EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dans un contexte d'inflation chronique, les familles françaises les plus modestes sont impactées par des sacrifices importants dans leur budget, tout particulièrement à quelques jours de la rentrée scolaire. Les fournitures scolaires représentent en effet une dépense importante pour les parents. Afin de soutenir certains ménages, il avait donc été mis en place en 1974, sous conditions de ressources, l'allocation de rentrée scolaire (ARS) pour les parents d'enfants âgés de 6 et 18 ans, et qui consiste à leur verser en août une aide d'un montant compris entre 398 euros et 434 euros. Cette aide nécessaire concerne aujourd'hui 5 millions d'enfants et 3 millions de familles chaque année. Elle permet d'aider à l'achat de fournitures, de vêtements, d'outils informatiques indispensables, afin de donner à tous les élèves les mêmes chances de réussite.

Mais cette aide conséquente, d'une valeur globale de plus de 1,5 milliard d'euros, délivrée via un simple virement bancaire, par les caisses d'allocations familiales (CAF) et les caisses de mutualité sociale agricole (MSA), n'est soumise à aucune disposition légale ou réglementaire définissant ou encadrant son usage. Son utilisation est à la discrétion des familles. L'absence de contrôle sur les dépenses effectuées permet de facto aux bénéficiaires d'utiliser cette aide à d'autres fins que celle des besoins de leurs enfants pour leur scolarité.

Force est de constater qu'aujourd'hui l'allocation de rentrée scolaire entre dans le budget familial sans que la puissance publique ne puisse s'assurer de son utilisation. Ce que l'on observe, c'est que l'ARS n'est in fine pas toujours dédiée aux enfants. L'ancien ministre de l'Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, avait lui-même constaté une augmentation d'achat d'écrans plats durant la période des rentrées scolaires. Face au risque avéré de fraudes et pour faire primer l'intérêt supérieur de l'enfant, il faut que l'emploi de cette aide soit plus ciblé, spécifiquement sur les équipements scolaires, sportifs ou le règlement des frais de cantine.

La présente proposition de loi souhaite donc un encadrement ferme du versement de l'ARS pour en contrôler l'utilisation. Il ne s'agit en rien d'une remise en cause des montants, de l'assiette ou des familles concernées par cette allocation, qui demeure une aide juste, plus que jamais nécessaire et qui fait l'honneur de la République ! Le but de la démarche est seulement de s'assurer que tous les enfants qui en ont besoin puissent recevoir du matériel de qualité et d'éviter le détournement des aides publiques par des parents peu scrupuleux, qui ne représentent évidemment qu'une minorité.

Par conséquent, cette initiative législative propose en son article 1er de transformer le versement de l'ARS en contremarque, sur le modèle des titres-restaurant. Ces titres spéciaux de paiement seraient utilisables pour les achats nécessaires directement et indirectement à la scolarité des enfants, et seraient seulement valables auprès d'enseignes répondant à des critères objectifs et pour une liste de catégories de produits préalablement établie. Ce dispositif permettrait ainsi de s'assurer que les deniers publics, affectés à l'amélioration des conditions matérielles de la scolarité des enfants, soient effectivement dépensés par les parents dans cet objectif.

Par ailleurs, bien que le code de la sécurité sociale spécifie explicitement que l'ARS est attribuée pour les enfants scolarisés, son versement n'est aujourd'hui subordonné à aucun justificatif. Pour les enfants soumis à l'obligation de scolarité, cette scolarisation est présumée. Pis encore, s'agissant des adolescents âgés de 16 à 18 ans, pour lesquels la scolarité n'est donc plus obligatoire, seule une déclaration sur l'honneur suffit pour les considérer comme bien inscrits dans un établissement. En effet, le décret n°2014-886 du 1er août 2014 a modifié le troisième alinéa de l'article R. 543-4 du code de la sécurité sociale afin qu'il dispose désormais que « pour le versement de l'allocation de rentrée scolaire après la fin de l'obligation scolaire, la condition d'inscription est présumée remplie sur la foi d'une déclaration sur l'honneur ». Un tel laxisme réglementaire ne peut être toléré plus longtemps alors même que cette proposition de loi s'efforce de mieux contrôler l'utilisation de l'ARS. En conséquence, l'article 2 propose de conditionner le versement de l'ARS à la production d'un justificatif.