TEXTE SOUMIS À LA DÉLIBÉRATION
DU CONSEIL DES MINISTRES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
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Ministère de l'Europe
et des affaires étrangères
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Projet de loi
autorisant l'approbation de l'accord sur la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République d'Arménie,
d'autre part, de l'accord sur la création d'un espace aérien commun entre
l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et l'Ukraine,
d'autre part, et de l'accord sur le transport aérien entre
l'Union européenne et ses Etats membres,
d'une part, et l'Etat du Qatar, d'autre part
NOR : EAEJ2304654L/Bleue-1
ÉTUDE D'IMPACT
La Commission européenne a initialement développé avec les pays tiers des accords horizontaux1(*) de transport aérien, les droits de trafic étant aux mains des Etats membres2(*). La clause de désignation3(*) contenue dans ces accords permettait que dès lors qu'un pays de l'Union européenne avait conclu un accord avec un pays tiers, alors un transporteur aérien de toute autre pays pouvait bénéficier de ces dispositions. La Commission européenne a ensuite développé des accords globaux de transports aériens4(*). Ceux-ci se regroupent en diverses catégories.
L'objet des accords avec les pays du voisinage est de créer des « espaces aériens communs 5(*)» en ouvrant progressivement les relations aériennes entre l'Union européenne et le pays tiers, sous condition de la reprise par cet État d'une part substantielle de l'acquis communautaire en matière de transport aérien.
Afin d'assurer une concurrence équitable entre les transporteurs de l'Union européenne et ceux issus de pays tiers et d'atténuer l'impact environnemental des services de transports, ces accords permettent ainsi de garantir des standards élevés dans les domaines de la sécurité, de la sûreté, de la gestion du trafic aérien ainsi que l'application des certaines règles communautaires en matière d'environnement, d'accès au marché, de protection des consommateurs et de temps de travail pour les professionnels du transport aérien, tout en libéralisant les marchés des services aériens entre les territoires des États membres de l'Union européenne.
Ainsi, l'Union européenne a conclu depuis 2006 des accords de transport aérien relevant de cette catégorie avec les Balkans occidentaux6(*), le Maroc7(*), la Géorgie8(*), la Jordanie9(*), la Moldavie10(*) et Israël11(*). Pour les pays de l'espace économique européen (Norvège, Islande, Liechtenstein) et la Suisse, les accords prévoient que lorsqu'ils auront appliqué tout l'acquis communautaire, ils feront partie du marché intérieur de l'aviation de l'Union européenne et leurs transporteurs jouiront alors des mêmes droits que ceux des transporteurs des Etats membres.
Les accords globaux de transport aériens avec les partenaires clefs prévoient une ouverture du marché (exemple : échange de droits de trafic - généralement la possibilité à terme de vols directs illimités pour les passagers) avec un niveau minimal de règles communes destinées à assurer une équité entre les transporteurs. Les domaines couverts sont souvent la sécurité, la sûreté, l'environnement, la concurrence et des aides d'État, le social afin de garantir un cadre concurrentiel équitable aux transporteurs aériens européens du pays tiers. L'Union européenne a actuellement conclu ce type d'accord avec les Etats-Unis12(*) et le Canada13(*). Se rapprochent de ce type d'accord les dispositions aériennes de l'accord de commerce et de coopération conclu avec le Royaume-Uni14(*) dans le cadre du Brexit.
Avertissement concernant les données relatives à l'accord aérien avec l'Ukraine :
concernant l'Ukraine, les études d'impacts disponibles sont anciennes, et incluaient alors de surcroît la Crimée. Du fait de l'invasion de l'Ukraine par la Russie démarrée en février 2022, il est désormais impossible de disposer de projections fiables. En effet, les conséquences sur l'industrie et les installations aériennes ukrainiennes ainsi que les mouvements de population engendrés par le conflit, tout comme le temps que prendra la restauration de l'économie ukrainienne, ne peuvent à ce stade être estimés. L'évaluation de l'impact (économique, social, environnemental) de l'accord de transport aérien sur ce pays, même s'il sera globalement indéniablement positif, ne peut donc être que lacunaire.
I. Situation de référence
Les trois accords ratifiés par le présent projet de loi ont été pendant plusieurs années en attente de signature alors même que les négociations étaient terminées avec un paraphe des négociateurs en 2013 pour l'Ukraine, en 2017 pour l'Arménie et en 2019 pour le Qatar. Cela s'explique par le différend opposant le Royaume d'Espagne au Royaume-Uni au sujet de la souveraineté sur l'aéroport de Gibraltar. En effet, l'aéroport de Gibraltar étant situé sur un isthme revendiqué par les deux pays, le Royaume-Uni et l'Espagne ont bloqué pendant plusieurs années l'adoption de tout texte dans le domaine aérien au Conseil, que ce soit des règlements européens ou des accords aériens. La sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne a levé cet obstacle aux signatures.
1. Accords avec l'Arménie et l'Ukraine15(*)
Pour ces deux pays, le projet de passer à des accords globaux de transport aérien à l'échelle de l'Union européenne participe de la politique des relations avec les « pays de voisinage 16(*)» de l'Union européenne. La majeure partie de ces pays a en effet vocation à rejoindre l'Union européenne, d'où des aides économiques versées par l'Union européenne en même temps qu'un accompagnement pour les aider à intégrer la règlementation de l'Union européenne. Il est issu de la communication de la Commission européenne de 2005 « développer l'agenda de la politique extérieure de la Communauté17(*) » sur la création d'un espace aérien commun avec ses voisins à l'est et au sud, objectif soutenu par le Conseil en juin 2005. Ces accords sont donc sans lien avec les conflits auxquels ces pays ont été confrontés respectivement en 2020 et 2022.
2. Accord avec le Qatar18(*)
La France était traditionnellement très prudente sur de potentiels accords aériens avec les pays du Golfe vu la forte croissance de leurs compagnies aériennes et les positions plus libérales d'autres pays de l'Union européenne. Toutefois, la France et l'Allemagne se sont montrées prêtes à plus d'ouverture, voyant la possibilité de pousser les pays du Golfe, via ce type d'accords, à s'inscrire dans des pratiques de concurrence plus équitable, en insérant des clauses liées à la transparence financière, à l'environnement ou un volet social. Le projet de mandat initial pour l'ensemble des pays du Golfe proposé fin 2015 par la Commission européenne a ensuite été scindé en six mandats, dont deux ont finalement débouché sur des accords : un avec le Qatar puis un en instance de signature avec Oman.
II. Historique des négociations
1. Accord avec l'Ukraine
L'accord avec l'Ukraine est issu des négociations menées entre l'Ukraine et la Commission européenne sur la base d'un mandat octroyé par le Conseil de l'Union européenne et ses États membres le 12 décembre 2006, conduisant au paraphe de l'accord le 28 novembre 2013. L'Ukraine ayant de grands constructeurs aéronautiques (dont Antonov), les discussions se sont avérées assez longues pour finalement conserver le mécanisme et les organismes de certification ukrainiens dans le domaine de la sécurité.
2. Accord avec l'Arménie
Le mandat pour l'Arménie a été octroyé par le Conseil de l'Union européenne et les États membres le 1er décembre 2016. L'Arménie souhaitant vivement cet accord, elle a fait preuve d'une grande souplesse d'où un accord conclu rapidement puisqu'une seule rencontre a été nécessaire avant de pouvoir le parapher le 24 novembre 2017.
3. Accord avec le Qatar
Après le mandat octroyé par le Conseil de l'Union européenne et les États membres le 7 juin 2016, cinq rencontres ont été nécessaires pour aboutir au paraphe de l'accord avec le Qatar le 4 mars 2019. Les discussions ont notamment porté sur la concurrence équitable et les droits de trafic avec l'ouverture progressive des marchés. Au moment des négociations, le Qatar était d'autant plus intéressé par cet accord que ce dernier lui permettait de sortir de l'isolement créé par le blocus aérien, maritime et terrestre imposé par ses voisins (Arabie saoudite, Emirats arabes unis, Bahreïn) et l'Egypte du 5 juin 2017 au 5 janvier 2021. Cette crise régionale a été le résultat des tensions croissantes liées à la politique étrangère indépendante de Doha. Le sommet des chefs d'Etat du Conseil de Coopération des Etats Arabes du Golfe (CCEAG), le 5 janvier 2021, à al Ula, a toutefois acté la fin de l'embargo sur le Qatar, la réouverture des frontières et le rétablissement des relations diplomatiques entre le Qatar et l'ensemble des pays du Quartet.
III. Objectifs des accords
1. Accords avec l'Arménie et l'Ukraine
Les accords avec l'Arménie et l'Ukraine visent à créer un espace aérien commun avec les États membres de l'Union européenne. Cela s'accompagne d'une harmonisation des règlementations du transport aérien en s'appuyant sur les règles européennes afin de garantir les standards les plus élevés aux usagers du transport aérien, notamment dans les domaines de la sécurité et de la sûreté.
2. Accord avec le Qatar
L'accord avec le Qatar est un accord aérien global de plus grande ampleur (type « partenaire clef ») et vise à accentuer la coopération entre les Etats membres de l'Union européenne et le Qatar en échange d'une libéralisation progressive des vols directs d'une part (autrement dit octroi de vols relevant des 3e et 4e libertés aériennes, à savoir droit de débarquer dans un Etat tiers des passagers embarqués dans l'Etat dont l'aéronef a la nationalité et droit de d'embarquer dans un Etat tiers des passagers à destination de l'Etat dont l'aéronef a la nationalité) et des vols avec escale pour le fret d'autre part (vols cargo).
IV. Conséquences estimées de la mise en oeuvre des accords
Ces accords emportent des conséquences dans les domaines économique, social, environnemental, ainsi que sur la parité femme/homme et le domaine juridique.
a. Conséquences économiques19(*)
Les chiffres indiqués ci-après pour le trafic des passagers sont ceux de l'année 2021, où le trafic aérien restait très affecté par la crise sanitaire du Covid19. Ils seraient probablement 50% supérieurs lors d'une année normale pour l'Arménie ou l'Ukraine.
La hausse serait encore plus importante pour le Qatar. En effet, Doha est rarement la destination finale ou initiale des vols, vu la faiblesse du marché intérieur. La très grande majorité des passagers sont en correspondance dans ce grand hub (38,7M de passagers en 2019) orienté vers l'Asie et le Pacifique. Or, ce sont ces pays qui ont vu leurs dessertes aériennes être les plus affectées par le covid.
1. Accord avec l'Arménie
En 2021, plus de 230 000 passagers ont voyagé en avion entre l'Union européenne et l'Arménie, dont une part très significative pour la France avec 40 000 passagers.
L'accord avec l'Arménie permettra un développement des liaisons aériennes directes entre l'Arménie et les pays de l'Union européenne, ainsi qu'un accès à leurs hubs (cf Roissy-Charles de Gaulle, Amsterdam, Frankfort, Munich). Cela rendra possible un désenclavement de l'Arménie dont l'accès au reste du monde reposait essentiellement sur les liaisons via la Russie. Or les récentes tensions internationales ont mis en péril cet accès, l'Union européenne comme d'autres Etats occidentaux ayant suspendu leurs liaisons aériennes avec la Russie. Il est à noter que dans le cadre du processus de normalisation des relations entre l'Arménie et la Turquie, deux lignes aériennes ont été ouvertes en 2022 entre Erevan et Istanbul.
Dans un premier temps, l'accord bénéficiera essentiellement aux compagnies aériennes de l'Union européenne. En effet, en raison de défaillances en matière de sécurité aérienne, les compagnies aériennes d'Arménie ont été placées sur liste noire et ne peuvent donc plus opérer vers les pays de l'Union européenne (ou alors seulement en affrétant des aéronefs conformes à la règlementation UE). Plusieurs années devraient être nécessaires pour régler ces défaillances de sécurité. L'Union européenne, notamment via l'Agence de l'Union européenne pour la sécurité aérienne, apporte d'ores et déjà son soutien à l'Arménie pour lui permettre d'améliorer sa sécurité aérienne.
A l'instar des accords similaires, le développement des flux de passagers est attendu avec des retombées très positives en termes touristiques et économiques pour l'Arménie. L'étude d'impact de la Commission européenne en 2012 prévoyait une hausse de trafic de 6% pendant les premières 10 années suivant la libéralisation20(*). Le bénéfice économique était estimé à 16 millions d'euros les cinq premières années pour l'Union.
2. Accord avec l'Ukraine
En 2021, plus de 4,5 millions de passagers ont voyagé en avion entre l'Union européenne et l'Ukraine, dont 40 000 pour la France, loin derrière la Pologne (1,2 millions), l'Allemagne (plus de 700 000) ou l'Italie (500 000).
Un fort accroissement de la desserte de l'Ukraine était attendu en début d'année 2022. D'ailleurs, nombre de compagnies aériennes prévoyaient d'ouvrir des nouvelles routes au cours de l'été 2022 vers des destinations ukrainiennes, pour des motifs touristiques et affinitaires au regard du nombre de travailleurs ukrainiens dans l'Union européenne (environ 1.5 millions détenteurs d'un titre de résidence permanent ; le chiffre total de résidents effectifs étant susceptible d'être largement supérieur).
L'invasion de l'Ukraine par la Russie en février a bouleversé ces perspectives. Néanmoins, à plus long terme, un accroissement des dessertes demeure probable et pourrait même être très supérieur au niveau anticipé. En effet, une partie des Ukrainiens réfugiés dans l'Union pourrait être amenée à s'installer définitivement dans les pays d'accueil et effectuer des voyages aériens pour retourner ponctuellement en Ukraine.
3. Accord avec le Qatar
En 2021, 1,6 million de passagers a voyagé en avion entre l'Union européenne et le Qatar, dont 240 000 pour la France, derrière l'Allemagne (350 000). L'étude d'impact de 2015 de la Commission européenne portait sur l'ensemble des pays du Golfe et non le Qatar seul et évaluait les bénéfices potentiels à 8,4 milliards d'euros sur une dizaine d'années.
Nombre de pays de l'Union européenne sont très favorables à cet accord avec le Qatar, dans la mesure où il développera leur connectivité vers le reste du monde, eu égard au rôle de hub de l'aéroport international Hamad de Doha.
Les dispositions sur la concurrence (article 14) reflètent les intérêts offensifs européens et permettront de s'assurer que les compagnies européennes et du Qatar bénéficient de conditions économiques et financières équitables et d'un accès au marché sans discrimination.
b. Conséquences sociales
1. Accord avec l'Arménie
L'accord avec l'Arménie permettra un développement des liaisons aériennes directes entre l'Arménie et les pays de l'Union européenne, ce qui pourra s'avérer bénéfique compte tenu de l'ampleur de la diaspora arménienne en France (composée d'environ 500 000 personnes).
2. Accord avec le Qatar
L'accord avec le Qatar pourrait avoir plusieurs conséquences sociales :
- d'une part, il renforcera la concurrence avec les compagnies de l'Union européenne pour les vols vers l'Asie, vu le rôle de hub de Doha, d'où une possible influence sur l'activité des compagnies européenne et donc sur l'emploi. L'étude d'impact de 2015 de la Commission européenne portant sur l'ensemble des pays du Golfe (et non le seul Qatar) chiffrait à 8 300 les emplois y compris induits créés sur une dizaine d'années en Europe. Cet accroissement de la concurrence pourra avoir un effet à la baisse sur le prix des billets d'avions, rendant ainsi certaines destinations plus accessibles aux passagers aux revenus plus modestes.
- d'autre part, pour la première fois avec un pays du Golfe, cet accord inclut une dimension sociale. En effet, il comporte une clause à l'article 20 dans laquelle le Qatar s'engage à faire tout ce qui est en son pouvoir pour ratifier, s'il ne l'a pas encore fait les conventions fondamentales de l'Organisation internationale du travail (OIT) et d'autres conventions de l'organisation.
c. Conséquences environnementales
La protection de l'environnement dans le cadre du développement et de la mise en oeuvre de la politique aéronautique internationale a été l'une des priorités des négociateurs de la Commission européenne.
Les trois accords comportent un article environnemental, soulignant l'importance de protéger l'environnement et de réduire les émissions de gaz à effet de serre, ainsi que de coopérer au niveau des organisations internationales en la matière (article 10 pour l'Ukraine, article 16 pour le Qatar et article 17 pour l'Arménie). La réunion annuelle de comités mixtes permettra d'en assurer le suivi. Le CORSIA21(*) est intégré aux deux accords négociés après son adoption à l'assemblée de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) de 2016, à savoir ceux avec l'Arménie et le Qatar.
1. Accord avec l'Arménie
L'étude d'impact de la Commission européenne de 2012 envisageait une hausse des émissions de gaz à effet de serre liées à la croissance du trafic aérien de 5,7% par an au lieu de 4% si l'Arménie ne rejoignait pas l'espace aérien commun.
2. Accord avec le Qatar
Sans établir d'estimation précise s'agissant du Qatar, l'étude d'impact de 2015 de la Commission européenne considérait que la hausse des émissions de gaz à effet de serre serait largement compensée par les clauses environnementales de l'accord renforçant la protection de l'environnement. Cela permettrait de resserrer les liens entre l'Union européenne et les futurs signataires pour qu'ils rapprochent leurs positions dans les négociations environnementales internationales, comme l'Organisation internationale de l'aviation civile (OACI), tel que prévu par l'article 16.
d. Conséquences concernant l'égalité femmes/hommes
L'accord avec le Qatar est potentiellement de nature à favoriser l'égalité homme-femme. En effet, l'article 20 comporte une clause par laquelle le Qatar s'engage à faire tout ce qui est en son pouvoir pour ratifier les conventions fondamentales de l'Organisation internationales du travail. Or, parmi celles qu'il n'a pas encore ratifiées figure la Convention n°100 sur l'égalité de rémunération (entre les hommes et les femmes).
e. Conséquences juridiques
Articulation avec le droit européen
Les accords globaux de transport aérien sont une compétence partagée entre l'Union européenne et les États membres, car ils traitent notamment des droits de trafic22(*). Il n'y a pas d'enjeu d'articulation particulier, ces accords permettant simplement de se rapprocher des droits et standards aériens des partenaires du droit de l'Union européenne.
Articulation avec le droit interne
1. Accord avec l'Ukraine
L'accord aérien avec l'Ukraine remplace le précédent accord avec la France conclu en la matière. En 2006, à l'ouverture des négociations entre l'Union européenne et l'Ukraine, cet accord tel que modifié par les dernières consultations aéronautiques prévoyait 14 fréquences par semaine. Le nouvel accord aérien permettra aux transporteurs européens de desservir, au départ de tout aéroport de l'Union européenne, tout aéroport d'Ukraine (droits dits de 3e et 4e libertés - cf. point III/2 en p. 3) et, lorsque l'Ukraine aura atteint un niveau suffisant d'application de l'acquis communautaire, effectuer des vols via un point intermédiaire dans certains États tiers, ou au-delà de l'Ukraine vers des États tiers (droits de 5e liberté23(*)). Les transporteurs ukrainiens bénéficieront des mêmes libertés, mais sans possibilité d'exercer des droits de 5e liberté au-delà des pays de l'Union européenne. Les transporteurs aériens ukrainiens auront le droit d'opérer des liaisons entre deux pays de l'Union européenne. Les transporteurs aériens de l'Union européenne auront un droit de cabotage en Ukraine, ce qui est un avantage d'autant plus rare qu'il est octroyé à titre unilatéral.
3. Accord avec l'Arménie
Il n'existait pas d'accord aérien entre la France et l'Arménie. L'accord qui a été conclu avec l'Arménie permettra aux transporteurs européens de desservir, au départ de tout aéroport de l'Union européenne, tout aéroport d'Arménie (droits dits de 3e et 4e libertés). Lorsque l'Arménie aura atteint un niveau d'application de l'acquis communautaire suffisant, attesté par les évaluations périodiques des services de la Commission, ces transporteurs pourront effectuer des vols via un point intermédiaire dans certains États tiers, ou au-delà de l'Arménie vers des États tiers (droits de 5e liberté). Les transporteurs arméniens bénéficieront des mêmes libertés, mais sans possibilité d'exercer des droits de 5e liberté au-delà des pays de l'Union européenne.
3. Accord avec le Qatar
L'accord européen avec le Qatar remplace le précédent accord conclu avec la France le 29 octobre 197524(*). Ce dernier prévoyait des fréquences de vols entre les deux pays qui étaient régulièrement accrues, mais sans contrepartie sur l'environnement, le social ou la concurrence loyale : 21 fréquences hebdomadaires sur Paris, 5 fréquences hebdomadaires sur Doha-Nice, 5 fréquences hebdomadaires sur Doha-Lyon. Une enveloppe de deux vols hebdomadaires était dédiée aux fréquences tout cargo.
Les fréquences des vols entre la France et le Qatar augmenteront donc progressivement chaque année avec l'accord européen, jusqu'à devenir illimitées pour les vols directs de passagers, et atteindre sept vols hebdomadaires de 5e liberté en cargo25(*) entre chaque État membre de l'Union européenne et le Qatar pour le fret. Le cabotage en faveur de compagnies du Qatar est interdit par l'accord (y compris le cabotage métropole - Ile de La Réunion).
V. État des approbations
L'Autriche, la Lettonie, l'Estonie et la Hongrie ont déjà approuvé l'accord avec l'Arménie.
La République tchèque, l'Autriche, la Lettonie, l'Estonie, l'Irlande, la Grèce et la Hongrie ont déjà approuvé l'accord avec le Qatar.
La République tchèque, l'Autriche, la Lettonie, l'Estonie et la Roumanie ont déjà approuvé l'accord avec l'Ukraine. L'Ukraine a également achevé ses procédures internes d'approbation.
* 1 L'Union européenne a des accords horizontaux de transport aérien en vigueur avec les pays suivants : Albanie, Australie, Azerbaïdjan, Brésil, Chine, Corée du Sud, Emirats arabes unis, Inde, Japon, Kirghizstan, Liban, Macao, Malaisie, Maldives, Mexique, Mongolie, Népal, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Panama, Paraguay, Singapour, Sri Lanka, Viet Nam et avec les Pays de l'Union économique et monétaire ouest africaine. Ils sont accessibles via le site Eur-lex
* 2 Article 4 du TFUE inscrivant les transports au nombre des compétences partagées et arrêts de la CJUE 5 novembre 2002 dans les affaires C-466/98, C-467/98, C-468/98, C-469/98, C-471/98, C-472/98, C-475/98 et C-476/98 précisant les compétences exclusives à la Communauté européenne dans l'aérien.
* 3 Pour exemple au 6e considérant et à l'article 2 de l'accord horizontal entre l'Union européenne et le gouvernement de la République populaire de Chine sur certains aspects des services aériens du 22 mai 2019.
* 4 L'Union européenne a des accords globaux de transport aérien avec le Canada, les Etats-Unis, la Géorgie, Israël, la Jordanie, le Maroc, la Moldavie, la Suisse, et les Etats couverts par l'espace économique européen (Albanie, Macédoine du Nord, Bosnie-Herzégovine, Islande, Monténégro, Norvège, Serbie - Kosovo). Source : Eur-lex
* 5 Un espace aérien commun est fondé sur le libre accès au marché, la liberté d'établissement, des conditions de concurrence équitables et des règles communes, notamment dans les domaines de la sécurité, de la sûreté, de la gestion du trafic aérien, de l'environnement et en matière sociale.
* 6 Accord multilatéral entre la Communauté européenne et ses Etats-Membres, la république d'Albanie, l'ancienne république yougoslave de Macédoine, la Bosnie-et-Herzégovine, la république de Bulgarie, la république de Croatie, la république d'Islande, la république du Monténégro, le royaume de Norvège, la Roumanie, la république de Serbie, et la mission d'administration intérimaire des Nations unies au Kosovo sur la création d'un espace aérien commun européen.
* 7 Accord entre la Communauté européenne et le royaume du Maroc sur certains aspects des services aériens
* 8 Accord sur la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Géorgie, d'autre part
* 9 Accord euro-méditerranéen relatif aux services aériens entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et le Royaume hachémite de Jordanie d'autre part
* 10 Accord sur la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Moldavie, d'autre part
* 11 Accord euro-méditerranéen relatif aux services aériens entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et le gouvernement de l'Etat d'Israël d'autre part
* 12 Accord de transport aérien entre la communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et les Etats Unis d'Amérique d'autre part
* 13 Accord sur le transport aérien entre le Canada et la communauté européenne et ses Etats membres
* 14 Accord de commerce et de coopération entre l'Union européenne et la communauté européenne de l'énergie atomique, d'une part, et le Royaume-Uni de Grande Bretagne et d'Irlande du Nord, d'autre part
* 15 Accord relatif aux transports aériens entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement d'Ukraine, signé à Kiev le 3 mai 1994
* 16 Pays du voisinage Est : Arménie, Azerbaïdjan, Biélorussie, Géorgie, Moldavie et Ukraine ; Pays du voisinage Sud : Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Maroc, Palestine*, Syrie et Tunisie
* 17 Communication de la Commission, 11 mars 2005, Développer l'agenda de la politique extérieure de l'aviation de la Communauté
* 18 Accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Etat de Qatar relatif au transport aérien dans leur deux pays et au-delà de ceux-ci, signé à Paris le 29 octobre 1975
* 19 Source : Eurostat, les données au niveau Union européenne étant incomplètes pour le 4e trimestre 2021.
* 20 Steer Davies Gleave, Study on the economic benefit of a Common Aviation Area Agreement between the EU and the Republic of Armenia, January 2012.
* 21 Le CORSIA est le système mondial de compensation des émissions de CO2 pour l'aérien, qui a été adopté par l'Organisation de l'aviation civile internationale en 2016.
* 22 « Le développement des services aériens ou services de transport aérien est encadré par des droits commerciaux appelés droits de trafic qui définissent les fréquences de vols, les points de dessertes et d'escales, les possibilités de partages de codes... Ces droits sont définis historiquement dans le cadre d'accords bilatéraux entre États. » (Source : Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Ministère de la Transition écologique, politiques publiques, aviation civile, 2019)
* 23 Les vols de 5ème liberté en cargo sont des vols vers un pays tiers en continuation d'un vol bilatéral initial, embarquant du trafic sur le second segment au-delà de l'Union européenne.
* 24 Accord entre le gouvernement de la république française et le gouvernement de l'Etat de Qatar relatif aux transports aériens entre les deux pays et au-delà de ceux-ci.