TEXTE SOUMIS À LA DÉLIBÉRATION
DU CONSEIL DES MINISTRES
ÉTUDE D'IMPACT
PROJET DE LOI
De ratification de l'ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales
NOR : JUSC2317255L/Bleue-1
18 juillet 2023
TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS 6
TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION 7
Article 2 - Droits de vote double (art. L.225-124 du code de commerce) 8
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Le présent projet de loi de ratification permet, dans son article 1er, de ratifier l'ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales.
Les articles 2 à 8 de ce projet de loi visent à clarifier et rectifier le contenu de certains articles du code de commerce modifiés par l'ordonnance.
L'article 2 permet de clarifier que les apports partiels d'actifs soumis au régime des scissions sont soumis au même régime juridique que les scissions s'agissant du traitement des droits de vote double mentionnés à l'article L.225-124 du code de commerce. Cette interprétation doit être clarifiée après que la réforme a créé une section dédiée à l'opération d'apport partiels d'actifs, qui pourrait faire douter de l'application de cet article auquel il n'est pas fait référence dans le renvoi au régime des scissions pour lequel il est possible d'opter en vertu de l'article L.236-27.
L'article 3 permet d'appliquer aux opérations de scission réalisées uniquement entre sociétés à responsabilité limitée les dispositions de la sous-section 2 de la section 2. Ces opérations n'ont pas été mentionnées dans cette sous-section par l'ordonnance alors qu'elles étaient soumises aux dispositions rassemblées dans cette nouvelle sous-section par le droit antérieur. L'ordonnance n'a pas permis de maintenir le droit constant sur ce point et il est donc proposé de le rétablir.
L'article 4 permet de modifier l'article L. 236-21 du code de commerce, qui a restreint aux scissions réalisées entre sociétés par actions l'application du seul I de l'article L236-9, alors que le droit antérieur à l'ordonnance leur permettait d'appliquer tout l'article, et donc son II autorisant d'effectuer des scissions par délégations de pouvoir ou de compétence.
L'article 5, conformément au droit antérieur à l'ordonnance du 24 mai 2023, clarifie que, lors des opérations prévues par l'article L.236-22, ce sont les deux rapports mentionnés à l'article L.236-10 qui ne sont pas requis.
L'article 6, rétablissant le droit antérieur à l'ordonnance du 24 mai 2023, permet, lors des opérations mentionnées à l'article L.236-28, l'exonération des deux rapports mentionnés à l'article L.236-10, et non seulement celui prévu au I de cet article.
L'article 7 modifie la rédaction de l'article L236-29 du code de commerce, en l'adaptant davantage à l'opération concernée d'apport partiel d'actifs.
L'article 8 corrige une erreur de référence dans la mention d'un article de la directive.
L'article 9 permet l'application des dispositions du projet de loi à Wallis et Futuna.
TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS
Article |
Objet de l'article |
Consultations obligatoires |
Consultations facultatives |
2 |
Droits de vote double (art. L.225-124 du code de commerce) |
Néant |
Néant |
TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D'APPLICATION
Article |
Objet de l'article |
Textes d'application |
Administration compétente |
2 |
Droits de vote double (art. L.225-124 du code de commerce) |
Néant |
Néant |
Article 2 - Droits de vote double (art. L.225-124 du code de commerce)
1. ÉTAT DES LIEUX
1.1. CADRE GÉNÉRAL
L'article L.225-124 du code de commerce prévoit les conséquences de certaines opérations sur les droits de vote doubles, et en particulier les fusions et les scissions.
En principe, le nombre de voix attachées aux actions ordinaires est obligatoirement proportionnel à la quotité du capital que les actionnaires détiennent. Cependant, ce nombre de voix peut être soit limité, par les statuts, soit augmenté, en attachant aux actions un droit de vote double. Ce droit de vote double peut être attaché à toutes les actions nominatives entièrement libérées et inscrites au nom d'un titulaire depuis au moins 2 ans ( article L.225-123) ; il est de droit dans les sociétés cotées.
L'article L.225-124 traite du sort des actions à droit de vote doubles dans certaines opérations. Lorsqu'elles sont converties au porteur ou transférée en propriété elles perdent, en principe, ce droit de vote double. Ce même article prévoit toutefois plusieurs hypothèses où ce droit est maintenu : en cas de succession, liquidation de communauté de biens, ou donation entre vifs ; en cas de fusion ou scission de la société qui agrée le système des droits de vote double.
1.2. CADRE CONSTITUTIONNEL
Sans objet.
1.3. CADRE CONVENTIONNEL
Ces modifications s'inscrivent dans le cadre de la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture et de la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières.
1.4. ÉLÉMENTS DE DROIT COMPARÉ
Sans objet.
2. NÉCESSITÉ DE LÉGIFÉRER ET OBJECTIFS POURSUIVIS
L'ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales a créé une section dédiée à l'opération d'apport partiels d'actifs soumis au régime des scissions. Cette section s'ouvre par un article de définition, qui indique que cette opération est une opération d'apport volontairement placée sous le régime des dispositions de la section consacrée aux scissions, comprenant les articles L.236-18 à L.236-26 ( art. L.236-27). Or, dans cette section consacrée aux scissions ne figure pas l'article L.225-124, situé dans une autre partie du code de commerce, qui porte sur le sort des droits de vote doubles en cas de scission.
Le fait que l'article L.225-124 ne se situe pas dans les articles expressément visés dans les renvois fait douter certains praticiens de son application aux apports partiels d'actifs. D'une part, selon les auteurs du Mémento Sociétés commerciales1(*), une interprétation limitative de cet article s'impose : l'apport partiel d'actif n'étant pas directement visé à l'article, les actionnaires ne sauraient garder leurs droits de vote double suite à cette opération, quand bien même l'apport en question serait soumis au régime des scissions. D'autre part, certains auteurs2(*) considèrent que, dès lors que l'article L.225-124 s'applique aux scissions, il devrait également s'appliquer automatiquement aux apports partiels d'actifs soumis au régime des scissions.
2.2. OBJECTIFS POURSUIVIS
Les modifications proposées permettent de lever ce doute en incluant expressément l'apport partiel d'actif dans le champ d'application de cet article lorsqu'il est soumis au régime des scissions par la société actionnaire.
Sur le fond, il n'y a en effet aucune raison de distinguer, en ce qui concerne le sort des droits de vote doubles, entre une opération de scission et une opération d'apport partiel d'actifs que la société qui apporte une partie de son actif choisit de soumettre au régime des scissions.
2.3. OPTIONS ENVISAGÉES
Les deux options envisagées étaient :
- De ne pas modifier l'article l.225-124 et laisser ainsi perdurer les débats doctrinaux qui portaient sur la question de savoir si celui-ci s'applique également aux apports partiels d'actifs soumis au régime des scissions ;
- De faire une référence expresse aux apports partiels d'actifs à l'article L.225-124, et lever ainsi les doutes de certains praticiens et auteurs de doctrine
2.4. OPTION RETENUE
L'option retenue est celle qui permet de résoudre les problèmes d'interprétation de l'article L.225-124, c'est-à-dire l'ajout d'une référence expresse aux apports partiels d'actifs dans le texte de cet article. Dès lors que l'apport partiel d'actif est soumis au régime des scissions, il n'y a aucune raison de traiter cette opération différemment de celle dont elle emprunte le régime. Les alinéas 1 et 3 de l'article L.225-124 sont donc modifiés en rajoutant de manière explicite une référence aux apports partiels d'actifs qui ne font donc pas perdre le droit de vote double s'ils sont soumis au régime des scissions par la société actionnaire.
3. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGÉES
3.1. IMPACTS JURIDIQUES
3.1.1. Impacts sur l'ordre juridique interne
L'article L.225-124 est modifié pour y inclure expressément les apports partiels d'actifs.
3.1.2. Articulation avec le droit international et le droit de l'Union européenne
Sans objet.
3.2. IMPACTS ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS
3.2.1. Impacts macroéconomiques
Sans objet.
3.2.2. Impacts sur les entreprises
La clarification que l'article L.225-124 s'applique également aux apports partiels d'actif soumis au régime des scissions par la société actionnaire permettra aux entreprises de réaliser de telles opérations sans craindre de perdre leurs droits de vote double. Les entreprises ne seront plus dans le doute et elles n'auront plus besoin de consulter une doctrine mitigée sur la question dès lors qu'une disposition législative le prévoit expressément. Ainsi, les opérations d'apport partiel d'actifs seront sans impact sur les équilibres en matière de droits de vote.
3.2.3. Impacts budgétaires
Sans objet.
3.3. IMPACTS SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
Sans objet.
3.4. IMPACTS SUR LES SERVICES ADMINISTRATIFS
Sans objet.
3.5. IMPACTS SOCIAUX
3.5.1. Impacts sur la société
Sans objet.
3.5.2. Impacts sur les personnes en situation de handicap
Sans objet.
3.5.3. Impacts sur l'égalité entre les femmes et les hommes
Sans objet.
3.5.4. Impacts sur la jeunesse
Sans objet.
3.5.5. Impacts sur les professions réglementées
Sans objet.
3.6. IMPACTS SUR LES PARTICULIERS
Grace aux modifications proposées, les actionnaires des sociétés auront la certitude du maintien de leur droit de vote suite aux opérations d'apport partiel d'actifs soumis au régime des scissions. Les équilibres dans la distribution des droits de vote parmi les actionnaires seront également maintenus suite à cette opération.
3.7. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX
Sans objet.
4. CONSULTATIONS ET MODALITÉS D'APPLICATION
4.1. CONSULTATIONS MENÉES
Aucune consultation n'a été menée. La difficulté d'interprétation de l'article L.225-124 à l'aune des dispositions de l'ordonnance du 24 mai 2023 a été soulevée par le Haut comité de la place financière de paris (HCJP).
4.2. MODALITÉS D'APPLICATION
4.2.1. Application dans le temps
Le présent article s'appliquera dès le lendemain de la publication de la présente loi au Journal Officiel de la République française.
4.2.2. Application dans l'espace
Applicabilité en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à La Réunion et à Mayotte : ces collectivités étant, en application de l'article 73 de la Constitution, régies par le principe d'identité législative, les lois et règlements s'y s'appliquent de plein droit, sans mention expresse d'applicabilité. Les dispositions du projet s'y appliquent donc de plein droit.
Applicabilité à Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon : les statuts des collectivités de Saint-Martin, de Saint Barthélemy et de Saint-Pierre-et-Miquelon, collectivités d'outre-mer relevant de l'article 74 de la Constitution, prévoient que les dispositions législatives et réglementaires y sont applicables de plein droit, à l'exception notamment de celles relevant de la compétence de la collectivité.
En matière de droit commercial l'État est compétent. Les dispositions législatives relatives à ces matières, portées par le projet, y sont donc applicables de plein droit, sans qu'aucune mention d'applicabilité expresse ne soit nécessaire.
Applicabilité dans les collectivités du Pacifique (Wallis-et-Futuna, Nouvelle- Calédonie et Polynésie française) et dans les TAAF : en ce qui concerne les collectivités du Pacifique régies par le principe de spécialité législative, les dispositions modifiant le code de commerce ne sont pas applicables en Nouvelle Calédonie et en Polynésie française, la compétence en matière de droit commercial ayant été transférée à la collectivité dans ces deux collectivités.
En revanche, à Wallis-et-Futuna, l'État est bien compétent en matière de droit commercial, les dispositions modifiant le code de commerce peuvent donc y être rendues applicables sous réserve d'une mention expresse d'applicabilité. Le projet révisé prévoit expressément cette applicabilité sans aucune mesure d'adaptation (art. 7).
Enfin, les dispositions modifiant le code de commerce prévues par vos deux projets sont applicables de plein droit dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), le 7° de l'article 1-1 de la loi n° 55-1052 du 6 aout 1955 ayant prévu une application de plein droit des dispositions législatives et règlementaires en matière de droit commercial dans ce territoire.
4.2.3. Textes d'application
La présente disposition n'appelle aucune mesure d'application.
* 1 A. Charvériat, B. Dondero, M.-E. Sébire, F. Gilbert, Mémento pratique Sociétés commerciales. Editions Francis Lefebvre, 2022, p. 825.
* 2 H. Le Nabasque, A. Soilleux, A. Duguay, « La question de la transmission des droits de vote double attachés à une participation apportée », Bulletin Joly Sociétés, juillet-août 2022