EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La présente proposition de loi est le fruit du travail de réflexion mené, à la demande du Président du Sénat, par Mme Sylvie VERMEILLET, vice-présidente du Sénat en charge de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire et des conditions d'exercice du mandat de sénateur.
Après avoir entendu l'ensemble des présidents de groupe, de commission et de délégation afin d'élaborer des pistes d'amélioration des conditions d'exercice du travail parlementaire, Mme Sylvie VERMEILLET a présenté 17 propositions qui ont été adoptées par la Conférence des Présidents réunie les 17 septembre et 6 novembre 2024. Ces propositions se répartissent en quatre axes :
- conforter la procédure législative pour renforcer le rôle du Parlement tout en préservant la qualité du débat parlementaire ;
- renforcer les moyens de contrôle ;
- simplifier la gestion de l'agenda des sénateurs ;
- poursuivre l'adaptation du Règlement aux évolutions des pratiques.
Parmi les 17 propositions adoptées, certaines nécessitent de modifier la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ou le Règlement du Sénat, d'autres relèvent d'une décision de la Conférence des Présidents ou d'une modification de l'Instruction générale du Bureau. Enfin, la mise en oeuvre de certaines d'entre elles implique une révision de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. Tel est l'objet de la présente proposition de loi.
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Parmi les 17 propositions adoptées par la Conférence des Présidents qui nécessitent de modifier l'ordonnance du 17 novembre 1958 précitée, certaines mesures concernent la procédure législative et plus particulièrement l'application des lois.
Afin de renforcer l'efficacité des moyens du contrôle parlementaire de l'application des lois, l'article 1er reconnaît aux présidents des assemblées ainsi qu'aux présidents des commissions et des groupes politiques de l'Assemblée nationale et du Sénat un intérêt à agir par la voie du recours pour excès de pouvoir notamment dans deux cas : contre le refus du Gouvernement de prendre, dans un délai raisonnable, les mesures réglementaires d'application d'une disposition législative et contre un acte réglementaire lorsque l'un des moyens soulevés est tiré de ce que cet acte méconnaîtrait la loi pour l'application de laquelle il a été pris. Cet article 1er reprend ainsi, en la complétant, la proposition de loi n° 696 (2020-2021) visant à renforcer le contrôle par le Parlement de l'application des lois de M. Jean-Claude REQUIER, adoptée par le Sénat le 14 octobre 2021.
Dans la continuité des conclusions de la mission de réflexion sur le contrôle sénatorial, dont Mme Pascale GRUNY, alors vice-président du Sénat, était rapporteur, et qui sont entrées en vigueur en 2022, plusieurs des 17 propositions adoptées par la Conférence des Présidents portent sur le renforcement des missions de contrôle.
Il en va ainsi de la mise en place à titre expérimental d'un nouveau créneau dédié au contrôle en commission et en délégation le mardi après-midi des semaines de contrôle ainsi que de la possibilité d'organiser, lorsque cela s'y prête, une audition à mi-mandat des personnalités nommées en application de l'article 13 de la Constitution. En outre, le présent article 2 vise à accroître les pouvoirs de contrôle des commissions permanentes, en dotant notamment leurs présidents ou des membres désignés par elles du droit de se faire communiquer tous documents ou de pouvoirs d'investigation sur pièces et sur place.
L'article 3 propose de mettre l'ordonnance du 17 novembre 1958 en conformité avec les dispositions du Règlement permettant la création de commissions d'enquête dans le cadre du droit de tirage prévu à l'article 6 bis du Règlement. La commission d'enquête étant créée dans ce cas sans vote du Sénat, il précise qu'une commission d'enquête prend fin à l'expiration d'un délai de six mois à compter, non pas de la date de l'adoption de la résolution qui l'a créée, mais de la nomination de ses membres en séance publique. En outre, il simplifie la procédure de publication du rapport d'une commission d'enquête en supprimant la possibilité pour l'assemblée concernée de se constituer en comité secret, qui n'a jamais été utilisée.
Enfin, l'article 4 est destiné à renforcer l'indépendance et les pouvoirs des assemblées en matière de nomination. En effet, dans sa jurisprudence « Lottin », le Conseil d'État s'est déclaré compétent pour trancher un litige concernant les décisions de nomination par les présidents d'assemblées de personnalités qualifiées au sein du Conseil supérieur de la magistrature (CE, n° 472669, 11 octobre 2023), en contradiction avec l'article 8 de l'ordonnance du 17 novembre 1958. Aussi est-il proposé de rappeler explicitement que les litiges d'ordre individuel concernant les agents de la fonction publique parlementaire et les litiges individuels en matière de marchés publics sont les seuls cas pour lesquels une instance peut être engagée contre une assemblée parlementaire, ce qui exclut les nominations décidées par les présidents des assemblées.