EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre sur la coopération lors des opérations d'évacuation à partir de la région du Moyen-Orient via le territoire de la République de Chypre dans le cadre d'une situation de crise a été signé à Paris, le 9 septembre 2022 par la ministre de l'Europe et des affaires étrangères, Mme Catherine COLONNA, côté français et par le ministre des affaires étrangères, M. Ioannis KASOULIDES, côté chypriote.
Sa conclusion s'inscrit dans le cadre du renforcement de la coopération bilatérale dans les domaines politique, de défense et de sécurité. L'accord de coopération en matière de défense, signé le 4 avril 2017, est entré en vigueur en août 20201(*). La marine française effectue des exercices réguliers avec la marine chypriote, parfois conjointement avec d'autres marines européennes. La France fait partie des principaux fournisseurs d'armement de Chypre. Cet accord illustre par conséquent une volonté partagée de renforcer les liens de défense.
L'accord permettra aux forces armées françaises de bénéficier d'un cadre juridique solide lors d'une situation de crise et du déploiement d'une opération d'évacuation à partir de la région du Moyen-Orient via le territoire de la République de Chypre.
Outre un court préambule, le texte comporte quinze articles.
Le préambule fait référence à la situation actuelle au Moyen-Orient ainsi qu'à la proximité de Chypre avec cette zone et rappelle l'excellente relation bilatérale qu'entretiennent les Parties. Il vise l'accord signé le 22 janvier 2010 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre relatif à l'échange et la protection réciproque des informations classifiées ainsi que l'accord de coopération en matière de défense signé le 4 avril 20172(*).
L'article 1er est consacré aux définitions. Celles-ci sont conformes aux stipulations figurant habituellement dans les accords de ce type et précisent que la zone du Moyen-Orient inclut l'Arabie saoudite, Bahreïn, l'Égypte, les Émirats arabes unis, l'Irak, l'Iran, Israël, la Jordanie, le Koweït, le Liban, Oman, le Qatar, la Syrie, les Territoires palestiniens, la Turquie et le Yémen.
L'article 2 énonce l'objet de l'accord, à savoir la définition des conditions générales et des responsabilités applicables aux opérations d'évacuation depuis le Moyen-Orient via le territoire de la République de Chypre durant le transit. Il précise que l'accord est activé par une demande officielle transmise 48 heures avant le début prévu d'une opération d'évacuation et les informations que doivent contenir ladite demande. Il stipule, par ailleurs, que la Partie d'envoi veille au départ des personnes évacuées du territoire chypriote dans les 48 heures après leur arrivée sur celui-ci sauf circonstances exceptionnelles.
L'article 3 précise que les membres du personnel d'envoi respectent la législation en vigueur sur le territoire du pays d'accueil et les autorise à conduire les véhicules, navires et aéronefs qu'ils peuvent conduire dans leur État d'envoi sur le territoire de l'État d'accueil. Il garantit la liberté de mouvement nécessaire au personnel d'envoi en vue de l'accomplissement de ses tâches sur le territoire chypriote. Le déploiement de navires, aéronefs et véhicules terrestres est ainsi prévu, de même que le droit d'utiliser les ports, les aéroports, les routes publiques et les autres installations désignées par le gouvernement chypriote.
L'article 4 prévoit que la détention ainsi que le port d'armes par le personnel français sur le territoire chypriote sont assujettis au respect de la législation en vigueur sur le territoire de la Partie d'accueil après avoir été autorisés par écrit par les autorités locales. Il indique aussi les conditions du maintien de la sécurité des installations mises à la disposition des membres du personnel français.
L'article 5 ouvre à la France la possibilité d'installer et de mettre en oeuvre ses propres systèmes de communication, sous réserve de l'accord des autorités chypriotes.
L'article 6 renvoie à l'Accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre relatif à l'échange et la protection réciproque des informations classifiées, signé le 22 janvier 2010, concernant les informations échangées durant les opérations d'évacuation mises en oeuvre au titre de l'accord.
L'article 7 porte sur le soutien logistique fourni à titre gratuit par Chypre à la France, la mise à disposition d'infrastructures et d'espaces publics ainsi que des espaces de stockage, et précise que tout autre service d'assistance logistique est fourni, à titre onéreux, à la France sur demande de cette dernière et après accord des autorités chypriotes.
L'article 8 précise le régime fiscal douanier applicable en matière d'importation de biens et d'approvisionnements destinés à la mise en oeuvre des opérations d'évacuation. Il prévoit également le régime fiscal applicable aux accords de type contrat de sous-traitance conclus par la France dans le cadre de l'opération, concernant la fourniture et l'utilisation d'installations, d'équipements, de navires, d'aéronefs et de véhicules terrestres ou l'acquisition de biens et de services, sachant que la France devra s'acquitter de toute redevance relative à l'utilisation des ports et aéroports ou de toute autre installation sur le territoire chypriote. Il stipule enfin que la France peut employer des civils locaux dans le respect de la législation de la République de Chypre.
L'article 9 prévoit que la France assure l'ensemble des soins médicaux aux personnes évacuées ainsi qu'au personnel français pendant leur stationnement sur le territoire chypriote à l'exception des soins médicaux de niveau supérieur qui sont fournis par Chypre, puis remboursés par la France. Les autorités chypriotes pourront néanmoins fournir un soutien médical supplémentaire moyennant paiement. La France doit aussi notifier, le cas échéant, aux autorités locales l'apparition d'une maladie grave parmi son personnel ou les personnes évacuées.
L'article 10 prévoit que la France se conforme à la législation de l'Union européenne en matière de prévention et de traitement de tout incident de pollution sur le territoire chypriote.
L'article 11 indique que les autorités françaises disposent d'une compétence exclusive en matière de discipline sur leurs membres du personnel.
L'article 12 porte sur les règles de compétence juridictionnelle et les garanties procédurales en cas d'infraction commise par un membre du personnel français. L'article pose le principe de la compétence juridictionnelle de la France en ce qui concerne les infractions punissables en vertu de la législation française mais pas de la législation chypriote. À l'inverse, les juridictions chypriotes exercent une juridiction exclusive en matière pénale sur le personnel français en ce qui concerne les infractions punies en vertu des lois de la République de Chypre mais pas des lois françaises. Aussi, il est prévu que les juridictions françaises exercent en priorité leur juridiction sur leur personnel en ce qui concerne les infractions commises en service ou uniquement à l'encontre du personnel français, de ses biens ou de sa sécurité. Les juridictions chypriotes exercent en priorité leur juridiction sur le personnel français pour toute autre infraction pénale. Chaque Partie peut décider de renoncer au profit de l'autre à sa priorité de juridiction. L'article indique que les Parties se prêtent assistance mutuelle dans la conduite des enquêtes et pour la recherche de preuves.
L'article 13 fixe les modalités de règlement des dommages causés par les membres du personnel. Il pose un principe de renonciation à toute demande d'indemnité pour des faits commis pendant l'exécution d'activités relevant de l'accord, sauf en cas de négligence grave ou de malveillance. Il définit en outre la répartition de la prise en charge des indemnités versées pour la réparation des dommages causés aux tiers pour des faits commis dans l'exercice des fonctions officielles et en dehors de telles fonctions.
L'article 14 prévoit que les différends relatifs à l'interprétation ou l'application de l'accord sont réglés par voie de consultation entre les Parties.
L'article 15 indique que l'accord entre en vigueur à la date de la dernière notification écrite par laquelle les Parties s'informent de l'accomplissement de leurs procédures internes nécessaires à l'entrée en vigueur de l'accord et qu'il est conclu pour une durée de trois ans, renouvelable par tacite reconduction pour des périodes de mêmes durées. L'accord peut être amendé à tout moment et il peut être dénoncé par les Parties par le biais d'une notification écrite, la dénonciation prenant effet trois mois après la réception de la notification écrite par l'autre Partie. Il est prévu que, malgré la non-reconduction ou la dénonciation de l'accord, les stipulations relatives aux questions financières restent en vigueur jusqu'à leur règlement définitif.
Telles sont les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre sur la coopération lors des opérations d'évacuation à partir de la région du Moyen-Orient via le territoire de la République de Chypre dans le cadre d'une situation de crise, signé le 9 septembre 2022 à Paris.
* 1 Accord de coopération en matière de défense entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre, signé le 4 avril 2017
* 2 Accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre relatif à l'échange et la protection réciproque des informations classifiées, signé à Nicosie le 22 janvier 2010.