EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le traité sur la coopération dans le domaine de la défense entre la République française et le Royaume d'Espagne a été signé à Barcelone, le 19 janvier 2023, par le ministre des armées de la République française, M. Sébastien Lecornu et par la ministre de la défense du Royaume d'Espagne, Mme Maria Margarita Robles Fernandes.
Notre relation avec l'Espagne en matière de défense est encadrée par l'accord de coopération dans le domaine de la défense, signé à Paris, le 7 octobre 1983. Il a été décidé de refondre ce cadre en concluant un nouvel accord intergouvernemental.
Le traité signé le 19 janvier 2023 offre ainsi un tel cadre rénové. Rédigé de manière réciproque, ce traité fixe les conditions et les modalités de la coopération franco-espagnole en matière de défense. D'une part, il reprend, en l'actualisant, le cadre qui était prévu par l'accord de 1983, et d'autre part, il introduit de nouvelles stipulations, par exemple sur les consultations régulières pour établir des positions communes (article 3).
Outre un préambule, cet accord comporte dix-neuf articles.
Le préambule du traité rappelle la volonté des Parties « d'actualiser le cadre juridique de leurs relations bilatérales dans le domaine de la défense et de la sécurité établi par l'Accord de coopération dans le domaine de la défense entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume d'Espagne, signé à Paris le 7 octobre 1983 ». Il vise la Convention entre les États parties au Traité de l'Atlantique Nord sur le statut de leurs forces signée à Londres le 19 juin 1951 (1(*)) (dit « SOFA OTAN ») ainsi que les accords bilatéraux liant les deux États signataires.
L'article 1er rappelle l'objet du partenariat entre les deux Parties, à savoir approfondir leur coopération dans le domaine de la défense et de la sécurité et définir les principes selon lesquels cette coopération est mise en oeuvre.
L'article 2 définit les termes les plus fréquemment employés au sein du traité afin d'en clarifier la portée. Les sept définitions figurant dans cet article sont conformes à celles habituellement employées dans les accords du même type.
L'article 3 prévoit que les Parties se consultent régulièrement pour établir des positions communes et agir conjointement, dans le respect notamment des principes et objectifs de la charte de Nations Unies et en étroite complémentarité avec l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord.
L'article 4 définit les domaines de la coopération en matière de défense à travers une liste non exhaustive. Ces domaines de coopération sont déclinés selon trois volets : les domaines stratégique et opérationnel (paragraphe 1), le domaine capacitaire (paragraphe 2) et les autres domaines (paragraphe 3), incluant entre autres l'énergie, le changement climatique et le rôle des femmes au sein des Forces armées. Un quatrième paragraphe prévoit que le traité couvre tout autre domaine de coopération décidé d'un commun accord entre les Parties.
L'article 5 définit les formes de la coopération en matière de défense à travers une liste non exhaustive. Un premier paragraphe énumère diverses formes de coopération telles que les échanges d'officiers de liaison et d'officiers d'échange, les visites officielles d'autorités, les entraînements et exercices communs, les échanges d'informations et de renseignements dans le domaine militaire et tout autre forme de coopération décidée d'un commun accord entre les Parties.
Un second paragraphe indique que les modalités de la coopération peuvent être précisées par des instruments pertinents (accord, arrangement technique).
L'article 6 met en place plusieurs instances de dialogue pour renforcer la coopération entre les Parties. En particulier, il instaure un conseil franco-espagnol de défense et de sécurité (CFEDS) composé des ministres chargés des affaires étrangères et de la défense des deux Parties, il institutionnalise un dialogue stratégique annuel entre la direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS) (2(*)) et son homologue espagnole (DIGENPOL) et prévoit qu'un comité d'armement assure le suivi des activités mises en oeuvre dans le domaine de l'armement.
L'article 7 prévoit l'application des stipulations de l'article V du SOFA OTAN pour le port de l'uniforme et des insignes militaires.
L'article 8 règle les questions relatives à la détention, au port et à l'utilisation des armes de dotation par les militaires de chaque Partie. Ceux-ci sont assujettis au respect des règles de la Partie d'accueil.
L'article 9 prévoit que les membres du personnel de la Partie d'origine ont accès aux services de santé dans les mêmes conditions que le personnel de la Partie d'accueil. Pour les services de santé militaires, les membres du personnel de la Partie d'origine et les personnes à leur charge ont un accès à titre gratuit. En revanche, les prestations médicales dans les services de santé civils sont à la charge de la Partie d'origine.
En outre, cet article prévoit que les professionnels de santé appartenant au personnel militaire de la Partie d'origine sont autorisés à réaliser les actes pour lesquels ils sont habilités dans l'État de la Partie d'origine à l'égard des membres du personnel de la Partie d'origine et de la Partie d'accueil.
L'article 10 est consacré aux dispositions applicables en cas de décès d'un des membres du personnel de la Partie d'origine sur le territoire de la Partie d'accueil, notamment pour ce qui concerne l'établissement du certificat de décès, en cas d'autopsie et pour la remise du corps du défunt à la Partie d'origine.
L'article 11 octroie aux forces armées de la Partie d'origine le bénéfice des services de courrier, de télécommunication et de transport dans les mêmes conditions que les Forces armées de la Partie d'accueil.
L'article 12 relatif aux impôts prévoit le maintien de la domiciliation fiscale des membres du personnel et des personnes à charge dans l'État de la Partie d'origine afin d'éviter une double imposition. Les exonérations prévues par cet article ne sont pas applicables aux membres du personnel qui ont la nationalité ou qui sont résidents de la Partie d'accueil.
L'article 13 précise que les autorités de la Partie d'origine disposent d'une compétence exclusive en matière de discipline sur les membres de leur personnel.
L'article 14 prévoit l'application des stipulations de l'article VII du SOFA OTAN en cas d'infractions commises par les membres du personnel de la Partie d'origine sur le territoire de la Partie d'accueil.
L'article 15 prévoit l'application des stipulations de l'article VIII du SOFA OTAN en cas d'infractions commises par les membres du personnel de la Partie d'origine sur le territoire de la Partie d'accueil.
L'article 16 porte sur le financement de la coopération mise en oeuvre au titre du traité. Il prévoit ainsi que chaque Partie prend à sa charge ses propres coûts de participation aux activités de coopération prévues dans le cadre du traité. Il prévoit également la possibilité d'encadrer le financement de ces activités par des accords, arrangements ou tout autre instrument approprié.
L'article 17 prévoit que les informations classifiées, échangées entre les Parties, sont protégées conformément à l'Accord général de sécurité concernant l'échange et la protection des informations classifiées, signé à Madrid le 21 juillet 2006 (3(*)).
L'article 18 prévoit que les différends liés à l'interprétation ou à la mise en oeuvre du traité sont réglés par voie de consultation ou de négociation entre les Parties.
L'article 19 contient les stipulations finales de ce traité. Il est conclu pour une durée indéterminée. Il peut être modifié à tout moment par commun accord écrit entre les Parties et il peut être dénoncé par les Parties par la voie diplomatique, la dénonciation prenant effet quatre-vingt-dix jours après la réception de la notification. À la date de son entrée en vigueur, il met fin à l'Accord de coopération dans le domaine de la défense entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume d'Espagne signé à Paris le 7 octobre 1983.
Telles sont les principales observations qu'appelle le traité sur la coopération dans le domaine de la défense entre la République française et le Royaume d'Espagne a été signé à Barcelone, le 19 janvier 2023.
* (1) Convention entre les États parties au Traité de l'Atlantique Nord sur le statut de leurs forces signée à Londres le 19 juin 1951.
* (2) Missions et organisation | ministère des armées (defense.gouv.fr).
* (3) Accord général de sécurité entre le Royaume d'Espagne et la République française concernant l'échange et la protection des informations classifiées, signé à Madrid le 21 juillet 2006.