la réduction de l'empreinte carbone du transport routier. Ils s'inquiètent d'un risque de flux incontrôlé de poids lourds à l'échelle du territoire national.
S'agissant des SME, la France est aussi préoccupée par les effets néfastes de leur développement à l'échelle européenne en termes de report modal. Pour l'instant, aucune étude n'a été réalisée sur les conséquences de leur utilisation dans notre pays. Leur circulation devrait nécessairement se faire sur des itinéraires dédiés et supposerait des investissements pour adapter certaines infrastructures à leur gabarit, comme les aires de repos et de stockage. Cependant, les autorités françaises ne sont pas opposées à un régime juridique pour les pays souhaitant les autoriser, l'autorisation pouvant être assortie de conditions (critères environnementaux, sécurité routière, critères opérationnels - seulement sur certains itinéraires, en cas d'absence d'offre de transport combiné ou de mode plus écologique).
Les rapporteurs de la commission des affaires européennes s'inquiètent que l'autorisation de circulation de véhicules de très grandes capacités de chargement ne favorise le secteur routier au détriment du rail, mais aussi du transport combiné, en réduisant l'attrait et la compétitivité de ces derniers. Cette mesure pourrait, en effet, contribuer à rendre le transport routier encore plus compétitif. Ils considèrent que les dynamiques en faveur du transport combiné ne doivent pas être freinées par des mesures qui s'avèreraient contre-productives dans le contexte de verdissement du transport de marchandises.
La préservation de l'attractivité des ports français constitue aussi un élément à prendre en compte, dans un contexte de forte concurrence avec les ports du nord de l'Europe.
Toutefois, les rapporteurs tiennent à souligner que le retard pris par la France, en termes d'investissements dans le fret ferroviaire, a notamment contribué à son déclin progressif. Les investissements ont été historiquement orientés vers le développement des lignes à grande vitesse et le réseau routier, au détriment du transport de marchandises par le rail. Le manque d'investissement a entraîné une dégradation des infrastructures et de la qualité de service, rendant le fret ferroviaire moins attractif par rapport au transport routier. Les experts du secteur ont souligné les objectifs particulièrement ambitieux, affichés à l'échelle européenne et nationale, et les difficultés à les atteindre, compte tenu des moyens financiers nécessaires.
2. Des risques d'impacts accrus sur les infrastructures routières et les ouvrages d'art
Les auditions réalisées par les rapporteurs ont montré que plusieurs mesures proposées par la Commission européenne suscitent des réserves en raison de leur impact potentiel sur les infrastructures routières, chaussées et ouvrages d'art. Les routes, les ponts et les tunnels n'ont, en général, pas été conçus pour supporter des charges excessives, lesquelles peuvent aussi accélérer leur dégradation. L'adaptation des routes à ces nouveaux ensembles routiers, et la réparation des éventuelles dégradations, représentent des enjeux importants pour l'État et les collectivités territoriales, d'autant plus que l'état actuel de certaines infrastructures nécessiterait de procéder à des investissements importants. Selon le Cerema, l'ouverture de la frontière aux poids lourds de 44 tonnes induirait une augmentation des coûts d'entretien du réseau routier. L'ordre de grandeur de ces coûts est estimé à 55 millions d'euros.
Les rapporteurs font observer, comme l'a justement souligné la déléguée à la sécurité routière, que la dégradation des chaussées et des ouvrages d'art due aux véhicules utilitaires lourds constitue un défi majeur pour les collectivités territoriales. Elle se pose différemment selon le type de infrastructures. La circulation des poids lourds est un facteur majeur de détérioration des chaussées, tandis que celle des véhicules légers a un impact négligeable. L'agressivité des véhicules lourds sur la chaussée est proportionnelle à une puissance de la force d'impact exercée par l'essieu, comprise entre quatre et cinq. Ainsi, une légère augmentation de la charge par essieu peut entraîner une usure disproportionnellement plus importante de la chaussée. Le poids à l'essieu constitue, d'ailleurs, le point le plus critique dans les négociations sur la réglementation des poids et dimensions des véhicules routiers. L'impact sur les ouvrages est plus difficile à évaluer globalement ; il est spécifique à chaque ouvrage. Néanmoins le passage répété de poids lourds fragilise et dégrade les ouvrages d'art.
Selon un rapport au Parlement, publié en janvier 2011, sur les enjeux et les impacts relatifs à la généralisation de l'autorisation de circulation des poids lourds de 44 tonnes, « les études montrent que si le passage à 44 tonnes avait lieu à type de véhicules constants (essentiellement des ensembles routiers composés d'un tracteur à deux essieux et d'une remorque à trois essieux « tridem »), la durée de vie des chaussées et des ouvrages d'art serait impactée, avec des variations fortes suivant la structure de la chaussée et la densité du trafic supporté. On peut estimer qu'un poids lourd de 44 tonnes produit une usure équivalente à deux poids lourds de 40 tonnes pour une route à fort trafic (surcoût d'entretien de 2 %), avec un impact majoré sur les routes à faible trafic (+ 4 %). »31(*).
C'est pourquoi les rapporteurs ne partagent pas l'affirmation de la Commission européenne selon laquelle les incidences seraient marginales et compensées par la réduction du nombre de trajets pour transporter le même volume de marchandises, laquelle n'est pas établie. Ces inquiétudes sont, d'ailleurs, exprimées par une majorité d'États membres, en particulier s'agissant de la capacité de leurs infrastructures à supporter une augmentation du poids à l'essieu. Elles concernent l'ensemble des véhicules quelle que soit leur motorisation, y compris les véhicules à émission nulle. En effet, le bonus de poids supplémentaire, nécessaire pour compenser le poids des batteries, est de nature à créer une pression supplémentaire sur les infrastructures routières.
3. Les enjeux de sécurité routière ne doivent pas être sous-estimés
Même si aucune étude n'a montré un risque accru pour la sécurité routière de la circulation de camions plus lourds et plus volumineux32(*), leur impact potentiel sur la sécurité routière ne doit pas être écarté pour plusieurs raisons.
- La priorité à la prévention des accidents de poids lourds : vers une réduction des risques
La gravité des accidents impliquant des poids lourds est plus importante que celle des accidents entre véhicules légers, en raison d'une énergie cinétique plus élevée due à leur masse supérieure. Selon l'Observatoire national interministériel de sécurité routière (ONISR), les accidents impliquant un poids lourd contribuent pour 31 % de la mortalité générale sur autoroute, 12 % de la mortalité générale hors agglomération et 8 % de la mortalité générale en agglomération. Les principaux facteurs d'accidents mortels hors agglomération sont l'inattention et une vitesse excessive ou inadaptée. Il convient de noter qu'au cours de la dernière décennie, malgré une intensification du trafic routier, le nombre d'accidents impliquant un poids lourd et le nombre de tués qui en résultent a diminué.
Lors de son audition par les rapporteurs, la déléguée à la sécurité routière a également souligné que les poids lourds et les véhicules utilitaires sont « particulièrement agressifs pour les usagers vulnérables ». La moitié des piétons tués, en 2023, sur autoroute l'a ainsi été par un véhicule utilitaire ou un poids lourd33(*).
Elle a également précisé que la circulation des méga-camions pouvaient poser des risques particuliers liés à leurs caractéristiques propres. Moins manoeuvrables, ces véhicules peuvent rencontrer des difficultés à effectuer différentes manoeuvres dans certaines zones, notamment dans les virages serrés ou les espaces restreints. Leur poids supplémentaire peut aussi allonger la distance de freinage, augmentant ainsi le risque de collision. Les interactions avec les autres usagers de la route peuvent poser des difficultés, en particulier lors des phases de dépassement, de changement de direction et d'embranchement, du fait de leur longueur accrue. Enfin, leur gabarit ne leur permet pas de circuler sur l'ensemble du réseau routier.
- Une simplification discutable des procédures administratives relatives aux transports exceptionnels
La circulation des convois de transports exceptionnels est soumise à des règles strictes et à des procédures administratives formalisées en France. Elles visent à assurer la sécurité des usagers de la route et la préservation des infrastructures routières lors du passage de ces convois aux dimensions hors normes et à la vitesse réduite. Leur circulation est ainsi soumise à une autorisation délivrée par le gestionnaire du réseau routier qui fixe l'itinéraire et des prescriptions locales de circulation.
La révision de la directive prévoit d'uniformiser et de simplifier les procédures administratives, sous la forme d'un guichet unique européen, ce qui n'est pas sans poser de difficultés compte tenu des spécificités propres à chaque réseau routier national. La France dispose déjà d'une plateforme unique en ligne spécialement dédiée aux demandes de transports exceptionnels, qui a été mise en place récemment. Une harmonisation au niveau européen entraînerait des coûts supplémentaires de mise à jour.
La Commission européenne envisage, en particulier, la suppression des exigences linguistiques afin de garantir le principe de proportionnalité et d'égalité de traitement au niveau des États membres. Or la règlementation française actuelle exige que le chef d'un convoi exceptionnel ait la maîtrise de la langue française. En outre, l'autorisation préfectorale de circulation accordée aux transports exceptionnels est exclusivement rédigée en français, sous la forme d'un dossier volumineux. Le chef de convoi, en tant que garant du bon déroulement des procédures, doit être en mesure de lire ce dossier et d'en comprendre les prescriptions.
Les autorités françaises estiment que chaque État membre doit pouvoir conserver la capacité d'adapter sa réglementation à ses propres problématiques, à son réseau routier et à ses ouvrages d'art. Elles considèrent que les simplifications envisagées par la Commission européenne portent atteinte aux prérogatives des États membres qui doivent permettre de tenir compte de la structure, de l'état et de l'organisation du réseau routier national. En France, par exemple, les transports exceptionnels sont rarement escortés par les forces de l'ordre. Les accidents surviennent en général alors que ces convois circulent sans assistance particulière du pays concerné. L'exigence linguistique est une condition importante pour pouvoir donner l'alerte en cas d'urgence, par exemple lors d'une immobilisation sur un passage à niveau qui nécessite d'utiliser le téléphone situé à proximité pour demander l'arrêt du train, et pour respecter les exigences fixées dans le cadre de l'itinéraire suivi.
Les rapporteurs sont opposés, pour des enjeux de sécurité routière, à l'interdiction de fixer des exigences de maîtrise de la langue nationale de l'État membre concerné pour les transports exceptionnels.
4. Une révision de la directive de 1996 qui n'apparaît pas pleinement justifiée
La Commission des affaires européennes justifie ainsi sa proposition de révision de la directive 96/53/CE : « les problèmes de fragmentation du marché pour les véhicules plus longs et plus lourds et l'application inefficace et incohérente de la législation résultent en grande partie des lacunes de la directive ». Elle considère que les différentes règles nationales en vigueur sont sources d'inefficacité et de concurrence déloyale.
Ainsi, afin d'encourager la décarbonation du transport routier, elle propose de faciliter la circulation transfrontière des véhicules de 44 tonnes zéro émission, mais aussi diesel jusqu'en 2035, et des SME entre deux États membres les autorisant sur leur propre territoire. Le droit d'autoriser ou non des limites de poids et dimensions plus élevés pour les véhicules utilitaires lourds sur leur territoire demeure une prérogative des États membres, ce dont il faut se féliciter. À ce titre, les autorités françaises soutiennent qu'un État membre doit pouvoir conserver la pleine maîtrise de décider d'autoriser ou non leur circulation, non seulement sur son territoire, mais aussi sur l'interconnexion transfrontalière. Les autorisations entre pays voisins devraient être envisagées dans le cadre d'une coopération bilatérale.
Cette position est partagée par les rapporteurs de la commission des affaires européennes. Ils considèrent, en effet, que chaque État membre doit conserver le pouvoir de décision s'agissant des conditions de circulation des véhicules utilitaires lourds dépassant les normes européennes sur l'ensemble de son réseau routier, quelle que soit leur provenance. Ils estiment que les États doivent ainsi garder la capacité de définir les critères d'autorisation, les itinéraires concernés, ainsi que toutes autres exigences en matière de sécurité routière et de préservation des infrastructures.
Compte tenu des enjeux de décarbonation du transport routier de marchandises et de développement du transport combiné, les mesures d'harmonisation proposées par la Commission européenne ne semblent pas nécessairement pertinentes ni utiles. En favorisant la circulation de camions plus lourds et plus longs, sans restriction de circulation, cette révision pourrait diminuer l'attractivité des solutions faiblement émettrices de CO2, et freiner l'atteinte des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. À ce titre, les rapporteurs estiment que la révision de la directive n'est pas pleinement justifiée.
Néanmoins les auditions réalisées par les rapporteurs ont permis d'identifier certaines lacunes, principalement d'ordre technique, du texte actuel, qui nécessiteraient d'en améliorer la rédaction, sans toutefois revenir sur les grands équilibres concernant la circulation transfrontalière des poids lourds.
À l'issue de la présentation des rapporteurs, la commission des affaires européennes a conclu au dépôt de la proposition de résolution européenne qui suit :
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
· Commission européenne, direction générale de la mobilité et des transports
- M. Kristian Schmidt, directeur des transports terrestres
- M. Filip Negreanu, chef d'unité adjoint « transport routier »
· Représentation permanente française à Bruxelles
- M. Florent Moretti, conseiller transports
- M. Marc Naro, chargé de mission pôle Transport
· Direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités
- M. Rodolphe Gintz, directeur général des infrastructures, des transports et des mobilités
- Mme Sylvie André, sous-directrice de la régulation et de la performance durables des transports routiers
- M. Frédéric Béchara, chef de bureau du contrôle et de la circulation des transports routiers
- M. Nicolas Bina, conseiller élus et communication
· Délégation interministérielle à la Sécurité routière
- Mme Florence Guillaume, déléguée interministérielle
· Cerema
- M. David Zambon, directeur général adjoint en charge du pilotage de la production, directeur Infrastructures de transport et matériaux (ITM)
- M. Benoît Hiron, responsable du secteur d'activité sécurité des déplacements
· Organisation des transporteurs routiers européens
- M. Jean-Marc Rivera, délégué général
· Fédération nationale du transport routier
- M. Rodolphe Lanz, secrétaire général
- Mme Florence Berthelot, déléguée générale
· Union TLF - Transport Logistique France
- Mme Olga Alexandrova, directrice déléguée au Pôle « Terrestre » de l'Union TLF
- Mme Camille Contamine, co-présidente de la commission intermodalité de l'Union TLF, responsable des affaires publiques & solutions multimodales Europe chez CEVA Logistics
· 4F Fret ferroviaire français du futur
- Mme Florence Rodet, secrétaire générale
- Mme Solène Garcin-Berson, déléguée générale de l'Association Française du Rail
- M. Aurélien Barbé, délégué général de GNTC (groupement national des transports combinés)
- M. Philippe François, président de l'Association objectif OFP
· Experts
- M. Michel Savy, ingénieur, économiste, professeur émérite à l'université Paris Est - Observatoire des politiques et stratégies de transport en Europe
* 1 Proposition de directive modifiant la directive 96/53/CE du Conseil fixant, pour certains véhicules routiers circulant dans la Communauté, les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international, COM(2023) 445 final.
* 2 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'utilisation des capacités d'infrastructure ferroviaire dans l'espace ferroviaire unique européen, modifiant la directive 2012/34/UE et abrogeant le règlement (UE) n° 913/2010, COM(2023) 443 final.
* 3 Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre des services de transport, COM(2023) 441 final.
* 4 Données Eurostat 2022.
* 5 Données Eurostat 2022.
* 6 Service des données et étude statistiques (SDES).
* 7 Réponses au questionnaire des rapporteurs.
* 8 Agence européenne de l'environnement 2023.
* 9 Livre blanc de la Commission européenne, intitulé « Feuille de route pour un espace européen unique des transports - Vers un système de transport compétitif et économe en ressources », COM(2011) 144 final/2.
* 10 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et au Comité des régions intitulée « Stratégie de mobilité durable et intelligente - mettre les transports européens sur la voie de l'avenir », COM(2020) 789 final.
* 11 Règlement (UE) 2024/1610 du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2024 modifiant le règlement (UE) 2019/1242 en ce qui concerne le renforcement des normes de performance en matière d'émissions de CO2 pour les véhicules utilitaires lourds neufs et intégrant des obligations de déclaration, modifiant le règlement (UE) 2018/858 et abrogeant le règlement (UE) 2018/956.
* 12 Union des entreprises - Transport et logistique de France - Panorama annuel 2025.
* 13 Données Eurostat.
* 14 Directive 2007/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 modifiant la directive 91/440/CEE du Conseil relative au développement de chemins de fer communautaires et la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire et la tarification de l'infrastructure ferroviaire.
* 15 Réponse à la consultation sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).
* 16 Données Eurostat 2022.
* 17 Proposition de directive modifiant la directive 92/106/CEE du Conseil en ce qui concerne un cadre de soutien au transport intermodal de marchandises et à la repositionner (UE) 2020/1056 en ce qui concerne le calcul des économies de coûts externes et la production de données agrégées, COM(2023) 702 final
* 18 Données de l'Observatoire du transport combiné.
* 19 Directive 2002/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 février 2002 modifiant la directive 96/53/CE du Conseil fixant, pour certains véhicules routiers circulant dans la Communautéì, les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international.
* 20 Directive (UE) 2015/719 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 modifiant la directive 96/53/CE du Conseil fixant, pour certains véhicules routiers circulant dans la Communauté, les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international.
* 21 Règlement (UE)2019/1242 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 établissant des normes de performance en matière d'émissions de CO2 pour les véhicules utilitaires lourds neufs et modifiant les règlements (CE) n° 595/2009 et (UE) 2018/956 du Parlement européen et du Conseil et la directive 96/53/CE du Conseil.
* 22 La directive de 1996 dispose que les États membres peuvent autoriser la circulation sur leur territoire de véhicules routiers dépassant les limites fixées en trafic international. Depuis le 1er janvier 2013, la circulation des véhicules routiers pesant jusqu'à 44 tonnes équipés de plus de quatre essieux est autorisée en France.
* 23 La Belgique, la République tchèque, la France, l'Irlande, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal, la Suède, le Danemark et la Finlande autorisent la circulation dans le transport national d'ensembles de véhicules à cinq et/ou six essieux (véhicules articulés standard et trains routiers) d'un poids de 44 tonnes et au-delà, dans certains cas. La République tchèque autorise un poids maximal allant jusqu'à 48 tonnes, les Pays-Bas jusqu'à 50 tonnes et l'Italie un poids maximal de 56 tonnes pour le transport de matériaux d'excavation et d'extraction minière.
* 24 Un méga-camion ou système modulaire européen (SME) est ensemble routier motorisé par un camion qui mesure entre 18,75 et 25,25 mètres de long et dont le poids peut atteindre jusqu'à 60 tonnes.
* 25 Réponse du Ministère délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé des transports, publiée le 21 novembre 2024- Question écrite n° 00488 du 3 octobre 2024 de Mme Nicole Bonnefoy, sénatrice.
* 26 Le transport transfrontalier avec SME est actuellement soumis aux conditions fixées dans les accords bilatéraux entre les deux États membres concernés, telles que la longueur et le poids maximaux, la partie du réseau où ils sont autorisés et les exigences imposées aux conducteurs et/ou aux véhicules. Ces conditions diffèrent d'un État membre à l'autre. Il est autorisé entre la Finlande et la Suède, la Suède et le Danemark, ainsi qu'entre l'Allemagne et les Pays-Bas, sur la base d'accords bilatéraux, ainsi qu'entre la Belgique et les Pays-Bas sur la base du traité instituant l'Union économique Benelux. Des accords bilatéraux pour le transport transfrontalier avec SME entre l'Allemagne et le Danemark et entre le Portugal et l'Espagne sont en cours d'élaboration.
* 27 https://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20240520/euro.html#toc4
* 28 Question écrite n° 10605 de M. Philippe Tabarot, publiée le 14 mars 2024.
* 29 Rapport final d'experts sollicités par la Commission européenne de novembre 2008. « Effects of adapting the rules on weights and dimensions of heavy commercial vehicles as established within Directive 96/53/EC » TREN/G3/318/2007. The Shift Project « Assurer le fret dans un monde fini - PTEF » - mars 2022. Publications d'E Larrodé, chercheur de l'université de Saragosse sur l'expérimentation des EMS2 pour le détail par itinéraire.
* 30 Conseil économique et social européen, Avis du 26 octobre 2023 sur la révision de la directive 96/53/CE relative aux dimension et poids - TEN/811
* 31 Rapport au Parlement sur les enjeux et les impacts relatifs à la généralisation de l'autorisation de circulation des poids lourds de 44 tonnes - Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer - DGITM - Direction des services de transport - 22 janvier 2011.
* 32 L'introduction des camions de 44 tonnes en France n'a pas non plus montré d'augmentation des accidents corporels et mortels.
* 33 Réponses au questionnaire des rapporteurs de la délégation ministérielle à la sécurité routière.