EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
De décembre 2020 à mars 2021, un groupe de travail pluraliste 1 ( * ) chargé de réfléchir à la modernisation des méthodes de travail de notre assemblée s'est réuni à cinq reprises sous ma présidence . Mme Pascale Gruny, vice-président du Sénat et président de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire, du contrôle et du suivi des ordonnances, en a été désignée rapporteur.
Parmi les propositions adoptées par le groupe de travail le 10 mars dernier , certaines sont d'application directe, d'autres nécessitent une décision de la Conférence des Présidents ou une modification de l'Instruction générale du Bureau. Enfin, la mise en oeuvre de certaines d'entre elles implique une révision du Règlement du Sénat. Tel est l'objet de la présente proposition de résolution.
Le titre I er améliore le suivi par le Sénat des ordonnances prises sur le fondement de l'article 38 de la Constitution , massivement utilisées au long de la décennie écoulée et dont le régime juridique a été bouleversé par un revirement récent de la jurisprudence du Conseil constitutionnel 2 ( * ) .
Le groupe de travail a prévu qu'un outil de suivi dédié retrace sur le site internet du Sénat les habilitations accordées, les délais fixés par la loi, les ordonnances publiées et l'état des ratifications et qu'une synthèse actualisée de ces données soit adressée chaque trimestre aux sénateurs.
En complément de ces mesures, dont la mise en oeuvre ne nécessite pas de modification du Règlement, l'article 1 er de la proposition de résolution ajoute aux missions des commissions permanentes le suivi des ordonnances et confie plus spécifiquement cette tâche au rapporteur du texte d'habilitation. L'article 2 prévoit que le Gouvernement, en complément de l'information qu'il doit déjà fournir sur son programme de travail prévisionnel, informe la Conférence des Présidents du Sénat des projets de loi de ratification d'ordonnances dont il envisage de demander l'inscription à l'ordre du jour et des ordonnances qu'il a l'intention de publier. Enfin, dans le but de mieux protéger la compétence du Parlement, l'article 3 consacre la compétence de la commission saisie au fond pour déclarer irrecevables les amendements d'initiative sénatoriale qui, en contradiction avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel 3 ( * ) , créent, étendent ou rétablissent une habilitation à légiférer par ordonnances.
Le titre II consacre dans le Règlement les nouvelles modalités d'exercice du droit de pétition , mises en oeuvre depuis janvier 2020 sur une plateforme électronique dédiée 4 ( * ) . Le dépôt de pétitions par courrier électronique ou sur un support papier restera possible mais ne sera plus qu'un mode d'exercice par défaut du droit de pétition. Toute pétition ayant atteint un seuil de signatures défini par le Bureau du Sénat sera évoquée en Conférence des Présidents, cette dernière ayant la possibilité de se saisir de toute pétition qui n'aurait pas atteint le seuil précité. Le Bureau sera également compétent pour définir les suites à donner aux pétitions (article 4).
Le titre III renforce les pouvoirs de contrôle du Sénat , notamment en assouplissant certaines procédures.
L'obtention des pouvoirs d'enquête par une commission permanente en dehors des jours où le Sénat siège est simplifiée (article 6), de même que la transformation des questions écrites en questions orales (article 8).
Le plafond des membres des commissions d'enquête et missions d'information est fixé à 23 et la possibilité de déroger à ce plafond, pour les structures créées hors droit de tirage, est désormais inscrite dans le Règlement (article 7).
Enfin, l'article 5 prévoit que toute commission permanente consultée préalablement à une nomination selon la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution désigne un rapporteur chargé de préparer l'audition.
Le titre IV modernise les règles de discussion en séance publique.
Des évolutions substantielles avaient déjà été mises en oeuvre en 2015 à la suite des préconisations formulées par le groupe de réflexion sur les méthodes de travail du Sénat dont MM. Alain RICHARD et Roger KAROUTCHI étaient rapporteurs. Les propositions qui ont émergé en 2021 s'inscrivent dans la continuité de ces travaux, notamment en encourageant le recours plus fréquent à la législation en commission et l'adaptation de l'organisation de la discussion de la loi de finances, qui pourrait passer par une expérimentation décidée par la Conférence des Présidents.
S'agissant des recommandations de nature réglementaire, la présente proposition de résolution prévoit, en premier lieu, de mieux utiliser le temps disponible en séance publique en faisant passer de deux minutes et demi à deux minutes la durée de droit commun des interventions des sénateurs (article 11) et de dix minutes à trois minutes la durée de présentation et d'intervention de l'orateur d'opinion contraire pour les motions de procédure qui n'émanent ni du Gouvernement, ni de la commission saisie au fond, ni d'un groupe politique (article 13).
L'examen en séance des textes élaborés par une commission mixte paritaire fait l'objet, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents, d'une procédure simplifiée conférant à la commission saisie au fond et à chaque groupe politique un temps de parole identique de cinq minutes (article 10) et la discussion générale des textes est simplifiée avec la suppression du renvoi en fin de tourniquet de l'orateur appartenant au même groupe politique que le rapporteur (article 9).
Enfin, par la création d'une motion spécifique, l'article 12 rend pleinement effective la possibilité pour le Sénat de refuser l'examen d'une proposition de loi présentée en application de l'article 11 de la Constitution et, ce faisant, de permettre l'organisation d'un référendum.
Le titre V vise quant à lui à assurer la parité au sein du Bureau du Sénat (article 14).
En dernier lieu, le titre VI prévoit l'entrée en vigueur de la résolution le 1 er octobre 2021 (article 15).
* 1 Le groupe était composé de M. Gérard LARCHER, Président du Sénat, Président du groupe de travail, Mme Pascale GRUNY, Vice-président du Sénat, Président de la délégation du Bureau « Travail parlementaire, contrôle et suivi des ordonnances », rapporteur du groupe de travail, M. François-Noël BUFFET, Président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, Vice-Président délégué du groupe de travail, M. Bruno RETAILLEAU, Président du groupe Les Républicains, M. Patrick KANNER, Président du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, M. Hervé MARSEILLE, Président du groupe Union Centriste, M. François PATRIAT, Président du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, Mme Éliane ASSASSI, Présidente du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, M. Jean-Claude REQUIER, Président du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, M. Claude MALHURET, Président du groupe Les Indépendants - République et Territoires, M. Guillaume GONTARD, Président du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, Mme Laurence ROSSIGNOL, Vice-présidente du Sénat, Présidente de la délégation du Bureau « Développement durable, technologies numériques, données ouvertes et dématérialisation », Mme Nadine BELLUROT, Sénatrice de l'Indre, M. Jean-Raymond HUGONET, Sénateur de l'Essonne, Mme Muriel JOURDA, Sénateur du Morbihan, M. Éric KERROUCHE, Sénateur des Landes, M. Pascal MARTIN, Sénateur de la Seine-Maritime.
* 2 Décisions n° 2020-843 QPC du 28 mai 2020, Force 5, et n° 2020-851/852 QPC du 3 juillet 2020, M. Sofiane A. et autre.
* 3 Décisions n° 2004-510 DC du 20 janvier 2005, Loi relative aux compétences du tribunal d'instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance, et n° 2014-700 DC du 31 juillet 2014, Loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.