EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En ce début d'année 2024, le mouvement « On marche sur la tête » a mobilisé les agriculteurs français, les amenant à manifester hors de leurs champs et à bloquer les routes avec leurs tracteurs, dans une volonté de faire entendre leurs revendications auprès du Gouvernement.

Ce mouvement, loin d'être anecdotique, révèle un profond mal-être au sein du monde agricole, dépassant les simples préoccupations concernant la hausse du gazole non routier (GNR) ou les retards de versement de la politique agricole commune (PAC) 2023.

Il est symptomatique d'une politique agricole déconnectée de la réalité du terrain, plongeant le secteur dans une crise profonde et menaçant la souveraineté alimentaire de la France.

Depuis les années 2000, l'agriculture française connaît une décroissance structurelle alarmante : déclin des exportations, augmentation des importations, disparition d'exploitations agricoles, acquisition de terres par des acteurs étrangers.

La France a perdu sa place de leader agricole, passant du troisième au sixième rang des principaux exportateurs mondiaux en seulement une décennie, avec la plus forte baisse de parts de marché à l'échelle mondiale dans ce secteur. Parallèlement, la part des importations est passée de 10 % à 20 %.

Bien que l'année 2022 ait enregistré un excédent commercial, celui-ci repose principalement sur l'exportation de vins et spiritueux ainsi que sur la hausse exceptionnelle des cours du blé due à la guerre en Ukraine. Sans ces facteurs, la balance agricole serait nettement déficitaire.

Nous observons une érosion constante du nombre d'exploitations agricoles, avec une diminution annuelle de 1,5 à 2 %. Entre 2010 et 2020, près de 20 % des exploitations ont disparu selon le recensement agricole.

Le mouvement « On marche sur la tête » met en lumière les normes absurdes qui entravent la compétitivité des agriculteurs français et l'inaction de l'État face aux importations de produits ne respectant pas ces normes.

Pour rester compétitifs et respecter les normes, les agriculteurs français sont contraints de travailler plus de 60 heures par semaine et de réduire leurs prix, entraînant une baisse significative de leurs revenus (30 % des chefs d'exploitation gagnent moins de 350 euros par mois).

Cette situation engendre des conséquences dramatiques sur le plan humain, avec un agriculteur se suicidant tous les deux jours en France.

Il est impératif d'agir face à cette crise agricole. Malgré les espoirs suscités par les États généraux de l'alimentation de 2017 et la loi Egalim, les problèmes persistent. La question de la compétitivité de l'agriculture française sur les marchés européen et mondial n'a pas été correctement abordée.

Nous devons agir contre l'inflation normative, notamment la surtransposition des directives européennes et la surréglementation, responsables de la perte de compétitivité de notre agriculture.

Pour cela, à travers cette proposition de loi, il est proposé de créer un « Conseil national de simplification des normes agricoles ». Ce conseil aura pour mission de lutter contre l'inflation normative dans le secteur agricole afin de restaurer sa compétitivité.

Il sera consulté sur tous les projets de loi et tous les actes réglementaires susceptibles d'impacter les exploitants agricoles et se prononcera sur l'intérêt des normes en vigueur en termes de compétitivité agricole. Il évaluera également l'impact des normes existantes et proposera des modifications ou suppressions le cas échéant.

Composé de représentants des organisations professionnelles agricoles, d'élus locaux et de parlementaires, ce Conseil sera un outil essentiel pour redonner du souffle à notre agriculture et libérer les agriculteurs des contraintes administratives.

Cette initiative trouve son inspiration dans deux textes déjà déposés :

1) la proposition de loi portant création d'un conseil national de simplification des normes, présentée par le député Jean-Louis THIERIOT et plusieurs de ses collègues ;

2) et l'article 28 de la proposition de loi tendant à répondre à la crise agricole, présentée par le sénateur Laurent DUPLOMB et plusieurs de nos collègues.

Garantir un avenir meilleur pour notre agriculture et nos agriculteurs, à travers une réelle simplification de normes applicables au secteur agricole, tel est l'objet de la présente proposition de loi.

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