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PROJET DE LOI
autorisant la ratification de l'accord-cadre entre l'Union européenne et ses Etats membres,
d'une part, et la République de Corée, d'autre part
NOR : MAEJ1236788L/Bleue-1
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ETUDE D'IMPACT
I - Situation de référence et objectifs de l'accord
L'accord-cadre signé le 10 mai 2010 entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République de Corée, d'autre part (ci-après, « l'accord »), doit se substituer à l'accord-cadre de commerce et de coopération entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et la République de Corée, d'autre part, signé à Luxembourg le 28 octobre 1996 et entré en vigueur le 1 er avril 2001 1 ( * ) .
L'accord-cadre conclu en 2010 étend la coopération entre l'Union européenne et la République de Corée à des domaines plus nombreux que ceux couverts par l'accord-cadre signé en 1996, tout en approfondissant la coopération dans les domaines existants. Ainsi, les deux parties s'engagent à renforcer leur coopération en matière politique, économique et commerciale, dans les secteurs du développement durable, de la culture et de l'éducation, de la justice, de la liberté et de la sécurité. Les dispositions relatives au respect des principes démocratiques et des droits de l'Homme (article1 er ) sont considérées comme des « éléments essentiels » de l'accord-cadre, de même que celles relatives à la non-prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs (article 4).
Cet accord répond, de façon générale, à la volonté de l'Union européenne de s'engager avec les pays tiers dans une relation plus globale et, s'agissant de la République de Corée, de prendre en compte son rôle croissant sur la scène internationale (qu'il s'agisse de sa présence économique, mais aussi de l'aide au développement et des questions politiques et de sécurité). Comme annoncé à l'occasion du 5 ème sommet entre l'Union européenne et la République de Corée du 6 octobre 2010 à Bruxelles et conformément aux conclusions du Conseil européen du 16 septembre 2010 2 ( * ) , les deux parties ont décidé de porter leur relation au niveau d'un partenariat stratégique et de renforcer la dimension politique (dialogue sur les questions régionales et globales) d'une coopération actuellement essentiellement fondée sur l'économie et le commerce.
II - Conséquences estimées de la mise en oeuvre de l'accord
- Conséquences économiques et commerciales
Compte tenu de leur poids économique et de leur degré d'intégration commerciale, l'Union européenne et la République de Corée entretiennent une relation fortement marquée par les questions économiques et commerciales. Le commerce bilatéral a représenté 67,2 milliards d'euros en 2010. L'Union européenne est le troisième partenaire commercial de la République de Corée (après la Chine et le Japon, mais devant les Etats-Unis), représentant 10,7 % de ses échanges, et la République de Corée le neuvième partenaire commercial de l'Union européenne (devant le Brésil et le Canada), représentant 2,4 % de ses échanges. Toutefois, ces relations présentent encore un fort potentiel. Ainsi, la balance commerciale de l'Union européenne avec la République de Corée est largement déficitaire (-11,3 milliards d'euros en 2010), et ce de manière constante depuis plus de cinq ans.
Cette situation a encouragé l'Union européenne à engager, en 2007, la négociation d'un accord de libre-échange avec la République de Corée. Conclu à l'été 2009, cet accord a été signé à Bruxelles le 6 octobre 2010, lors du sommet entre l'Union européenne et la République de Corée. Il fait l'objet d'une application provisoire depuis le 1 er juillet 2011. Sa ratification est en cours par les Etats membres.
L'accord de libre-échange « constitue un accord spécifique rendant effectives les dispositions commerciales du présent accord (de l'accord-cadre) » (article 9, paragraphe 2, de l'accord-cadre) et il fait « partie intégrante des relations bilatérales générales régies par le présent accord » (article 43, paragraphe 3, de l'accord-cadre). Dès lors, afin d'évaluer l'impact de l'accord-cadre en matière économique et commerciale, on pourra utilement se reporter à l'étude d'impact annexée au projet de loi autorisant l'approbation de l'Accord de libre-échange entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République de Corée, d'autre part.
- Conséquences sociales
L'Union européenne et la République de Corée s'engagent à renforcer leur dialogue et leur coopération, notamment en ce qui concerne les droits de l'Homme (article 2, paragraphe 2, a).
Les deux parties conviennent de coopérer en matière de santé et de gestion des problèmes sanitaires transfrontaliers : échange d'informations et surveillance des maladies infectieuses, grippe notamment ; échange d'informations sur les politiques de prévention et, dans la mesure du possible, dans les domaines de la sécurité des produits pharmaceutiques et de la sécurité alimentaire ; coopération dans le domaine de la recherche (article 21).
L'Union européenne et la République de Corée conviennent de renforcer leur coopération dans le domaine de l'emploi et des affaires sociales : cohésion régionale et sociale, intégration sociale, système de sécurité sociale, santé et sécurité au travail, égalité entre hommes et femmes). Elles s'engagent à respecter les normes sociales et du droit du travail reconnues au plan international (article 22).
Les deux parties renforceront leur coopération dans le domaine des migrations : elles coopèreront en vue de prévenir et de contrôler l'immigration clandestine et sont convenues de réadmettre leurs ressortissants en séjour illégal sur le territoire de l'autre partie. Un accord de réadmission pourrait être conclu, s'il y a lieu (article 33).
L'accord-cadre prévoit une coopération dans les domaines de la culture et de la formation (articles 28 et 29). L'Union européenne et la République de Corée s'engagent notamment à promouvoir la diversité culturelle, en respectant les dispositions de la convention de l'UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles (article 28.3) - convention à laquelle l'Union européenne, la France et la République de Corée sont parties 3 ( * ) .
- Conséquences environnementales
L'accord-cadre doit favoriser la coopération en matière de protection de l'environnement et de préservation de la biodiversité. Les secteurs visés sont notamment les suivants : la lutte contre les changements climatiques et la promotion de l'efficacité énergétique, la sensibilisation à la protection de l'environnement, la mise en oeuvre des accords multilatéraux de protection de l'environnement et de développement durable, la promotion des technologies relatives à la protection de l'environnement, la prévention des mouvements transfrontaliers clandestins de substances et déchets dangereux, le contrôle de la conservation de l'environnement marin, la gestion des sols, l'échanges d'informations et de savoir-faire (articles 23 et 24).
- Conséquences en matière politique
L'Union européenne et la République de Corée s'engagent à coopérer dans les instances et organisations régionales et internationales : Nations Unies, Organisation internationale du travail, Organisation de coopération et de développement économiques, Organisation mondiale du commerce, Sommet Asie-Europe, Forum régional de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est, notamment (article 8).
Les deux parties coopèreront par ailleurs dans les domaines de la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs ainsi que contre le commerce illégal des armes légères et de petit calibre, contre le terrorisme, contre la criminalité organisée et la corruption et contre les drogues illicites. Elles soutiendront l'universalité et l'intégrité du statut de Rome instituant la Cour pénale internationale (articles 4, 5, 6 et 7).
Une première session de dialogue politique à haut niveau a été organisée à Séoul en novembre 2011 (session co-présidée par le Secrétaire général adjoint du Service européen pour l'action extérieure et par le premier vice-ministre coréen des Affaires étrangères. Les deux parties sont convenues que ces rencontres se tiendraient sur une base annuelle. Parmi les dossiers évoqués à cette occasion : les relations bilatérales, la Chine, l'Afghanistan, le Pakistan, la Russie, l'Asie centrale, l'Iran, l'Afrique du Nord, la lutte contre la piraterie, la République populaire démocratique de Corée. Les deux parties ont décidé d'établir un dialogue portant sur la politique en matière de développement ; la République de Corée a confirmé son intérêt pour l'organisation de consultations sur les droits de l'Homme en marge des rencontres internationales dédiées (Conseil des droits de l'Homme des Nations Unies, notamment).
L'accord-cadre doit permettre de renforcer ce dialogue.
- Conséquences juridiques
L'accord-cadre porte à la fois sur des matières relevant de la compétence de l'Union européenne et sur des matières relevant, au moins pour partie, de celle des États membres. Il est donc de nature mixte et doit, pour entrer en vigueur, être ratifié par les États membres. Certaines dispositions, qui relèvent au moins pour partie des États membres, sont de nature législative : coopération dans la lutte contre le terrorisme (article 7) ou l'immigration clandestine (article 33), pouvant se traduire par des échanges d'informations incluant des données à caractère personnel, par exemple. Il en résulte que l'accord-cadre doit faire l'objet d'une approbation parlementaire en vertu de l'article 53 de la Constitution.
S'agissant des dispositions relatives à la protection des données personnelles (article 32), l'accord stipule expressément que « La coopération en matière de protection des données à caractère personnel peut porter notamment sur les échanges d'informations et de compétences ». Le traitement et la protection des données à caractère personnel et des autres informations fournies par les parties sont, pour la France, assurés conformément à :
- la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure ;
- la loi n° 78-17 modifiée du 6 janvier 1978 dite « informatique et libertés » ;
- la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;
- la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil de l'Union européenne du 27 novembre 2008 relative à la protection des données à caractère personnel traitées dans le cadre de la coopération policière et judiciaire en matière pénale ;
- la Convention du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, adoptée à Strasbourg le 28 janvier 1981 4 ( * ) .
L'accord n'entraîne, en tout état de cause, pas de modification de la législation nationale avec laquelle il s'articule.
La République de Corée n'étant pas membre de l'Union européenne, elle ne peut se voir transférer des données à caractère personnel que si elle assure un niveau de protection suffisant de la vie privée et des libertés et droits fondamentaux des personnes à l'égard du traitement dont ces données font l'objet, comme le prévoit l'article 68 de la loi n° 78-17 précitée. Par ailleurs, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) estime que la République de Corée ne dispose pas d'une législation adéquate en matière de protection des données à caractère personnel 5 ( * ) . De plus, la République de Corée n'a, à ce jour, pas fait l'objet d'une reconnaissance de protection adéquate par la Commission européenne 6 ( * ) .
Dans l'attente, et sous réserve de l'application de l'article 69 de la loi « informatique et libertés » qui permet sous certaines conditions 7 ( * ) le transfert de données à caractère personnel par exception à l'interdiction prévue à l'article 68 précité, l'accord permettra de développer l'échange d'informations autres que les données à caractère personnel.
Les accords liant la France et la République de Corée sont les suivants :
- convention d'extradition (6 juin 2006) ;
- accord relatif à la protection des informations militaires classifiées échangées dans le domaine de la coopération militaire et de l'armement (6 mars 2000) ;
- convention d'entraide judiciaire en matière pénale (2 mars 1995) ;
- convention tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu (16 juin 1979, avenant du 9 avril 1991) ;
- accord relatif aux usages pacifiques de l'énergie nucléaire (4 avril 1981) ;
- convention sur l'encouragement et la protection des investissements (28 décembre 1977) ;
- accord relatif aux services aériens entre territoires respectifs et au-delà de ceux-ci (7 juin 1974, modifié le 23 mars 1989) ;
- accord portant suppression du visa de court séjour (11 février 1967) ;
- accord sur la coopération culturelle et technique (28 décembre 1965) ;
- accord sur l'application réciproque du traitement de la nation la plus favorisée (12 mars 1963).
S'agissant de son articulation avec les autres accords en vigueur, l'accord-cadre dispose, au paragraphe 4 de son article 43 relatif aux « Autres accords », que « [...] les accords en vigueur actuellement, relatifs à des domaines de coopération relevant du champ d'application du présent accord, sont considérés comme faisant partie, d'une part, des relations bilatérales générales régies par le présent accord et, d'autre part, d'un cadre institutionnel commun. »
- Conséquences administratives
L'accord-cadre prévoit l'organisation de réunions au sommet au niveau des dirigeants (chef d'Etat ou de gouvernement) quand les parties le jugeront nécessaire ; des consultations annuelles au niveau ministériel ; des réunions d'information au niveau des hauts fonctionnaires ; des dialogues sectoriels ; des échanges entre le Parlement européen et l'Assemblée nationale de la République de Corée (article 3, paragraphe 3).
III - Historique des négociations
Le Conseil de l'Union européenne a autorisé la Commission européenne à négocier un nouvel accord-cadre avec la République de Corée en mai 2008. L'accord-cadre a été paraphé le 14 octobre 2009.
Dans une déclaration interprétative commune concernant les articles 45 (modalités de mise en oeuvre) et 46 (procédure d'arbitrage), les parties insistent sur leurs « valeurs partagées » (sont cités : la démocratie, les droits de l'Homme, la non-prolifération et la lutte contre le terrorisme) et présentent l'accord comme une « manifestation de leur détermination conjointe à promouvoir » ces valeurs. Dès lors, sa mise en oeuvre « entre les parties qui partagent les mêmes valeurs sera donc fondée sur les principes du dialogue, du respect mutuel, d'un partenariat équitable, du multilatéralisme, du consensus et du respect du droit international. » Il convient de souligner que l'Union européenne cherche à négocier des accords ambitieux en matière politique, reposant sur un socle de valeurs partagées à promouvoir, avec l'ensemble de ses grands partenaires, afin de rehausser les relations qu'elle entretient avec chacun d'entre eux au niveau d'un partenariat stratégique, s'incarnant dans un cadre juridique global et cohérent : celui d'un accord-cadre ou d'un accord de partenariat et de coopération.
Les parties définissent ensuite, dans la même déclaration interprétative commune, les conditions de mise en oeuvre de l'accord. Il est ainsi précisé que les « mesures appropriées » visées à l'article 45, paragraphe 3, doivent être « proportionnées au défaut de mise en oeuvre des obligations prévues par le présent accord ». De telles mesures peuvent également être prises concernant un accord spécifique relevant du « cadre institutionnel commun » que constitue l'accord-cadre. Il est également précisé que les « cas d'urgence spéciale » visés à l'article 45, paragraphe 4, sont les « cas de violation substantielle de l'accord par l'une des deux parties », qui peuvent être « soit une dénonciation du présent accord non sanctionnée par les règles générales du droit international, soit une violation particulièrement grave et substantielle d'un élément essentiel de l'accord ». Deux séries de dispositions entrent dans cette catégorie : celles relatives aux droits de l'Homme et celles relatives à la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs. Il convient de souligner que ces clauses essentielles se retrouvent désormais dans la majorité des accords négociés et conclus par l'Union européenne.
IV - État des signatures et ratifications
L'accord-cadre a été signé le 10 mai 2010 par l'Union européenne et la République de Corée. Il a été ratifié à ce jour par 12 États membres de l'Union européenne 8 ( * ) et, le 20 avril 2011, par la République de Corée.
V - Déclarations ou réserves françaises
Néant.
* 1 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2001:090:0046:0058:FR:PDF.
* 2 http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/fr/ec/116571.pdf.
* 3 La France et l'Union européenne ont adhéré à la convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles le 18 décembre 2006. La République de Corée a ratifié cette convention le 1 er avril 2010.
* 4 Il convient de noter que la République de Corée n'a pas signé cette Convention.
* 5 Voir le site internet de la CNIL : http://www.cnil.fr/pied-de-page/liens/les-autorites-de-controle-dans-le-monde/.
* 6 Le Conseil de l'Union européenne et le Parlement européen ont donné le pouvoir à la Commission de décider sur la base de l'article 25(6) de la directive 95/46/CE qu'un pays tiers offre un niveau de protection adéquat en raison de sa législation interne ou des engagements pris au niveau international.
* 7 L'article 69 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 stipule notamment que « le responsable d'un traitement peut transférer des données à caractère personnel vers un Etat ne répondant pas aux conditions prévues à l'article 68 si la personne à laquelle se rapportent les données a consenti expressément à leur transfert ou si le transfert est nécessaire à l'une des conditions suivantes : 1° A la sauvegarde de la vie de cette personne ; 2° A la sauvegarde de l'intérêt public ; 3° Au respect d'obligations permettant d'assurer la constatation, l'exercice ou la défense d'un droit en justice ; (...). Il peut également être fait exception à l'interdiction prévue à l'article 68, par décision de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ou, s'il s'agit d'un traitement mentionné au I ou au II de l'article 26, par décret en Conseil d'Etat pris après avis motivé et publié de la commission, lorsque le traitement garantit un niveau de protection suffisant de la vie privée ainsi que des libertés et droits fondamentaux des personnes, notamment en raison des clauses contractuelles ou règles internes dont il fait l'objet. (...) ».
* 8 République de Bulgarie (4 janvier 2011), République tchèque (8 juin 2011), Royaume de Danemark (21 juin 2010), République d'Estonie (9 juillet 2010), Royaume d'Espagne (16 janvier 2012), République de Lettonie (6 janvier 2011), République de Hongrie (10 mars 2011), République d'Autriche (23 juin 2011), République de Pologne (15 avril 2011), République portugaise (20 janvier 2012), République slovaque (4 mai 2011) et Royaume de Suède (12 septembre 2011).