Étude d'impact au format PDF (252 Koctets)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE |
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Ministère de l'Europe et des affaires étrangères |
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PROJET DE LOI
autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco relatif au régime fiscal des dons et legs faits aux personnes publiques et aux organismes à but désintéressé
NOR : EAEJ2010456L/Bleue-1
ÉTUDE D'IMPACT
I. Situation de référence
Les relations politiques entre la France et Monaco ont profondément évolué depuis quelques années dans le sens d'une souveraineté renforcée de la Principauté. En effet, à la signature du Traité d'amitié de 2002 1 ( * ) a succédé la signature de la convention de coopération administrative de 2005 2 ( * ) et l'élévation du Consulat de France à Monaco au rang d'Ambassade depuis le 1 er janvier 2006.
La France et la Principauté continuent à entretenir des relations étroites. L'imbrication du territoire monégasque dans le département des Alpes-Maritimes contribue historiquement et encore aujourd'hui à la proximité de nos populations, notamment en ce qui concerne la reconnaissance de nos patrimoines culturels respectifs. La Principauté représente, par ailleurs, un bassin d'emplois important pour ce département. Environ 35 000 Français travaillent à Monaco, un peu moins de 10 000 y résident tandis qu'environ 400 Monégasques vivent en France. De manière générale, cette proximité instaure un cadre favorable au consentement de dons et legs transfrontières à l'égard d'entités à but non lucratif françaises et monégasques.
En droit français, à l'instar du droit monégasque, les bénéficiaires de dons ou legs, où qu'ils se trouvent, sont en principe redevables de droits de mutation à titre gratuit auprès de l'Etat de provenance du don ou legs. Ces droits sont dus à l'occasion du changement de propriété d'un bien ; il s'agit généralement de droits d'enregistrement et de la taxe de publicité foncière 3 ( * ) .
Certaines entités bénéficiaires sont alors éligibles à une exonération des droits de mutation à titre gratuit en raison du caractère non lucratif de leurs activités 4 ( * ) .
Toutefois, de telles exonérations ne valent pas pour les dons ou legs provenant d'un Etat étranger.
Il s'ensuit que quand deux Etats exonèrent, dans leur droit interne, des entités similaires, de telles exonérations ne couvrent pas les entités à but non lucratif implantées sur le territoire de l'autre Etat. Pour autant, en pratique, la proximité de certains Etats, peut conduire les populations à effectuer des dons et legs auprès d'entités à but non lucratif implantées dans le territoire de l'autre Etat.
Afin d'exonérer mutuellement de droits de mutation à titre gratuit des entités des deux Etats pour les dons et legs qui leur sont consentis de manière transfrontière, la France a conclu plusieurs accords avec, notamment, l'Allemagne 5 ( * ) , l'Autriche 6 ( * ) , la Belgique 7 ( * ) , l'Espagne 8 ( * ) , les Etats-Unis 9 ( * ) , l'Italie 10 ( * ) , le Portugal 11 ( * ) , la Suède 12 ( * ) et la Suisse 13 ( * ) .
Ces différents accords permettent alors aux entités à but non lucratif implantées en France d'être exonérées par l'Etat partenaire de droits de mutation à titre gratuit lorsqu'elles sont bénéficiaires de dons ou legs transfrontières.
En matière fiscale, la France et Monaco sont liés par la convention du 1 er avril 1950 tendant à éviter les doubles impositions et à codifier les règles d'assistance en matière successorale 14 ( * ) ainsi que par la convention du 18 mai 1963 en matière d'impôt sur le revenu 15 ( * ) . Le suivi de cette dernière convention est assuré par une commission consultative mixte 16 ( * ) composée de représentants français et monégasques. Elle se réunit chaque année pour examiner les difficultés d'interprétation ou d'application que soulève la convention qui n'auraient pu être réglées par la voie diplomatique.
Toutefois, aucune des conventions fiscales existantes entre les deux Etats ne comporte de dispositions permettant d'exonérer réciproquement des droits de mutation à titre gratuit les organismes à but non lucratif de l'autre Etat lorsque ceux-ci ont été bénéficiaires de dons et legs entre vifs et par décès consentis dans l'autre Etat.
En raison de la qualité des relations franco-monégasques, et au nom de l'intérêt général français et monégasque, en l'absence d'accord sur cet aspect spécifique, depuis 1969, les organismes à l'égard desquels des dons et legs ont été consentis de manière transfrontière ont pu être exonérés de droits de mutation sur la base de décisions ponctuelles des autorités compétentes des deux Etats dès lors que ces organismes auraient été éligibles à de telles exonérations s'il avaient été constitués dans le droit interne de l'Etat concerné.
Lors de la réunion de la commission mixte fiscale franco-monégasque de 2016, Monaco a sollicité, pour le compte de l'un de ses hôpitaux, l'exonération par la France des droits de mutation à titre gratuit d'un legs. Actant que des dons et legs avaient pu être consentis à plusieurs reprises entre nos deux Etats, la délégation française a saisi cette occasion pour proposer à la Partie monégasque d'encadrer les conditions d'exonération des droits de mutation à titre gratuit, entre vifs et par décès, pour les dons et legs consentis dans l'autre Etat, au travers de la conclusion d'un accord. Il s'agit par cet accord de garantir une exonération réciproque et homogène s'inscrivant dans le cadre de règles claires, comme cela existe d'ores et déjà avec d'autres Etats partenaires.
L'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Principauté de Monaco relatif au régime fiscal des dons et legs faits aux personnes publiques et aux organismes à but désintéressé a été signé à Monaco le 25 février 2019.
II. Historique des négociations du présent Accord
Evoqué lors de réunions des commissions mixtes de 2016 et de 2017 et précisé au cours d'échanges techniques complémentaires entre les administrations fiscales française et monégasque en 2018, cet accord a été signé à Monaco le 25 février 2019, pour la France par Marine de Carné de Trécesson de Coëtlogon, Ambassadrice de France à Monaco et, pour Monaco, par Gilles Tonelli, Conseiller de Gouvernement, Ministre des Relations extérieures et de la Coopération.
III. Objectifs de l'accord
L'Accord vise à exonérer certains bénéficiaires de dons et legs entre vifs et par décès de l'un des Etats Parties, de droits de mutation à titre gratuit exigibles dans l'autre Etat Partie.
Les bénéficiaires visés peuvent être l'autre Etat Partie, ses collectivités locales ou territoriales ou leurs établissements publics ou d'utilité publique.
Les bénéficiaires peuvent également être des organismes, associations, institutions et fondations à but désintéressé si ces entités oeuvrent dans le domaine culturel, cultuel, éducatif, charitable, scientifique, médical, environnemental ou artistique, si elles sont implantées sur le territoire de l'un des Etats Parties et si l'autre Etat dans lequel des droits de mutation sont exigibles exonère les mêmes catégories d'entités lorsqu'elles sont implantées sur son territoire.
L'exonération s'applique sans condition de résidence du donateur ou testateur dans l'un des deux Etats Parties, dès lors que le bénéficiaire d'un des Etats Parties doit s'acquitter de droits de mutation à titre gratuit dans l'autre Etat Partie. En effet, le présent Accord trouvera également à s'appliquer lorsque le donateur/testateur réside dans un Etat tiers si le don ou legs est imposable en France ou à Monaco et a été consenti à un bénéficiaire éligible présent sur le territoire de l'autre Etat Partie.
L'article 3 de l'Accord prévoit la rétroactivité de la mesure d'exonération de droits de mutation à titre gratuit pour les legs consentis par des personnes décédées à compter du 1 er janvier 2012. En effet, des legs éligibles à une exonération des droits de mutation à titre gratuit ayant été consentis à partir de cette date, ils ont fait l'objet d'une demande d'exonération auprès des administrations compétentes. Toutefois, ces demandes ont été mises en attente le temps de la conclusion d'un accord, la Partie française et la Partie monégasque s'étant accordées, pour, qu'à compter de cette date, toute exonération n'intervienne que dans le cadre d'une convention internationale.
IV. Conséquences estimées de la mise en oeuvre de l'Accord
La mise en oeuvre de l'Accord aura des conséquences fiscales, sociales et juridiques. Cet accord n'emporte pas de conséquence particulière sur la jeunesse.
a. Conséquences fiscales
Cet Accord aura un impact fiscal limité. En effet, il se substitue à une pratique d'exonération déjà existante.
En outre, s'il n'est matériellement pas possible de prévoir précisément le nombre de dons et legs transfrontières qui seront consentis une fois le texte entré en vigueur, il faut souligner d'une part, que le consentement de dons et legs intervient en principe ponctuellement et, d'autre part, que la réciprocité de l'exonération limite l'impact fiscal dans chacun des deux Etats.
Par ailleurs, cet Accord sera bénéfique pour l'intérêt général français et monégasque en facilitant le financement d'entités à but non lucratif.
Sur la rétroactivité de l'exonération de legs, un effet limité est attendu côté français dans la mesure où peu de legs ont fait l'objet d'une demande d'exonération depuis le 1 er janvier 2012.
a. Conséquences juridiques :
• Articulation avec les accords ou conventions internationales existantes
La convention tendant à éviter les doubles impositions et à codifier les règles d'assistance en matière successorale signée le 1 er avril 1950 a pour objet d'attribuer à l'un ou l'autre Etat Partie à la convention le droit d'imposer les biens meubles et immeubles contenus dans l'actif successoral d'un défunt de l'un ou l'autre Etat.
L'accord signé le 25 février 2019 a lui pour effet de permettre que les dons et legs consentis à des organismes à but désintéressé par un défunt ayant la nationalité de l'un ou l'autre Etat, ne soient pas imposés par l'Etat auquel le droit d'imposer a été attribué par la convention de 1950.
• Articulation avec le droit européen
En vertu du principe d'attribution prévu à l'article 5 du Traité sur l'Union européenne, la fiscalité directe est une compétence des États membres. Elle est exercée dans le respect du droit de l'Union européenne (UE). Les autorités françaises, sont de ce fait, compétentes pour conclure un accord ayant pour objet l'exonération de droits de mutation à titre gratuit lequel, en l'espèce, n'est pas susceptible d'avoir d'incidence sur le fonctionnement du marché unique européen. En effet, il s'agit d'étendre l'exonération des droits de mutation déjà applicable à certaines entités françaises, à des entités monégasques de nature similaire.
• Articulation avec le droit interne
Le présent Accord ne contient pas de clause territoriale et s'applique de ce fait l'ensemble du territoire français, y compris dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
Le délai de réclamation prévu à l'article R.* 196-1 du Livre des procédures fiscales débute à la date de l'événement qui motive la réclamation, soit, à partir de la date de publication de l'Accord au Journal officiel. Il prendra fin le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de la publication. Aucune mesure d'adaptation du droit interne ne sera donc nécessaire.
V. État des signatures et ratifications
Le présent Accord a été signé à Monaco le 25 février 2019, pour la France, par Marine de Carné de Trécesson de Coëtlogon, Ambassadrice de France à Monaco et, pour Monaco, par Gilles Tonelli, Conseiller de Gouvernement, Ministre des Relations extérieures et de la Coopération.
L'article 3.1 du présent Accord prévoit son entrée en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant le jour de la dernière notification.
La Principauté de Monaco n'a pas à ce jour fait connaître l'achèvement de ses procédures internes requises pour l'entrée en vigueur du présent Accord.
VI- Déclarations ou réserves
Sans objet.
* 1 Le traité destiné à adapter et à confirmer les rapports d'amitié et de coopération entre la Principauté de Monaco et la République française a été signé à Paris le 24 octobre 2002.
* 2 La Convention destinée à adapter et à approfondir la coopération administrative entre le République française et la Principauté de Monaco a été signée à Paris le 8 novembre 2005.
* 3 A titre d'exemple, en France, en application de l'article 777 du Code général des impôts, les droits d'enregistrement dus dans le cadre d'une donation ou d'un legs lorsqu'il n'existe aucun lien de parenté entre le de cujus - le défunt auteur de la succession - et le bénéficiaire sont de 60 % de la valeur de l'actif net successoral. A Monaco, ces mêmes donations sont soumises à des droits de mutation au taux de 16 %.
* 4 En droit français, les entités visées aux articles 794 et 795 du Code général des impôts sont exonérées de ces droits pour les dons et legs qu'elles reçoivent. Il s'agit, notamment, des régions, des départements, des communes, leurs établissements publics, des établissements publics hospitaliers, des établissements publics charitables, des mutuelles ou sociétés faisant oeuvre d'assistance, de défense de l'environnement ou de protection des animaux, des établissements d'enseignement reconnus d'utilité publique, des organismes d'habitations à loyer modéré, des associations cultuelles. Le droit monégasque exonère, quant à lui, de droits les dons et legs faits en faveur des communes, des établissements publics hospitaliers ou de bienfaisance, des fondations à but désintéressé ayant pour objet le perfectionnement intellectuel, moral ou social des membres de la collectivité monégasque.
* 5 Point 7 de l'article 21 de la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 .
* 6 Article 10 de la convention franco-autrichienne sur les successions et les donations du 26 mars 1993 .
* 7 Article 13 de la convention franco-belge sur les successions et les droits d'enregistrement du 20 janvier 1959 .
* 8 Article 38 de la convention franco-espagnole sur le revenu et les successions du 8 janvier 1963 .
* 9 Article 10 de la convention franco-américaine sur les successions et les donations du 24 novembre 1978 .
* 10 Article 17 de la convention franco-italienne sur les successions et les donations du 20 décembre 1990 .
* 11 Accord entre la France et le Portugal en matière d'impôts sur les successions et sur les donations du 3 juin 1994 .
* 12 Article 11 de la convention franco-suédoise sur les successions et les donations du 8 juin 1994 .
* 13 Accord entre la France et la Suisse concernant le traitement fiscal des libéralités faites dans des buts désintéressés du 30 octobre 1979 .
* 14 Convention approuvée par la loi n° 53-84 du 7 février 1953 .
* 15 Convention approuvée par la loi n° 63-817 du 6 août 1963 .
* 16 Article 25 de la convention susvisée.