EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le refus du Président de la République Emmanuel Macron, de reconnaître les résultats des élections législatives du mois de juin - qu'il avait lui-même convoquées - a entraîné le pays dans la situation actuelle. En désignant un gouvernement minoritaire, il n'a fait que provoquer sa censure par l'Assemblée nationale, le 4 décembre 2024.
Cette crise est loin d'être terminée puisque les perdants des deux précédents scrutins demeurent au Gouvernement et poursuivent une politique majoritairement rejetée.
Le Gouvernement Bayrou ne propose pas de nouveau budget pour la France en 2025 mais reprend le texte présenté par Michel Barnier en octobre et préparé par le Gouvernement de Gabriel Attal au printemps.
Le cinquième alinéa de l'article 47 de la Constitution est pourtant clair : « Les délais prévus au présent article sont suspendus lorsque le Parlement n'est pas en session. » Or la session n'a pas été interrompue.
Dès lors, toute tentative d'imposer le budget du gouvernement censuré relève moins d'une nécessité démocratique que d'une manoeuvre visant à contrefaire l'esprit même de la Constitution. En vertu des principes élémentaires de la légalité budgétaire, deux voies s'ouvraient au gouvernement s'il avait voulu respecter le Parlement : la première, certes contestable mais juridiquement admissible, consistait à recourir à une ordonnance afin de pallier la censure ; la seconde, démocratique, eût été de soumettre un nouveau projet de loi de finances à l'examen des deux chambres, afin que la représentation nationale puisse exercer pleinement sa fonction délibérative.
En reprenant le projet de loi de finances d'un Gouvernement censuré au cours d'une nouvelle année civile et budgétaire, le nouveau Gouvernement et le socle commun ne respectent pas la Constitution.
En outre, les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2025 Attal-Barnier-Bayrou prévoient des coupes importantes dans les dépenses du budget de l'État et une baisse des moyens pour les services publics, les collectivités et la sécurité sociale, déjà exsangues.
Le refus de dégager de nouvelles recettes confine le débat parlementaire aux choix des dépenses à couper ; nous refusons cette parodie de démocratie.
Nous n'oublions pas que l'Assemblée nationale avait adopté des propositions de recettes alternatives et que la majorité sénatoriale a soutenu le gouvernement pour supprimer les amendements adoptés en la matière via la seconde délibération.
C'est un autre budget que les groupes de la Gauche Démocrate et Républicaine de l'Assemblée nationale et du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste-Kanaky du Sénat veulent proposer : un budget qui soit au service de la solidarité nationale et non au profit de quelques-uns, un budget qui crée une richesse vertueuse.
Convaincu.es qu'un autre budget pour la France est possible : nous proposons des mesures d'urgence en faveur du partage des richesses, qui mettent en évidence que l'austérité pour tous est un choix politique et non une fatalité. Face à l'urgence climatique et écologique, un sursaut est indispensable notamment dans les territoires dits ultra-marins en première ligne face aux conséquences du réchauffement climatique.
Nous refusons ce coup de force démocratique et formulons ici 10 propositions alternatives en faveur de la justice sociale et 10 propositions de justice fiscale.
Ces propositions démontrent notre crédibilité financière avec des mesures de recettes nouvelles qui financent des mesures de justice sociale comme l'augmentation des salaires, l'abrogation de la réforme des retraites et l'investissement en faveur des services publics de proximité (hôpitaux, écoles, transport, logement social, etc.).
L'un des enjeux est également de sortir d'une société corsetée par la rente et l'héritage, où l'accumulation stérile remplace l'élan collectif. Chaque fois dans notre histoire que les rentiers accumulent des sommes considérables, le pays s'appauvrit et les inégalités s'accentuent. Aussi, c'est le respect du pacte social et fiscal que nous remettons au centre des débats afin que notre République et les valeurs universelles qui la fondent soient respectées.
10 MESURES DE JUSTICE SOCIALE
Abroger la réforme des retraites et les réformes de l'Assurance chômage :
L'article 1er abroge la réforme des retraites
L'article 2 abroge les derniers décrets de l'Assurance chômage et supprime l'obligation de 15 heures d'activité par semaine pour les bénéficiaires du RSA
Augmenter les salaires et les traitements des fonctionnaires :
L'article 3 augmente le SMIC à 1 600 euros nets mensuels
L'article 4 augmente le point d'indice des fonctionnaires de 10 %
L'article 5 indexe les salaires sur l'inflation et organise une conférence sociale sur les salaires et les conditions de travail (minima de branches sous le SMIC, égalité salariale, santé au travail, durée de travail...)
Revaloriser les pensions de retraite et les minimas sociaux :
L'article 6 revalorise les pensions de retraite en fixant le montant du minimum de retraite à 100 % du SMIC net pour une carrière complète
L'article 7 revalorise les minimas sociaux de 10 % (bourses étudiantes, allocation aux adultes handicapés, revenu de solidarité active etc.)
Améliorer le pouvoir d'achat des ménages :
L'article 8 prévoit le blocage des loyers et le financement d'un grand plan de construction de logements publics prévoyant notamment la suppression de la réduction de loyer de solidarité
L'article 9 prévoit le blocage des prix des produits alimentaires et l'application d'un coefficient multiplicateur sur l'ensemble des produits alimentaires entre le prix d'achat et le prix de vente des produits agricoles et alimentaires.
Lutter contre la vie chère dans les territoires dits d'outre-mer :
L'article 10 instaure un taux de TVA à 0 % pour les produits de première nécessité en Guadeloupe, en Martinique, à la Réunion et à Saint-Martin
10 MESURES DE JUSTICE FISCALE
Sur les revenus financiers :
L'article 11 vise à lutter contre l'évasion fiscale communautaire et extracommunautaire en rapatriant les bénéfices des groupes français faisant des bénéfices à l'étranger, en imposant les plus-values et en renforçant l'Exit Tax.
L'article 12 met à contribution les revenus du capital en abrogeant le prélèvement forfaitaire unique (PFU).
L'article 13 double la taxe sur les transactions financières et élargit son assiette.
Sur les entreprises :
L'article 14 rétablit l'impôt sur les sociétés au taux normal d'imposition à 33 %, instaure une progressivité de 4 tranches et met à contribution les superprofits en taxant les entreprises réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 100 millions d'euros.
L'article 15 abroge (ex-TIFCE, Régime Mère-Fille, Niche Locatif touristique, Niche Copé) ou réforme (CIR, Pacte Dutreil) les niches fiscales injustes.
L'article 16 conditionne les aides publiques aux entreprises en fixant des critères sociaux, économiques, environnementaux
Sur les hauts revenus et patrimoines
L'article 17 instaure une taxe sur les très hauts patrimoines et un ISF à destination des ultras-riches pour financer la transition écologique
L'article 18 repense la fiscalité de l'héritage pour la rendre plus juste
L'article 19 renforce et augmente la progressivité de l'imposition en passant le barème d'impôt sur les revenus de 5 à 14 tranches
Protéger nos services publics et les collectivités locales
L'article 20 indexe la dotation globale de fonctionnement des collectivités territoriales sur l'inflation
Conformément à l'article 40 de la Constitution, l'article 21 constitue le gage financier de la présente proposition de loi.