EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Force est de constater qu'on oppose souvent laïcité et attachement à notre patrimoine culturel et historique. Il est un combat de chaque jour que d'essayer de préserver l'expression et les symboles de nos traditions et de nos racines, qui subissent depuis des années les attaques et critiques d'extrémistes s'obstinant à déconstruire notre histoire, notre identité. Une interprétation erronée de la laïcité ne doit pas conduire la France à ignorer qui elle est et d'où elle vient. Intrinsèquement laïcs, nous nous devons pour autant de défendre les marqueurs de notre civilisation et de notre identité. Nous ne devons pas nous couper de nos racines qui ont forgé ce que nous sommes.
En séparant les Églises de l'État, la loi de 1905 a voulu garantir à chacun une totale liberté de conscience et de culte. Pour autant, cela n'impliquait pas de renoncer à notre histoire commune, ni de renier le lien qui unit la France à ses racines judéo-chrétiennes. S'il faut défendre à tout prix la laïcité en tant que facteur d'unité, elle ne peut avoir pour corollaire l'effacement de notre culture commune. Le combat pour la sauvegarde du principe cardinal qu'est la laïcité, ne doit pas servir de prétexte pour effacer les origines de notre civilisation.
Le rappel constitutionnel des origines françaises n'est pas antinomique avec le maintien, et même, le renforcement du principe de laïcité. Si cette proposition de loi constitutionnelle aurait pu rappeler dans le même temps la prééminence des lois de la République, notamment sur les pratiques religieuses, en affirmant que « nul individu ou nul groupe ne peut se prévaloir de son origine ou de sa religion pour s'exonérer du respect de la règle commune », cela a déjà été proposé par une autre initiative sénatoriale, que nous pouvons que saluer et qui est totalement complémentaire avec la présente proposition de réforme constitutionnelle.
Le fait est, qu'après avoir réclamé la disparition des traditions immémoriales de notre nation, certains extrémistes veulent maintenant s'en prendre aux jours fériés. Ces jours sont des marqueurs culturels et sociaux immémoriaux pour les Français qui y sont attachés. Vouloir les supprimer, c'est faire exactement ce qu'a entrepris Robespierre sous la Terreur, ou le communisme soviétique, ce que tous les régimes totalitaires ont essayé de faire : gommer les marqueurs historiques chrétiens pour arracher un pays à son histoire et le faire à sa main. Le passé de la France ne peut être modelé au bon vouloir d'extrémistes. Déraciner un pays, c'est le priver de son identité, et sans elle, il n'y a plus de socle sur lequel faire nation et écrire un avenir commun.
La France est autant cultuellement laïque, en accordant à chacun une complète liberté de croire et de pratiquer une religion ou non, que culturellement chrétienne. La France a été culturellement façonnée et imprégnée par son histoire chrétienne. Ce passé a forgé nos modes de vie et notre organisation sociale. Nous en retenons encore le calendrier civil ou les fêtes religieuses qui rythment la vie des Français, qui leur servent de repères au fil que l'année s'écoule. Il ne s'agit plus de revendications à caractère religieux, mais d'un héritage qui appartient à l'histoire et au patrimoine de la France que la Nation se doit de préserver. Il s'agit ici de symboles culturels et non pas cultuels. Les Français demeurent attachés à des traditions avec lesquelles ils ont toujours grandi. Au même titre, crèches de Noël, santons, galettes des rois, arbres de Noël, oeufs de Pâques sont des transmissions de symboles appréciés par l'immense majorité des Français, qui les tiennent de leurs parents et eux-mêmes de leurs propres parents, au-delà de toute croyance ou pratique religieuse. Ainsi, il est important de veiller à respecter l'histoire de notre pays, ses codes sociaux et son patrimoine. Ce sont les garants de la cohésion nationale et de la paix publique.
Par conséquent, afin de rappeler les origines de notre nation, de rappeler l'attachement de la France à sa civilisation, pour assurer la conservation et la transmission de symboles qui incarnent ce passé au fondement de notre histoire, la présente proposition de loi constitutionnelle souhaite consacrer à l'article 1er de notre constitution - article qui décrit l'identité de la France - les origines judéo-chrétiennes de notre pays et son attachement aux symboles qui matérialisent et expriment ces origines.