EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le 7 août 2017 le décret n° 2017-1244 relatif à la prévention des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés, dit « décret bruit », était publié au Journal officiel. Il s'agissait, avec ce décret, de compléter la règlementation sur le bruit de voisinage et le bruit des activités par de nouvelles exigences.

Depuis, les fédérations sportives délégataires (Fédération Française de Motocyclisme et Fédération Française du Sport Automobile) représentant le groupement des sports mécaniques sont extrêmement préoccupées de l'insécurité juridique dans laquelle a été placée leur filière suite à la prise de ce décret. Ce dernier compromet, en effet, à court terme, la pérennité de leur écosystème.

Il convient de rappeler que la filière des sports mécaniques a toujours été consciente des questions relatives aux émissions sonores et à la tranquillité publique, d'autant que les fédérations sportives sont délégataires d'une mission de service public. À cet effet, selon l'article L. 131-16 du code du sport, elles ont le pouvoir d'édicter les règles techniques propres à leur discipline. C'est dans ce cadre que la FFSA et la FFM règlementent les émissions sonores de leurs activités et donc les règles d'accès et de participation des licenciés à leurs activités. Ainsi, un licencié qui ne respecterait pas les règles relatives au niveau des émissions sonores fixées ne peut participer à l'une des activités encadrées par les fédérations susmentionnées.

Or, depuis l'entrée en vigueur du décret « bruit », les évènements sportifs de sports mécaniques doivent en plus se conformer à la réglementation générale prévue à l'article R.1336-6 du Code de la santé publique, applicable à toute activité professionnelle, sportive ou culturelle, fixant les limites en matière de bruit (valeurs limites de l'émergence autorisée) dans le but de préserver la tranquillité du voisinage et la santé humaine.

S'applique désormais aux établissements de loisirs et de sport la même règle d'émergence1(*) que pour les activités industrielles, artisanales ou commerciales ne relevant pas du régime ICPE : inférieure à 5 dB en journée et 3 dB en période nocturne, valeurs auxquelles s'ajoute un terme correctif en fonction de la durée de l'activité (article R. 1336-7 du code de la santé publique).

Cette nouvelle législation classant les sports mécaniques dans le droit commun des bruits de voisinage, les soumet ainsi à un dispositif d'infractions pénales plaçant de nombreux circuits et activités dans l'incapacité de respecter la règle d'émergence.

En effet, depuis le décret n° 2017-1279 du 9 août 2017 portant simplification de la police des manifestations sportives, le fait pour tout organisateur de ne pas respecter les prescriptions figurant à l'arrêté d'homologation ou d'autorisation de manifestation est puni des peines prévues pour les contraventions de la 5ème classe (art. R.331-45 code du sport).

Pourtant, dès le début des années 2000, la FFSA a adopté une politique ferme visant à réduire drastiquement le bruit à la source des véhicules. Les acteurs de la filière ont investi dans la recherche et le développement de technologies innovantes pour réduire les émissions sonores, tout en maintenant des performances optimales. Ces efforts ont conduit à une réduction de plus de 20 décibels en vingt ans. La FFM quant à elle a adopté des politiques de réduction des émissions sonores depuis deux ans, de façon déterminée.

Avec la publication du décret « bruit », les circuits de sport mécanique se trouvent soumis à des règles disproportionnées, voire parfois inapplicables, les fragilisant juridiquement et mettant en péril l'avenir des sports mécaniques en France, alors même que nombre des véhicules qui fréquentent les circuits sont parfaitement conformes aux règles d'homologation lorsqu'ils empruntent le réseau routier. C'est le cas, par exemple, de la compétition des 24 Heures du Mans qui se doit de respecter désormais deux niveaux d'émergence sonore distincts entre la période diurne et la période nocturne.

La France possède un riche patrimoine et une tradition forte dans les sports mécaniques, avec des événements emblématiques tels que les 24 Heures du Mans auto et moto, le Rallye de Monte-Carlo, le Grand Prix de France de Formule 1 et Moto GP ou bien encore le Bol d'Or. Ces événements ont acquis une renommée internationale et sont souvent considérés comme des classiques des sports automobile et motocycliste. Porte-étendards du savoir-faire français en matière de sports mécaniques, ils sont, en outre, une vitrine non négligeable de la diversité en matière d'expressions touristiques dont dispose notre pays.

Sur le plan économique, les sports mécaniques ont un impact important en France. Selon une étude réalisée par Ernst and Young en 2019 (qui sera prochainement actualisée pour l'année 2022), cette filière pèse 2,3 milliards d'euros dans l'économie française et génère 13.500 emplois directs. Elle englobe 47 spécialités réunies au sein de 16 disciplines, avec plus de 1.000 sites de pratique repartis dans l'hexagone. Ces chiffres démontrent l'ampleur de l'impact économique de cette filière et l'importance de la soutenir dans les territoires.

Les sports mécaniques sont, de plus, un terrain propice à l'innovation technologique. La France est notamment reconnue pour ses compétences dans le domaine de l'ingénierie automobile, de la conception de moteurs et de pneumatiques. Les équipes et les constructeurs français ont contribué de manière significative au développement de nouvelles technologies, tant sur les circuits que dans l'industrie en général. Les compétitions de sports mécaniques figurent depuis longtemps comme des pionnières en termes d'innovation permettant aux constructeurs de tirer profit des avancées techniques et technologiques réalisées sur circuit aux fins de les transposer sur leurs véhicules de série, notamment pour améliorer la sécurité de tous nos concitoyens.

Ainsi, dans le but d'assurer la pérennité des activités de sports mécaniques et de leur écosystème, cette proposition de loi vient modifier le code de l'environnement, à son article L. 571-6, qui prévoit que les activités bruyantes peuvent être soumises à des prescriptions générales, voire à une procédure d'autorisation. Cette proposition de loi introduit un aménagement du décret n°2017-1244, applicable aux sports mécaniques, qui demeureront soumis à des dispositions particulières précisées par décret. Elle continuera de permettre la conciliation de la pratique de ce type d'activités avec la protection de la tranquillité publique.

* 1 L'émergence d'une perturbation sonore est une modification temporelle du niveau ambiant induite par l'apparition ou la disparition d'un bruit particulier. Ainsi, l'émergence acoustique correspond à la différence en décibel (ou dB) entre un niveau de bruit ambiant (bruit de l'environnement avec les nuisances sonores à caractériser) et un niveau de bruit résiduel (bruit normal de l'environnement sans les nuisances sonores à caractériser).

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